El Marco Modérateur

3587 votes

  • Des Hommes d'argent

    Patrick Hénaff, Tristan Roulot, Philippe Sabbah

    8/10 En s’achevant sur la phrase : « Je suis l’enfoiré qui vous a tous ruinés », voilà une BD qui, dès la première page, plante le décor. Franck Carvale travaille chez Visalis et propose des coups fumants en bourse à ses clients. Il vivote de son job, sans jamais vraiment bien gagner sa vie, jusqu’à ce qu’il croise M. Bilkaer, une rencontre qui va être déterminante. Une plongée sans concession dans le monde de la bourse, des traders, des ventes aux sommes colossales et aux risques abyssaux. Les explications sont suffisamment claires et didactiques pour que l’on comprenne (même en gros) les procédés utilisés pour se faire un maximum d’argent. Le graphisme est réussi, et j’ai bien aimé ce premier tome, dans l’air du temps, et qui sera probablement et malheureusement encore longtemps d’actualité.

    18/04/2020 à 15:23 1

  • Apprenti criminel tome 1

    Gosho Aoyama, Mayuko Kanba

    6/10 Une silhouette anonyme sort de la rame de métro et, au mépris des avertissements des autres usagers, se fraie un chemin dans le quartier Beika-Chô, le plus malfamé de Tokyo. Son surnom : Kris Minel. Un spin-off vraiment amusant de la série Détective Conan, où Gosho Aoyama reste au scénario, mais où c’est Mayuko Kanba qui prend le relais au dessin. Ici, c’est moins l’intrigue qui importe que l’humour, avec ce personnage visiblement malfaiteur (on le voit notamment dans les scènes qu’il s’imagine) essayant de se faire sa place en un lieu où il est totalement étranger. Le coup de la sélection de son appartement, où a précédemment eu lieu un crime bien sanglant, est en soi un sacré moment de rigolade, au même titre que les clins d’œil aux personnages fétiches du sieur Aoyama. A ce stade de la série, je ne sais donc pas trop comment ça va évoluer, mais ça demeure plaisant, sans atteindre le niveau des Détective Conan, et sans avoir une sorte de colonne vertébrale avec une réelle intrigue policière.

    18/04/2020 à 15:21

  • Afterschool Charisma 2

    Kumiko Suekane

    6/10 Un opus qui commence avec les manigances de jeunes adultes qui semblent vouloir éliminer les clones jusqu’au dernier, et les suites de la tentative de suicide d’Amadeus. Mais j’ai trouvé que l’ambiance n’était pas assez délétère, anxiogène ou autre par rapport au sérieux du sujet, au point que ça en devient presque bon enfant voire gentillet, sans compter le fait que l’auteur aurait pu essayer de forcer les traits de ses personnages pour qu’ils soient moins typés « manga » et ressemblent beaucoup plus aux personnalités historiques dont ils sont censés être les clones. Bref, c’est original, et tout sauf inintéressant, mais ça n’est pas assez « ajusté » esthétiquement au propos, en plus de manquer d’une noirceur salvatrice.

    18/04/2020 à 15:20

  • Tout cela je te le donnerai

    Dolores Redondo

    8/10 Manuel Ortigosa est un écrivain dont les ouvrages sont, à chaque fois, d’immenses succès. Mais quand un matin, deux officiers de la garde civile viennent toquer à sa porte, ce n’est pas pour lui annoncer une bonne nouvelle : son mari, Alvaro Muniz de Davila, vient de décéder dans un accident de voiture. Passée la stupeur, Manuel apprend beaucoup d’informations sur feu son compagnon, comme le fait qu’il appartenait à une famille très conservatrice, une lignée reconnue de nobles galiciens. A mesure qu’il se pose des questions, le veuf se rend compte que bien des secrets semblent encore dissimulés, et que les causes de la mort de son homme ne sont probablement pas si accidentelles que ça.

