LittleWing

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  • Adieu, ma jolie

    Raymond Chandler

    8/10 Non, nous ne sommes pas à Matapouille, petit hameau du fin fond de l'Ariège où auraient pu vivre des moines cénobites. Non nous sommes à L. A., où un colosse tout droit sorti du permafrost ou d'un fanzine de second rang des aventures de Momo et Ursule, à face simiesque et au brushing impeccable, bref tout l'inverse d'une physe, se ballade à la recherche de sa dulcinée, Velma, Belle rousse, ancienne reine des guinguettes. On dit que j'ai des belles guinguettes c'est vrai. Velma, beauté dont le bush fait ressortir le regard aussi sucré qu'un loukoum noyé dans un bain d'hydromel. Véritable petit cachou de notre colosse à la carrure d'une valise diplomatique, la rousse mousseuse fait chavirer notre endive dans un charleston endiablé, mantille au vent, tournoyant sous la lune tel un tournevis cruciforme sur une vis en laiton doré. Mais voilà, à la sortie de prison de Moose, Velma la tendre et douce n'est plus là. Son sang ne fait qu'un tour, le repaire de sa bien-aimée est devenu une bauge de noirs, où les blancs sont exclus, et dès lors, notre King Kong, renverse tout sur son passage, shaker, verres, bouteilles... rien ne lui résiste. Tout le monde passe à la cassolette, mijoté sous sa poigne, les indices fusent, les corps s'entassent comme de vieilles marmites au fond d'un placard. Marlowe, lombric impuissant laisse faire le kraken surpuissant, avant de se retrouver au fourneau, tel une anchois dans sa pissaladière. Un jeune dandy au cœur de seiche l'engage comme Remora australis et garde du corps. Oui mais voilà, comme dirait Truman, l'affaire capote! Il faut toujours sortir couvert disent les médecins... Les sélacimorphes endocriniens sont de sortie. Notre dandy endimanché est retrouvé la cervelle pendante sur son complet flanelle, quel manque d'élégance tout de même, chocking my dear! Notre détective va plonger en eaux troubles naviguant sur plusieurs enquêtes, jouant alors de l'humour plus que de son arme, il va sortir les reparties à tout va, flinguant ses victimes de ses répliques cinglantes, mais sera-ce suffisant pour vaincre notre loxodonta irisé?

    19/01/2016 à 11:58 3

  • Alex

    Pierre Lemaitre

    9/10 Alex, que dire d’Alex : elle est jeune, elle est belle, elle a un goût immodéré pour les perruques et puis c’est tout. Rien, le néant, alors quand Alex disparaît comment faire pour retrouver un fantôme, quelqu’un que personne ne connaît. C’est l’équation que doit résoudre le commissaire Camille Verhoeven. Tour à tour, on va l’aimer, puis la haïr, et pour finir on s’apitoyer sur Alex. Que demander à un thriller, de l’action, des meurtres, des renversements, du suspense. Pierre Lemaître maîtrise cela dans ce drame en trois actes. Un personnage central dont on ignore tout et que l’enquête va mettre à nu ; un commissaire qui depuis la mort de sa femme fuit toute enquête criminelle se voit confier une affaire similaire à celle qui à entraîner la mort de sa femme ; et enfin un kidnappeur pervers, sans scrupule agrémenté d’un petit côté sadique à vous enfermer nu dans une Louisette en compagnie d’une horde de rats comiques qui n’ont qu’une idée en tête : vous manger et vous voilà dans l’ambiance de ce policier. Des personnages forts extérieurement, mais qui recèle leur lot de faiblesse, leur traumatisme, parsemé de notes d’humour pour faire passer le tout.

    19/01/2016 à 11:56 6

  • Golgotha

    Leonardo Oyola

    9/10 Buenos Aires, bien loin de l'antique Gardel, dont le fantôme a déserté les ruelles pour laisser place aux souvenirs de touristes en villégiature. La ville a changé et l'auteur Leonardo Oyola nous emmène dans les viscères de la violence et de la pauvreté. Bienvenue à Laferrere et à la Villa Scasso, à l'ouest de Buenos Aires. Laferrere, quartier populaire, dernier lieu où la police tente de faire régner la loi. Lagarto et Calavera, deux flics y exercent tranquillement leur métier. En face, Scasso! Un quartier aux mains de la bande des gamins, dirigés par Musclor, alias Kuryaki. Ici pour survivre, il faut montrer que tu as des couilles, tu n'as pas le droit de pleurer, on joue " à tuer ou à mourir" ( page 93). Tout semble régenté par un accord tacite, mais un beau jour de juillet, Magui, vingt-huit ans est retrouvée pendu dans son cabanon de Scasso. Elle n'a pas supporté la mort de sa fille de quatorze ans suite à un avortement Le coupable est tout trouvé pour Calavera, c'est Kuryaki. Et le Skeletor a promis de lui faire la peau, de le buter en mémoire de Magui, son amour d'adolescence. Et quand on vient de Scasso, on appartient toujours à Scasso, c'est dans le sang. Un matin, Musclor est retrouvé plombé dans ses toilettes. La queue s'allonge chez le tatoueur." Lorsqu'ils se font tatouer les cinq points, quand ils se font graver cette face-là du dé et qu'ils prient un de leurs saints au moment où l'aiguille fait couler le sang, alors tu peux faire dans ton froc" ( page 98). Les flics sont en alerte, et puis un jour, les baskets suspendues sur les câbles du Verger, ont disparues, remplacées par des godasses noires, les patas negras des flics. La bataille entre Saint-George et San La Muerte ne fait que commencer. Une lutte sordide où tout les coups foireux sont permis. Le Golgotha, c'est le Calvaire, la colline où l'on crucifiait les condamnés, et notamment Jésus. C'est un lieu chargé de religion, tout comme la vie en Argentine, tout comme le récit de l'auteur. un livre ou l'on prie avant de tuer. Leonardo Oyola nous livre un roman sur la brutalité, l'appartenance et les croyances, sur une société en marge qui construit ses règles et ses repères sur la drogue, le pouvoir des armes à feu et la loi du sang. Un royaume où " la reine d'entre les reines,(...) est et sera toujours la Violence" (page 130). Un véritable témoignage musclé et bien rythmé

