Dany33

535 votes

  • La Vie en rose

    Marin Ledun

    9/10 Ce titre, une invitation de la part de l’auteur … car il s’agit bien de cela : vivre cette nouvelle aventure dans la peau de Rose. Mais pas une aventure rose, non, il s’agit bien d’un roman à suspense. On se demande raisonnablement comment fait Marin Ledun, pour être aussi vrai dans la peau d’une femme : il aime comme une femme, il pleure comme une femme, il exprime ses sentiments, sa colère et ses peurs comme une femme, il conduit comme une femme et surtout il est enceinte comme une femme !
    Après avoir fait connaissance avec la famille Mabille-Pons l’année dernière dans Salut ô toi mon frère, il restait à Marin Ledun à confirmer son virage de style en nous proposant ce retour loufoque et néanmoins inspiré à Tournon. Il adopte le même ton léger que pour le premier épisode, pour conter les aventures de cette famille atypique. Même si je ne le conseille pas, ce volet peut être lu indépendamment du premier.
    L’auteur n’a pas abandonné les grands thèmes sociétaux. C’est avec sa plume de sociologue qu’il guide le lecteur, à la suite de Rose, perturbée par sa grossesse, qui doit un temps endosser les responsabilités de cheffe de meute, puisque les parents sont aux antipodes, en vacances. La fratrie, moitié d’origine, moitié adoptée, mais magnifiquement unie quand on touche à l’un de ses membres … Il ne faut pas toucher aux copains non plus …
    C’est truffé de citations littéraires, musicales, cinématographiques et de … téléréalités. .
    Le meurtrier « explose en plein vol. Il se laisse dominer par la colère, devient l'esclave de sa propre violence, descend dans la rue et dessoude le premier venu. Il défraie la chronique, il suscite l'émotion, il a son nom en gros en Une des journaux, il fait pleurer dans les chaumières. » C’est ce type de déviance qui nous guette, nous fragilise, peut nous faire basculer du côté du bourreau ou de la victime… de toutes façons il y a risque pour chacun(e) d’entre nous.
    Au cours de ces trop courtes 320 pages, on accompagne les révoltes de l’auteur grâce aux réflexions de Rose qui avec son franc parler, s’insurge contre les travers de notre société, celle du fric, de l’inégalité, de l’indifférence, de la manipulation, de l’ambition.
    Un régal jubilatoire et tellement juste. A quand le tome 3 ? Dans l’attente ne vous privez pas de découvrir le tome 1 des aventures de Rose …

    06/10/2019 à 09:31 3

  • Luca

    Franck Thilliez

    9/10 Objets connectés, allez-vous prendre le pouvoir ? Il semble bien que nos auteurs y croient … Le prologue de Luca n’est pas sans rappeler celui de Sylvain Forge dans Tension extrême (2017) et a tout lieu de nous inquiéter ! Bien moins optimiste que ses précédents romans (oui c’est possible !), Franck Thilliez nous questionne sur l’avenir de l’humanité, capable des pires horreurs au nom de la science. C’est donc avec ce roman très noir, que l’auteur nous propose une intrigue pleine d’imprévus, construite en deux temps : deux enquêtes qui pourraient rester parallèles, se rejoignent, puis une descente aux enfers.
    Les enquêteurs bien connus des lecteurs de Franck Thilliez, reprennent du service après une année de mise en sommeil. Si Sharko et Hennebelle y sont moins mis en avant (pour autant toujours aussi borderline), et c’est Nicolas qui va d’avantage révéler ses émotions, encore dans la quête de la sérénité après la disparition de Camille il y a quatre ans maintenant. La nouvelle recrue, son nouveau binôme, Audra, a elle aussi connu un traumatisme majeur qu’il n’aura de cesse de découvrir.
    Du sang et des mutations, voire des mutilations génétiques, pour sélectionner la férocité de chiens de combat, les dangers à connecter tous nos objets quotidiens, une arnaque à la GPA, des recherches ADN qui ouvrent des horizons malsains aux nouveaux Mengele , mais aussi une « humanité » en profonde transformation, subie ou volontaire, à faire frémir Nestor Burma dans sa version revisitée par Danielle Thiery … (cf. Piquette à la Roquette). Une flopée de dérangés, propres à nous interpeller l’éthique ! … et l’éthique, sans en faire un pilier de la morale bien-pensante, il en faut pour juguler tous les excès de notre société du paraître, de l’argent, du gain etc.
    Que dire des détournements de l’internet, de l’objectif de communication à ce qui pourrait devenir un palliatif à l’absence … ?
    Un très bon cru que cette parution 2019. La précision et le soin apportés à la démonstration scientifique n’en sont pas les moindres qualités. En prime une visite du Bastion …Franck Thilliez a réussi encore une fois à me surprendre !
    Pour ceux qui craignent de se perdre parce qu’ils ne connaîtraient pas les personnages récurrents de la série « Sharko », sachez que vous pouvez télécharger gratuitement le fascicule Sharko Henebelle couple de flic https://www.epagine.fr/listeliv.php?base=ebook&mots_recherche=Franck%20Thilliez%20-%20Sharko%20/%20Henebelle,%20Couple%20de%20flics%20-%20Petite%20anthologie%20biographique
    qui vous permettra de combler les manques et … de vous donner envie de remonter dans la bibliographie de l’auteur

