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130 votes

  • La Tristesse du Samouraï

    Víctor Del Árbol

    10/10 Les premiers mots qui me viennent à l'esprit à peine ce livre refermé sont: brillant, passionnant, à lire impérativement, ciselé de main de maître, œuvre littéraire!

    D'entrée de jeu, j'ai été saisi par le style de la traduction de ce livre que je considère assurément comme une œuvre littéraire du 21e siècle. L'auteur nous fait voyager entre 1941 et 1981, dans la vie de plusieurs familles et citoyens espagnols, qui nous apprennent que notre présent se joue aussi dans le passé de nos familles. Pour moi qui n'ai de cesse de répéter à l'envi que nous ne sommes pas responsables des erreurs commises par nos ancêtres et par nos proches (maxime que j'ai encore répétée récemment dans diverses conversations privées), ce roman apparaît comme une véritable occasion de remise en question (mesurée) de mes sacro-saints principes! Et c'est bien une caractéristique qui fait pour moi d'un roman une œuvre inoubliable: quand le livre est capable de bouleverser mes évidences, quand il remet en question ce que je suis, ce que je pense, et que l'auteur distille des éléments de réflexion sérieux, étayés par une intrigue réalise... j'ai alors le sentiment d'être en présence d'un "grand" livre. En termes de qualités littéraires "objectives", je dois avouer que la manière fine qu'a del Árbol de mettre progressivement son récit en route, de poser ses personnages, de manier avec brio le contexte historique dans lequel ils évoluent, de décrire les gestes, les sentiments, les lieux, sans excès, mais avec une précision "immédiate" qui lui évite les redites... tout cela a produit en moi une véritable "réjouissance"!

    Il faut toutefois faire preuve d'attention dès le départ, afin de ne pas se perdre parmi les personnages qui constellent le récit. Il faut sans cesse garder à l'esprit les filiations, les affiliations politiques, les exactions de chacun... pour savourer pleinement la force de la plume de l'auteur.

    Le roman contemporain ne semble pas à même de nous livrer des monument tels ceux commis par Dostoïevski. Il est tributaire d'exigences commerciales que n'aurait certainement pas satisfait l'auteur de Crime et châtiment. Avec un livre tel que La Tristesse du Samouraï, on se prend à rêver de voir revenir le temps des grandes plumes, qui ont le talent de proposer des intrigues lisibles sur plusieurs plans. On peut suivre, simplement, les histoires familiales dans une Espagne en proie à ses démons. On peut aussi prendre pour fil conducteur les manipulations auxquelles se livre une poignée de partisans du franquisme... on peut par ailleurs savourer la mise en perspective de la figure du Samouraï et de ses codes d'honneur pour comprendre la complexité de ce récit...

    Vous l'aurez compris, La Tristesse du Samouraï est un de ces grands romans, que l'on se plaira sans doute à relire à un âge plus avancé... Un coup de cœur en ce qui me concerne!

    (il s'agit de mon premier 10/10 sur PP... à vrai dire je lui mettrais plutôt 9.5/10... il mérite plus qu'un 9, assurément)

    29/12/2016 à 18:10 12

  • Le Démon de la Colline aux Loups

    Dimitri Rouchon-Borie

    10/10 Un énorme coup de cœur!

    Duke vit une enfance immonde, éloigné du monde par ses parents, reclus dans "le nid" de sa fratrie. Brimé. Battu. Violé.
    Duke vit dans sa prison et écrit. Il s'écrit avec une conscience innocente, lumineuse, et fragile aussi.

    Le récit nous fait pénétrer au plus profond d'un sujet qui se construit, à travers une conscience qui s'exprime, qui s'étale, même. L'écriture est aussi saisissante que les faits. Duke y cherche un exutoire, une possibilité de se débarrasser du Démon, sans doute. Quel sera le prix de sa rédemption?

    Le roman plaira assurément aux lecteurs soucieux de la qualité littéraire des romans qu'ils dévorent. Rouchon-Borie "tient" son style de bout en bout. Il laisse Duke parler, ou plutôt, écrire, s'écrire. Il y a assurément plusieurs strates et portes d'entrée: la simple succession des faits relatés, l'enfance terrible de Duke, son rapport au bien et au mal, la place du style narratif dans l'histoire des récits autobiographiques, une manière "d'expliquer" le crime... chaque porte d'entrée permettra à mon avis à un large public de s'approprier ce récit, et d'y revenir ultérieurement.