    19/01/2016 à 11:53 2

  • La porte des enfers

    Laurent Gaudé

    7/10 « Rends-moi mon fils, Matteo. Rends-le-moi, ou, si tu ne peux pas, donne-moi au moins celui qui l’a tué ! » (Page 61) Terrible phrase, lourd contrat pour Matteo De Nittis. Cette promesse faite à sa femme Giuliana changera le restant de sa vie. Naples, 1980. Matteo De Nittis se relève, une fusillade vient d’éclater à côté de lui, son regard se tourne alors vers son fils. « Pippo ? L’enfant ne répondit pas. Il se sentit pâlir d’un coup. Il se mit à genoux. Sa chemise était baignée de sang. Pippo ? L’air lui manque. Son fils ne bougeait pas, restait face contre terre, inerte. Pippo ? Il cria. Il ne savait que faire. Il cria. Parce qu’il ne savait pas comment empêcher ce sang qu’il aimait de continuer à se répandre sur le trottoir. Ses mains couraient sur le torse de l’enfant comme s’il essayait, sans y parvenir, de trouver la plaie et de l’empêcher de couler. Ses mains qui semblaient ne lui servir à rien parce qu’il ne savait pas faire les gestes utiles. » (Page 27) Une mort injuste. Cruelle. Intolérable. Pippo avait six ans ! A partir de cet acte mortel, Laurent Gaudé va sillonner les différents chemins qui mènent au deuil, guidant le lecteur dans ces entailles, ces déchirures, ces plaies qui jamais ne cicatrisent. Parce que la mort fascine, parce qu’elle fait mal, la réaction sera violente. La cruauté sera proportionnelle à la souffrance, à l’injustice et la scélératesse de cet assassinat. Accablé, démoli, Matteo erre le soir dans les rues de Naples au volant de son taxi. Giuliana refuse cette mort, se parjurant, reniant sa maternité et allant jusqu’à violenter les symboles de sa féminité. De sa souffrance se dégage une force effrayante, une personnalité machiste et dure. Pour eux, la vie s’est arrêtée dans cette rue de Naples, leur couple va se disloquer en même temps que disparait leur point d’union, leur ancrage. « Ils nous ont tués, Matteo, ajouta-t-elle. La mort est-là. En nous. Elle contamine tout. Nous l’avons au fond du ventre et elle n’en sortira plus. » (Page 68) Cette mort omniprésente dans le livre. Cette lente agonie qui suinte au travers des personnages. Que ce soit le prêtre, mort pour son église, que ce soit Grace qui ressuscite chaque soir en se confessant, ou encore le Professore dont les travers sexuels ont tué sa carrière, tous ne sont plus que des ombres, des fantômes de leurs rêves, de leurs conditions. Et il y a Pippo. Pippo qui a hérité de la violence, de la mémoire de sa mort et de la souffrance de ses proches. Pippo qui vit attendant l’heure de la vengeance et du retour. Retour de son père, retour de la vie pour tous ces personnages accidentés. Mais hélas, je suis resté en rade devant les portes de l’enfer. Autant, étudiant je m’étais régalé dans les pas de Dante parti en quête de sa Béatrice dans la Comédie. Ici, je n’ai rien ressenti dans cette descente, l’écriture par trop onirique ne m’a pas convaincu. J’ai préféré retenir le dernier cadeau de Matteo à son épouse, cette ultime preuve d’amour, la réalisation de sa promesse : lui ramener Pippo en plongeant dans ce royaume d’Hadès. Certes, Laurent Gaudé ne recherche pas une représentation religieuse de ce lieu et de ce fait il s’éloigne un peu de Dante. Mais cette interrogation sur le rôle des âmes, sur sa vision des enfers jonchés d’aphorismes m’a laissé pantois. Ce roman va droit au but, parce que nous avons tous côtoyé la mort à un moment donné de notre existence, nous avons tous laissé une partie de nous dans ces disparitions et de ce fait nous serions parfois prêt à tout pour aller les rechercher. Mais peut-être parce que j’ai fréquenté trop tôt et trop souvent cette mort, je n’ai pas eu envie de suivre Matteo dans ces limbes.

