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Ils vivent la nuit
9/10 Une très belle fresque sur l'Amérique de la Prohibition, avec ses trafics, sa corruption, ses gangsters et leurs organisations, qui n'avaient déjà rien à envier à ceux de la drogue et de ses cartels qui s'installera un peu plus tard. En suivant l'apprentissage puis l'essor de Joe Coughlin, dont les origines irlandaises ainsi qu'un père commissaire de police ne le prédestinaient pourtant pas particulièrement à embrasser à cette époque la vie hors-la-loi, Dennis Lehane dresse avec le talent qu'on lui connait le portrait aussi complexe que fascinant d'un homme qui souhaite vivre comme bon lui semble et refuse les règles que lui impose la société, un homme en quête de libertés, d'aventures et de richesses, mais aussi et surtout en quête d'amour. Et c'est à travers ce personnage éblouissant de Joe Coughlin que Lehane parvient à s'émanciper du simple roman de gangsters pour offrir à ses lecteurs un roman noir aussi ambitieux que réussi. Avec une narration d'une fluidité exemplaire, il déroule un récit parfaitement maîtrisé, puissamment visuel et même étonnamment cinématographique - peut-être trop, diront certains. En effet, il n'y a pas une seule scène dans Ils vivent la nuit que l'on n'imagine pas aisément retranscrite à l'écran.
Tout comme il n'y a pas un seul chapitre de cet excellent roman noir dont on ne se délecte pas...13/09/2014 à 17:35 6
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Pur
3/10 Personnellement, il ne me reste aucune sensation de Pur, plusieurs mois après l'avoir lu, et seuls me restent en tête la pauvreté de son intrigue, le grotesque de son final, le vide absolu de ses personnages-Playmobil, sans parler du message vomitif qui sous-tend le roman, comme quoi les Français sont de méchants névrosés, racistes et xénophobes, le même message culpabilisant qui nous est asséné à longueur de temps par les médias, certaines politiciens et autres officines communautaires spécialisées dans le marché lucratif de la victimisation.
En réalité, Pur n'est qu'une grossière caricature de la société française, écrite par un auteur aveuglé par l'idéologie gauchiste, et incapable de la moindre analyse objective.
Au sujet de ces fameuses "gated communities", mieux vaut lire cent fois l'excellent Utopia, de Ahmed Khaled Towfik, qui lui avait eu l'ouverture d'esprit d'analyser que ce phénomène de la multiplication de ces "communautés/lotissements fermés et surveillés" étaient en fait une conséquence logique de l'effondrement de la classe moyenne dans une société.
Bref, un roman vide, creux et grotesque, des personnages inexistants divisés entre méchants et gentils, une intrigue poussive qui se termine par un bain se sang ridicule, autrement dit une solution bien facile pour Chainas de tenter de clore son misérable roman.
Peut-être serait-il préférable pour tous que Chainas, désormais à l'aise dans la traduction de romans anglo-saxons, se décide à s'y consacrer pleinement et définitivement, plutôt que de nous infliger des romans aux allures de tracts pour le NPA, Le CRIF ou la Licra...21/08/2014 à 15:45 2
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Hollywood Zero
6/10 Un bon petit polar. Dominique Forma crée des personnages hauts en couleurs et, dans ce roman, se sert de son expérience personnelle - il a vécu plus d'une quinzaine d'années aux USA et à Los Angeles, où il a cumulé les expériences dans le cinéma jusqu'à devenir réalisateur de films - pour nous montrer l'envers du décor hollywoodien.
Petites frappes, grosses arnaques, femme (vraiment) fatale, un Los Angeles bien loin des couchers de soleil magnifiques que l'on a l'habitude de voir, avec ses quartiers glauques et sa faune interlope forment le décor et l'ambiance de cet Hollywood Zero.
Les dialogues sont vifs, les losers nombreux et le récit rythmé, on passe un bon moment de lecture avec ce roman qui a en plus le mérite de nous montrer l'autre face d'Hollywood et de Los Angeles.17/08/2014 à 13:56 3
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Aux animaux la guerre
9/10 Ce roman noir et âpre est excellent, captivant et décrit sans fards la triste réalité qui ronge notre société, la fermetures des usines, le chômage, la pauvreté, et les innombrables drames du quotidien que cela engendre.