    Je ne suis pas sorti indemne de cette lecture. Elle a tendance à "renvoyer à soi-même", à fouiller les recoins de notre esprit, à interroger notre rapport à la justice, à sensibiliser à l'importance du temps long de la construction de soi, à "comprendre" une certaine violence...

    Ce premier roman de Dimitri Rouchon-Borie, connu comme chroniqueur judiciaire, fera indubitablement date. L'accueil enthousiaste qu'il a reçu dans la presse est amplement justifié selon moi!

    23/03/2021 à 17:18 10

  • Né d'aucune femme

    Franck Bouysse

    10/10 Dans une époque sans doute située à la charnière des 19e et 20e siècles, dans sa petite église, le père Gabriel apprend, en confession, des informations assez troublantes quant à une femme décédée à l'asile proche. Celle qui se confesse à lui prétend avoir laissé sous la robe de la défunte les "carnets de Rose", qu'elle le supplie d'emporter lorsqu'il viendra bénir son corps. Il promet!
    L'homme d'Église, troublé, tiendra sa promesse, profitant d'un moment de solitude avec la disparue.
    Au cœur de la nuit, Gabriel se plonge dans le récit de Rose, qu'il recopie patiemment, et qu'il livre au lecteur...
    Rose, aînée d'une famille de quatre filles, vivait à la ferme, avec son père et sa mère. Ayant fait le deuil de la possibilité d'avoir un fils, ceux-ci exploitent tant bien que mal leur lopin de terre. Mais les ressources se font rares, ils subsistent à peine. Aussi, autour d'une table de bar, le père en vient-il à commettre l'innommable en allant jusqu'à vendre sa fille Rose, 14 ans, au Maître des Forges, contre une somme qui devrait permettre à sa famille d'assurer sa subsistance. Rose entame alors une nouvelle vie, au service d'un homme et d'une vieille, passant outre les mise en garde d'Edmond, jardinier des Forges, qu'elle rencontre dès son arrivée dans le domaine. Prise au piège, Rose se trouve alors rapidement sous l'emprise du Maître et de sa mère. L'innommable se trame, ne lui laissant aucune échappatoire. C'est la souffrance qui entre alors en scène...
    Il est des romans que j'ai peine à refermer après en avoir lu le dernier point. Des romans dont je voudrais qu'ils ne s'arrêtent pas, tant ils me bouleversent. Tant ils ont a dire de l'humaine condition. Tant leur écriture est travaillée, réfléchie. Tant le récit laisse entendre l'intimité des voix de ses narrateurs. Tant leurs mots peine à cesser de résonner une fois le livre refermé. Malgré leur dureté. Malgré l'horreur.
    Franck Bouysse m'a ébloui par son style. M'a touché par la sensibilité avec laquelle il est parvenu a créer chacun des personnages et à leur donner vie. À dévoiler leur plus profonde intimité, tout leur laissant aussi la grâce ou la lourdeurs de certains secrets; cela a provoqué en moi ce sentiment "d'épaisseur" envoutant, me procurant un authentique plaisir de lecture, au-delà de l'effroi.
    Le fond de l'histoire a quelque chose de sordide. Et elle serait "plate" voire "juste violente" (elle l'est "aussi"), si Franck Bouysse n'avait pas pris la peine de construire une mise en abyme qui permet de garder le souffle, de prendre distance. C'est le récit de Rose lu et recopié par le P. Gabriel que nous lisons essentiellement. D'autres narrateurs interviennent, qui mettent en perspective ce qui se trame. Je sais gré à F.Bouysse de proposer aussi de puissantes réflexions sur l'acte même d'écrire, sur la mémoire, sur ce que nous pouvons faire de notre passé et, bien, évidemment, sur la souffrance, sur son absurdité, et sur l'espérance, aussi... je demeure à présent troublé par cette phrase de Marc, citée par Gabriel: "le fils de l'homme doit beaucoup souffrir, [...] il doit être tué, s'il veut ressusciter. Il n'y a rien à ajouter".
    Un coup de cœur total!