    19/01/2016 à 11:51 2

  • Belém

    Edyr Augusto

    9/10 Belèm, l’indolente, la métisse aux couleurs chatoyantes traine langoureusement le fardeau de son glorieux passé. Entre dénuement et opulence, dans la moiteur exacerbée de cette ville, où le manguier est roi, Edyr Augusto nous offre un premier roman opaque, noir. Dans cet antre paradisiaque aux confins de l’Amazonie la folie des hommes exulte, sans retenue, sans pudeur, dans une violence sans limite. « Johnny est mort », c’est par ces mots qui ne sont pas sans rappeler un autre roman, un autre style journalistique que s’ouvre l’enquête de l’inspecteur Gil Castro. En arrivant chez le célèbre coiffeur, notre étoile montante de la police ne sait pas encore où il a posé les pieds. D’une banale histoire d’overdose, notre héros dipsomane va se retrouver en plein cœur des milieux interlopes belenenses ; entre pédophilie, prostitution, drogue et manipulation, la tentation de sombrer aux appels de la bière est forte, encore plus quand la belle Selma vient se jeter dans ses bras. Dans un style narratif, parfois déroutant, Augusto joue avec son lectorat et ses personnages, les maltraitant, les violentant, les plaçant tantôt au sein même de l’action, dans l’intimité des protagonistes, dans leur conscience, révélant leur appréhension, leur peur, leur effroi. Par ce biais, le journaliste qu’est Edyr Augusto déplace le noyau de l’action, renvoie l’enquête sur d’autres voies, peignant lentement le portrait de cette caste sociale, de ces aristocrates en herbe, de leurs ambitions, de leurs rêves et de leurs vices. Dans ce Brésil, loin de la samba, des carnavals, Belém se dresse en fanion de la corruption, de la violence, tel un ramassis de cruauté, de sexe, de luxure et de drogue, en paria de cette douceur, de cette sensualité brésilienne. Dans ce royaume, des prédateurs prêts à tout pour assouvir leur volonté usent de leurs droits régaliens, de leur droit de vie et de mort sur ceux qui entraveraient leurs projets. Consommant allégrement drogue, filles, enfants et vie, sans aucun discernement, tel des sangsues, des veuves noires se nourrissant de leurs victimes pour mieux régner sans partage. Et dans cette cruauté, nombreux personnages apprendront à leur dépend qu’il n’y a pas d’esquive, pas de place pour le rêve et l’espoir. Sans conteste, un bon roman noir, réaliste, au style acéré et acerbe, cru. Une atmosphère de violence pesante, qu’elle soit physique ou parfois sexuelle, vient clore la folie monstrueuse des hommes, dans un final qui peut paraitre rapide mais qui en surprendra plus d’un.

    19/01/2016 à 11:49 5

  • L'île invisible

    Francisco Suniaga

    6/10 Margarita, perle des Caraïbes, paradis pour les héliocentriques. Mais ce n’est pas pour ses raisons qu’Edeltraud Kreutzer atterrit à La Asuncíon. Mort par immersion mécanique. Quatre mots. Quatre mots qui agissent dans son cerveau comme le pôle magnétique sur une boussole. Deux mois que Wolfgang, son fils restaurateur à la Playa el Agua a été retrouvé noyé, affaire classée. Cette explication laconique et technique ne convainc pas l’allemande d’autant plus qu’une lettre anonyme lui est parvenue. Dans une Amérique latine aux lenteurs exagérées, à l’administration pyramidale interminable, où le temps est suspendu à la volonté des autochtones, entre dilettantisme et indolence, la teutonne disciplinée, cartésienne, obstinée risque de se fourvoyer. Juan Benítez, avocat en quête de client, plus féru de littérature que de droit va tenter de la guider, de résoudre l’enquête. Entre passe-droit et archaïsme, loin des grèves enchanteresses, on découvre une autre facette, une autre vision de Margarita. Une image séculaire, violente, impétueuse, celle qui a happée, alliciée, fascinée Wolgang Kreutzer. L’île des combats de coq, des paris, de l’affrontement. Francisco Suniaga nous entraine avec nonchalance dans une enquête, une découverte de cette Caraïbe méconnue, entre sexe et cruauté, entre passion littéraire et jeunesse communiste, les personnages défilent tour à tour. Un monde obsolète, pompadour, spéculaire aux antipodes des circuits, qui met en exergue les difficultés économiques, le métissage, l’omnipotence bureaucratique, les tensions. Ces tensions qui se cristallisent autour d’une arène, d’un gallodrome, combat bref, intense où vie et mort, honneur et courage s’enchevêtrent, fascinent et parfois corrompent ou damnent les plus fragiles. L’île invisible, cette partie qui envoute, sauvage, rebelle, fière comme ses coqs de combats, prête à s’enflammer, orgueilleuse, celle qui rêve les yeux ouverts, loin de celle de Benítez qui se complait à refaire l’histoire et la politique, cherchant dans son passé les causes de son présent. Suniaga mène son lecteur dans une réflexion, une psychanalyse sur l’identité de ces iles, perdues entre tourisme et traditionalisme, entre luxe et volupté. Dans un style parfois déroutant, le roman se met en place oisivement écrasé dans un premier temps par cette chaleur oppressante, étouffante puis fiévreusement la fascination grimpe, prenant le lecteur à témoin dans ses recherches de vérité.

