LeJugeW

1778 votes

  • Bienvenue à Cotton's Warwick

    Michaël Mention

    7/10 J'ai lu ce roman assez rapidement, partagé de façon totalement paradoxale entre l'avidité d'en savoir plus et le dégoût de certaines scènes particulièrement glauques, trash. J'ai apprécié le fait que Michaël Mention s'aventure sur de nouveaux territoires (même si je le préfère encore Outre-Manche avec son excellente trilogie), curieux de voir ce qu'il voulait nous y faire découvrir. J'applaudis l'imagination de l'auteur (inspiré à n'en pas douter par les livres/films cités plus bas par Fab), une intrigue cuisinée avec son style si particulier et reconnaissable entre mille. J'ajoute que l'avertissement donné par Scarabe dans le commentaire précédent n'est pas anodin. Oui ce livre est particulièrement violent, d'une violence franchement malsaine.
    Du coup, difficile de dire que j'ai aimé. Mais impossible de dire le contraire. Paradoxal, comme je l'ai écrit plus haut.
    Au final, je garde une sensation particulièrement aiguë : celle d'un roman comme un soleil cuisant, dont je suis ressorti le visage carbonisé et qui laissera quelques séquelles.

    21/12/2016 à 14:54 9

  • Bird Box

    Josh Malerman

    9/10 Une idée géniale exploitée avec talent, cela donne un EX-CE-LLENT premier roman. Avec Bird Box, on est à la fois l'objectif d'une caméra omnisciente ou presque, voyeur au pays des aveugles volontaires mais aussi aveugle au pays des "choses" qui nous entourent, nous épient, nous frôlent et... nous font mourir si l'on a le malheur de les regarder.
    J'ai littéralement dévoré ce roman la peur au ventre, totalement immergé dans cette histoire apocalyptique. J'ai trouvé la construction ingénieuse, alternant entre le présent angoissant de Malorie et ses deux enfants et l'avant, du début du phénomène qui se transforme rapidement en fléau, sans que l'on comprenne ni qui, ni pourquoi.
    On tremble, on sursaute, on frissonne, on vibre, bref, on RESSENT les émotions et sensations des protagonistes, c'est extraordinaire. On n'est pas loin du 10/10. Coup de maître, coup de cœur !
    Bravo, bravo et encore bravo à Josh Malerman pour cette perle, j'ai hâte de voir ce qu'il nous réserve dans un prochain roman ! D'ailleurs, en rédigeant ce commentaire j'ai envie de me replonger dans Bird Box !

    11/05/2016 à 20:21 9

  • Bondrée

    Andrée A. Michaud

    5/10 Une très belle écriture, des passages qu'on a envie de recopier pour les garder comme des citations, un décor plutôt immersif mais... tout cela au service d'une intrigue que je n'ai pas trouvée intéressante, gêné en outre par une espèce de faux rythme désagréable. L'intrigue est comme un prétexte pour décrire le passage d'Andrée de l'enfance à l'âge adulte au cours de cet été 67 sanglant (je trouve d'ailleurs la critique de Polarbear particulièrement pertinente sur ce concept de frontière, applicable à différents éléments du roman). Je me suis ennuyé souvent et lorsque, enfin, l'identité du tueur est révélée, ça fait "pshitt", parce que c'est bien trop long à venir (au point où je m'en suis presque désintéressé) et que la fin ne m'a pas paru crédible.
    Bref, une déception pour moi, même si je comprends ce qui a pu plaire à d'autres. A chacun donc de se faire son propre avis.

