JohnSteed

552 votes

  • Le Passager

    Jean-Christophe Grangé

    8/10 Cela faisait très longtemps que je n’avais pas lu de Grangé. Je l’ai découvert comme beaucoup avec Les Rivières pourpres dès sa sortie et avais réitéré mon expérience littéraire avec L’Empire des loups. Je n’arrive pas à me souvenir des raisons pour lesquelles je n’ai pas continué à lire ses romans : certainement pour des manques de temps et sûrement pour mon intérêt grandissant pour les auteurs classiques des polars qui m’ont encore plus écarté de cet auteur français.
    Pourtant, dernièrement, lors d’achats de livres de secondes mains, j’avais sauté sur l’occasion pour acheter Le Passager en prétextant que je ne pouvais décemment pas être membre de Polars Pourpres et partager mes lectures avec des amateurs de Jean-Christophe Grangé sans lire ses romans.
    C’est avec cette résolution de fin d’année (oui, mon esprit de contradiction ou ma paresse m’interdisent de prendre des résolutions en début d’année) que je commençais la lecture des quelques 1000 pages que comptent la version poche du Passager. Sans préjugé ou prérequis, je découvrais il y a 3 jours l’histoire de ce passager sans bagage et ses multiples identités.

    Bien sûr, ce livre est loin d’être parfait. Malgré un rythme soutenu, on peut soulever, comme Grangé l’écrit lui-même dans le livre, que ce passager ne manque indéniablement jamais de chance. On peut relever également quelques raccourcis dans l’histoire, ou des situations facilitantes pour le bon déroulement de l’intrigue qui prêtent à sourire.
    Cependant, je dois reconnaître que j’ai dévoré cette histoire et que ce livre m’a donné envie de me plonger dans d’autres intrigues écrites par Grangé.

    02/01/2019 à 13:52 11

  • Le Présage

    Peter Farris

    9/10 Ce livre souffre de deux lacunes qui peuvent éloigner le lecteur : le titre (on ne peut pas faire plus énigmatique et surtout neutre) et surtout, à mon avis, la couverture. Tout est une affaire de goût, allez-vous me rétorquer. Certes. Je la trouve hideuse, voilà tout. Encore plus une fois refermé ce livre, car elle ne met pas en valeur ce chef d’œuvre.

    Car, passé ces deux obstacles, il convient de parler du fond. Peter Farris, auteur américain reconnu depuis la parution outre-Atlantique de ses 3 précédents livres, signe avec Le présage un roman aussi attachant que profond. Pour notre plus grand plaisir, Peter Farris s’est donné le champ libre pour exprimer tout son talent. Et il le fait admirablement tout du long de ces 500 pages. Et rassurez-vous, on ne s’ennuie pas une seule page. On ne se rend même pas compte du volume de l’ouvrage, l’histoire étant aussi prenante que fluide.

    Cynthia Bivins rend visite à son père Toxey placé dans une maison spécialisée, qui prend en charge les personnes atteintes de troubles cognitifs. Si la maladie d’Alzheimer n’est pas encore prononcée, les propos de Toxey laissent sa fille dubitative quant à leur véracité. Mais Toxey tient plus que tout à lui raconter un pan de sa vie.

    Début des années 70, Toxey travaille dans la quincaillerie locale, une bourgade du comté de Mercy Oaks en Géorgie. Originaire des Quarters, le quartier pauvre de la ville, Toxey se découvre une passion : la photographie. Son talent lui permet de rencontrer Fiona, une scientifique, qui souhaite écrire un livre sur le Lakutta, cette terre ancestrale qui rengorge autant de richesses faunistiques que culturelles et historiques. Et c’est aussi dans le Lakutta qu’a été découvert le corps sans vie et mutilé à hauteur du bassin d’une jeune femme afro-américaine.
    D’ailleurs Toxey se rend compte qu’il a croisé cette femme et qu’il l’a même photographié. Et ces clichés, Elder Reese, fils de la plus richissime des familles locales, les veut plus que tout. Il veut s’en servir pour couler son adversaire politique. Reese veut remporter coûte que coûte les prochaines élections qui lui ouvriront, il n’en doute pas, la porte vers le siège de la Maison Blanche…

    Peter Farris raconte dans Le Présage une histoire américaine qui, sous bien des traits, n’est pas si éloignée de la réalité contemporaine et de quelques hommes politiques. Un roman noir qui questionne sur nos sociétés, ses dérives politiques, ses violences, ses choix sur l’avenir et ses traits tirés sur le passé… A ce jour, Le présage est le meilleur livre de Peter Farris qui se pose là comme un auteur américain incontournable.