    03/10/2019 à 07:44 10

  • 120, rue de la Gare

    Léo Malet

    9/10 J'ai lu ce Malet il y a déjà bien longtemps (15-20 ans...) et, si je ne garde pas toute l'intrigue en mémoire, j'en conserve le sentiment d'un polar bien fichu, de personnages étranges rencontrés par Nestor Burma... Malet est un auteur qui mérite plus qu'un petit détour... un grand du polar! Merci à Janjak pour la "piqûre de rappel" :-)

    15/01/2018 à 20:33 7

  • Alex

    Pierre Lemaitre

    9/10 Alex (ou Nathalie? ou...? ou ...?) ... qu'en dire? Je l'ai dévoré (le livre!)! Pierre Lemaître nous démontre toute sa maestria dans l'art de mettre le lecteur sur de fausses pistes, de jouer avec nos "sentiments". Alex, à plaindre, on veut tantôt l'aimer, la sauver, tantôt la détester, la juger, lui faire payer. On pourrait regretter une écriture, une stylistique moins recherchée que dans Travail soigné, premier opus de la série "Verhoeven". Mais j'ai personnellement "reçu" Alex comme un roman plus "percutant", plus "déstabilisant", qui interroge le mal que l'on peut commettre, qui ne le "justifie" pas, certes... entre les faits de maltraitance subie et la vengeance, quelle voie suivre? Un roman qui interroge sur la solitude dans laquelle une victime peut s'enfermer, sur le jeu de la manipulation d'un enfant, sur la violence sexuelle intra-familiale, tellement plus fréquente qu'on ne le pense. Un sujet brûlant d'actualité, une écriture maîtrisée pour un roman policier (j'y tiens, pour moi, ce n'est pas un "thriller") au-dessus de la moyenne! À lire, et "à méditer", longuement...

    04/12/2015 à 09:47 8

  • Arrêtez-moi là!

    Iain Levison

    9/10 J'ai littéralement dévoré ce petit bijou dans le monde du roman noir! Comment se faire accuser du pire, simplement parce qu'on a mis les doigts là où il ne fallait pas juste pour vérifier quelque chose et qu'on a voulu rendre service à deux jeunes filles éméchées en les ramenant chez elles? Comment survivre à l'emprisonnement, garder la tête haute - ou perdre ses raisons de vivre -, après avoir été injustement malmené par des policiers pas très pros, qui ont pourtant la légitimité suffisante pour vous faire condamner? Comment continuer de regarder les gens "en face" alors que les médias vous ont mis au gibet, que votre avocat commis d'office est un mollusque, que la famille de la victime fait tout pour croire que vous êtes bien le kidnappeur et l'assassin? Comment vivre dans une société où, en définitive, c'est l'attrait du fric qui pourrait vous rendre votre liberté? Est-il possible de prouver tout simplement son innocence alors que tout le monde autour de vous est convaincu du contraire?
    Un livre rempli de cynisme et d'ironie à l'égard de la société américaine, magnifiquement bien traduit (on dirait qu'il a été écrit en français, comme le souligne Xave dans sa critique), et non dénué de l'humour décalé qui caractérise son auteur. À découvrir sans hésiter!

    19/12/2015 à 21:59 3

  • Au-delà du mal

    Shane Stevens

    9/10 Cet opus est un véritable bijou dans le genre! Un des grands romans de la veine "serial killer" sur fond de débat sur la peine de mort aux USA. Une documentation soignée, une traduction plutôt agréable à lire, une angoisse qui croît à chaque ligne... des descriptions fouillées et saisissantes de la psychologie de Bishop et de son mode opératoire. L'enquête progresse, bute, est sur de fausses pistes, analyse chaque détail dans tous les sens... Vraiment un tout grand thriller! A lire sans hésiter par les lecteurs patients et qui aiment que le suspense dure longtemps! Il se lit à la manière dont on devrait manger des Chokotoff: laisser "agir" longtemps, longtemps, longtemps et faire durer le plaisir...