    11/02/2017 à 11:54 9

  • Dans la brume écarlate

    Nicolas Lebel

    8/10 Dans ce 5e opus, moins sombre que le précédent (quoique...) et flirtant par moments avec le fantastique (mais très léger, juste histoire de mettre le doute au lecteur), Mehrlicht et sa bande doivent faire face à la résurgence d'un avatar de Dracula.
    J'ai a nouveau beaucoup aimé l'intrigue tissée par l'excellent Nicolas Lebel qui nous fait naviguer du Père Lachaise aux geôles de Ceausescu, en passant par les légendes transylvaniennes, la Syrie ou encore le Dark Web. Les thèmes abordés sont multiples et j'ai trouvé quelques liens entre eux un peu capillotractés, mais je comprends et approuve les choix de l'auteur, dans leur traitement comme dans leur philosophie. Un roman dense, où l'équipe de Mehrlicht n'est pas en reste puisque Dossantos va renouer avec ses vieux démons... J'aime beaucoup l'évolution de ce personnage, je le trouve de plus en plus attachant, tiraillé qu'il est entre ses convictions et son amour pour sa collègue... Mr Code Pénal est un personnage que j'ai hâte de retrouver dans le prochain roman de la série (pas avant 2021 a priori).
    Bref, cinq polars, cinq immenses réussites, encore bravo et merci Monsieur Lebel !

    05/12/2019 à 19:27 9

  • Idaho

    Emily Ruskovich

    4/10 130 pages pour commencer à apprécier (un peu) ce roman dont j'ai, à plusieurs reprises, eu l'envie de ne pas le terminer tant l'ennui dominait.
    Pourquoi ? Parce que l'auteure a en a trop fait. Il y a trop de choses dans ce roman, trop d'évènements mélangés avec des allers-retours dans une chronologie déjà confuse, rendue encore plus confuse par l'Alzheimer d'un des personnages, sans compter l'imagination débordante d'Ann, obsédée par le dramatique passé de son mari ou encore tous les passages où l'auteure décrit le quotidien de Jenny.
    C'est voulu, bien sûr, mais les digressions sont si nombreuses que l'on si perd et surtout, j'ai cherché l'intérêt de tout cela.
    En refermant le livre, une fois la dernière page tournée (car oui, je suis allé au bout), le sentiment dominant était : "tout ça pour ça" !

    Idaho, qui promettait tant, fut au final un récit lourd, dans tous les sens du terme, qu'il m'a été très pénible de lire.
    Il y a une qualité de plume indéniable chez Emily Ruskovich mais cette qualité est diluée dans une construction tortueuse, aussi tortueuse que l'est la psychologie de ses personnages.
    Dommage.

    01/03/2019 à 12:28 9

  • Joyland

    Stephen King

    8/10 La plupart des avis précédents résument mon ressenti : c'est un très beau roman où l'aspect horrifique est absent pour laisser la place à une belle histoire dans laquelle un jeune cœur brisé et suicidaire reprend vie au contact d'un parc d'attractions pas comme les autres, d'une galerie de personnages hyper attachants dont le King a le secret, le tout le temps d'un été et d'un automne 1973 mémorables.
    Un Stephen King touchant, émouvant, un peu éloigné de ses autres romans mais pas tant que ça car, comme à chaque fois ou presque, la patte inimitable du King nous transporte.

    31/07/2016 à 13:17 9

  • La Ferme

    Tom Rob Smith

    9/10 Si Tom Rob Smith change de registre après trois romans dédiés à l'URSS, il confirme son talent exceptionnel de conteur pour nous plonger dans une histoire où doute, paranoïa, folie, suspense forment ensemble un thriller hyper addictif. J'ai adoré suivre le récit de Tilde, la mère du narrateur, dans cette partie retirée et glaciale de Suède, dans cette ferme et ses alentours où se trament des évènements pour le moins étrange. Avec toujours, cette question qui nous fait avaler les pages à une vitesse folle : dit-elle la vérité ?
    Je n'ai pas été déçu du tout par la fin, à la hauteur du reste du roman à mon avis. Et j'ai apprécié la "note de l'auteur" en fin d'ouvrage qui permet à celui-ci de revenir sur la genèse du roman, tiré de sa récente et perturbante expérience personnelle.
    Un coup de coeur.