    Après les remarqués Le Gardien invisible, De Chair et d’os et Une Offrande à la tempête, Dolores Redondo nous est revenue avec ce livre très réussi. D’entrée de jeu, la plume de l’écrivaine séduit : des personnages denses et humains, croqués avec tact et humanité, et poignants d’émotions. On se plaît à faire la connaissance de Manuel, auteur à succès et époux éploré d’un homme qui avait de multiples zones d’ombre. C’est également un régal de plonger dans des décors si typiques de la Galice, dépeints avec talent par Dolores Redondo. Dans le même temps, cette dernière dépeint avec vitriol cette branche de l’aristocratie, cruelle, campée sur ses privilèges et propriétés. On y découvrira notamment des secrets de famille, des tensions larvées, des antagonismes tenaces et des joutes pour le pouvoir. Deux individus retiennent notamment l’attention, à savoir le père et la mère du disparu, le premier étant un monstre de férocité, la seconde une châtelaine castratrice. Si Dolores Redondo amorce son récit par deux citations d’Agatha Christie (pol|Le Secret des Chimneys] et La Maison biscornue), ce n’est pas un hasard, car ce roman ressemble, à certains égards, à un whodunit à l’anglaise, tandis que la tension croît jusqu’à un final en plusieurs étapes.

    Malgré l’épaisseur de l’ouvrage (pas loin de sept cents pages), l’histoire se dévore littéralement. Aucun effet superflu, pas de scène mémorable à la manière hollywoodienne : un suspense très habilement bâti, avec de justes réflexions sur le couple, la famille, le libre-arbitre et la tolérance.

    14/04/2020 à 22:59 6

  • Le Furet égaré

    Denis Julin

    8/10 Marie-Christine Montfort-Louis n’est plus. On vient de retrouver son corps dans son appartement du 16e arrondissement, le crâne fracassé, une paire de ciseaux ensanglantée dans la main. Son mari ? Il erre près d’un lac lorsque quelque chose le percute violemment à la tête, entraînant une amnésie totale quant à son identité. C’est ensuite un véhicule qui bascule dans les eaux, et dans lequel on retrouve une mallette contenant une arme étrange. Il faudra au capitaine Brunie des trésors d’acharnement et de sagacité pour tout dénouer.

    Après La Lézarde du hibou, dont on avait pensé beaucoup de bien, Denis Julin revient avec ce deuxième tome des enquêtes menées par le policier Brunie. On retrouve la patte de l’auteur : une écriture léchée, parfois même très poétique, un suspense intelligemment construit, pas mal d’humour, et des personnages crédibles et d’une grande humanité. Le lecteur se plaira à suivre la traque menée par le capitaine, mais ce protagoniste, quoique fort réussi, ne constitue pas nécessairement le plus intéressant de l’histoire. En effet, c’est ici Arnaud, le veuf à la mémoire altérée, qui se révèle presque le véritable héros de cette histoire. En quête de lui-même, ne sachant plus qui il est réellement, il croisera la route de la délicieuse Stéphanie, belle jeune femme à la jambe artificielle, tandis qu’il se découvrira graduellement des aptitudes inattendues, comme une maîtrise du close combat, savoir comment désarticuler un pistolet en deux temps trois mouvements, manier un fusil de précision Dragunov, ou des relations avec des personnages interlopes. L’intrigue est une nouvelle fois fort bien bâtie, avec une savoureuse résolution, et les pièces du puzzle en viendront à s’emboîter de façon très satisfaisante. Aucun temps mort dans ce roman à suspense mâtiné d’espionnage et d’action, sans pour autant tomber dans les travers hollywoodiens et faciles de ces trois genres, sans compter une belle dose de cocasserie qui jamais ne vient ternir la densité dramatique de l’ouvrage. A titre d’exemple, ces titres de chapitres qui n’engendrent pas la mélancolie : « L’Affaire est dans le lac », « Qui perd le nord va à l’ouest », « A l’est, plein de nouveaux », ou encore ce vingtième chapitre, vide, et intitulé « Ben, il n’y en a pas ! ».