    30/09/2015 à 09:14 5

  • Bull Mountain

    Brian Panowich

    9/10 J’ai ouvert Bull Mountain après en avoir lu quelques critiques on ne peut plus élogieuses sur Polars Pourpres. Intrigué par ce qui semblait constituer un petit phénomène littéraire au rayon des romans noirs, je me suis lancé sans a priori (sinon celui que les histoires de cowboys et de trafic ne sont pas toujours les mieux réussies). Le moins que je puisse dire, c’est que je n’ai pas du tout été déçu. Le décor, qui s’étend de la Géorgie du Nord au nord de la Floride (Jacksonville). La Géorgie est particulièrement connue comme ce qui fut, historiquement, un des états les plus ségrégationnistes de la confédération sudiste (la Géorgie fut d’ailleurs le dernier état sudiste à rejoindre l’Union à la fin du 19e siècle). C’est plutôt un décor qui inspire la poisse et la haine, où la peine de mort est toujours pratiquée (attention aux assimilations évidemment, ne me faites pas dire que sa population en est infréquentable!)…

    C’est sur une sinistre montagne du Nord que le clan Burroughs règne. Enfin, ceux qui restent fidèles à l’héritage de plusieurs générations d’hommes enclins à une forme toute particulière de protectionnisme territorial. C’est de là haut que les Burroughs trafiquent leur came et règlent leurs comptes à ceux de la fratrie qui accepteraient de se plier aux lois de l’État. Il y a quelque chose d’animal dans le comportement des «purs» Burroughs. Ils reniflent leurs adversaires, ils fonctionnent à l’instinct, ils se comportent comme des loups en meute. Gare à ceux qui prendraient un autre chemin.

    Bull Mountain est résolument un roman aux strates multiples: c’est une saga familiale, qui s’étale sur au moins trois générations successives. C’est le récit de relations fraternelles tendues (l’image de Caïn et Abel, évoquée dans certaines critiques anglophones et en 4e de couverture, est adéquate), c’est l’histoire de fils et de pères qui s’entre-déchirent. C’est aussi la mise en scène d’une forme très particulière de vengeance, mais aussi celle d’un trafic d’armes et de came, celle d’une bande de motards infréquentables, celle d’une prostituée battue pour vouloir en faire trop auprès d’un client… les scènes se succèdent, les face à face sont particulièrement soignés et visuels, on entend et on voit les protagonistes et la tension qui les animent, aucune concession n’est faite aux personnages, on suffoque presque à la lecture de l’enchaînement de violence. On est pris de pitié pour certains, on comprend parfois le comportement crasseux des autres, on croyait savoir ce qui était juste, mais tant de poisse a le don de faire perdre certains repères ou de déplacer le curseur. La violence n’est pas délivrée gratuitement par l’auteur, il veut montrer quelque chose, il entend nous dire que la violence est, pour certains, fondatrice d’une histoire, d’une lignée. Que notre histoire se débat avec cette animalité violente qui nous constitue, que notre histoire est toujours rattrapée par cette violence. On est pris entre vengeance et perspective de «rédemption», entre innocence et culpabilité, entre justification de la violence et nécessité d’une paix durable.

    Le récit est découpé en chapitres relatifs à un moment spécifique de l’histoire du clan Burroughs, chapitres qui ne sont pas organisés selon l’ordre chronologique des événements. Si cette présentation peut avoir quelque chose de déroutant au début, le lecteur s’en accommode rapidement et assimile facilement la quantité importante d’intervenants. L’alternance est pensée de manière intelligente et force est de souligner qu’elle maintient un vrai suspense de bout en bout.

    Je regrette – c’est ma seule réserve – comme cela arrive parfois, le côté un peu trop caricatural de certains personnages, mais quand on est aux prises avec une histoire qui fait appel à une telle poisse, il est compliqué de ne pas tirer les traits de ses héros dans des directions diamétralement opposées.

    Avec Bull Mountain, Brian Panowich fait une entrée fracassante sur la scène littéraire. Si l’on se souvient qu’il s’agit là d’un premier roman, assurément, il s’agit d’une exception du genre! À n’en pas douter, Bull Moutain a tous les atouts pour devenir un classique de la littérature noire.

