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Double amnésie
8/10 Mais quelle histoire ! Quel drame ! Il est délicat de résumer et surtout de rapporter l’intrigue pour éviter de la divulgâcher. Une double enquête qui n’en fera qu’une, avec un manipulateur qui se fait appeler l’Oeil. On découvre chapitre après chapitre les raisons qui ont poussées Abby Le Guen à tuer froidement son mari, les secrets de famille, et l’enquête officieuse d’Eloïse Bousquet à innocenter sa sœur jumelle, Marion, inculpée d’infanticide.
Avec Double amnésie, Céline Denjean me confirme tout le talent qu’elle avait su déployer dans Le Cheptel. Une intrigue des plus glaçantes et un style très personnel. Rien ne manque et rien n’est superflu. Une auteure à suivre.
26/09/2021 à 09:22 7
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Là où chantent les écrevisses
10/10 Chère Kya,
« La vie est belle et cruelle à la fois, elle nous ressemble parfois ». Ce sont ces paroles d’une chanson qui me traversent l’esprit quand je repense à votre vie.
Cruelle, votre vie le fût : abandonnée dès votre plus jeune âge par votre famille, vous vous êtes construite et, au milieu des marais, avez appris tout ce que votre environnement pouvait vous apporter. De là où chantent les écrevisses vous vous êtes forgée ce caractère inébranlable, cette envie et cette force de vivre aussi puissantes qu’essentielles dans ce milieu hostile.
Cruelle toujours quand certaines personnes ont abusé de votre innocence. Se sont amusés avec les sentiments, ont joué avec le plus fort, le plus noble : l’amour.
Mais certains épisodes et quelques rencontres furent belles et décisives : Jumping et sa famille, qui, sur leur ponton, vous ont apporté de quoi survivre mais plus que tout, une amitié infaillible. Et le jeune Tate, l’ami de votre frère, qui vous a appris à lire et à écrire. Car, pour vous, il était hors de question d’aller à l’école. Isolée dans les marais, vous avez su trouver le but de votre vie. Faire découvrir et aimer cette faune et flore si riche, si belle et tellement vitale.
Kya, je vous suis éternellement reconnaissant de m’avoir apporté à travers votre histoire tant de beauté, et de belles leçons sur la vie.
26/09/2021 à 08:57 10
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Avalanche hôtel
8/10 Première entrée dans l’univers littéraire de Niko Tackian. Compagnon de Franck Thilliez pour l’écriture de scénarios TV, Niko Tackian partage cet univers des romans noirs à suspense. Mais ce n’est pas pour autant qu’il faudrait le classer en seconde division. Niko Tackian m’a plongé dans cette intrigue onirique, cauchemardesque et angoissante avec force, style et talent. J’étais en apnée, cherchant à respirer entre les courts chapitres, à comprendre et chercher ce qui se tramait dans cet hôtel.
Un homme se réveille nu, la mémoire en miette, dans une salle de bain d’hôtel : Avalanche Hôtel. Le plus bel hôtel des années 80 à Vevey, canton suisse. Il découvre qu’il est détective. Il se nomme Joshua Anderson. Un drame vient de se produire : le jour de ses 18 ans, Catherine Alexander vient de disparaître. La directrice de l’hôtel le somme d’enquêter et de trouver la fille de la très riche famille fidèle à Avalanche Hôtel. Suivant sa voix intérieure, sa quête va l’emmener dans une station de ski, où il va être emporté par une avalanche.
Il se réveille dans un lit d’hôpital. En 2018. Toujours le même homme, Joshua découvre qu’il est policier et qu’il mène une enquête sur une femme inconnue qui est dans le coma depuis des années.
Ces quelques lignes ne résument que les 20 premières pages du roman qui en compte 260. Et le rythme ne ralentit pas, nous encourageant à dévorer les chapitres.
C’est peu dire que j’ai été séduit par cette histoire et le style de Niko Tackian, que je regrette de ne pas avoir découvert plus tôt. La trame, le rythme, la plume, les personnages, les cliffhangers, l’atmosphère… tout m’a plu dans cet Avalanche hôtel. Cela va sans dire que je vais me plonger dans ses autres livres et que je ne peux que conseiller à celles et ceux de découvrir cet auteur.
11/09/2021 à 09:19 6
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Une Confession
7/10 John Duxbury, chef d’entreprise de papeterie qu’il a créée et qu’il gère avec son fils, Harry, écrit dans son journal. Il souhaite qu’un jour, celui-ci sache la vie qu’il a menée : triste, sans enthousiasme. Avec sa femme, Maude, qu’il a aimé d’un véritable amour mais qui s’est effrité. A tel point que désormais, le couple fait lit à part.