    22/12/2015 à 11:55 9

  • La Maison où je suis mort autrefois

    Keigo Higashino

    8/10 Roman fort, poignant de cet auteur japonais que je ne découvre que maintenant. Je m'attendais à quelque chose d'angoissant mais ce n'est pas dans ce registre que l'histoire se déroule. L'auteur sème des pièces d'un puzzle lié à une maison perdue dans les montagnes japonaises, dans laquelle se rendent les deux héros. Puzzle dont la reconstitution est lente mais ne cesse de surprendre.
    Magnifique et touchant.

    04/05/2013 à 18:06 9

  • La mort est mon métier

    Robert Merle

    8/10 Quel pari fou que celui d'écrire, dès 1950 (livre publié en 1952), un roman dans lequel le personnage principal est un SS qui va être amené à diriger le camp d'Auschwitz !
    Librement inspiré par l'histoire de Rudolf Hoess, le vrai commandant d'Auschwitz, ce récit glaçant à la première personne (!) raconte l'histoire d'un Allemand issu d'une famille de militaires qui va gravir les échelons de la SS jusqu'à devenir un des artisans majeurs de la Shoah. C'est saisissant et très bien documenté pour l'époque. Un léger bémol, l'aspect trop psychologisant à mes yeux, les agissements de Rudolf Lang pouvant s'expliquer notamment par son éducation avec un père complètement taré et frustré de ne pas avoir pu marcher dans les pas de ses ancêtres militaires.
    Il n'en demeure pas moins que La mort est mon métier est un grand roman, de ceux qui marquent une vie de lecteur...

    23/04/2023 à 12:20 9

  • La Mort, entre autres

    Philip Kerr

    9/10 Captivé de bout en bout par ce 4e opus des enquêtes de Bernie Gunther. Riche idée d'avoir repris ce personnage, 15 ans après avoir clôturé la trilogie berlinoise !
    On retrouve cette atmosphère si particulière, cette fois-ci en Bavière (Dachau, Garmisch-Partenkirchen...) et en Autriche. On y croise encore des personnages de (la sombre) histoire, comme Eichmann, le grand mufti de Jérusalem... on y apprend l'histoire du camp de Janowska... On est impressionné par la solide documentation au service d'une intrigue riche et tortueuse. Et l'on clôt le livre en se disant "chapeau, Mr Kerr" !
    Un régal de lecture.

    20/09/2020 à 10:07 9

  • Le Carnaval des hyènes

    Michaël Mention

    7/10 Le Carnaval des hyènes se veut une satire du monde des médias français, du PAF principalement. C'est indéniablement réussi, ça dézingue dans tous les sens, même si j'ai trouvé que parmi le tir nourri quelques balles perdues n'ont pu être évitées. Le personnage de Carl Belmeyer n'est pas attachant et ne le devient pas malgré ce qu'il vit. Je n'ai pas accroché au côté espionnage, j'ai trouvé l'intrigue parfois peu crédible. J'ai aimé Le Carnaval des hyènes, davantage pour la lecture que fait l'auteur de notre société et du traitement de l'information par les médias, sans pour autant vraiment accrocher à l'histoire (sauf la partie française et celle en Sierra Leone).
    Ce ne sera donc pas mon Mention préféré mais il reste à découvrir, au moins pour la critique acerbe et acide de notre société, découvrir les arcanes de l'information et, évidemment, pour la plume originale de l'auteur.

    09/07/2015 à 13:42 9

  • Le Deuxième homme

    Hervé Commère

    8/10 Je rejoins complètement l'avis d'ericdesh, j'ai aussi été frustré de n'avoir "que" le récit de Stéphane et que le roman devienne un "page turner" sans que l'on s'attache assez à l'aspect psychologique. Cette frénésie de "tout savoir" m'a fait lire ce roman peut-être trop vite...
    En revanche, je m'incline devant le talent d'Hervé Commère d'avoir tissé une intrigue aussi habile, c'est assez fascinant. A découvrir pour se faire sa propre idée.