    19/01/2016 à 11:45 1

  • Un long moment de silence

    Paul Colize

    8/10 1954, Le Caire, dix-sept personnes perdent la vie. Pourquoi ? En Belgique un téléphone sonne, le petit Stanislas a un an, son père vient de mourir dans l’attentat du Caire. Qui l’a assassiné, qui visaient les terroristes ? 1948, les souvenirs des camps de concentration coulent encore dans ses veines quand Nathan Katz assiste, à la sortie du Brooklyn College, à une énième humiliation de la part de jeunes italiens. Quelques jours plus tard, armé d’une simple batte de base ball, le jeune collégien pénètre dans l’antre des agresseurs. Deux événements qui marqueront nos deux héros, qui changeront à jamais leur vie. Cette disparition deviendra très vite obsessionnelle pour Stanislav Kervyn richissime entrepreneur. S’ensuivront de longues années à traquer la vérité, les raisons de cette circonstance malheureuse. Alors qu’il pense avoir mis un terme à ses démons et ces images malsaines, qu’il croit enfin aspirer à une nouvelle vie, Stanislas se voit contraint de tout reprendre à zéro, de fouiller dans un passé qu’il ignore, qui s’évapore un peu plus au fil des disparitions des derniers témoins. Cet affront, Nathan ne peut l’accepter. Les juifs n’ont déjà que trop souffert, trop subit, en un jour, il va changer son avenir et le regard des autres sur lui. Une rébellion qui fera entrer le jeune Nathan dans un nouveau monde, un monde souterrain, où la mémoire de son peuple doit guider ses gestes, sa vie. Paul Colize, par l’entremise de deux personnages, de deux mondes opposés, nous mène dans un roman à cent à l’heure. Une œuvre où se mêle passé, présent, histoire et exactions, où réalité et fiction s’entrechoquent dans un style cru, dur parfois mais non dépourvu d’humour et de dérision. Un personnage de prime abord antipathique, Stanislas qui se laisse submerger par ses hantises, par les événements de son passé, s’érigeant en martyr odieux au point de devenir antisocial, agressif et inhumain,égocentrique et obsédé. Un héros, Nathan Katz justicier de la Mémoire de son peuple mais nanti de pitié au moment du dernier geste, jeune juif émigré, intelligent et consciencieux. Deux personnages prêts à tout pour obtenir la vérité, quel qu’en soit le prix à payer. Un scénario renversant, addictif que l’on a du mal parfois à lâcher. Colize réussit le tour de force d’emmener son lecteur sur un terrain labile, où les certitudes s’effondrent parfois comme un sable mouvant, laissant le lecteur dubitatif.

    19/01/2016 à 11:43 6

  • Le Paradoxe du cerf-volant

    Philippe Georget

    8/10 Quatre boules de cuir tournent dans la lumière De ton œil électrique, Boxe, Boxe, Ô déesse de pierre Quatre boules de cuir, mes poings contre les siens, Moi le jeune puncheur, Boxe, Boxe... -- Ça swingue comme une mélodie chaloupée, un corps à corps dangereux, le bien, le mal se croisent, s'affrontent. L'amitié, l'amour ne semblent plus exister le temps d'un combat. Pierre, 27 ans voyait sa retraite sportive lui tomber dessus comme un ultime K.O., la fin du combat, mais c'était sans compter sur un nouvel adversaire, un poids lourd. Mais ses gants et mes gants ne pensent pas de même --Ô déesse de pierre, pour atteindre ton cœur, Il n'est qu'une manière, Boxe, Boxe, Il faut être vainqueur Quatre boules de cuir sur quatre pieds de guerre Bombardent le plexus, Boxe, Boxe.-- En boxe les coups bas ne sont pas de mise, dans la vie si. Orphelin, solitaire plaqué, Pierre voit Sergueï, son ami disparaître alors que lui se trouve embarqué dans une sombre histoire de meurtre sordide. Une enquête hantée par les fantômes du passé, les plaies de la mort et de la violence. Des coups pour se venger, des fleurs pour la rédemption. Entre crimes politiques et boxe, Pierre titube, assommé par la réalité, frappé par le passé. Il encaisse les Serbes, évite les croates, crochète la police. Philippe Georget nous livre un polar sur fond de boxe et de crimes de guerre dans l'ex-Yougoslavie. Un combat plein d'humour et de noirceur, cette bile de l'âme qui pousse l'être dans sa bassesse. Trois combats pour autant d'adversaires, mais aussi un combat contre soi, contre ses angoisses refoulées au fil des années, contre ses silences si douloureux. --Ô déesse de pierre, je prendrai ma revanche Et j'aurai ton sourire, comme une maison blanche Oui, j'aurai ton sourire, point final de mes poings Même si dans les coins, Boxe, Boxe, J'y vois encore luire, Quatre boules de cuir.

    19/01/2016 à 11:36 2

  • La vengeance volée

    Irène Chauvy

    7/10 Nous voici à l’aube d’une nouvelle série, Vengeance volée est un premier roman qui marque l’arrivée d’une nouvelle équipe de fins limiers. Hadrien Allonfleur, récemment promu capitaine des Cent-gardes, unité créée pour la protection de Napoléon et qui sera dissoute à la fin de l'Empire en 1870, et Amboise Martefon, pur élève de Vidocq, et ancien inspecteur de la Sûreté. Allonfleur est un personnage frivole, à l’image de son époque, qui se fie autant à son intuition qu’à « sa boîte à penser », mais qui n’hésite pas à payer de sa personne, surtout auprès de la gente féminine. Personnage extraverti, dilettante sûr de son charisme mais qui paradoxalement souffre d’un complexe relationnel avec les femmes. Martefon, l'ombre du capitaine, qui agit en sous-main, qui aime triturer les gens par ses interrogatoires serrés, qui n’a confiance que dans son réseau. Une véritable énigme à lui tout seul, autant Allonfleur aime être vu, aime briller, autant Martefon se complait dans les cuisines, dans les annexes des maisons bourgeoises… Nos limiers nous entraînent dans le Paris du Second Empire. Nous sommes en 1863, un peu plus de la moitié du règne de Napoléon III s’est écoulé, mais déjà l’Empire s’essouffle est connait des difficultés. L’enquête nous fait déambuler dans le Paris d'Haussmann, au rythme de l'omnibus, dans une ville grouillante de monde, on s’attend à voir surgir un Émile Zola au coin de la rue, tant l’ambiance nous rappelle ces œuvres parisiennes. Quand l’omnibus est plein, la marche à pied reste encore le meilleur moyen de transport, tout est encore à quelques minutes de marche. Une visite fouillée, minutieuse entreprise sous la plume de l'auteur. C'est dans cette atmosphère que vivent les protagonistes du roman. L’énigme avance, lente comme la Seine, dans les méandres des Bourgeoisies parisiennes et dijonnaises. Direction la gare et les cris stridents du chemin de fer, c’est la ruée, la découverte d’un moyen de transport encore incertain, mais le déplacement est important… En me renseignant sur le livre, l'idée récurrente était travail bien documenté, et j'appréhendais quelque peu la lecture, m'attendant à un pointillisme exacerbé. Que nenni! Le travail effectué en amont est bien présent dans l'œuvre (cf. scène de la morgue, chantier de l'Opéra, le voyage en train...) mais l'ensemble s'incorpore à l'ambiance, nous ne sommes pas ici dans un thriller à cent à l'heure de Tom Clancy, mais plutôt dans un Cadfael d'Ellis Peters voire un Sherlock Holmes, bref un policier qui se savoure. Pour un premier roman la maîtrise est intéressante et l’on se surprend à attendre la suite des aventures de tous ces joyeux vivants. Une auteure à découvrir.