    Une nouvelle réussite de la part de Denis Julin. C’est sobre et adroitement mené, plaisant et distractif : la matière idéale pour un téléfilm de grande qualité.

    14/04/2020 à 22:55 2

  • Un Océan de pierre

    Matz, Philippe Xavier

    8/10 Complètement d’accord avec gamille67 : des dessins qui saisissent d’entrée de jeu, avec cet « océan de pierre », à savoir un désert rocailleux au possible de la Cordillère des Andes magnifiquement traité. L’action intervient rapidement avec ces rois bandits rapidement mis hors d’état de nuire. Le passé de ce dénommé Tango réapparaît lentement, et presque intégralement à l’entame du dernier tiers de cette BD. Une intrigue au final assez classique mais très efficace. J’ai également bien aimé les photos à la toute fin qui permettent de mieux saisir ce que les auteurs ont représenté. Je tâcherai d’être au rendez-vous des tomes suivants.

    13/04/2020 à 14:26 3

  • L'Île du disparu

    Max de Radiguès

    5/10 Parce que le rituel est immuable, « les enfants de 14 ans doivent partir sur le lac, s’installer sur une des centaines d’îles et y survivre pendant un an. A leur retour, ils entrent officiellement dans le monde des adultes ». Aussi, pour cette raison, Stig et Tilde, frère et sœur, s’engagent dans cette aventure. Mais un naufrage, au lieu de les mener sur Tylsa, les conduit à échouer sur une île inconnue. Ils découvrent sur place des têtes de bois, façon masques africains. Il y a aussi sur place un garçon de leur âge prénommé Arne. Un scénario honnête, même si, à ce point, il n’a rien de novateur ni de renversant, si l’on excepte la nature d’Arne. Mais c’est surtout au niveau du graphisme que je suis très sceptique : je n’ai vraiment pas aimé. J’ai trouvé ça très (trop ?) enfantin, presque amateur (qu’on se comprenne bien, je suis hyper mauvais en dessin, je ne jauge donc à l’aune de ce que je sais faire, mais de ce que je connais de la BD avec d’autres dessinateurs), à tel point que je me suis un peu forcé pour le finir. C’est certainement subjectif, mais à titre très personnel, c’est un élément qui m’a beaucoup déplu.

    13/04/2020 à 14:25 1

  • L'Homme aux babioles

    Julien Lambert

    8/10 Une bien curieuse histoire que celle de ce Jacques Peuplier, détective privé d’un genre assez particulier. Solitaire et cradingue, sa spécialité est de retrouver des objets perdus ou volés, et il est aidé en cela par un don singulier, celui de pouvoir entendre ce que lui disent les objets. Mais en ville, plusieurs affaires se côtoient : celles concernant Jacques, un gamin dont le passe-temps est de capturer des insectes volants pour les revendre aux frères Monk, un individu ailé qui semble capturer une femme (Christina) dès la troisième page, etc. Une histoire vraiment atypique, prenante, où je me suis laissé capturer par le récit et les graphismes si particuliers (donnant l’impression d’être bruts de décoffrage alors qu’ils sont en réalité, à mes yeux, beaucoup plus travaillés que ne le laissent penser les apparences). En outre, quand s’achève ce premier tome, il y a eu des réponses (ou du moins partielles), mais aussi des questions qui restent en suspens (comme le devenir du pouvoir de communication de Jacques). Une BD très réussie, qui tranche avec ce que j’ai pu lire jusqu’à présent, et qui donne furieusement envie de lire le tome suivant (qui sera également le dernier, puisque c’est un diptyque).