    28/09/2019 à 16:25 7

  • La Liste Alpha

    Philippe Smans

    8/10 Le sujet est bien d’actualité et ma conscience écolo malmenée, confrontée à la ce qui pourrait être la solution finale de l’humanité en quête de survie …
    Un complot planétaire, tout sauf humaniste, vise à supprimer une grande partie la population, pour ne laisser vivre qu’une élite, celle-là même qui figure sur la liste, et ce en raison de la raréfaction des ressources vitales disponibles sur notre planète. Certains y voient leur survie car ils sont parmi les meilleurs … mais comme le dit le personnage principal, ce ne serait pas le progrès car le progrès ne peut être porté que par l’ensemble de la population. « …on ne bouscule pas comme ça un ordre établi, on n’accélère pas impunément un cycle qui a son rythme propre. En utilisant les données de cette liste Alpha, on dénaturerait les choses. On apporterait peut-être une amélioration réelle, mais à un prix tel qu’il aurait peut-être mieux valu ne pas précipiter une amélioration qui, de toute manière, aurait eu lieu, mais à son rythme, le seul qui soit vraiment efficace… »
    Un complot donc est mis sur pied pour diffuser une mort douce et euphorique mais, alors que l’un des principaux instigateurs demande son abandon, certains poursuivent leur funeste projet et la NSA s’en mêle avec ses moyens presqu’aussi importants que les complotistes.
    En fait l’auteur nous fait identifier deux dangers majeurs bien actuels : l’urgence écologique induite par le réchauffement climatique et le détournement des informations collectées sur le net (les datas). Ces deux thèmes font partie de l’actualité littéraire.
    Objets connectés : danger … je pense à Tension extrême de Sylvain Forge déjà en 2017, ou au plus récent M, le bord de l’abîme de Bernard Minier ainsi que quelques autres.
    Réchauffement climatique : urgence … et là depuis 2016 les auteurs de thrillers y trouvent une source d’inspiration comme Yannick Monget et son inoubliable Résilience et d’autres par la suite.

    Avec des références au militantisme bien réel, comme le charismatique Paul Watson, La liste alpha est le premier roman de Phil Smans. Nous espérons que son sujet restera une fiction et non l’anticipation de notre fin annoncée …
    J’ai beaucoup apprécié cette intrigue, certes parce qu’elle parle à ma fibre écolo, mais parce qu’elle est bien construite, bien documentée et éminemment contemporaine … hélas ! Un bon rythme fait que l’on y croit … hélas encore pour l’humanité et tant mieux pour les lecteurs !

    26/09/2019 à 13:07 4

  • Piquette à la Roquette

    Danielle Thiéry

    8/10 Quelle bonne idée a donc eu cette maison French Pulp Editions, de donner un coup de jeune au héros de Léo Mallet, en confiant sa nouvelle destinée à nos auteurs de polars contemporains.
    Cette fois c’est Danielle Thiery qui a endossé l’habit et la personnalité de Nestor Burma et qui l’accompagne à la première personne dans l’antre du diable et des tatoueurs. Comme à l’accoutumée, notre détective privé va accompagner un client, solvable cette fois, mais frappé de malchance, à la recherche de sa petite-fille disparue. Nestor sera rattrapé par une récente et triste histoire d’amour.
    Dans un Paris historiquement peuplé de mauvais garçons et de filles de petite vertu, en voie de boboïsation, Nestor va devoir jeter ses nouveaux complices, secrétaire et geek, dans la tourmente et aura par ailleurs beaucoup de craintes pour leur avenir. On y découvrira le Paris souterrain, sectaire, satanique et luciférien. On approchera les tatoueurs en découvrant le dernier chic en matière de marquage et d’implants. Un monde souterrain, noir et sans concession traité avec humour, dans un environnement social bien contemporain, du paraître et du plaisir. Une parenthèse heureuse dans la biographie de cette auteure.
    6ème opus de cette collection, à lire sans modération, remarquablement documenté et au ton fidèle à l’esprit de son créateur
    #Piquetteàlaroquette #NetGalleyFrance