    13/06/2023 à 16:31 11

  • Les Refuges

    Jérôme Loubry

    9/10 Une fois la dernière ligne lue, on ne peut qu’émettre un « waouh ». Alors que l’on s’est précipité pour découvrir le fin mot de cette histoire, on la termine complément ahuri. Cette histoire est déstabilisante. Et ce dénouement nous amène à nous interroger sur notre bonne compréhension du livre voire à nous donner envie de reprendre tout depuis le début. Les refuges est un livre obsédant. A l’image des personnages, Sandrine et Damien, on est hanté, manipulé, trahie par tant de mensonges, et de faux semblants.
    Jérôme Loubry signe là un roman psychologique qui restera gravé dans ma mémoire.

    07/11/2019 à 19:53 11

  • Qui voit son sang

    Élisa Vix

    9/10 Rose, atteinte de leucémie, ne voit son espoir de guérison que par une greffe de moëlle osseuse. Les médecins se tournent vers son père, David. Navigateur passionné, ce dernier accoste en Martinique où sa fille vit depuis 2 ans avec Lancelot qu’elle a rencontré dans l’île.

    Mais les résultats sont sans appel : il n’est pas le père biologique de Rose. David fuit par bateau, laissant seule Rose avec un seul papier plié, une carte marine du Finistère indiquant par une croix rouge l’île d’Ouessant avec pour légende « là où tout a commencé ».

    Lancelot, comme un preux chevalier, va se lancer à la quête de réponses sur les origines de Rose et trouver ainsi un membre de famille qui pourrait sauver sa fiancée. Ainsi, loin de son île natale, il va tenter de percer les différents mystères qui s’étalent sur plusieurs décennies.

    Elisa Vix, qui est ici au paroxysme de son talent, va plonger le lecteur dans les différentes vies des acteurs de ce drame. L’auteure offre ainsi, comme à son habitude, une histoire captivante, rempli d’émotion, de mystères et d’exotisme. Il faut avoir le pied marin et être bien accroché pour affronter les turpitudes de ce livre attachant. Un vrai régal !

    08/08/2022 à 13:48 11

  • Rattrape-le !

    Jake Hinkson

    8/10 Je suis toujours le parcours littéraire de cet auteur découvert avec l’excellent Sans lendemain. Il dépeint avec un humour décalé l’Amérique puritaine d’aujourd’hui. Ce fils de prêcheur baptiste, élevé dans une éducation religieuse stricte, utilise l’écriture pour régler ses comptes. Et ses personnages et ses histoires empreints de spiritualité extrême sont savoureux.

    Rattrape-le ! est un livre qui ne déroge pas à ces ingrédients. Lily, fille du pasteur local, enceinte et à la veille de son mariage voit son fiancé disparaître, sans laisser aucune nouvelle, ni à elle, ni à sa famille. Cette situation engendrant des conséquences désastreuses au regard de la communauté religieuse menée son père pousse Lily à tenter de retrouver le père de son enfant.

    Dans sa quête, à défaut d’être entendue par le Seigneur, elle trouvera un oncle, issu d’une relation adultère, des prostituées, brebis égarées des Saintes Ecritures, et de caïds sans loi ni foi, bien évidement. Une histoire caustique comme je les aime.

    21/10/2022 à 11:28 11

  • Récursion

    Blake Crouch

    7/10 La récursion se définit par un phénomène qui peut être répété un nombre indéfini de fois. Comme votre image réfléchie indéfiniment par deux miroirs opposés. C’est le titre choisi par Blake Crouch pour ce roman de science-fiction dans lequel Barry Sutton, policier new-yorkais, enquête sur une vague de suicides engendrée par le Syndrome des Faux Souvenirs.