    19/01/2016 à 11:31 1

  • Le Faucheux

    James Sallis

    8/10 Dans l'atmosphère moite et faussement nonchalante de la Nouvelle-Orléans, Lew Griffin mène ses enquêtes comme sa vie. Solitaire désabusé, il connait mieux les rades glauques que sa propre existence, le goût de l'alcool que la chaleur d'un lit accueillant. Le Faucheux retrace quatre épisodes sombre de sa carrière, des enquêtes qui l'emmène au cœur de l'introspection, dans une descente aux enfers interminable. Tour à tour détective privé, recouvreur, Lew est aussi instable dans la vie que dans sa tête. Une folie qui le poussera, un jour, à tuer un homme, qui lui permet d'affronter l'immonde sans vergogne, ou à vouloir devenir écrivain. Autour de lui, les personnages vont et viennent, s'attachent à lui, le temps d'une enquête, le temps d'une nuit, amour d'un soir, amour d'une vie comme La Verne, amour éternel comme Vicky, mais Griffin ne peut se fixer toujours en mouvement, en évolution entre misère et désolation, entre musique et fanfaronnade. Il est le miroir de sa ville, de cette Nouvelle-Orléans festive et touristique, bruyante et métissée. Inexorablement, il avance, attaché à cette ville, enchaîné au passé négrier, animé d'une colère sourde. Lew est noir, accro au blues, à la musique et à l'alcool, salement amoché comme peut l'être Corene Davies quand il la retrouve. Le faucheux se lit comme une biographie de Lew Griffin, des instantanés d'un paumé noir américain aux racines du jazz et de l'esclavage. Un voyage dans le temps et les réflexions d'un personnage attachant qui s'abreuve aux sources de la mélancolie et de la déchéance.

    19/01/2016 à 11:29 3

  • King County Sheriff

    Mitch Cullin

    9/10 Seize psaumes qui résonnent dans les tréfonds d'un puits, écho d'une âme violentée, conscience d'une Amérique profonde et viscéralement excessive et brutale. Un soliloque aux sources de l'enfance, un puisage à l'extraction du mal, cru et virulent qui déchire les oreilles. Un souffle de haine et de racisme, un vent emplit d'engeance, tourbillonnant dans un éternel recommencement. Branches a beau avoir brûlé les traces d'un passé opprimé par un beau père alcoolique et violent, la souffrance, la sauvagerie le rattrape. Branches règne en maître sur le bled de Claude, bourgade du West Texas. Il est la loi, le garant des valeurs, respecté de tous, mais assis au bord du gouffre, les plaintes de Danny, son beau-fils n'ont pas de prises sur lui. Les cris, la douleur lui claque au visage comme la gâchette de son colt fierté de son ceinturon. Chaque doléance le ramène dans la fosse de ses souvenirs, dans les germes d'une relation familiale conflictuelle, dans l'amour de son arme à feu plutôt que celle de son prochain. Dans ce puits, la haine entre Branches et Danny côtoie la ségrégation mexicaine, l'antisémitisme, la folie humaine. King county sheriff puise toujours plus loin l'eau de la violence, de la discrimination, refoulant la ponctuation et les émotions au fin fonds de l'être. Une eau couleur bile et sang, une immensité désertique taillée dans la douleur et la souffrance, des arbres mesquites solitaires et abandonnés, une poésie de la violence collante comme du remugle, poisseuse mais qui vous prend et ne vous lâche plus comme le cri d'un coyote en pleine nuit.

    19/01/2016 à 11:13 2

  • Marseille Noir

    Ouvrage collectif

    7/10 Marseille l'indolente, la rebelle, semble s'endormir attablée à la terrasse d'un café, s'enliser dans d'infinis palabres, d'incoercibles logorrhées. Mais sous de faux airs débonnaires, la cité millénaire, terre de contrastes, de fantasmes et de légendes, entretient son image. Enchâssée entre azur et montagne, terre d'accueil et d'écueil, la cité phocéenne conjugue son présent aux sons des règlements de compte et de l'O.M. Mais pour ne plus être endiguée dans l'affairisme, Marseille joue de ses cultures, de ses identités plurielles pour s'ouvrir, s'offrir aux autres. Marseille noir nous imbibe de ces quartiers aux noms enchanteurs que sont la Joliette, l'Estaque, la Belle de Mai. Des lieux qui sont les véritables héros de ces histoires, parfois entrecoupées par la folie stridente du Mistral qui pousse les êtres aux dessins les plus vils. Des paysages croulant sous le poids d'immondices, de petits caïds dealers ou de nostalgie. Marseille noir nous invite au voyage, mais ici, les bagages ne recèlent pas toujours des souvenirs de vacances et les trajets en bus finissent en cagade. Car Marseille ne fait jamais rien comme les autres, ici on ne peut boquer devant les bombasses aux pilotis, et le cagnard vous fait des misères. Quatorze nouvelles, quatorze facettes de la capitale culturelle 2013 qui finissent comme souvent sur la cannebière comme un air de révolte, une grosse bronca sous l’œil de deux légendes marseillaises, parce qu'ici peut être plus qu'ailleurs les mythes ont la vie dure et les rues résonnent encore du bruit des gangs.