    22/09/2019 à 09:28 2

  • Une Colonne de feu

    Ken Follett

    8/10 1558 / 1620
    La saga des familles Willard et Fitzgerald sert d’alibi à Ken Follett pour nous narrer l’époque troublée qu’on appelle « les guerres de religions ». L’affrontement entre les catholiques et les protestants, tous plus ou moins intégristes, tous sûrs du bien fondé de la morale qui les guide et de leur légitimité, est au cœur de ce qui est surtout une lutte territoriale et de pouvoir, entre l’Angleterre, la France, l’Espagne, Les Pays-Bas eux-aussi espagnols et l’Ecosse.
    L’auteur nous présente cette Colonne de feu comme une suite des Piliers de la terre et d’ Un monde sans fin, alors que seule la cathédrale de Kingsbridge a survécu aux deux premiers épisodes. J’avais beaucoup aimé ces deux premiers pavés de la trilogie des Piliers de la terre. J’ai trouvé ici, certes un ouvrage historique hyper documenté, une encyclopédie du XVIème siècle, mais les aventures des protagonistes de cette fiction beaucoup moins palpitantes que les précédentes. Peut-être la surprise avait-elle fonctionné à plein avec le premier opus et qu’elle est moins présente avec … l’habitude.
    La richesse de ce troisième tome se trouve indéniablement dans les descriptions des modes de vie de l’époque, des vêtements, de la gastronomie, des usages et aussi des événements douloureux comme les tortures et massacres. L’immersion dans cette Europe du XVIème siècle, dans ses guerres terrestres et maritimes dont notre scolarité a gardé quelques traces, dans le cortège de l’Inquisition dont on nous a moins parlé, est criante de vérité et nous renvoie à notre quotidien, nos conflits actuels … notre société n’ayant pas vraiment évolué vers l’humanisme et la tolérance.
    A noter que l’auteur a eu la très bonne idée de nous préparer le mémento des personnages en début de l’édition.
    J’ai apprécié cette lecture même si je me suis perdue dans quelques descriptions. L’entreprise est impressionnante avec la cohorte de conseillers et de traducteurs dont il s’entoure. J’ai lu tous les romans de Ken Follett, celui-ci n’est pas mon préféré !
    Enfin, les dernières phrases de cette épopée nous laissent penser à une suite …

    18/09/2019 à 08:21 3

  • IVM - tome 1

    Katia Campagne

    8/10 Secouée je suis …
    Je ne suis pas adepte du fantastique, trop cartésienne pour ça. Cependant je ne rechigne pas devant une petite dose d’étrangeté, de surnaturel, dès lors que l’intrigue principale tient la route.
    C’est donc avec plaisir que je me suis fait embarquer par Katia Campagne pour un deuxième voyage, après Kuru, sur les conseils de Nick Gardel. Un voyage envoutant.
    De nombreux personnages, doublés parfois de leurs petites voix, leur conscience bonne ou mauvaise, se croisent dans le Vercors. Tous ont des secrets plus ou moins avouables. Les traumatismes de l’enfance ont laissé des séquelles, voire des psychoses. Eléane et sa mère tentent d’oublier leur passé de victimes maltraitées, mais ce passé lui ne les oublie pas et va réapparaître avec toute sa cruauté et ses peurs. A part ça, un frère va retrouver sa sœur avec bienveillance ou malveillance … l’histoire le dira avec pas mal d’hémoglobine.
    Donc j’ai aimé même si je me suis perdue dans le dénouement et que j’ai dû focaliser mon attention pour poursuivre les vrais méchants !
    S’agissant du tome 1 d’une trilogie (un tome 3 annoncé), on me dit que quelques personnages sont encore en état de poursuivre leurs démons dans le tome 2 alors … après une pause je l’avoue nécessaire, j’irai faire un tour du côté de ce deuxième épisode car l’auteure a su me surprendre.