    14/12/2019 à 11:09 9

  • Le Manuscrit inachevé

    Franck Thilliez

    6/10 J'ai longtemps hésité entre un 6 et un 7... Et c'est après avoir relu la critique de Norbert ci-dessous que j'ai opté pour un 6. Le Manuscrit inachevé a un potentiel certain mais, comme Norbert, la désincarnation des personnages, l'absence d'empathie à leur égard parce qu'ils manquent d'âme et de chair, m'a empêché d'apprécié ma lecture. Ajoutons à cela une surenchère dans le gore (séquestration, viol, mutilation, nécrophilie... parfois sur des mineures...) à un rythme éreintant et l'on obtient ce que je n'apprécie plus du tout dans le thriller. Je n'ai pas été mécontent d'en terminer (j'ai appris ce qu'était la cryptomnésie, c'est déjà ça). Mais avec l'envie d'ouvrir sa "suite", Il était deux fois, pour mieux apprécier la mise en abîme voulue par l'auteur et, peut-être, voir Le Manuscrit inachevé sous un autre angle...

    30/01/2021 à 18:12 9

  • Le Verdict

    Nick Stone

    10/10 Thriller judiciaire hyper addictif et ce malgré ces presque 800 pages (format poche), Le Verdict m'a happé dès les premières pages (soirée de la récompense de Vernon James, un type imbuvable et amoral au possible). S'ensuit une intrigue machiavélique, diabolique, dans la peau de Terry Flint, modeste greffier d'un fameux cabinet d'avocats chargé de défendre James, qu'il connaît bien et dont il ne garde pas le meilleur souvenir...
    Passionnant, fascinant, captivant, Le Verdict fait assurément partie des tout meilleurs de la catégorie "polar judiciaire". En rédigeant cet avis, de nombreuses scènes me reviennent en tête, alors que j'ai tourné la dernière page il y a près de 6 mois. L'écriture délectable de Nick Stone n'y est pas non plus pour rien.
    Pas de doute, un titre très marquant, pour ma part un énorme coup de cœur et un roman que je considère comme un chef-d'œuvre. Merci Norbert de m'avoir permis de découvrir cet immense roman, que je relirai à l'occasion avec ravissement.

    06/10/2021 à 10:04 9

  • Les Lieux Sombres

    Gillian Flynn

    8/10 Ébloui par le bluffant "Les Apparences", j'ai ouvert "Les Lieux sombres" avec envie. Le pitch est très accrocheur, la couverture sublime, la lecture à venir est pleine de promesses... Bon, le personnage de Libby Day n'est pas des plus sympathiques. On peut le comprendre, vu le passif familial. Bien sûr, on se pose immanquablement la question : Ben, son frère aîné qui croupit en prison pour le massacre des deux autres sœurs et de la mère, est-il réellement coupable ? Libby a-t-elle menti ? S'est-elle trompée ?
    C'est dans une ambiance poisseuse, alternant passé et présent (de façon un peu lassante par moments), que nous découvrons, au fur et à mesure, la vérité. J'ai ressenti parfois un certain malaise lors de ma lecture, notamment avec les deux personnages complètement malsains et tarés Diondra et Trey. Ce qui est certain c'est que l'on ne peut rester insensible au passé de Libby, à cette famille boiteuse, entre une mère perdue qui se débat pour faire vivre une ferme endettée et une famille de 4 enfants dont un aîné taciturne en pleine crise d'ado, et alors que le père, alcoolique, a pris la tangente. Quand je repense à cette histoire, je mesure le boulot que cela a dû être de bâtir une telle histoire, avec toutes ces ramifications...
    Donc si je n'ai pas été totalement conquis par ces Lieux sombres (peut-être parce que j'ai trop gardé en tête l'immense plaisir de lecture des Apparences), je dois reconnaître que l'on a là un très bon roman noir.