    13/04/2020 à 14:24 1

  • La Voie fiscale

    Stephen Desberg, Bernard Vrancken

    6/10 L’IRS, pour « Internal Revenue Service », permet de récupérer l’argent que tentent de frauder des Américains peu scrupuleux (doux euphémisme). Parmi l’un de ces dix agents, Larry B. Max. Un personnage héroïque et cinématographique des termes, à savoir beau gosse, athlétique et brillant, sans la moindre aspérité. Son rare passe-temps est d’appeler Gloria au téléphone, une call-girl à l’identité incertaine. Côté boulot, un accident de voiture va le mettre sur la trace de la spoliation des biens appartenant aux Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. Un graphisme un peu daté (mais la BD a tout de même plus de vingt ans), de l’action juste ce qu’il faut (à mi-chemin entre le côté hollywoodien et outrancier de la chose et le minimum syndical que les lecteurs de ce genre de BD peuvent attendre), et un scénario plutôt intéressant. Mais je reste un peu sur ma faim, tant pour l’esthétique un peu trop aseptisée à mon goût, et le récit qui ne creuse pas assez le sillon (mais peut-être que le tome suivant contredira mon jugement).

    13/04/2020 à 14:24 2

  • Eveil

    Joël Jurion, Antoine Ozanam

    7/10 Harcelé par des brutes dans le même établissement que le sien, un gamin se révèle capable de se transformer en tigre pour se défendre. Cet Ange Tomassini devient alors une bête de combat, ce qui le conduit à tuer Kurt Becket, un môme qui s’en prenait à lui, sans qu’il n’en conserve le moindre souvenir. J’ai beaucoup aimé l’esthétique et le traitement des couleurs, sans compter la disproportion qui existe entre ce môme plutôt gentillet et la bestiasse qui se réveille en lui lorsque les circonstances deviennent menaçantes, d’autant qu’il va apprendre après tout le monde que son père est un ponte de la mafia. L’initiation offerte par Dan, son garde du corps et détenteur de pas mal de secrets qu’il va avouer à Ange, est également intéressante. Un bon moment de lecture, un peu plus agréable selon moi dans la forme que dans le fond, j’essaierai d’être au rendez-vous d’autres tomes de la série.

    13/04/2020 à 14:21 3

  • Deadman Wonderland tome 1

    Jinsei Kataoka, Kazuma Kondou

    6/10 « Dix ans après le grand tremblement de terre de Tokyo, une prison est au centre de l’activité touristique qui est censée assurer la reconstruction de la capitale. C’est la seule prison privée du Japon ». Le jeune Ganta, quatorze ans, voit ses camarades de classe subitement mutilés et tués par un mystérieux homme rouge volant. Mais sa version des faits n’est pas acceptée par la justice et il est condamné à la peine de mort. Pour lui, donc, direction la prison de Deadman Wonderland. Devenu le détenu 5580, il y découvre des règles étranges, comme l’existence de jeux mortels (quelque part entre « Running Man », Fort Boyard et ceux des gladiateurs) très appréciés des spectateurs. Bon, esthétiquement, rien à redire, on est dans du classique mais de l’efficace. En revanche, le thème de ces sports sanglants que l’on fait vivre à de pauvres bougres, prisonniers ou non, est du réchauffé (jeux vidéo, cinéma, littérature) et ce déjà-vu/déjà-lu m’a un peu fatigué. N’en reste pas moins que cet univers a titillé ma curiosité et que les scènes finales, avec la réapparition de l’homme en rouge, m’incitent à aller voir les tomes suivants.

    13/04/2020 à 14:19 1

  • Bob Morane et l’Oiseau de feu

    Dino Attanasio, Henri Vernes

    6/10 Dès la quatrième vignette de cette BD, Bob Morane et Bill Ballantine sont confrontés à une fusée jaillissant de l’eau. Aussitôt arrêtés, ils sont libérés dans la foulée par une vieille connaissance, le major Briggs. Mais les voilà embarqués dans une histoire où l’aventure (majoritaire) le dispute à l’espionnage. Un canevas classique, avec nos deux héros vraiment très héroïques, rompus au combat et perspicaces, et un méchant, Dimitri Tchou, digne des opus de James Bond. Pas mal de clichés à la chaîne (mais c’est probablement le genre et l’époque qui veulent ça, « o tempora o mores »), avec les bagarres contre les requins, le cachalot et le calamar géant, ou encore l’épisode avec la tribu de Papous cannibales (que j’ai trouvée très mal greffée à l’histoire, comme un cheveu arrivant dans la soupe). Bref, ça aligne gentiment les éléments attendus et ça distrait, mais ça ne m’a pas pour autant renversé, même si je garde à l’esprit que cette bande dessinée a soixante ans et qu’elle est nécessairement tributaire du temps qui a passé.