    19/01/2016 à 11:07 3

  • La Soif primordiale

    Pablo De Santis

    6/10 La soif primordiale nous plonge dans le Buenos Aires des années 50, celle de Perón, puis de la jungle militaire des généraux Gomez, Lonardi et Aramburu issus du coup d’état de 1955. Mais l’ombre de cette dictature ne planera qu’à peine sur une moitié du livre et encore ce n’est pas l’oppression à laquelle on pouvait s’attendre. En fait, l’oppression ce sont surtout les Antiquaires qui la subissent : obligation de se terrer pour vivre, obligation de vivre seul pour ne pas se mettre en danger, impossibilité de tomber amoureux sous peine de mettre l’autre en danger… La soif primordiale est une histoire de vampire transplantée dans un pays plus exotique que la traditionnelle Transylvanie de Dracula. Je ne suis pas fana de ces histoires de vampire et j’avoue que cette partie ne m’a pas véritablement passionné, malgré l’omniprésence du milieu des libraires. Je pensais, après la lecture du quatrième de couverture, trouver une omniprésence de ce ministère de l’Occulte. Or ce dernier est malheureusement occulté un peu avant la moitié du livre comme je l’ai dit plus haut. Par contre j’ai aimé ces déambulations dans cette Argentine des années cinquante, pays en plein marasme économique et politique. Le style d’écriture nous incitant à ce vagabondage nocturne, dans les pas feutrés du héros, dans les quartiers populaires en quête de boisson pour cette soif inextinguible. J’ai aimé aussi cet amour impossible pour Luisa et cette passion destructrice de Celina. Deux femmes qui compteront dans la vie du héros. Malgré les qualités indéniables d’écriture de Pablo de Santis et les balades dans Buenos Aires, je n’ai toujours pas adhéré aux histoires de vampires. Un livre qui toutefois est agréable à lire, mais ce n’est pas ma tasse de sang………

    19/01/2016 à 11:04 1

  • Le Système D

    Nathan Larson

    6/10 "Je ne suis personne, je réponds. Je suis un **** de mauvais rêve." Des bribes de vie, des réflexes venus d'ailleurs... qui est vraiment Dewey Decimal? Dernier gardien de la bibliothèque municipale où il a élu domicile après la catastrophe? Névrosé obsessionnel, mysophobe solitaire et drogué ou hypocondriaque conditionné? Inconnu sans passé désormais homme lige du procureur d'un New York ravagé par les pandémies, les attentats et autres machinations? "Tu n’existes pas. Tu n’apparais dans aucun registre." Sa vie semble avoir débutée le 14 février, avant rien! Mais Dewey n'en a cure tant qu'il a sa clé, ses cachets et son produit antiseptique, pour le reste il suit le système et improvise, le reste du temps il lit et classe les livres de la bibliothèque. Mais quand le procureur Rosenblatt le convoque pour une nouvelle affaire, sa vie va prendre une autre dimension. Nathan Larson nous livre un premier roman intéressant, mélangeant les genres et les humours pour le plus grand malheur de Decimal. Un héros tout droit sorti d'une superproduction, toujours touché mais jamais mort. Qu'importe, Decimal dégage une certaine empathie, un vétéran paumé, privé de passé et qui ne soucie guère du présent souffrant de nombreux TOC. L'auteur nous immerge dans un New York abandonné entre mafia ukrainienne et men in black. Un thriller inqualifiable tant les références y sont multiples, mais une lecture agréable.

    19/01/2016 à 11:02 3

  • Boléro noir à Santa Clara

    Lorenzo Lunar

    9/10 Il est des liens plus forts que le sang. Naître à El Condado, c'est lier un pacte pour la vie et le porter à jamais dans son cœur et sa chair. On ne fuit pas ce barrio, on le quitte pour un aller-retour sans espoir ou on lui tourne à jamais le dos. « Vivre dans ce quartier, ça te fout les boules », répète Léo Martin comme un leitmotiv envoûtant, oppressant, telle une lente vérité qui s'insinue, s'enracine chaque jour un peu plus. Habiter El Condado, c'est accepter le silence des amis, les regards suspicieux, l'ignorance de ce qui se passe chez le voisin, chez sa mère. Léo Martin y est né, il y vit encore. Aujourd'hui, flic dans son quartier, le passé, la vérité et la suspicion vont le rattraper le temps d'une enquête. Le temps de retrouver l'assassin du vieux Cundo. Jadis mentor de Léo et de toute une bande de gamins. Le cadavre du vieil homme gît le crâne défoncé, dernier témoin des illusions d'une jeunesse devenue adulte dans un Cuba en crise. Face aux uniformes, les témoins s'effacent, les portes se referment, même les amis d'hier semblent fuir. Mais El Condado est une geôle, le cœur pauvre de Santa Clara qui rythme les pas de Léo vers la révélation. Boléro noir à Santa Clara se déroule comme une lente pulsation, une terrible brûlure d'un vieux rhum. Lunar revisite un classique du genre, le policier version Agatha Christie. Mais la force de l'auteur réside dans sa personnification du barrio et de son ambiance. On savoure langoureusement cette histoire sous une chaleur accablante, on s'attend à fouiller les vices de son voisin, déceler les combines lucratives . Lorenzo Lunar interagit allègrement entre ses héros, à savoir Martin et El Condado. Ce dernier dirigeant le boléro dans une moiteur étouffante. Plus qu'un remarquable immersion dans un Cuba misérable, un mano à mano entre un homme désabusé et sa terre plus destructrice que nourricière. Un premier volume magistral.