    17/09/2019 à 15:10 3

  • Morts chroniques

    Nick Gardel

    8/10 Virage radical de style pour ce nouveau roman de Nick Gardel, quoique …. Non pas qu’il manque d’humour, les situations sont toujours originales, mais il est résolument plus grave. Il nous offre ici un thriller plus classique que ce à quoi il nous avait habitués.
    Amis internautes, nous sommes dans ce roman comme à la maison, en immersion dans le réseau social le plus partagé : Face Book. Au hasard d’une enquête menée par des personnages presque « normaux », le lecteur est pris en otage ! Des groupes de lecture, des chroniques et commentaires amicaux ou franchement odieux, des frustrations mal assumées, plantent un décor familier. Cette réalité virtuelle cache-t-elle le mobile de cette série de vrais crimes commis en prenant modèle sur un exercice pratiqué sur le net : le cadavre exquis ?
    L’auteur ici nous surprend d’une part par le traitement du sujet. Il nous confirme d’autre part sa grande maîtrise de la langue et des dialogues ciselés. Son humour pour être moins flagrant, n’en est pas pour autant absent et la satyre de nos nouveaux modes de communication, de nos amitiés virtuelles, d’autant plus cruelle : un exercice efficace.
    Nick Gardel confirme son talent d’observateur sans concession de ceux qui se découvrent un sens critique toxique sous couvert d’anonymat ou d’avatar, en égratignant au passage l’intolérance.
    Un virage réussi donc. Plus polar que les précédents romans qui méritent eux aussi d’être découverts, pour leur originalité.

    15/09/2019 à 18:27

  • Heimaey

    Ian Manook

    10/10 Soulniz est en froid avec sa fille fugueuse depuis 3 ans. Il décide de lui offrir LE voyage de réconciliation, en retrouvant ses pas d’il y a quarante ans en Islande. Rebecca sous ses allures de rebelle a publié les détails de leur trip sur le net et … toute l’e-planète est au courant de leur itinéraire. De fait cela va faciliter la traque de ces Français depuis l’aéroport … jusqu’où ira la malveillance à leur encontre ? S’agit-il vraiment de malveillance ? Pourquoi avoir décidé ce voyage au bout du monde ? Pour le grand tour des spots de géothermie ? Pour plonger dans les racines de la culture islandaise ?
    Tout ça ne serait (presque) rien si deux kilos de drogue n’avaient pas été subtilisés à un gang lituanien dont le chef parle de façon décalée, par citations littéraires …
    Pour le paysage, c’est beau et contemplatif comme du Franck Bouysse qui aurait délaissé sa campagne corrézienne pour le contraste chaud-froid du grand nord. On connaissait le talent de Ian Manook pour emmener ses lecteurs au fin fond de la Mongolie et de la philosophie des moines Shaolin, il confirme ici sa grande connaissance des cultures et sa maîtrise des ambiances de l’extrême le tout avec un humanisme rare.
    Attention ce thriller palpitant est le premier d’une série dite Kornelius Jacobson du nom du flic improbable de cette aventure, le tome 2, Askja, étant annoncé pour le 02/10/2019 …

    12/09/2019 à 09:30 3

  • La femme aux fleurs de papier

    Donato Carrisi

    7/10 Un huis clos très particulier où il ne s’agit pas de tuer l’autre mais de l’écouter … mission que s’est vu confier le médecin militaire autrichien parce que tout simplement il connait la langue de l’ennemi. Le prisonnier doit révéler son identité mais préfère raconter la vie de Guzman …
    Je ne m’attendais pas à un tel roman sous la plume de Donato Carrisi qui a d’avantage habitué le lecteur aux thrillers psychologiques et violents. Il confirme son talent de conteur mais aussi son goût de la précision de la narration, cette fois pleine d’épicurisme.
    Au grès des rencontres des femmes de sa vie, Gruzman évoque par la bouche du prisonnier, Marseille et ses pluies savonneuses, les montagnes qui chantent en Asie, l’art de fumer et la conquête de la femme de sa vie. Autant d’impressions qui font écho aux souvenirs de Roumann, le médecin.
    Pas un thriller, pas feelgood non plus, un regard particulier sur la vie tout en mélancolie, discrétion et élégance et une fin inattendue. Très bon moment de lecture pour ce court roman !

    08/09/2019 à 09:39 2

  • La Fille de la plage

    Alexis Aubenque

    7/10 Qui est Chelsea, cette jeune femme retrouvée sur la plage, abimée physiquement et mentalement. Ange ou démon ? Victime ou simulatrice ? Elle échoue au milieu d’un « club » de jeunes adultes nantis, sans trop de soucis d’avenir sauf à se fixer dans une vie sentimentale qui s’ébauche. Cette micro société va être gentiment mise à l’épreuve par l’arrivée de cette nouvelle créature de rêve, qui irradie d’amitié et de bienveillance … Est-ce bien naturel ? Arnaque ? Manipulation ?
    L’auteur fixe son action une nouvelle fois sur la côte ouest des Etats-Unis, dans une société « hors sol » qui lui permet de développer les personnages qu’il nous propose.
    J’ai apprécié l’épisode décalé avec la rencontre des bikers au grand cœur, à peine intéressés et surtout le personnage haut en couleur de Dodi qui ouvre une réflexion sur la vie et ce qu’on peut en attendre, les objectifs qui valent vraiment la peine d’être poursuivis et la souffrance de la vieillesse.
    Pas thriller, pas polar, juste gris …clair. Un moment de détente dans un monde privilégié de Santa Barbara où l’on tremble à peine pour les déboires de Chelsea.