    02/05/2020 à 14:57 9

  • Léviatemps

    Maxime Chattam

    6/10 Le Paris de 1900, l'exposition universelle... chic chic chic, voilà qui a l'air appétissant ! Bon, autant le dire tout de suite, j'ai été déçu par ce roman.
    La moyenne actuelle (6.4/10 après 45 votes) avait pourtant été une indication mais je m'étais refusé à lire les commentaires, voulant découvrir par moi-même s'il s'agissait d'un roman qui "méritait" une moyenne relativement basse sur PP dans la production de cet auteur dont j'apprécie les romans.
    Et mes premières impressions tendaient à infirmer ce constat : le décor est bien planté, on s'attache aux personnages, l'intrigue est accrocheuse, bref 150 premières pages réussies. Et puis... et puis Maxime Chattam se perd, nous perd dans les 200 pages suivantes, avec une intrigue qui n'avance plus ou si peu, noyée dans les éternelles considérations/réflexions chères à l'auteur sur le Mal, servies ici ad nauseam à tel point que je me suis dit "Léviatemps qu'ça s'arrête" (ok, je sors). Et dire qu'à ce moment-là, il me restait encore 200 pages avant de terminer le roman... Autre point qui m'a un peu énervé, c'est le fait qu'il faille attendre près de 350 pages pour véritablement entrer dans cette fameuse Exposition universelle.
    Heureusement, l'intrigue est ensuite relancée par une séance de spiritisme et l'étau se resserre ensuite autour de l'assassin. Les scènes finales sont assez marquantes et l'idée de base (expliquant le titre) est ingénieuse.
    Au final, une note qui oscille entre "moyen" et "assez bon", avec le sentiment tenace qu'en moins de pages, l'auteur aurait pu nous servir un roman bien plus marquant, tant les ingrédients choisis étaient les bons.

    03/06/2017 à 15:07 9

  • Lontano

    Jean-Christophe Grangé

    7/10 Un tourbillon de 800 pages, sans pause, sans répit. Du Grangé pur jus, peut-être un peu plus politique que d'habitude (surtout au début, dans les réflexions de Morvan père). Une famille dont le ver est dans le fruit, des meurtres bien trash, la Bretagne, Paris, l'Italie et le Congo (ex-Zaïre) en toile de fond, l'armée, des mines de coltan etc... Dans ce maelstrom ô combien malsain, j'avoue avoir parfois tiré la langue, un peu usé par les descriptions gores, les vices des uns et des autres. Peut-être est-ce parce que ce type de thrillers n'est plus trop mon truc ou que la patte Grangé ne me plait plus autant qu'avant.
    Sûrement un peu des deux. En tournant la dernière page j'ai eu comme un sentiment de "too much" (comme lorsque j'avais refermé l'Empire des loups).
    Cela ne m'empêchera toutefois pas d'ouvrir Congo Requiem plus tard, poussé par l'envie de savoir ce qu'il s'est passé à Lontano...

    06/09/2016 à 10:10 9

  • Metropolis

    Philip Kerr

    8/10 1928, Berlin. Bernie Gunther entre dans la Kripo avec comme supérieurs Bernhard Weiss ou encore Ernest Gennat, deux personnages qui ont réellement existé. On croisera aussi le cinéaste Fritz Lang (le clin d'oeil du titre à son film) et sa compagne Thea von Harbou (Kerr s'amuse à placer Bernie en inspirateur du film M. le Maudit).
    Et l'on retrouve déjà cette volonté chère à Philip Kerr de retranscrire fidèlement une époque, une ambiance, ici celle de la République de Weimar.

    Et c'est diablement réussi, comme d'habitude avec Kerr !