    18/05/2016 à 10:19 12

  • De Cauchemar et de feu

    Nicolas Lebel

    9/10 Je compléterai cet avis lorsque j’aurai un peu plus de temps ;-) mais je dois avouer que ce 4e opus du Sieur Lebel m’a littéralement soufflé... l’auteur maîtrise parfaitement son sujet et son écriture. La documentation concernant le conflit nord-irlandais est excellente, la description de notre capitaine gagne assurément en maturité. De bout en bout, j’ai adoré cet quasi parfait polar, qui appelle énormément de questions quant à notre société, à nos démons, à la nature humaine. Un cocktail d’un rare niveau d’excellence, dont je forme le vœu qu’il soit traduit en anglais et diffusé outre-Manche... merci Nicolas Lebel, de m’avoir ainsi fait vibrer!

    26/12/2020 à 09:16 8

  • Débâcle

    Lize Spit

    9/10 J'ai hésité entre 9 et 10...
    Une pure merveille du roman noir. Sombre à souhait.

    Servi par une écriture fine, par une intrigue bien amenée, par une traduction élégante (bravo à Emmanuelle Tardif!), ce roman, d’une noirceur presque rebutante, rend compte des émotions et du parcours d’Eva, Pim et Laurens avec patience.
    Il faut le lire, il nous éclaire sur l’adolescence, peut-être sur les adolescents que nous avons été, sur ceux que nous côtoyons ou formons.
    Un roman ne donne jamais la réponse, mais je me prends à considérer Débâcle comme une perle de l’introspection adulescente (« u » intentionnel) version 21e siècle.
    Ça questionne, ça remue, ça bouleverse, ça prend aux tripe, ça noue la gorge... être témoin de ce qui se trame ici donne quasi envie de convertir l’impulsion qui nous habite en un acte de protection ou de confrontation avec certains protagonistes.
    À découvrir, en sachant que l’écriture et le récit ne laissent pas indemnes, qu’ils écorchent, qu’ils blessent presque... et qu’ils sont habités par cette noirceur réaliste qui constitue selon moi une des essences du roman contemporain. Nécessaire et urgent!

    07/09/2018 à 15:19 10

  • Fatherland

    Robert Harris

    9/10 Un excellent polar, on baigne dans l'histoire des années 39 à 64, dans une Allemagne qui aurait vaincu! Un u-chronie rondement menée, hautement recommandable!

    26/10/2016 à 07:26 7

  • Germania

    Harald Gilbers

    9/10 [...]
    Quasi tout est excellent dans ce magnifique opus d’Harald Gilbers, que je ne peux que recommander tant aux passionnés de la 2e Guerre Mondiale qu’à ceux qui voudraient en savoir un peu plus, tout en passant de bonne heures de plaisir à tâtonner avec Oppenheimer à la recherche du tueur de ces dames et de ses raisons d’agir… Un excellent roman policier !

    31/03/2016 à 08:08 8

  • L'Affaire Léon Sadorski

    Romain Slocombe

    9/10 Dans le registre du polar, le rayon "historique" éveille souvent mon attention et mon avidité. Bien des romans ont été écrits sur cette période sombre des années 40. Romain Slocombe a réussi le pari de parfaitement intégrer son récit dans l'atmosphère d'une époque qu'il rend avec précision. Il fait coller l'intrigue au plus près de faits historiques. Quel travail, quelle maîtrise! Cela donne envie de se plonger dans la littérature historique consultée par l'auteur pour bâtir son histoire.
    Voilà donc un roman particulièrement soigné, et parfaitement accessible au plus large public (il vient de sortie en poche, n'hésitez pas).
    Attention, point d'humour dans ce livre, l'auteur "déterre" des éléments liés à la "mauvaise conscience" de la période collaborationniste. Le héros, dégoûtant et intriguant, se devait de rester "sobre". Nullement polémique, ce livre pose les jalons d'une lente prise de conscience de ce que fut, dans les faits, la collaboration. Loin de dresser un portrait stéréotypé, Slocombe se parfait dans le récit d'une tranche de vie qui se cherche.
    La suite (L'étoile jaune de l'inspecteur Sadorski) est dans ma PAL...