    26/08/2019 à 09:33 1

  • Le Chien Arabe

    Benoît Séverac

    8/10 Paru le sous le nouveau titre "Trafics" le 09/03/2017 aux éditions Pocket – collection Thriller
    Immersion dans le Toulouse post Merah, dans ces zones délaissées de la République et comme la nature à horreur du vide, l’espace est investi par les trafics et les intégrismes. Ces deux mondes se nourrissant l’un l’autre tout en se haïssant, au cœur d’une communauté d’habitants complices ou victimes malgré eux.
    Parfois un citoyen se lève … Sergine, par exemple, va essayer d’aider une ado. D’abord parce qu’elle est vétérinaire et que Samia a un chien malade, ensuite parce qu’elle apprend que la jeune fille va devoir subir un mariage forcé. A partir de ce moment notre héroïne va découvrir, provoquer, défendre ses valeurs, se mettre en danger. Ajoutez une petite guéguerre entre les services de police et vous aurez ce thriller mâtiné de polar, au rythme soutenu, sans concession.
    Avec Trafics j’ai découvert l’écriture efficace de Benoît Séverac et il m’a fallu relire sa biographie pour constater … qu’il n’était pas flic… quelle pertinence pour cette observation in situ ! Le personnage de Sergine est à mettre au panthéon des nanas qui marquent l’imaginaire du lecteur … une belle personne !
    J’ai beaucoup aimé cette intrigue originale, dans les cités aussi vraies que celles d’Olivier Norek dans Territoires ou de Ghislain Gilberti dans Le bal des ardentes et on peut dire que la misère n’est pas moins pénible au soleil ! Bref un peinture réaliste, curieuse, efficace et déroutante.

    21/08/2019 à 10:37 3

  • Crime dans les Marolles

    Nadine Monfils

    8/10 Je remonte le temps avec cette série de nouvelles aventures … j’ai commencé par « les carats de l’opéra » de Jacques Saussey et je ferme à l’instant « crimes dans les Marolles » de Nadine Monfils.
    On sent que l’auteure s’est beaucoup amusée à envoyer Nestor Burma à Bruxelles en compagnie de Guy Marchand son ami … histoire de perdre un peu le lecteur qui comme moi ne peu dissocier l’un de l’autre. Nestor va jouer perso et solitaire en aidant la petite amie d’un suspect prochainement relâché pour bonne conduite. Le flair de notre privé préféré va le conduire dans les milieux les plus divers de la capitale belge. Il visitera aussi deux maisons de retraite histoire de nous laisser faire les comparaisons sordides.
    Bruxelles est le personnage principal de cette aventure policière décalée. Nul doute que l’auteur aura eu à cœur de nous faire partager son plaisir d’arpenter cette superbe ville, goûter ses spécialités culinaires et ses bières, se frotter à cette langue bien particulière, ni flamande, ni wallonne … bref apprécier tout ses attraits et se remémorer ses illustres comme Brel ou Magritte. Avec humour elle nomme ses chapitres des titres de chansons intemporelles et consacre une partie de son intrigue à évoquer le film de Kubrick Orange mécanique … toute ma jeunesse Alex.
    En résumé un court roman pour une intrigue bien glauque, inspirée d’un fait divers bien réel, de l’hémoglobine bien rouge, une balade dans Brussel et beaucoup de clins d’œil amusés pour la plus normande des auteures belges. Vous avez dit bonheur ?
    Lecture idéale pour les vacances !

    21/08/2019 à 09:18 2

  • Sale temps pour le pays

    Michaël Mention

    8/10 L’action se déroule du 20 janvier 1976 au 3 avril 1981et relate une traque, inspirée de faits réels, une série de meurtres de femmes majoritairement prostituées « économiques », ritualisés, laissant penser à un tueur en série, dès lors que les différents services de police auront rapproché leurs enquêtes. Il y a bien la police scientifique mais le décalage avec notre époque numérique ajoute aux difficultés de nos enquêteurs. Un chef bienveillant et un duo de circonstances vont se mettre en chasse au cours de ces quinze années de peur dans le triangle Manchester-Leeds-Bradford.
    Michaël Mention comme à l’accoutumé, ne laisse rien au hasard de ses investigations, baignant semble-t-il avec plaisir dans cette ambiance de basculement gouvernemental, ne présageant rien de bon pour les petits et favorisant la finance. Cet exercice lui permet de manifester sa révolte contre l’injustice et toutes les inégalités.
    Premier volet d’une « trilogie anglaise », publié en 2012, ce polar pur jus confirme le talent de l’auteur, capable de nous embarquer à chacun de ses romans, dans un nouvel univers et avec un style renouvelé, émaillé de citations musicales et cinématographiques.