    13/04/2020 à 14:19 1

  • Aime ton prochain tome 1

    Daisuke Chida

    6/10 Il y a six ans de cela, Saki a prouvé son amour inconditionnel (et dément) pour Kazumi par un acte sanglant avec un cutter. Désormais en deuxième année de lycée, Shino s’est amourachée de Kazumi. Quand tous les deux découvrent un lapin tué avec un cutter, pour le jeune homme, le doute n’est plus permis : Saki est de retour, et elle ne compte pas laisser faire cette idylle. Un précipice sépare le graphisme plutôt gentillet de ce manga des fulgurances de sang, de folie et de sexe (très courtes à chaque fois) qui parsèment cet opus. On y découvre donc la folie érotomane de Saki (qui n’est pas sans rappeler le film « Liaison fatale » avec Glenn Close et Michael Douglas, avec même un sacré clin d’œil), timbrée au point de se trimbaler avec l’urne funéraire contenant les cendres de sa prime victime. Bref, une atmosphère oppressante et anxiogène, habilement servie par un scénario intéressant mais pas non plus d’une immense originalité, et par une esthétique volontairement décalée qui sert le récit. J’ai trouvé ça plutôt pas mal.

    13/04/2020 à 14:18 1

  • Le Cauchemar d'Innsmouth

    Howard Phillips Lovecraft

    9/10 … ou comment le narrateur, un peu par hasard, en vient à se rendre au village portuaire d’Innsmouth, où il surprend de nombreuses étrangetés, dont une certaine physionomie curieuse chez les habitants, un rite impénétrable, et bien pire encore, jusqu’à ce que les dernières pages révèlent un lien inattendu et intime entre la cité et lui-même. Une nouvelle très forte, encore une fois bien anxiogène et saturée de mystères, faisant pénétrer assez loin dans la cosmogonie lovecraftienne. Pas mal de scènes intéressantes et déjà « visuelles », depuis la poursuite du protagoniste depuis la chambre jusqu’aux descriptions physiques des autochtones, et ce jusqu’au final, efficace, et qui a certainement dû marquer pas mal de lecteurs et d’auteurs.

    13/04/2020 à 14:17 5

  • Comme un frère

    Samuel W. Taylor

    4/10 … ou comment il arrive une bien curieuse mésaventure à Charles – surnommé « Chick » - Graham en revenant de la gare : son épouse Cora ne vient pas le chercher. Il l’appelle, et à sa plus grande surprise, Cora ne s’émeut pas de son coup de fil, voire croit en un canular, et pour cause : Chick est déjà à ses côtés, dans leur maison. Un sosie ? Une manipulation ? Le premier symptôme de la démence ? Dans le même temps, on en vient à prendre Chick pour Albert Rand, qui vient de prendre la poudre d’escampette avec deux millions de dollars en bons du trésor. C’est cette histoire de ressemblance ou de substitutions d’identité qui m’a fait acheter ce livre, car j’étais intrigué par la manière dont l’auteur, Samuel W. Taylor, viendrait à la traiter. Mais j’ai été sacrément déçu par le traitement, justement. Cela commence plutôt bien, avec quelques bonnes réparties, une écriture qui est tout sauf déplaisante, et les premières pages qui défilent à toute allure. Rapidement, je déchante : je ne sais pas exactement ce qui a le plus étouffé mon plaisir. Ces dialogues qui, malgré leur humour à froid, n’en finissent pas de ne pas en finir au point d’en paraître presque parodiques et de m’extraire du cœur de l’intrigue ? Ce complot à petite échelle qui est trop vite dévoilé, et qui ne parvient pas à tenir la distance d’un roman de près de deux cents quarante pages ? Ces personnages qui ne m’ont jamais touché, d’autant que le récit à la première personne permet, de fait, une immersion dans un individu qui n’a que bien peu de saveur ? Ou, plus globalement, ces longueurs dans le récit où, à la place d’une intrigue complexe et bien charpentée, j’ai eu souvent le sentiment que tout était inutilement filandreux ? Alors, il y a bien quelques éléments positifs pour relever l’ensemble (par exemple, l’utilisation des chiens, comme l’annonce en quelque sorte l’illustration de la première de couverture), mais cela reste bien maigre à mes yeux. Si tout le bouquin se laisse lire, j’ai eu l’impression d’assister à une pièce de théâtre où les acteurs surjouaient, et en plus improvisaient en raison d’un script famélique ou inachevé. Une déception.