À l'aide d'une construction polyphonique impeccable où chaque chapitre est consacré à un personnage, porté par une superbe écriture, parfaitement maîtrisée et évocatrice, et des personnages forts et puissamment campés, d'autant plus crédibles qu'il s'agit de gens simples confrontés au chômage, à la misère, au désespoir, à la tentation de boire pour oublier ou de s'embarquer dans des coups risqués et des trafics illicites de plus en plus gros pour se sortir de la merde, Nicolas Mathieu signe avec Aux animaux la guerre un beau et très grand roman noir qui fera date, parce qu'il aura réussi à écrire et décrire, sans jugement aucun, la déliquescence actuelle de notre société.
Incontestablement l'une de ces quelques très grandes révélations françaises de l'année à ne pas manquer.03/08/2014 à 18:02 8
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Purgatoire des innocents
3/10 À moins de ne jamais avoir lu de vrais bons polars, je ne comprends pas qu'on puisse aimer cette espèce de sous-thriller bas de gamme et aussi pauvre qu'une série Z. C'est vulgaire, fade, racoleur et ennuyeux. Pourtant, à la base le pitch est intéressant et quelques rares rebondissements (dont la fin surtout) sont réussis, mais complètement gâchés par tout le reste, tout ce "torture porn" vulgaire et racoleur censé représenter le suspense ou les moments de "grande tension" du livre, tout ça monté en pudding indigeste sur 600 pages. Les personnages sont transparents, caricaturaux, lus et vus des milliers de fois, comme ceux d'un pauvre téléfilm. L'écriture est basique, inexistante et l'on s'énerve et s'épuise à tourner tout ce papier inutile pour savoir la fin. Si seulement Giebel avait dégraissé son livre de la moitié des pages, j'aurais été plus indulgent et le résultat aurait pu être efficace, sans toutes ces longueurs et répétitions qui noircissent des tonnes de papier pour rien. Non, décidément, je ne comprends pas toutes ces louanges, commentaires dithyrambiques et notes maximales pour un produit aussi creux, pauvre en véritables sentiments et émotions à l'intérieur, mais tellement artificiel, bouffi par du remplissage. Je sais que les gros pavés se vendent malheureusement mieux qu'un polar mince car le lecteur a l'impression d'en avoir "pour son argent" - ce qui déjà est profondément stupide - mais je ne comprends qu'on puisse aimer, se contenter de si peu, là où pourtant sur le marché et pour le même prix sont publiés de nombreux et très bons auteurs, même nouveaux, avec de vrais romans, de vrais polars de qualité, même dans la catégorie des thrillers... non, j ne comprends pas, désolé.
20/07/2014 à 17:34 1
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La Faux soyeuse
9/10 "La Faux soyeuse" est un miracle. Un double choc. Celui du récit, et celui du talent de plume d'Eric Maravélias. Un récit puissant, saisissant et fascinant sur l'arrivée de l'héroïne en France au tout début des années 1980. La déchéance de Frank Varon et de tout ce qu'il aimait, sa femme, ses amis, la fille dont il avait toujours été secrètement amoureux depuis l'adolescence, dans la dope. Avec une écriture parfaite, des dialogues qui sonnent toujours juste, Eric Maravélias balance une claque monumentale, d'une noirceur totale, à la gueule du lecteur pour qu'il apprenne et comprenne à quel point l'héroïne est la pire des saloperies.
Une lecture salutaire, notamment pour les jeunes.19/07/2014 à 18:27 3
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Le Loup
6/10 John Katzenbach nous revient cette année avec ce nouveau thriller psychologique surprenant et efficace.
Dans une intrigue où il revisite à sa manière (très spéciale) le conte du Petit Chaperon rouge, trois jeunes femmes rousses et vulnérables sont les proies d'un mystérieux écrivain psychopathe qui compte écrire le thriller qui sera l'oeuvre de sa vie... tout en le mettant en pratique en même temps.
Dès lors, le lecteur se retrouve aussi manipulé que les trois victimes par Katzenbach qui multiplie rebondissements et surprises tout au long de cette traque haletante.
