La porte des enfers

4 votes

  • 6/10 En bref, Laurent Gaudé est un auteur que j'apprécie découvrir petit à petit. Si sa plume et la poésie qu'il met dans son oeuvre me plaisent énormément, certains choix dans ce titre me laissent perplexe et ne répondent pas à mes attentes. Je ressors de cette lecture très mitigée entre la complexité maîtrisée des sujets abordés et le décrochage fantastique qui gâchent les sentiments réels des personnages...

    17/06/2018 à 10:08 Riz-Deux-ZzZ (498 votes, 6.9/10 de moyenne) 2

  • 7/10 « Rends-moi mon fils, Matteo. Rends-le-moi, ou, si tu ne peux pas, donne-moi au moins celui qui l’a tué ! » (Page 61) Terrible phrase, lourd contrat pour Matteo De Nittis. Cette promesse faite à sa femme Giuliana changera le restant de sa vie. Naples, 1980. Matteo De Nittis se relève, une fusillade vient d’éclater à côté de lui, son regard se tourne alors vers son fils. « Pippo ? L’enfant ne répondit pas. Il se sentit pâlir d’un coup. Il se mit à genoux. Sa chemise était baignée de sang. Pippo ? L’air lui manque. Son fils ne bougeait pas, restait face contre terre, inerte. Pippo ? Il cria. Il ne savait que faire. Il cria. Parce qu’il ne savait pas comment empêcher ce sang qu’il aimait de continuer à se répandre sur le trottoir. Ses mains couraient sur le torse de l’enfant comme s’il essayait, sans y parvenir, de trouver la plaie et de l’empêcher de couler. Ses mains qui semblaient ne lui servir à rien parce qu’il ne savait pas faire les gestes utiles. » (Page 27) Une mort injuste. Cruelle. Intolérable. Pippo avait six ans ! A partir de cet acte mortel, Laurent Gaudé va sillonner les différents chemins qui mènent au deuil, guidant le lecteur dans ces entailles, ces déchirures, ces plaies qui jamais ne cicatrisent. Parce que la mort fascine, parce qu’elle fait mal, la réaction sera violente. La cruauté sera proportionnelle à la souffrance, à l’injustice et la scélératesse de cet assassinat. Accablé, démoli, Matteo erre le soir dans les rues de Naples au volant de son taxi. Giuliana refuse cette mort, se parjurant, reniant sa maternité et allant jusqu’à violenter les symboles de sa féminité. De sa souffrance se dégage une force effrayante, une personnalité machiste et dure. Pour eux, la vie s’est arrêtée dans cette rue de Naples, leur couple va se disloquer en même temps que disparait leur point d’union, leur ancrage. « Ils nous ont tués, Matteo, ajouta-t-elle. La mort est-là. En nous. Elle contamine tout. Nous l’avons au fond du ventre et elle n’en sortira plus. » (Page 68) Cette mort omniprésente dans le livre. Cette lente agonie qui suinte au travers des personnages. Que ce soit le prêtre, mort pour son église, que ce soit Grace qui ressuscite chaque soir en se confessant, ou encore le Professore dont les travers sexuels ont tué sa carrière, tous ne sont plus que des ombres, des fantômes de leurs rêves, de leurs conditions. Et il y a Pippo. Pippo qui a hérité de la violence, de la mémoire de sa mort et de la souffrance de ses proches. Pippo qui vit attendant l’heure de la vengeance et du retour. Retour de son père, retour de la vie pour tous ces personnages accidentés. Mais hélas, je suis resté en rade devant les portes de l’enfer. Autant, étudiant je m’étais régalé dans les pas de Dante parti en quête de sa Béatrice dans la Comédie. Ici, je n’ai rien ressenti dans cette descente, l’écriture par trop onirique ne m’a pas convaincu. J’ai préféré retenir le dernier cadeau de Matteo à son épouse, cette ultime preuve d’amour, la réalisation de sa promesse : lui ramener Pippo en plongeant dans ce royaume d’Hadès. Certes, Laurent Gaudé ne recherche pas une représentation religieuse de ce lieu et de ce fait il s’éloigne un peu de Dante. Mais cette interrogation sur le rôle des âmes, sur sa vision des enfers jonchés d’aphorismes m’a laissé pantois. Ce roman va droit au but, parce que nous avons tous côtoyé la mort à un moment donné de notre existence, nous avons tous laissé une partie de nous dans ces disparitions et de ce fait nous serions parfois prêt à tout pour aller les rechercher. Mais peut-être parce que j’ai fréquenté trop tôt et trop souvent cette mort, je n’ai pas eu envie de suivre Matteo dans ces limbes.

    19/01/2016 à 11:51 LittleWing (21 votes, 7.8/10 de moyenne) 2

  • 8/10 Un très bon roman; une jolie plume, des chapitres courts. Deux époques retracées pleines d'émotion et de mort.

    19/04/2012 à 16:08 Emil (460 votes, 7.3/10 de moyenne) 1

  • 9/10 Le style Gaudé dans un polar : le rêve !! Phrases courtes, percutantes. De la poésie aussi, même et surtout quand il fait sombre. La scène de la fusillade est prodigieuse d'intensité, donnant son élan au reste du bouquin en plombant l'ambiance dès le départ pour aboutir vers une issue riche en reflexion sur la mort et ce que l'on en fait quand on est encore en vie. Seriez vous prêt à donner votre vie en échange d'une autre ? Du grand roman, gros plaisir.

    09/03/2009 à 12:52 Xave (233 votes, 6.9/10 de moyenne) 2