    Quelques années plus tôt, Helena Smith, chercheuse neurologue sur la maladie d'Alzheimer, travaille sur un fauteuil permettant de revivre des vies antérieures et modifier leurs passés.

    Mais ces retours en arrière successifs et ces modifications de vie sont sources de conflits dans la mémoire. De ce chaos spatio-temporel naît le Syndrome des Faux souvenirs. Si ce fauteuil est reconnu pour être dangereux, il peut être également une arme redoutable. Certains vont tout faire pour se l’accaparer. Quitte à retourner dans le passé pour tout modifier…

    Blake Crouch prend comme thème l’exploration du passé, le voyage dans le temps. Thème maintes fois développé. Ici le prétexte est le souvenir et la maladie d’Alzheimer. N’étant pas féru de science-fiction, j’ai plus apprécié les passages où les développements scientifiques étaient moins présents. Ainsi, j’ai préféré les chapitres avec Barry Sutton, flic ravagé par la mort de sa fille, et qui va pouvoir modifier le cours de sa vie, profiter d’être un meilleur père, un meilleur mari,… Un roman qui questionne sur l’existence, sur le sens de la vie de chacun, les regrets, les remords… Un roman que j’aurais davantage apprécié avec moins de longueurs sur les théories et autres explications scientifiques.

    08/02/2023 à 10:43 11

  • Seules les bêtes

    Colin Niel

    9/10 Rentrer dans ce roman noir, c’est se prendre en pleine figure le désespoir des différents protagonistes qui, de près ou de loin, portent la responsabilité de la disparition de Evelyne Ducat. La disparue était mariée à un notable, un gars du coin parti à la capitale à sa majorité puis revenu vivre dans la vallée après avoir fait fortune à l’étranger. Dans cette région dure du Causse, où l’hiver porte avec sa neige son lot de désespoir, les habitants se confient peu.

    Tour à tour, certains vont cependant prendre la parole et raconter leur histoire et leur vie qui apporteront la lumière à cette sombre disparition : Alice, l’assistante sociale au service des agriculteurs locaux, va trouver en Joseph, un amant qui comblera son vide d’amour ; Joseph, éleveur d’ovins, comble le vide de son existence avec les morts ; Maribé la romantique parisienne qui, par amour, va se trouver une âme de néo-rurale et développer son activité de surcyclage ; Armand, un arnaqueur par messagerie, trouvera finalement que ses messages peuvent sauver les causes les plus perdues.

    Colin Niel arrive avec force et talent à nous convaincre que du désespoir, des destins tragiques peuvent naître l’amour. Après tout, la nature a horreur du vide. L’amour aussi. Seules les bêtes est certes un roman noir mais aussi un roman d’amour.

    24/04/2019 à 16:03 11

  • Bleu de Prusse

    Philip Kerr

    8/10 Automne 1956, la saison touche à sa fin au Grand Hôtel de Saint Jean-Cap-Ferrat où Bernie Gunther travaille en tant que concierge. Tandis qu’il prépare ses valises, il est approché par des membres de la Stasi. Ces derniers le menacent de s’en prendre à son ex-femme s’il ne remplit pas une mission spéciale : tuer Anne French.
    Même si cette dernière a su manipuler Bernie en lui faisant endosser la responsabilité d’un crime, l’ex-Kommissar de la Kripo ne peut accepter ce chantage. Une seule solution s’offre à lui : la fuite vers l’Allemagne. Une course poursuite s’engage entre Gunther et les membres de la Stasi, dont Friedrich Korsch. Ce dernier fut l’adjoint de Gunther en 1939. Le temps de sa cavale, il se remémore l’affaire qui les avait menés sur le Berghof, l’immense propriété luxueuse du Führer. Un ingénieur avait été tué sur la terrasse. Alors qu’Hitler souhaite venir y fêter son cinquantième anniversaire, Heidrich somme Gunther de découvrir le meurtrier dans la plus grande discrétion. Hors de question que l’on puisse apprendre qu’il est facile de tuer quelqu’un au nid d’Aigle.