    On y trouve tout d'abord toutes les séquelles de la Première Guerre mondiale : qu'elles soient physiques (les nombreux invalides qui hantent les rues berlinoises et qui provoquent très souvent rejet et dégoût de la part des Berlinois, comme une volonté de tourner définitivement la page de cette "honte" qu'est à leurs yeux la défaite de 1918) ou psychologiques (les nombreux témoignages des différents personnages ayant participé à la guerre, dont Bernie lui-même, se réfugiant dans l'alcool pour surmonter ses traumatismes issus des tranchées).
    On assiste aussi à la montée du nazisme (qu'illustre notamment Arthur Nebe), l'antisémitisme omniprésent, les combats de rues entre membres du KPD (parti communiste allemand) et ceux du NSDAP (parti nazi). Et cette folie qui s'est emparée de la ville : une folie créatrice, jouissive mais aussi perçue comme dégénérée, ces fameuses années folles qui font de Berlin la ville décadente par excellence aux yeux d'un grand nombre, sorte de Babylone moderne, temple de la perversion. Cette décadence illustrée par les nombreux lieux interlopes de la capitale allemande et ces femmes seules, en surnombre car tant d'hommes sont morts à la guerre, qui tentent de survivre, en ailleurs recours à la prostitution.
    Alors quand certaines d'entre elles meurent, peu s'en préoccupent... Lorsqu'elles meurent scalpées, cela intéresse la presse, avide de meurtres sordides mais sans pour autant que cela émeuve beaucoup la masse berlinoise ("dans cette ville, vous tuez une fille, tout le monde s'en fout", p.244). Cela m'a d'ailleurs frappé dans ce roman, le manque d'empathie généralisé, vis-à-vis des invalides de guerre, des prostituées... comme un prélude à la brutalité qui s'annonce couleur brune...
    Des prostituées scalpées bof, mais des invalides abattus froidement, alors le pouvoir politique attend des résultats ("vous tuez un ancien combattant infirme, ça remonte jusqu'au Reichstag", p.244).

    Soyons honnête, l'intrigue policière n'est pas totalement à la hauteur de la contextualisation. Mais cela importe finalement peu. Car c'est à un voyage dans le temps que nous invite, une dernière fois hélas, Philip Kerr. Et c'est avec émotion, des images d'Allemagne d'antan en tête, que l'on referme, définitivement la page Bernie Gunther qui, comme un pied de nez, commence tout juste chronologiquement une série qui s'étendra sur près de 30 ans.
    Chapeau bas l'artiste, merci M. Kerr.

    23/12/2020 à 18:16 9

  • Meurtres pour rédemption

    Karine Giebel

    9/10 Karine Giebel a écrit avec Meurtres pour rédemption un roman époustouflant. L’auteur malmène sans cesse son lecteur, on passe par toutes les émotions, c’est très fort !
    Ce qui m’a peut-être le plus marqué, c’est l’histoire d’amour bouleversante que recèle ce livre.
    Mais ne nous-y trompons pas : ce livre est avant tout sombre, dur, violent et triste, de la première à la dernière page.
    Un léger bémol : j’ai personnellement trouvé le roman un peu long. Comme l’a déjà souligné Gilmoutsky, je crois que l’intensité émotionnelle aurait été encore plus prégnante en moins de pages.
    Cela n’en reste pas moins un très grand roman dont, c’est vrai, on ne sort pas totalement indemne.

    17/07/2013 à 19:21 9

  • Mr Mercedes

    Stephen King

    8/10 Stephen King est décidément un auteur surprenant. Ici pas de fantastique mais du roman policier pur jus et, tel celui qui transforme tout ce qu'il touche en or, le King fait mouche : un prologue ("Une Mercedes grise") qui donne le ton puis le rythme ralentit, le temps de faire connaissance avec Bill Hodges, le "off-ret" et Mr Mercedes, le psychopathe. Le rythme s'accélère dans la deuxième partie et le suspense est carrément haletant dans le dernier tiers. Les personnages deviennent attachants au fil des pages, à commencer par le duo Hodges-Jerome (j'ai beaucoup aimé ce personnage), Janey ou encore Holly. Certains passages nous plongeant dans la tête et le passé de Mr Mercedes sont particulièrement sordides et dérangeants.
    Ce n'est peut-être pas le meilleur King mais c'est assurément un super King. 8.5.

    30/10/2015 à 15:37 9