Mais il ne s'agit pas uniquement d'un jeu "du chat et de la souris", car l'auteur nous livre en parallèle les agissements de ce tueur diabolique, et à travers eux on se retrouve confronté à une personnalité déviante et criminelle assez fascinante. Aussi, lorsque les trois victimes décident de ne plus se laisser faire et de se retourner contre le pervers pour le tromper et le démasquer, les réactions de celui-ci sont aussi captivantes que la chasse à l'homme elle-même.
Un thriller parfaitement construit et maîtrisé, difficile à lâcher jusqu'à la toute dernière page. À dévorer !10/06/2014 à 09:23 4
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Par la grande porte
7/10 Un très bon polar, qui nous change des éternels thrillers à serial-killers, et nous réserve malgré tout bien des surprises ! Peuplé de personnages "croquignolesques", hauts en couleurs, troubles et ambigus à la fois, et doté d'une intrigue qui se révèle moins simple et basique qu'au premier abord et qui tient en haleine jusqu'à un dénouement surprenant, ce thriller addictif met en scène un anti-héros qui joue de malchance mais qui toutefois a l'air d'avoir plus d'un tour dans son sac... Très bien écrit par un auteur qui manie parfaitement ironie, cynisme et humour noir, et qui fait mouche dans les dialogues percutants et savoureux comme dans certaines situations décalées !
Bref, du tout bon, un polar surprenant et captivant, un parfait divertissement. Punchy !10/06/2014 à 06:54 1
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Boulevard
7/10 Un roman noir à la fois poignant et dérangeant, de par l'envers du décor hollywoodien qu'il dévoile. Ces gamin(e)s, ces jeunes adolescent(e)s venus s'échouer à Hollywood pour fuir le plus souvent le cauchemar qu'il vivait chez eux et rejoindre ce qu'ils s'imaginent être la ville des rêves, des stars et des paillettes, où ils trouveront forcément leur place et leur part du rêve américain.
Fuir un père incestueux, des parents alcooliques ou la misère pour se retrouver, une fois arrivé, face à une réalité qui n'offre aucune autre perspective d'avenir que de vivre dans la rue en mendiant, en volant et/ou en tapinant. La faim, le froid, la violence omniprésente de la rue et des maquereaux, enchaîner les passes pour pouvoir se payer une nuit au motel et de quoi manger, le Sida, se faire violer par un maquereau, Casey, 13 ans, va vivre tout ça à Hollywood. Heureusement, entre eux, ces jeunes sont soudés et forment une communauté, essaient de s'entraider, des amitiés se créent et parviennent à surmonter les drames et la vie au quotidien.
Parallèlement, un ponte de Los Angeles vient d'être retrouvé assassiné dans une chambre du Château Marmont, et la police est sur les dents : il s'agissait d'un des meilleurs amis du maire et Jimmy qui va être chargé de l'affaire subit une forte pression de sa hiérarchie. Lui, la quarantaine, dont le fils devenu toxicomane à 15 ans a fui dans la rue, est aussi hanté par toutes les horreurs qu'il a pu voir au cours de son métier.
Entre son enquête et sa vie, on suit donc aussi en parallèle le parcours de la jeune Casey, et l'auteur trouve le ton juste pour accrocher le lecteur, réaliste et sans pathos ni voyeurisme. On s'attache évidemment aux personnages, on vit et on souffre avec eux et, même s'il ne s'agit pas d'un thriller, la tension narrative qu'arrive à créer l'auteur tout au long du récit est une réussite. Quant au fond, malheureusement Bill Guttentag n'invente rien, lui qui a réalisé déjà plusieurs documentaires pour la télévision. La vérité qu'il dévoile est suffisamment glauque comme ça. Un très bon roman noir à conseiller, doublé d'une lecture salutaire.07/06/2014 à 14:05 2
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Les âmes perdues de Dutch Island
8/10 Le livre idéal pour découvrir l'univers unique, sombre et tourmenté, de John Connolly. Si ici l'intrigue est un peu plus linéaire que dans une enquête de Charlie Parker, on y retrouve avec bonheur un concentré des atmosphères noires, fantastiques et poétiques développées par l'auteur irlandais. Avec une construction implacable, des personnages bien campés - dont une belle brochette de "méchants" très méchants - et un décor naturel exploité à merveille, le suspense est d'une redoutable efficacité et ne cesse de monter en puissance. Connolly a un don pour mêler une touche de surnaturel à son intrigue sans pour autant tomber ni dans le fantastique facile qui lui permettrait de balayer toute rationalité, ni dans le ridicule comme tant d'autres auteurs qui s'essaient à ce mélange. Au contraire, ce cocktail subtil fonctionne une fois encore à merveille dans ce thriller glaçant et oppressant. Une réussite.