    Philip Kerr nous comble dans cet épisode des aventures de Bernier Gunther. L’enquête, comme toujours, est rondement bien ficelée, le cadre historique très intéressant. Les remarques acerbes, le cynisme, les réflexions toujours aussi piquantes de Gunther sur le régime nazi, le peuple allemand, les Français,… sont aussi pertinentes que dérangeantes. Et on adore ça quand c’est écrit par Philip Kerr.

    31/05/2019 à 17:47 10

  • Enfermé.e

    Jacques Saussey

    8/10 Abordé le sujet de la transidentité (avoir une identité différente du genre assigné à la naissance) dans la littérature est un exercice difficile, délicat, sensible. Alors dans le roman noir, cela peut se révéler être très périlleux.

    Mais Jacques Saussey a réussi haut la main ce pari. Enfermé.e par son histoire, son intrigue est un livre tellement touchant. De plus, les chapitres alternant passé-présent rendent la lecture encore plus captivante de la vie tourmentée, cruelle et torturée de Virginie. Dans le post-face, on apprend les raisons personnelles qui ont permis et encouragé l’auteur français à écrire Enfermé.e. Cela rend encore plus fort la lecture, je trouve.

    Mais Enfermé.e, outre ce sujet, n’en reste pas moins un roman noir. Si la vie de Virginie tient une place prépondérante dans le livre, elle est aussi une histoire de vengeance remplie de violence… et, paradoxalement, d’amour.

    08/12/2021 à 15:35 10

  • Et toujours les Forêts

    Sandrine Collette

    9/10 « Et qu’était devenu l’homme pour que, dans un monde où presque tout avait disparu, il s’obstine à détruire ses semblables un à un, à les dépouiller, à les achever ? » peut on lire page 300 de ce livre aussi angoissant que prenant. Je trouve que cette phrase résume bien l’esprit de Et toujours les Forêts, avec son ambiance post-apocalyptique sombre, triste et désespérante.
    Oui, pourquoi l’être humain cherche-t-il, voire coure-t-il, à son anéantissement ? Sandrine Collette a-t-elle voulu nous faire prendre conscience de notre destin fragile sur une Terre qui peut imploser à tout moment ? A-t-elle souhaité tirer de ce livre une leçon écologique, proposer une approche philosophique d’une société déchue, démontrer les instincts primaires et primitifs de l’espèce humaine,… ?

    Chacun pourra faire sa propre opinion à la lecture du 9ème roman de Sandrine Collette, qui, je trouve, prend de plus en plus d’importance dans le milieu littéraire au fil de ses parutions. Quoi qu’il en soit, ce roman est écrit pour être lu, certes, mais surtout relu un nombre de fois incalculable. Il peut être analysé, faire l’objet de discussion (pourquoi dans une grande partie du livre, les questions ne sont pas ponctuées par des points d’interrogation ?)… Bref, le signe d’un immense livre, une fable, que je comparerai à Le rapport de Brodeck de Philippe Claudel.

    12/08/2020 à 21:37 10

  • Glaise

    Franck Bouysse

    9/10 Franck Bouysse est un peintre en mots. Il arrive à trouver les mots justes pour décrire avec réalisme et humanisme ses personnages et les paysages cantaliens. Glaise est autant un livre qu’une peinture, autant un roman noir qu’une analyse sociologique de la vie rurale au début de cette Première Guerre mondiale. C’est à la fois touchant, dur, sensible et attachant. Et lire, à la fin du livre, les noms des héros tombés au combat inscrits sur le monument de Saint-Paul-de-Salers, lieu de cette histoire, montre que Franck Bouysse nous a offert un livre d’une exceptionnelle expérience littéraire.

    08/06/2019 à 13:18 10

  • L'Île des âmes

    Piergiorgio Pulixi

    7/10 L’île des âmes – Cette île, c’est la Sardaigne. Ces âmes, ce sont celles des ancêtres lointains chargées de traditions ancestrales, qui ont forgé les us et coutumes locales. S’inspirant de rituels antiques, des meurtres de jeunes filles sont commis depuis plusieurs années sans qu’ils aient été résolus.

    Recrutées dans la nouvelle section des crimes non résolus de la police de Cagliari, les inspectrices Mara Rais et Eva Croce, que tout oppose, vont se prendre en pleine face une vie sarde remplie de mythes, de paysages préservés remplis de mystère, de personnages troublants et inquiétants.