    13/04/2020 à 14:15 1

  • Un Homme doit mourir

    Pascal Dessaint

    7/10 Boris a trente-six ans et travaille pour l’entreprise Nature & Co, prodiguant des expertises, très souvent de complaisance pour des entreprises qui placent le profit avant le principe écologique. Dans le même temps, Alexis s’en va rejoindre la superbe et monstrueuse villa que Raphaël a fait bâtir dans les Landes, juste en face de l’océan. Des personnages que rien ne prédisposait à ce qu’ils se rencontrent. Et pourtant…

    Toujours aussi militant, Pascal Dessaint signait ce livre en 2017. On y retrouve sa plume si particulière, animée d’engagements que l’on devine sincères et profonds, et prompt à mettre en avant les âmes humaines, les activismes et la protection d’une certaine vision de l’humanité. C’est ici l’écologie qui prime, et qui est examinée à travers divers points de vue, au gré de ce roman choral fort prenant. D’Alexis, très démonstrateur avec son SUV Audi et ses bagages hors de prix, à Raphaël qui s’est éperdument moqué de la protection de l’environnement pourvu que sa bâtisse ait pu être construite, en passant par Émeric et son projet de parc à vagues, c’est un éventail de personnages peu scrupuleux, avides et uniquement intéressés par leurs propres intérêts qui se déploie sous nos yeux. Dans le même temps, d’autres êtres apparaissent et viennent corriger cette trajectoire purement consumériste et individualiste : Mélissandre, empressée de défendre la cause de la planète et rejoindre les rangs des adeptes d’une ZAD, ou encore un oncle écolo qui n’hésite pas à user de la force pour soutenir les intérêts qui lui semblent justes. Des individus tranchés, représentatifs des diverses franges de la population, et même si la plume de Pascal Dessaint est charmante et captivante, ces portraits psychologiques et moraux auraient pu être plus nuancés, moins binaires et forcés. L’histoire recèle de petits bijoux de descriptions, que ces dernières concernent la faune ou la flore du sud-ouest, et c’est avec ravissement que l’on se balade dans ce microcosme si particulier. En outre, certains éléments viennent raviver, tout au long du récit, l’intérêt du lecteur, comme ce chargement d’un transport de fonds qui s’évapore, un inconnu bloqué dans une cave, ou encore les forces de la Nature qui viennent durement rappeler aux hommes la férocité de sa colère. Mais il est vraiment dommage que Pascal Dessaint se soit montré si manichéen dans les peintures psychiques de ses protagonistes, même s’il est évident que certaines d’entre elles existent.

    Au final, un autre bon roman de la part de l’auteur, si brillant, qui a signé, entre autres, Du Bruit sous le silence, Les Pis rennais, Le Bal des frelons ou Tu ne verras plus, mais qui s’est peut-être laissé égarer par la fougue de son propre militantisme, au risque de réduire les adversaires qu’il combat à des clichés trop appuyés, alors que sa cause est fort belle.

    08/04/2020 à 08:40 2

  • Le Coffret maléfique

    Paul C. Doherty

    8/10 1381. Frère Athelstan, dominicain, est appelé pour enquêter sur une série de mystères. Deux hommes de foi assassinés dans une église, le cercueil vidé de la dépouille de la mère d’un inquiétant bandit, et un coffre soulagé de son contenu. Et quel est le lien avec ces deux cadavres, embaumés, découverts non loin de là ? Une intrigue sinistre qui obligera notre limier à remonter jusqu’à un drame qui a eu lieu dix-huit ans plus tôt.