29/05/2014 à 18:58 9
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Le passé est une terre étrangère
7/10 Une spirale de déchéance remarquablement décrite et totalement crédible, des sentiments humains sondés et décrits avec une grande justesse, Carofiglio signe ici un roman noir fort et subtil à la fois, dont la mécanique implacable captive le lecteur, tout en le questionnant sur ses propres choix si celui-ci avait été à la place de Giorgio. Envoûtant.
27/05/2014 à 19:40 4
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Little Girl Blue
7/10 Au coeur même de la ville de New York, par une nuit glaciale d' hiver, le cadavre nu d' une fillette est retrouvé en plein Central Park. Commence alors une enquête trépidante, sans temps morts et pleines de rebondissements, sur la double piste d' un tueur en série et d' un réseau de prostitution d' enfants qui sévit dans le milieu huppé et "protégé" de la ville, et qui diffuse, notamment via internet, des vidéos pornographiques pédophiles. Un sujet brûlant d' actualité qui est ici traité avec subtilité mais réalisme par l' auteur. L' intrigue, parfaitement construite, se révèle captivante et tient en haleine jusqu' à la dernière page. Du même auteur, lire aussi "Avocat criminel", paru dans la même collection.
27/05/2014 à 19:19 1
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Terminus Belz
4/10 Au final, une déception d'autant plus cuisante que ce roman avait de prime abord de nombreux atouts de son côté et qu'il démarrait très bien. Mais une fois le décor planté sur l'île, malgré de très belles descriptions de la nature et de la mer, le travail de marin particulièrement bien rendu et une ambiance réussie, l'intrigue s'enlise peu à peu, d'autant plus que l'auteur a du mal à construire des personnages solides et crédibles, à quelques trop rares exceptions près. Jusqu'à la fin, la plupart ne resteront qu'un nom inscrit sur du papier, les "principaux" personnages secondaires n'étant esquissés qu'à grands traits, le personnage principal de Marko lui-même souffrant de crédibilité et de manque d'empathie, si bien que ses déboires comme sa rencontre amoureuse avec Marianne laissent le lecteur de marbre - et sans parler du personnage de flic totalement inutile et transparent.
Si les légendes bretonnes peuvent être intéressantes, l'ajout de surnaturel apparaît vite comme une fausse bonne idée, tant certaines scènes et descriptions frôlent le ridicule, jusqu'à y sombrer complètement lors d'un final quasiment risible.
Même constat pour la traque parallèle de la mafia qui fait elle aussi l'effet d'un pétard mouillé, d'un simple prétexte pour maintenir la tension durant le récit tant elle se termine de manière dérisoire. Avec des scènes d'action qui cumulent maladresses et procédés narratifs lourdingues, il est évident qu'Emmanuel Grand aurait mieux fait de resserrer son intrigue sur l'essentiel - l'île - plutôt que d'en superposer artificiellement plusieurs qui finissent par se dégonfler elles-mêmes comme des baudruches sans éviter l'écueil du ridicule.18/05/2014 à 20:02 2
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Sale temps pour le pays
8/10 Un des meilleurs polars français lus depuis longtemps. Je l'avais justement commencé un samedi après-midi, et pris par l'enquête, la reconstitution passionnante de l'époque et le suspense j'avais été obligé de le lire d'une traite pour voir comment ça se finissait ! Plus que quiconque, Michael Mention a appris et digéré l'écriture béhavioriste des plus grands auteurs américains, tout en se l'appropriant pour la faire sienne.