    Je suis rentré dans ce livre sans préjugé, ouvert au champ des possibles… Il faut laisser la lecture prendre son rythme que l’auteur nous impose : à la fois lente et lassante ou vive et troublante. Un auteur qui a su, avec ce premier livre, imposer son style et son univers, : l’un comme l’autre personnel et unique.

    14/04/2022 à 16:37 10

  • La Lèpre

    Pierre Boileau, Thomas Narcejac

    8/10 (8,5) Éminent résistant devenu homme politique reconnu et à l’avenir prometteur dans les prochains gouvernements, Marc Pradier écrit cette longue lettre à son fils adoptif, Christophe, parti combattre en Algérie. Dans cette missive, il souhaite rétablir la vérité à son fils, sur les circonstances de son héroïsme durant la 2nde Guerre Mondiale qui lui a permis de suivre une carrière politique heureuse. Car son fils, parti dans cette « guerre coloniale » pour que son père soit fier de lui et montrer qu’il peut être lui aussi un héro à son image, doit tout savoir.
    Tout a commencé en cette Saint-Sylvestre 1943, quand il a sauvé, par un hasard, en passant simplement dans la rue, le Docteur Pléaux, d’une tentative d’assassinat. Cet homme, important collabo à Clermont-Ferrand, va lui être reconnaissant et se lier d’amitié avec lui, ce petit professeur sans ambition particulière. Ce dernier donne des cours à Christophe alité chez Mme de Chatelus. Celle-ci s’avère être une résistante de la première heure et l’ex-femme de Pléaux. Elle souhaite éliminer son ex-mari avec le concours de Pradier. Tous les événements vont s’enchaîner, sans que Pradier ne lève le petit doigt. Ils vont lui coller à la peau comme la lèpre, cette maladie dont on ne peut se débarrasser et qui entraîne indubitablement à une perte.

    La lecture de cette lettre-confession est très prenante. On découvre avec intérêt l’histoire de Pradier, cet homme dont la vie s’est écrite à ses dépends et dont il va devenir un pion. L’écriture de ce duo, qui a donné de véritables chefs d’œuvre de la littérature noire de l’hexagone, est encore une fois magnifique et rend palpable la détresse et la tension nerveuse de Pradier dans son besoin de dire la vérité. Et la fin est assez tragique, à l’image du livre.

    14/11/2019 à 09:21 5

  • Le Manuscrit inachevé

    Franck Thilliez

    8/10 Après avoir mis de côté les livres de cet auteur suite à quelques lectures insipides (La forêt des ombres, notamment), j’ai redonné ma chance à Franck Thilliez. L’attrait du titre mystérieux et accrocheur de ce Manuscrit inachevé fut finalement une bonne initiative. Oui, j’ai dévoré ce livre malgré des situations un peu excessives dans lesquelles nous plonge Franck Thilliez.

    Dévoré, oui. J’ai tourné les pages, et j’ai pris plaisir à découvrir cette histoire où se mêlent amnésie, dark web, sérial killer, corps mutilés, jeunes filles enlevées, traite des prostituées, … Bref, tous les ingrédients les plus ténébreux des polars actuels. Mais cette accumulation poussée à l’extrême fut vite dépassée par le plaisir ressenti de l’auteur à écrire ce livre et par la volonté du lecteur à trouver la clé de l’énigme qui, comme l’enchevêtrement des livres dans ce livre, apparaît comme une vraie originalité dans l’univers du polar actuel.

    Un roman noir plus qu’agréable à lire avec la découverte de la réponse qui donne paradoxalement le sourire face à une fin des plus tragiques et désespérantes…. Ou pas.

    16/09/2019 à 16:06 10

  • Le Silence des repentis

    Kimi Cunningham Grant

    9/10 Cooper vit avec sa fille, Finch, au fin fond d’une forêt, isolée au cœur de la montagne des Appalaches. Seuls depuis 8 ans, dans une maison en bois, prêtée par un ami, ils vivent de façon rudimentaire, de chasse, de cueillette et de culture, sans électricité, ni moyen de communication ou échange avec le monde extérieur. A part un voisin, Scotland, un rustre ermite, rempli de mystère, qui espionne ses lointains voisins et qui a beaucoup d’empathie pour Finch. Cette jeune fille, du haut de ses 8 ans, n’a pas connu le monde civilisé. Curieuse de tout, en plus d’être le seul Amour de son père, elle aspire à connaître le monde extérieur. Mais son père et elle se cachent des autres. Ils ne doivent pas être vus. Ainsi s’instaure un système de protection dès l’approche d’une quelconque personne, synonyme de danger, via une cache dans la cave.