    14/09/2017 à 07:42 10

  • L'Étoile jaune de l'inspecteur Sadorski

    Romain Slocombe

    9/10 J’avais adoré le premier volet. Ce deuxième volet de l’histoire de Sadorski confirme tout le bien que je pense de Slocombe. Entre le polar et le roman historique, Slocombe nous livre un récit brillant, à la documentation extrêmement maîtrisée. Il parvient une nouvelle fois à convaincre du caractère détestable de son personnage principal, tout en livrant un témoignage sensible et parfaitement balancé de la terrible réalité des Juifs de France durant la 2e Guerre Mondiale.
    La rafle du Vel d’Hiv est relatée avec réalisme, horreur et sensibilité aussi.
    Ce livre est bien « au-delà » du polar, il réveille notre conscience, titille notre rapport à l’histoire.
    Je serais heureux de remercier de vive voix ce tout grand auteur français!

    26/02/2021 à 18:37 9

  • La mort n'oublie personne

    Didier Daeninckx

    9/10 Un roman qui ne se résume pas à la simple narration d’une histoire fictive – mais une histoire tellement crédible. Un livre qui, nourri d’une connaissance de l’histoire, propose une lecture des faits au lecteur et l'invite à la réflexion et à prendre position. Un polar où l’on n’est certes pas pris dans une atmosphère «psychologique», ou de tension permanente. Mais un roman tel que j’aimerais en lire au quotidien!

    26/04/2016 à 09:34 8

  • La pâle figure

    Philip Kerr

    9/10 Un polar historique qui, une nouvelle fois, enchantera le lecteur! Relire la période avant 40 avec le regard de Bernie Gunther est à la fois hilarant, grinçant d'humour décalé, et passionnant, tant on sent la maîtrise que Kerr a de l'histoire de l'Allemagne nazie. Comme d'autres, je l'ai encore préféré à L'été de cristal, tant l'intrigue policière est encore mieux menée à mon goût. A conseiller sans hésiter.

    13/09/2016 à 08:28 9

  • Le Secret du treizième apôtre

    Michel Benoît

    9/10 Je l'ai lu il y a quelques années et j'en garde le souvenir d'une intrigue où les thèmes religieux sont amenés avec finesse et sur fond d'une très solide connaissance du sujet (exégèse, histoire des religions, etc.). Nettement au-dessus d'un Da Vinci Code par exemple.

    25/05/2016 à 11:41 2

  • Lykaia

    DOA

    9/10 [INTERDIT AUX MOINS DE 18 ANS, non par pudibonderie, mais parce que!]
    DOA nous livre un récit, sinon digne du Divin Marquis, tout au moins digne d'une des plumes les plus excitantes de la littérature noire d'expression française.
    DOA a produit des œuvres dignes d'un géant. Pukthu reste son chef-d'œuvre actuel.
    Avec Lykaia, DOA nous "prouve" que son talent littéraire a un potentiel sans limites....
    Mêlant le sexe le plus cru et le plus explicite qui soit (on voyage entre bites, chattes, culs, vagins... et rien ne nous est épargné), l'univers du BDSM, le gore, le thriller, mais aussi les symboles, la mythologie, la passion et le conte amoureux, Lykaia n'est résolument pas un livre pornographique. Il ne vise pas une description "complaisante" d'actes sexuels en vue de provoquer le plaisir physique - la satisfaction sexuelle - du lecteur... (libre au lecteur d'en prendre, mais je passe mon tour). Que cela soit clair, sinon on passe totalement à côté du livre me semble-t-il. DOA n'est pas Dorcel en somme. Ni Woodman.
    Et Lykaia n'est pas là pour nous faire passer un moment de plaisir, même s'il faut reconnaître que les première pages invitent à un certain voyeurisme.