Le résultat est un style impeccable, c'est écrit à l'os sans un seul mot de trop, avec qui plus est quelques touches d'humour ou d'ironie ici ou là. Bref, un très très grand polar, à lire en écoutant la superbe BO concoctée par l'auteur !26/04/2014 à 18:02 9
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Un vent de cendres
8/10 Avec "Un vent de cendres", Sandrine Collette se hisse parmi les grandes plumes du roman noir français. Après le succès critique et public de son premier roman, consacré qui plus est par le Grand Prix de Littérature Policière, inutile de dire que Sandrine Collette était attendue au tournant.Or, si je n'avais personnellement pas été totalement convaincu par ce premier roman qui pêchait à mon avis par quelques menus défauts, j'avoue que j'ai été impressionné par celui-ci et sa maitrise absolue. Là où le précédent m'avait un peu frustré en ne me laissant pas vraiment de souvenir marquant, celui-ci sera parvenu à me laisser un certain nombres d'images et de sensations fortes.Il faut dire que l'auteur frappe ici très fort dès les premières pages, avec un prologue d'une redoutable efficacité, aussi percutant qu'habilement placé dans le récit, dont il permettra d'ailleurs de mieux interpréter le dénouement.Par la suite, elle nous plonge dans une sorte de version sombre et hautement vénéneuse de La Belle et la Bête, dévoilant un incontestable talent pour créer et jouer avec les atmosphères, alternant les ambiances, soufflant tantôt le chaud puis le froid.Le cadre naturel dans lequel se déroule l'intrigue est parfaitement restitué, des champs de vignes à la forêt qui les entoure, jusqu'à la grande maison élégante de ces propriétaires qui vivent reclus, blessés voire même au bord de la folie pour l'un. Les sentiments humains y semblent exacerbés, de l'attirance entre Octave et Camille dont naît une sensualité à fleur de peau à la colère de Malo face à ce rapprochement qu'il perçoit comme malsain.Grâce à une écriture évocatrice et un style qui a gagné en maturité, Sandrine Collette envoûte le lecteur dans cette espèce de conte revisité où la tension grandissante finit par exploser dans les derniers chapitres, jusqu'à un épilogue d'une infinie noirceur qui clôt ce magnifique roman noir par une seconde grosse claque pour le lecteur. Impressionnant !
25/04/2014 à 23:52 8
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Deux petites filles
6/10 Âmes sensibles, s'abstenir. Une plongée d'une noirceur totale dans les bas-fonds de Barcelone qui peut difficilement laisser indifférent. Un premier roman rageur, désespéré et étouffant qui, même s'il est parfois confus et manque de fluidité, se lit avec intérêt, l'estomac serré, et révèle toutefois un nouvel auteur prometteur.
19/04/2014 à 03:04 2
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On ne joue pas avec la mort
9/10 Une pure merveille !
Commencé en fin d'après-midi et finalement lu d'une traite jusqu'à deux heures du matin, impossible de décrocher de cette intrigue passionnante qui se dévoile peu à peu, comme les personnages, dans une construction absolument brillantissime qui ménage un suspense psychologique d'une rare finesse. Les personnages sont éblouissants de justesse, fascinants, avec leurs failles et leurs doutes. On devine qu'Emily St John Mandel a réalisé un véritable travail de dentelière pour que tout dans son texte soit si juste, si naturel, si touchant, si simple en apparence et s'enchaîne avec tant de fluidité. Subtile réflexion sur l'identité, les relations familiales et l'immigration clandestine, elle nous livre avec On ne joue pas avec la mort un roman en état de grâce.13/04/2014 à 13:45 4
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Monstres à l'état pur
8/10 Porté de bout en bout par une prose limpide et de toute beauté qui parvient à allier précision cinématographique et fulgurances poétiques, Monstres à l'état pur est un roman noir initiatique aussi fascinant qu'envoûtant. Ici, pas d'énigme à résoudre ou d'intrigue au cordeau - celle-ci servant davantage de fil rouge au récit - mais un texte magnétique qui nous fait voyager dans une Argentine méconnue et rurale : « Les épisodes relatés dans ce livre se sont déroulés en 1968 dans la province du Chaco, en Argentine. » Malgré la beauté des paysages, c'est un soleil de plomb qui sculpte ici, avec le dur labeur des terres, des hommes durs, travailleurs, secs comme des lianes. Certains paysans ont pu hériter de ces lopins de terre qui se transmettent de père en fils, uniques moyens de subsistance : c'est le cas du père de Miro. Pour les autres, ceux qui ne sont ni gros propriétaires terriens ni même paysans, seuls les combines et les petits trafics leur permettent de survivre. Confrontés à une police gangrénée par la corruption et capables des pires crimes, mieux vaut avoir la carapace dure. Pour Miro, adolescent solitaire, rêveur et fragile, ce n'est pas un endroit pour vivre. Maltraité par un père aigri par la vie, frustré de ne pas avoir eu un fils digne de lui et capable de reprendre à sa mort la petite exploitation familiale, il ne trouve guère de réconfort auprès d'une mère qui l'aime mais qui a malheureusement fui dans l'alcool. Après le meurtre de ses parents, conscient qu'il va être recherché par la police, il se décide une nuit à faire du stop et se retrouve dans la voiture d'un étrange personnage, Hansen. Celui-ci, trafiquant d'armes, le voit avant tout comme une aide provisoire, un bouclier humain pour la livraison à hauts risques qu'il s'apprête à faire, et dont il se débarrassera ensuite. Mais au fil de la route et des préparatifs à effectuer, il va découvrir peu à peu la personnalité complexe et les multiples facettes de Miro, lequel, de son côté, apprend à goûter à cette nouvelle liberté et à cette nouvelle vie d'aventurier qui s'offre à lui.