    Ce dix-huitième opus de la série consacrée à Frère Athelstan est un véritable délice. Avec une plume saisissante, Paul Doherty nous dépeint avec un réalisme extraordinaire l’atmosphère londonienne de cette fin du quatorzième siècle. Même si la phrase du Publishers Weekly retranscrite sur la quatrième de couverture insiste sur le « contexte politique de l’époque », force est de reconnaître que c’est davantage une représentation particulièrement sombre des bas-fonds et de la criminalité. Petit peuple des égorgeurs, des prostituées, des estaminets interlopes, au premier rang desquels on trouve Simon Makepeace, dit « Le Boucher », la plus terrible des brutes et des truands de la ville. Un être ignoble et patibulaire, vivant dans une habitation aux allures de camp retranché et protégé par une meute de chiens monstrueux. Il faudra à notre dominicain toute sa sagacité et son calme pour pouvoir, dans le chaos ambiant, résoudre cette suite d’énigmes, toutes liées au mystérieux naufrage d’une barge royale presque deux décennies auparavant.

    Paul Doherty livre ici une réussite littéraire plurielle : érudite tout en étant distractive, elle offre également une solide enquête policière, uniquement résolue dans les ultimes instants du roman. De la première à la dernière page, un ravissement.

    08/04/2020 à 08:31 2

  • Inspecteur Kurokôchi Vol.1

    Koji Kono, Takashi Nagasaki

    8/10 Un manga qui commence fort, avec la découverte du cadavre d’une jeune femme, tuée par un homme politique éminent, et avec l’inspecteur Kurokôchi, prêt à fournir un alibi au meurtrier en échange d’argent. On lui adjoint le jeune policier Shingo Seike pour faire définitivement tomber ce ripou. Mais une tuerie vieille de quinze ans, impliquant quelques politiciens de haut rang, pourrait être à l’origine de la manœuvre de Kurokôchi, qui, après des années de corruption passive, cherche un moyen de réaliser enfin une bonne action. Voilà un manga plus que plaisant, au graphisme particulièrement léché et prenant, qui propose un personnage central très original, et bien moins cliché que prévu. Des chapitres efficaces (portant tous le nom d’une couleur) pour une histoire qui ne l’est pas moins, avec de belles manipulations et autres jeux de pouvoir. Je suis ferré, je serai au rendez-vous d’autres opus de la série.

    07/04/2020 à 08:49 1

  • Sains et saufs ?

    Charlie Adlard, Robert Kirkman

    7/10 Une bonne baston pour nos héros dès le début, pensant trouver dans ce pénitencier un asile. Une entraide inattendue avec des prisonniers, quelques moments poignants, des cas de conscience, et des attaques de zombies bien senties, pour cet opus toujours aussi dynamique qui s’achève sur une mise en joue inattendue. Le suspense est donc habilement maintenu pour aller voir ce que le tome suivant nous réserve.

    07/04/2020 à 08:48 2

  • Détective Conan Tome 67

    Gosho Aoyama

    6/10 La suite et fin de l’intrigue débutée dans l’opus 66 : une habile et intéressante histoire de passe-passe. Ensuite, une tentative de suicide qui débouche sur un type bardé d’explosifs et qui menace de se faire sauter, faisant ressurgir une histoire ancienne ayant eu lieu en pleine montagne : pas mal, mais manquant un peu de suspense à mon goût, et surtout un poil trop longuette. Puis mademoiselle Kobayashi découvre un cadavre dans une ruelle mais n’a fait qu’entrapercevoir la meurtrière. Un récit inachevé et qui, au moment à ce tome s’achève, ne m’a pas particulièrement remué les sangs. En bref, un opus sympa, certes, mais plutôt en deçà du reste de la série.

    07/04/2020 à 08:47 1