    19/01/2016 à 11:00 1

  • Cry Father

    Benjamin Whitmer

    8/10 « L'essentiel de ce que tu as en tête, c'est que ta vie peut s'interrompre à tout instant » (page 265), alors qu'en plus rien ne semble le retenir, Patterson se perd dans des brouillards d'alcool, de cocaïne et de violence. En dehors de ces instants-là, seul la vue du massif des Blanca semble apaiser ses souffrances, mettre un baume sur ses plaies. Solitaire, la vie l'a abandonné le jour où il a du se résoudre à enterrer son fils Justin. Dans ce Colorado sauvage, la bagarre et une force invisible le poussent vers un gouffre sans fonds, où une main tendue l’entraîne dans ce dérapage inexorable. Junior contemple le monde, un monde putride comme l'orbite de son œil vide. Il a choisi pour exister de s'exclure du système, prouver à lui même et à son père que « rien s’arrête, jamais. Et rien ne se soigne parce qu'il n'y a rien à soigner » (page 315). Ensemble, ils vont chercher une raison à leur déchéance, descendant chaque jour plus bas dans les affres du morbide, dans des zones mortifères. Des virées comme des rails de coke qu'on aligne jusqu'à l'extinction finale, des bagarres comme autant de gueules de bois toujours plus douloureuses, laissant une nouvelle scarification à leur détresse. Junior et Patterson n'ont rien de commun, seul l'amertume d'une vie qui ne leur appartient plus, qui ne leur ressemble pas va les souder dans un rodéo dangereux. Une cavalcade où plus personnes ne comptera pour eux, une descente sur fond d'invective de Brother Joe, de complots politiques et d'Amérique en plein marasme.

    Benjamin Whitmer se complaît dans une escalade de violence, de drogue et d'alcool comme autant de cachets pour soulager les maux, d'anti-dépresseur pour oublier l'indicible douleur de la vie. Une écriture répétitive et lente qui s'infuse, s'insinue dans les veines pour troubler les sens et accepter cette férocité gratuite. Une fausse lenteur pour une existence indigne, pour accentuer ces questionnements infinis d'enfants abandonnés par des pères alcooliques, sur les problèmes relationnels. Des êtres paumés, erratiques, victime de leur vie et dont l'unique résistance se limite à survivre sans espoir d'un lendemain parce qu'« il n'est pas nécessaire d’être particulièrement malheureux pour se tirer une balle (...). Une vie ordinaire, c'est largement assez » (page 190).

    19/01/2016 à 10:50 7

  • Frank Sinatra dans un mixeur

    Matthew McBride

    10/10 Un polar déjanté avec Frank Sinatra ça vous dit? Non pas le célèbre crooner himself mais un véritable crotteur et leveur de patte sur tout ce qui traine accessoirement. Comme d'habitude me direz-vous, vous connaissez la chanson! Et si je rajoute un cambriolage en camionnette de boulanger, alors-là on est dans le pétrin! Une dose d'hémoglobine, pas beaucoup, à peine 30 litres par personne, un ex-policier devenu détective qui outre une adoration sans bornes pour un york (terrier attention pas n'importe lequel non plus) , ne voyage jamais sans sa tronçonneuse préférée, ça peut toujours servir si on a pas d'ouvre-boîte. Bon le personnage est aussi un peu accro à la bière juste une ou deux... glacières par jour, aux médocs (ben quoi c'est bon pour la santé!). Un junkie intelligemment nourrit à channel discovery aussi doué pour l'orthographe que Dumbo pour le tricot, un tueur à gage angliche trop la classe et son acolyte qui répond au doux surnom de Sans couilles mais n'allez pas vérifier un bon conseil, le dernier à être passé entre ses mains à fini en kit playmobil. Un dealer aux fesses carrées à force de squatter les bancs du club de striptease local normal à Saint-Louis, le roi de la cambriole, et le flic intègre ex-amish de la période post witness celle qui a été élevé au sein d'Harrison Ford, moins généreux que celui de Kelly McGillis on en convient, mais pour un flic le plus important c'est la testostérone non! N'oublions pas le principal le magot de la banque celui qui ferait jouir oncle picsou de plaisir convoité pêle-mêle par notre junkie illettré, l'angliche et son eunuque rois de la torture et du finger au doigt de pied fait maison, les roi de l'amphet et notre private et la police bien entendu!

    Matthew McBride nous délivre un premier roman jubilatoire et loufoque mené tambour battant, certes cela peut paraître glauque dans la lignée d'un Reservoir dogs ou d'un Pulp fiction, mais l'exagération à outrance fait passer la violence le doigt de pied dans la bouche. Des personnages stéréotypés à outrance, un détective qui est à la fois le bon, la brute et le truand à lui tout seul et vous obtenez un moment de bonheur intense, que n'envierai pas notre Dumbo qui se bat depuis le début de la critique avec son bonnet en laine.