Noir mais lumineux, un roman qui transporte littéralement le lecteur dans une Argentine aussi belle que sauvage, à travers un récit sinueux mais bien agencé qui permet d'en découvrir les plus sombres facettes. À travers une galerie de personnages hauts en couleurs, une atmosphère pleine de contrastes merveilleusement bien restituée et de somptueux paysages, Molfino signe un très beau texte, riche en images fortes et envoûtantes que le lecteur n'est pas prêt d'oublier...20/01/2014 à 06:19 6
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Des noeuds d'acier
7/10 Un premier roman réussi avec lequel Sandrine Collette aborde le huis-clos selon l'angle du roman noir, en traitant avant tout de la dépersonnalisation de la victime et de survie. Elle a également l'habileté d'y confronter un personnage peu sympathique, Théo, un ex-taulard condamné pour avoir quasiment réduit son propre frère en bouillie après que celui-ci ait séduit sa fiancée. Un pari audacieux, car jamais ce personnage principal ne réussira à susciter durant son calvaire beaucoup d'empathie de la part du lecteur. Malgré une écriture parfois un peu plate, elle réussit à planter un décor et une situation crédible et glaçants. Seules la rapidité et la facilité apparentes avec lesquels son personnage se soumet et abandonne toute tentative de révolte ou de fuite sont assez déconcertantes, avec pour résultat une progression dramatique du récit qui semble un peu trop courte, comme amputée d'un dénouement qui aurait pu faire culminer la tension. Malgré cela, le découpage serré du texte et sa relative brièveté facilitent et accélèrent sa lecture. Bien que captivant et globalement bien mené, on peut toutefois être un peu déçu de constater qu'une fois la dernière page tournée, ce premier roman prometteur se révèle au final un peu trop "court en bouche", et qu'il n'ait pas ancré davantage de sensations, d'images, de souvenirs et d'émotions dans l'imaginaire du lecteur.
20/01/2014 à 03:15 5
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Dans la rue j'entends les sirènes
10/10 Après le déjà formidable "Une terre si froide", Adrian McKinty poursuit sa trilogie Sean Duffy digne de James Ellroy en signant à nouveau avec ce second volet l'un des meilleurs romans noirs de ces dernières années. Son écriture racée, parfaitement traduite par Eric Moreau, est puissamment évocatrice, teintée d'un humour noir et d'une ironie désenchantée qui font des merveilles. L'épaisseur des personnages, tous terriblement humains malgré leurs défauts et leur ambiguïté, est bluffante, le personnage de Sean Duffy, magnifique, gagne encore en profondeur et l'intrigue passionnante et menée de main de maître dévoile une fois de plus un pan de vérité trop méconnue sur cette période ô combien sensible de l'Irlande du Nord.
[ MAJ de 2021 ] : Ne pas manquer la suite de cette série Sean Duffy avec l'excellent "Ne me cherche pas demain" (lauréat du Prix Polars Pourpres 2021), qui vient enfin - après des années d'attente - d'être publié chez Actes Sud.31/12/2013 à 17:33 10