    18/08/2019 à 09:25 5

  • M Le bord de l'abîme

    Bernard Minier

    9/10 « Et que se passera-t-il quand des centaines de millions de personnes auront délégué (à DEUS) leur pouvoir de décision ? … Et si, à ce moment-là, quelqu’un derrière DEUS décidait de modifier le programme afin de leur dire pour qui voter, quoi penser, quoi acheter, à qui confier leur argent ? »
    C’est le retour flippant puissance 10 de Big Brother que nous propose Bernard Minier comme avenir réjouissant … Une vaste manipulation planétaire est en route … ça on le savait, mais chacun d’entre nous se pensait suffisamment outillé pour y faire face … A Hong Kong, Moïra, une jeune scientifique a été recrutée pour alimenter un « assistant personnel » en voie de développement, nommé Deus. Déontologiquement les apparences sont sauvegardées car chaque utilisateur pourra paramétrer la bête en fonction de ses opinions, semble-t-il. Dans la pratique, Moïra va découvrir de nombreuses malversations et son parcours vers la vérité sera ponctué de morts brutales et de rencontres ambiguës pour aboutir à un dénouement cataclysmique prémonitoire et métaphorique.
    On ne peut imaginer que le choix du prénom de l’héroïne soit gratuit, ni celui de la merveille technologique vouée à faire note bonheur. Au-delà de l’épopée que nous propose Bernard Minier, bien éloignée des aventures toulousaines de Servaz, il y a une vision extrêmement noire de notre avenir voire de notre futur très proche. Il nous invite à la vigilance.
    Oui ce roman est bien éloigné de ce qu’a écrit l’auteur de Glacé : une vision volontairement pessimiste pour ébranler nos convictions et notre confort, mais toujours ce talent de conteur que j’aime beaucoup. Un thriller hyper documenté, assez classique dans son déroulement, aux rebondissements parfois attendus, parfois improbables. Un bon moment de lecture !

    07/08/2019 à 08:42 4

  • Le Sicilien

    Carl Pineau

    8/10 Pour son deuxième roman, Carl Pineau adopte une trame beaucoup plus classique que dans l’Arménien. Un personnage central, nous fait découvrir sa descente aux enfers sur deux mois. Principal suspect dans une affaire de meurtre, il sympathise néanmoins avec Greg Brandt, le flic atypique déjà rencontré dans la précédente décennie. C’est le pari que s’est imposé l’auteur, celui de retracer une intrigue dix années après L’Arménien, dans ce deuxième volet de la trilogie Les nuits nantaises. Nous sommes dans les 90’s et toujours dans les nuits chaudes sur les bords de Loire. Dario, le narrateur, est barman, il succombe aux charmes de Bleona que l’on retrouvera morte dans son véhicule détérioré. A partir de ce moment, plus rien ne va pour lui, sa compagne disparait, il se fait tabasser, ses rencontres complaisantes semblent lui nuire, sa tante qui l’a élevé est mourante, son avocat se révèle véreux, … et bien pire encore …mafia sicilienne et la même en version russe, drogue, enlèvement, sida, psychopathe, pervers sexuels, …
    Près de 300 pages bien menées, sans voyeurisme pour des sujets sensibles, où le dénouement et la révélation de la vérité peuvent paraître un peu abruptes, tant on ne pouvait s’y attendre.
    Maintenant on va attendre les années 2000 …

    26/07/2019 à 19:06 2

  • La Prisonnière du diable

    Mireille Calmel

    8/10 On connaissait de cette auteure ses écrits sur Aliénor d’Aquitaine, la femme emblématique du XXII ème siècle et c’est cette fois dans l’arrière pays niçois, à l’époque charnière entre le moyen-âge et la renaissance que se situe l’action, une période où les esprits sont restés fortement marqués par la religion toute empreinte de sorcellerie. C’est ce qui va guider les protagonistes de ce thriller historique. Parce qu’il s’agit bien d’un thriller que nous offre Mireille Calmel.
    Le châtelain de la petite communauté d’Utelle, Raphaël veut conjurer un sort et faire disparaître l’enfant à naître de Myriam. De son côté un mystérieux commanditaire envoie un message à Hersande, la religieuse qui veille sur le sanctuaire de Notre-Dame d’Utelle, qu’elle doit transmettre à un tueur en vue d’éliminer un habitant de la cité. Elle semble connaître la victime désignée mais son devoir l’emportera-t-il sur ses sentiments ?
    400 pages de thriller médiéval, très documenté qui nous rappelle ou fait découvrir la langue, les usages de l’époque au niveau culinaire, la vie quotidienne, les remèdes par les simples et surtout les relations humaines et inhumaines, la domination des nantis sur la piétaille, dans une région soumise aux aléas sismiques. Certes le fond historique fait référence à des faits et certains personnages réels et induit que l’action ne pourrait pas se dérouler aujourd’hui, mais les comportements et rapports de force ont-ils vraiment évolué positivement avec les téléphones portables et internet ? Les enjeux sont-ils transposables de nos jours ou sommes-nous plus vertueux ? Pas sûr … Une histoire passionnante en tous cas !