    19/01/2016 à 10:48 1

  • Fin de mission

    Phil Klay

    9/10 Ils avaient dix-huit, trente ans ou plus. Ils étaient pleins d'espoirs ou sans avenir. Partir là-bas servir leur pays, lutter pour le bien. Des idéaux en tête. Ils s'appelaient Jenks, Rodriguez, Weissert qu'importe, ils étaient des marines. L'Irak comme quotidien, la mort comme nuit, des odeurs de chair, des bruits de perceuses, des visages de gamins hantaient leurs rêves. Aumônier, réserviste, officier ou simple soldat, ils côtoyaient le danger, la peur des bombes, des embuscades; partageaient les pertes humaines, les mutilations, les larmes et les permissions. On leur avait promis la liberté dans leur M16, la reconstruction au bout des obus. Ils amenaient misère, destruction, désolation et séparation. C'étaient des hommes, des maris, des fils, ils sont revenus héros, martyrs...ou mort. Si la guerre les a marqué qu'en est-il du retour au bercail, revoir sa femme, se retrouver seul... Réorganiser une vie loin de l'horreur, de la suspicion permanente, du bruit et de la mort, c'est leur nouvelle mission, la plus difficile pour certains. Phil Klay nous livre un premier roman époustouflant sur un conflit contemporain. Ancien vétéran, il a connu l'Irak de prés, le soleil brûlant sous le casque, les regards vides de peur. Aujourd'hui il le retranscrit au sein de nouvelles, certaines sont dures mais elles sont toutes justes. Il retrace les états d'âmes, les combats internes de ces êtres déchirés, détruits pour certains, un regard lucide sans pathos, sans concessions, sans jugement car finalement et avant tout ce sont des hommes fragiles, des êtres humains perdus dans un combat, un pays qui ne leur appartient plus.

    19/01/2016 à 10:18 1

  • Au coeur de la mort

    Lawrence Block

    6/10 Quelque part dans un vieux troquet new-yorkais, un détective miteux et goguenard introduit une pièce de dix cents dans la fente du téléphone. Ses doigts défilent sur la roulette du cadran. Une sonnerie, deux sonneries, trois sonneries… Une voix féminine à l’accent britannique lui répond lentement. Portia Carr, prostituée spécialisée dans le sadomasochisme n’a pas l’air particulièrement heureuse de rencontrer Matthew Scudder. Matt Scudder, ancien flic démissionnaire, exerce ses talents comme détective. Il traine son mal être et ses souvenirs de bistrots en bistrots, accompagnant ses réflexions de café-bourbon ou de bourbon-café suivant son humeur. Miteux, goguenard, divorcé, il ne croule pas sous le poids des dollars. Mais pourquoi faut-il que tous les détectives américains revendiquent la misère, la désespérance et des problèmes familiaux à tout va? Pourquoi n’y a-t-il que Magnum qui roule en Ferrari ? Ici mon pauvre privé ne possède même pas une vieille carriole dont la porte vous reste entre les mains à chaque utilisation. Mais, voilà que la mort de Portia va changer la vie de Matt. Jerry Broadfield, grand défenseur de l’anti-corruption vient de tomber dans les griffes de ces soi-disant policiers véreux. La prostituée qui avait déposé plainte contre lui pour extorsion de fonds vient d’être retrouvée assassinée dans son appartement. Matt moyennant quelques poignées de dollars est appelé en renfort pour le sortir de là. Ce n’est pas qu’ils s’apprécient beaucoup, mais les deux hommes vont devoir cohabiter pour prouver la machination, car la police n’aime pas les délateurs et ne leur fera aucun cadeau ! Dans l’antichambre de la corruption, Scudder va devoir bluffer pour obliger ses adversaires à se dévoiler. Il ne reculera devant rien pour prouver l’innocence de son client, usant de ses relations et de ses charmes. Parviendra-t-il au cœur de la mort, là où la gangrène frappe?

    19/01/2016 à 09:42 1

  • Angel Baby

    Richard Lange

    8/10 Résister aux étoiles scintillantes, aux enseignes lumineuses clinquantes de liberté quand ici règne la loi du flingue et du dollar. Résister aux chants de l'Amérique quand on est la femme d'un influent narco et que là-bas à Los Angeles sa fille lui manque. Luz blessée dans son âme de mère n'a plus qu'un désir en tête quitter El Principe et Tijuana, quitter le luxe qui ne parvient plus à combler ses fêlures et passer la frontière. Malone ne vit plus, il a lâché la main du bonheur en pleine rue, cessant le combat au profit d’expédients. Pour subvenir, il est devenu passeur entre le Mexique et les Etats-Unis, jouant avec ses nerfs à chaque passage comme un ultime défi. Malone et Luz vont devoir voyager ensemble, apprendre à cohabiter quand les deux sont devenus prisonniers de leur solitude, de leurs cages et de leurs souvenirs. Mais si Luz a vider le coffre et le chargeur du colt avant de partir, c'est plus l'humiliation que le vol et la mort de ses employés qui chagrine El principe. Pour la punir il fait libérer El Apache et passe un contrat avec ce dernier afin qu'il la ramène, mais très vite l'argent du narcotrafiquant attise les convoitises. De vrais paumés de la vie et de la société, de belles voitures et des colts à foison, Richard Lange nous livre toute la panoplie du bon road thriller. L'intérêt n'est pas dans une intrigue dont on sent très vite les aboutissants, mais dans l'exploitation des faits et des personnages. Quatre héros qui ne maîtrisent plus les destinées de leur vie depuis belle lurette et qui palpent enfin une nouvelle issue, un autre dénouement à leur quotidien pourri de désœuvrement, de violence et de souffrances. Un roman qui vous happe...

    19/01/2016 à 09:29 1