    Cooper nous raconte leur vie quotidienne et distille, au compte-goutte, son passé et ce qui l’a poussé à venir se cacher ici. Et puis Jake, le propriétaire du chalet, sensé venir ravitailler comme tous les ans le couple, se fait attendre. Cooper comprend que sa vie d’isolement devient précaire, et que cette situation aura des incidences incontournables.

    Kimi Cunningham Grant a su me conquérir avec ces quelques personnages très attachants. Cooper est un père aimant et très protecteur. On découvre ses secrets et sa vie des plus douloureuses. Finch, est une petite fille à la maturité et la curiosité propre à toute petite fille. Elle fait montre d’une grande intelligence. L’auteure m’a totalement séduit et charmé, à tel point que je passe sous silence les quelques largesses dont elle a fait preuve dans la fin de l’histoire. Je veux garder le plaisir de la découverte de ce père et sa fille, de leur amour indéfectible et d’un cadre naturel aussi charmant qu’angoissant. Une écriture remarquable pour une histoire émouvante.

    24/10/2022 à 14:40 10

  • Les Veufs

    Pierre Boileau, Thomas Narcejac

    9/10 Quel plaisir de tomber sur un très bon cru Boileau-Narcejac. Et cette cuvée 1970 est un vrai délice qui ne se dévoile qu’à la fin.

    Serge Mirkine est un vrai jaloux, ou plutôt un jaloux maladif. Acteur qui prête sa voix aux séries radio, Serge écrit également à ses heures perdues. Amoureux de la mannequin Mathilde, il est intimement persuadé qu’elle le trompe. Après avoir espionné ses faits et gestes, il engage un détective privé pour confirmer ses doutes. C’est ainsi qu’il découvre que l’amant n’est autre que l’agent de Mathilde : Méryl. Il décide alors d’aller le tuer dans son château en province. Alors que le tueur est vivement recherché, Serge apprend que son livre a obtenu un fameux prix.

    Il est devant un cruel dilemme : se dévoiler pour obtenir le prix au risque que des témoins le reconnaissent comme meurtrier de Méryl ou rester caché sans obtenir cette reconnaissance après qui il court depuis si longtemps et cet argent dont il aurait tant besoin.

    Et puis Serge apprend que Méryl n’était pas l’amant de Mathilde. Mais si ce n’était pas lui, qui peut-il être ? Car Serge sait que Mathilde a un amant….

    Et tout s’enchaîne entre les retournements de situation, les vérités qui n’en sont pas, … Une lecture addictive et vertigineuse. Le duo dévoile un pan de leur talent. Un livre qui mérite d’être reconnu.

    25/02/2022 à 08:37 5

  • Metropolis

    Philip Kerr

    8/10 Bernie Gunther vient d’avoir une promotion. Il intègre la Kripo, Police criminelle, dans ce Berlin de la fin des années 20 (1928). Les rues de cette ville sont peuplées de soldats handicapés qui mendient de quoi survivre, de prostitués hommes et femmes qui vendent leur corps pour les mêmes raisons.
    Le jeune inspecteur doit enquêter sur une série de meurtres de prostituées, scalpées. D’ailleurs, le meurtrier se voit affublé du surnom de Winnetou, nom de l’Apache créé par le populaire romancier allemand Karl May.

    Mais cette affaire est vite remplacée par une autre série de meurtres, celle de soldats handicapés, exécutés d’une balle au front, comme un coup de grâce. Le tueur, Dr Gnadenshuss, envoie des courriers aux journaux où il explique ses motivations : débarrasser de Berlin ces êtres inutiles et déchets de la société, et l’image de la défaite allemande.