    23/07/2019 à 12:00 3

  • Poissons volants

    François Filleul

    8/10 Tout y est. le lieu : au pied du rocher de Gibraltar, une petite ville oubliée où les voitures arrêtent au passage à niveau pour laisser la priorité … aux avions. le contexte économique : des industries polluantes en perdition et le système D D une économie parallèle qui permet la survivance, favorisée par sa situation géographique. La politique : à peine plus corrompue qu'ailleurs, marchés publics truqués, fonds européens détournés et émergence de Podemos. La police : à court de moyens et bien alcoolisée, dont le parking est sécurisé par des junkies qui survivent grâce à ce petit commerce. La culture : la cavalcade des rois mages bien préservée avec les spécialités culinaires locales. Les migrants exploités, qui jouent au foot avec les flics qui les renvoient sur leurs terres natales le lendemain. La vraie vie quoi !
    Et une enquête qui échoue entre les mains de l'inspecteur-chef Fulgor et son équipe, par hasard qui, fort de son intuition, va s'acharner à découvrir qui sont les gentils et qui sont les méchants … à qui profitent les crimes ?
    Et ces poissons volants … qui arrivent avec six mois d'avance alors qu'une canicule s'est installée sur l'Andalousie, dont le séchage devrait donner de quoi vivre aux pêcheurs, en temps « normal ». Anormal également cette catastrophe écologique d'échouage de cétacés …
    Beaucoup de choses dans ces 250 pages, une bonne enquête, classique dans sa structure mais édifiante par son contexte qui évoque tous les centres d'intérêt de l'auteur avec un ton percutant et très juste, avec beaucoup d'humour et de dérision.
    Bref, tout ce que j'aime pour ce premier roman de François Filleul. le ton est juste, sans emphase. le récit est ponctué de courts dialogues en espagnol, ce qui contribue à la pointe d'exotisme et rythmé d'articles de presse qui apportent la vision décalée du spectateur … En le repérant, Barbara Abel ne s'est pas trompé … une très bonne découverte !

    16/07/2019 à 13:02 1

  • Ristretto

    Bertrand Puard

    8/10 L’auteur nous invite à partager une immersion dans le monde de la finance où le café n’est rien moins que le deuxième marché mondial après le pétrole … c’est dire les enjeux qu’il représente.
    Il s’agit d’un thriller et le traitement de l’intrigue est somme toute assez classique par son plan et ses protagonistes (un triangle amoureux, des bons pas vraiment bons, des méchants aux circonstances atténuantes, des politiques pas très nets qui affichent néanmoins la lutte contre l’évasion fiscale comme prioritaire, une aventure sur plusieurs continents pour laquelle l’on ne tient pas compte de l’empreinte carbone pour les déplacements, un enfant en danger, de l’hémoglobine, des coups, des flammes, des explosions … )
    Une jeune femme, Clara a échappé à une funeste fin en ratant son suicide après un licenciement abusif, alors qu’elle connaissait (presque) tous les rouages du quasi monopole du café. Elle a gardé dans son cerveau une balle qui a affecté ses capacités en la rendant hypermnésique et son ancien boss décide de faire appel à elle pour une mission particulière. Des traders, anciens compagnons de galères dorées, sont suicidés, disparus, en fuite … et des indices laissent à penser qu’il s’agit bien d’une série destinée à porter préjudice au monopole …une traque va entraîner Clara, flanquée d’un garde du corps, à la poursuite des « éperluettes » dispersées.
    Quand la finance dirige le monde, elle met entre parenthèses la déontologie dont pourtant elle se réclame. C’est ce que le lecteur va constater au long de ces presque 400 pages haletantes, enrichies de l’expérience de l’auteur dans ce monde impitoyable.
    Très bon moment de lecture pour les amateurs du genre.