    [CERTAINS ELEMENTS CI-DESSOUS POURRAIENT RESSEMBLER À DU SPOIL (mais sans ça on ne dit pas grand-chose du livre)]

    On suit l'aventure romantique et parfois touchante du Loup et de la Fille, à Berlin, Prague, Venise. On entre dans l'esprit du Loup, chirurgien, et père. On découvre sa quête du plaisir, qui passe par la souffrance. On cherche à comprendre si celle-ci vise une rédemption, si elle ne poursuit qu'elle-même, si quelqu'un doit nous y accompagner, et si l'on doit y plonger seul ou en société. Résolument, pour le Loup, la Fille agit comme une voie d'accès, comme une fée qui le mène là où il semble vouloir aller. Pour libérer "sa" fille? Pour s'en libérer? Pour retrouver son "ex"? Pour la séduire? S'en défaire? Jusqu'à la mort?
    Ce roman bouscule, fait trembler, nous questionne, jusque dans nos fantasmes les plus inavouables (pour reprendre à ma sauce une idée de la chronique disponible sur Nyctalopes).

    Si vous entamez la lecture, ne vous découragez pas du simple fait de la violence - réelle et qui fut pour moi une épreuve de lecture par moments - et poursuivez jusqu'à l'ultime ligne avant de rendre votre verdict.

    Sans être "le" chef-d'œuvre, Lykaia a tout pour offrir à un public averti et majeur - et prêt à embarquer - un récit tout à fait singulier, aux strates plurielles mélangeant le conte, l'amour, le sexe et le thriller, en dehors de certains sentiers archi-battus. C'est cela qui me plaît dans la littérature noire contemporaine.




    21/06/2019 à 11:02 7

  • Mr Mercedes

    Stephen King

    9/10 Avec Mr Mercedes, Stephen King se profile, plus que jamais, en véritable maître de l'écriture et de la narration. Au départ d'un fait divers tragique, mais à la trame simple - une Mercedes qui fonce dans une foule de personnes à la recherche d'un emploi - King nous embarque dans une enquête fort soignée, à la recherche de "Mr Mercedes". Point de surnaturel ni de fantastique ici. Un récit qui nous fait découvrir, avec finesse, la psychologie des personnages principaux: Mr Mercedes lui-même, Bill Hodges "l'Off.-Ret." qui "mène" l'enquête, Jerome Robinson, Holly Gibney, Janey Trelawney... chaque portrait est bien trempé, bien pensé, bien cadré...

    Certes, d'aucuns pourraient reprocher à King de ne nous proposer qu'un "simple" roman policier, dans la lignée de ce qui se fait aux States depuis quelques décennies. Qu'est-ce qui fait la force particulière de celui-ci? Personnellement, j'ai été séduit par le mélange polar/roman noir (la situation familiales de Mr Mercedes est d'un abject manifeste, la ville du Midwest américain où se déroule l'intrigue n'est pas au top de sa forme, un inspecteur à la retraite qui vivote entre télé et alcool...), j'ai trouvé la manière de décrire les personnages remarquable, j'ai particulièrement été séduit par les différents rythmes de la narration, et toujours avec cette dose d'humour et de cynisme qui caractérise les écrits du King. Le chassé-croisé entre Bill et Mr Mercedes, les détours nécessaires pour en venir au but, sont "crédibles". On progresse "lentement", "à pas lents", vers le "meurtrier". Alors oui, il y a toujours l'élément qui fait que "tout bascule" et que l'enquête s'emballe, mais, contrairement à beaucoup d'autres polars du même style, j'ai trouvé la progression assez "continue", la rupture de continuité n'intervenant que petit à petit. Quand Stephen King se met à écrire dans un genre qui lui est moins familier, il parvient immédiatement au meilleur niveau.

    16/03/2016 à 09:49 10

  • Mygale

    Thierry Jonquet

    9/10 Mygale est un thriller absolument efficace ! En 150 pages, Thierry Jonquet réussit, en 1984, à proposer des personnages parfaitement campés, dont on ressent les émotions, à construire un récit où l’alternance des points de vue amène progressivement le lecteur à la découverte de la sombre machination dont Mygale est protagoniste. Relire Jonquet aujourd’hui nous rappelle qu’il n’est pas nécessaire d’écrire des « pavés » pour satisfaire les lecteurs les plus exigeants ! Si vous avez une mini soirée libre devant vous, faites-vous plaisir en (re-)découvrant cette véritable bombe littéraire, qui ravira tant les amateurs les plus avertis que les « néophytes ». Tout simplement excellent !

    04/07/2016 à 18:03 11