    On suit Bernie dans ce Berlin, la Babylone occidentale, où sexe, dépravation, misère, banditisme, alcool, drogue… rythment la vie quotidienne. Sans parler de la montée de l’antisémitisme, et son corollaire, celle du nazisme qui n’en est qu’à ses balbutiements. Et ce cynisme, cet humour décalé, toujours grinçant, toujours amère mais qui fait mouche…

    C’est donc avec beaucoup de plaisir que j’ai lu cette première histoire de la série de Gunther, qui est également et paradoxalement la dernière et l’ultime écrite par Philip Kerr. L’auteur britannique qui nous manque déjà, n’a pas perdu de son talent pour nous décrire avec justesse, précision historique, émotion et talent cette sombre histoire du nazisme durant le XXème siècle. Merci MONSIEUR Kerr d’avoir créé Bernie Gunther, qui a croisé mon chemin, et que je n’oublierai jamais, pour toutes les émotions qu’il a su m’apporter.

    09/05/2021 à 17:33 10

  • Né d'aucune femme

    Franck Bouysse

    9/10 J’ai beau avoir survolé (et non lu, pour préserver l’effet de surprise) les différents avis et critiques de ce livre, j’avais bien compris que Né d’aucune femme était une bombe de la littérature noire sortie 2019. Mais rien ne m’avait préparé à me prendre en pleine figure cette histoire tragique que fut la « vie » (peut-on appeler ça une vie ?) de Rose. Et quand j’emploie le terme tragique les qualificatifs de « dramatique », « horrible » et « terrifiant » doivent compléter ce qui fut l’histoire de Rose. C’est effectivement un récit abominable avec des scènes des plus pétrifiantes que nous délivre Franck Bouysse. Et j’ai pris un plaisir pervers à tourner les pages pour connaître l’issue du livre.

    Je dois reconnaître que l’auteur français s’est sublimé et est presque au sommet de son art. J’utilise sciemment ce « presque » car je caresse le doux rêve que Franck Bouysse saura se transcender et écrire d’autres écrits qui dépasseront cette histoire.

    03/01/2020 à 19:46 10

  • Précipice

    Céline Denjean

    8/10 Je ne lâche plus l’autrice française depuis quelques romans que je m’enfile comme des pains au chocolat (ou chocolatine, on ne va pas se fâcher, hein ?) après un jeûne de plusieurs jours. Ses romans policiers sont très addictifs. Céline Denjean a le talent de pondre des pavés que l’on dévore. Pire, on en redemande.

    Dans Précipices, aucune fausse note. Le secret de plus de 20 ans de ces jeunes lycéens est la source de leur mort. Mais par qui ? Et quel est-il ? Le lecteur se fait une idée au fil des pages dans lesquelles on découvre au fur et à mesure les personnages, leur histoire ainsi que l’enquête diligentée par ce duo de fortes femmes gendarmes.

    Les romans de Céline Denjean sont captivants. Précipices ne fait pas exception

    11/09/2023 à 11:20 10

  • Sauf

    Hervé Commère

    8/10 Deuxième escapade, pour ma part, dans l’œuvre de Hervé Commère que j’ai découvert avec ce qui fut pour moi un véritable coup de cœur : Le Deuxième Homme.

    Sauf reprend les mêmes règles d’écriture : un roman raconté à la première personne, ce qui nous permet de nous identifier au personnage et ainsi de vivre par lui ses déboires existentiels ; des retours passés présents dans la composition des chapitres ; et surtout (je ne sais pas si c’est un thème de prédilection de l’auteur), une trame qui porte sur la recherche d’identité du protagoniste principal.
    Et, il faut le souligner, un style d’écriture qui rend la lecture prenante et développe une intrigue des plus efficaces. Cependant, j’ai eu un peu de mal à accepter qu’un homme, somme tout ordinaire, puisse aussi aisément découvrir la vérité cachée depuis des années sur sa famille. « La police ne me l’a jamais demandé, mais à vous, je vais tout dire » ou bien « Il est temps que j’avoue tout ».

    Malgré tout, j’ai vraiment passé un agréable moment de lecture et je continuerai à lire les livres de cet écrivain que je place au-dessus de la liste des auteurs de polars hexagonaux contemporains.

    25/11/2019 à 12:36 10