    16/07/2019 à 11:31 3

  • Les Carats de l'opéra

    Jacques Saussey

    8/10 Nestor Burma c’est ce « mousquetaire anarchiste » repenti pour raison économique et peur de la prison, héros de Léo Mallet son créateur qui lui a consacré plus de vingt épisodes et qui est agréablement repris par d’honnorables plumes polardeuses à l’initiative des éditions French Pulp.
    Jacques Saussey y signe le troisième épisode de ce Nestor Burma revisité et modernisé : il utilise internet et le téléphone mobile … il me semble aussi avoir un peu rajeuni pour l’occasion.
    J’ose avouer, pour moi qui n’ai jamais lu Léo Mallet, je garde en tête l’incontournable interprétation de Guy Marchand, qui assure pour la série TV, outre le rôle titre, la narration en voix off et quelle voix ! Ce ton sarcastique et décalé qui relativise tous les aléas de ces aventures parisiennes et que l’on retrouve ici avec grand plaisir. C’est cette douce musique qui chante à l’oreille du lecteur au long de ces 271pages.
    Avec brio Jacques Saussey on le sent, s’est amusé à reprendre ce personnage, toujours aussi sensible aux charmes féminins en général et à ceux de sa secrétaire Kardiatou en particulier, avec grand respect toutefois. L’auteur nous fait aussi le plaisir de nous faire visiter son univers professionnel car, n’oublions pas qu’il touche de très près le monde de la joaillerie. Ne boudez pas cette immersion très documentée dans la quatrième dimension du luxe.
    Nestor Burma retrouve dans cet épisode les nouveaux personnages de cette série : Mansour le geek et Stéphanie la commissaire, il croise aussi Magne au Bastion … on sait que l’auteur aime les clins d’œil et les lecteurs s’en régalent. Burma va entreprendre de trouver l’assassin de son pote de frasques juvéniles, un certain Fabrice Pichon alias Verlaine, tout un programme … tout un hommage !
    L’intrigue où évolue en sous-marin notre Nestor est donc une plongée rue de la Paix mais aussi dans les sous-sols méconnus de Paris, un Paris qui communiquait à grande vitesse avant internet … bien avant internet ! Cette aventure lui permet d’évoquer les SDF, les immigrés, dans cette ville de l’indifférence…
    Une bien agréable parenthèse dans la production de cet auteur que nous attendons toujours avec impatience … le prochain, promis, on y retrouve Magne et Heslin ! Ne boudez pas cet intermède !

    Et oui, les diamants … « Bernard-Henri les vît » c’est Jacques Saussey qui le dit !

    04/07/2019 à 09:07 1

  • Le Bûcher de Moorea

    Patrice Guirao

    9/10 Cet objet entre nos mains est un roman « noir azur » … noir certes nous savons ce que c’est mais il est bien plus que ça. Azur parce qu’il se passe dans les îles et plus précisément en Polynésie française mais pas que …

    Lilith l’héroïne, est photographe de presse, sa complice journaliste à l’affût du scoop pour le prix Pulitzer. Toutes deux vont « collaborer » avec la Gendarmerie pour résoudre ce qui apparaît comme quatre meurtres rituels. Ce qui apparaît, car la tentation est grande d’incriminer des petits loubards locaux, qui pour vivre aux antipodes, dans une « cité », n’en subissent pas moins que leurs homologues métropolitains, le délaissement de la collectivité à leur égard.

    En métropole, Nael est sans scrupules quand il s’agit de se venger de sa femme Ariane. Il va être rejoint par sa voix intérieure, son « Jiminy criquet », son rat (presque) domestique, Gaspard … sa conscience, son bon sens …tous deux vont tenter de trouver les origines de cette histoire peu commune.

    Ajoutons au paysage le « mana ». Le mana est un pouvoir d’influence, véhiculé par les revenants et les esprits au travers d’un mortel bien réel. Tonton Raymond est donc le Mana de service qui use de son hypersensibilité pour préserver sa nièce, Lilith, dont il a eu la garde depuis son enfance.

    Au même moment dans ce petit coin de France, se déroule un « festival des danseurs du feu », festival ethnique rassemblant des troupes internationales, pas forcément les plus amicales entre elles.

    Une fois tous ces éléments posés, il se dégage une ambiance, un rythme qui pour paraître paisible n’en est pas moins désespérant. Désespérant ce rejet de la différence, cette spoliation des ressources locales, cet asservissement par le plus fort, au nom du fric et du pouvoir en général. Ils sont cependant bien contemporains nos cousins du bout du monde, la preuve … les technologies utilisées, ils essayent tout simplement de s’en sortir au mieux. Résultat : une intrigue bien menée, un suspense bien entretenu, une atmosphère moite et contemplative … des cocotiers dangereux, des personnages attachants, un univers en vert …

    Un roman noir-azur, un thriller contemporain que j’ai beaucoup aimé et qui m’a rappelé le brillant « sur le ciel effondré » de Colin Niel (coup de cœur 2018).

    25/06/2019 à 11:32 2