Harry insiste pour que ses parents prennent quelques jours de congés, avec l’espoir non feint que l’amour revienne, le temps de passer quelques jours au bord de la mer. Mais une balade tourne au drame : Maud chute mortellement du haut d’une falaise. Le drame est classé en accident quant trois jours plus tard, un client de l’hôtel vient affirmer à la police qu’il a vu John Duxbury pousser sa femme. Alors qui faut-il croire ? Le mari qui pouvait aspirer à une meilleure vie, la cinquantaine passée ? Un témoin avec qui John Duxbury avait eu des propos dégradants à son encontre la veille du drame ? L’inspecteur Harker mène son enquête.
Une confession est considéré comme un livre oublié, réédité 35 ans après par les éditions Sonatine. Un livre encensé par Simenon, d’une structure classique où les ombres de Poirot et de Maigret planent à côté de l’inspecteur Harker. Si l’intrigue n’est pas originale, son traitement par l’auteur est subtil. Le face à face final, même s’il est emprunt d’un profond humanisme, offre une décevante conclusion. Dommage.
05/09/2021 à 17:44 5
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Thérapie
8/10 Viktor Larenz, célèbre et médiatique psychiatre en schizophrénie, accompagne sa fille, Josy, à son rendez-vous chez l’allergologue. La jeune adolescente souffre depuis plusieurs mois d’une maladie qu’aucun médecin n’arrive à diagnostiquer. Après avoir été aux toilettes, Viktor constate que Josy a disparu. Et pire : personne ne l’avait vue dans la salle d’attente. Et pire encore : Josy n’avait pas de rendez-vous.
4 ans plus tard, Viktor Larenz est attaché à un lit d’un hôpital psychiatrique. Il vient de sortir d’un état de choc. Il raconte à son collègue les résultats de ses recherches de sa fille et surtout sa mystérieuse rencontre avec Anna Spiegel, une auteure de livre pour enfant. Cette dernière écrit un livre qui relate étrangement l’histoire et la disparition de sa fille…
J’avoue que j’ai dévoré cette intrigue, voulant rapidement trouver réponses à toutes les interrogations que soulevaient cette disparition. Atmosphère étouffante, angoissante, avec des fantômes ou des personnages que l’on croit exister ou inventer. J’ai douté de tout. Mais à la page suivante, j’ai certain d’avoir tout compris. Le chapitre d’après, mes certitudes s’écroulaient. Seules les dernières pages m’ont apporté la lumière sur cette affaire. Et la vérité s’est avérée être très éloignée de mes convictions. Sebastian Fiztek m’a promené tout le long de ces 300 pages. Sans aucune rancune. Plein de reconnaissance de ce moment de lecture accrochant.29/08/2021 à 17:40 10
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Les Somnambules
8/10 La couverture, cette photo de trois nageurs courants dans la mer, m’a attiré vers ce livre d’une auteure totalement inconnue pour ma part. Ce sentiment de vacances, d’insouciance, de bonheur, de vie tout simplement, a attisé mon envie de lire cette histoire qui est en totale contradiction avec cet esprit de liberté. Car les trois protagonistes du livre de Gilda Piersanti vont devenir prisonniers, pieds et mains liés de leur passé.
Dario, Massimo et Gabriele sont trois amis de longue date. La troïka, comme ils sont surnommés, tant leur amitié est inébranlable. Soudés, à la vie à la mort. 25 ans après avoir commis un crime impuni, les 3 compères devenus des personnes importantes dans la société romaine voient leur amitié soumise à rude épreuve. La fille de Gabriele est enlevée et sera livrée contre l’aveu public de leur crime. Un acte qui mettrait en cause toute leur famille, leur carrière,…
Gilda Piersanti propose une lecture assez psychologique de ces évènements : elle y décrit avec précision et vérité les sentiments contraires : la solidarité, l’amitié, la culpabilité, la vérité, la vengeance, la trahison… Une lecture envoutante empreinte de sensibilité.29/08/2021 à 17:38 6
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Affronter l'orage
9/10 En quatrième de couverture, pour présenter Larry Brown, l’éditeur reprend les termes publiés par Le Monde qualifiant l’auteur américain de « romancier des rêves égarés et des âmes perdues ». Dans les neufs nouvelles qui composent Affronter l’orage, on rencontre des personnages ravagés par la vie, oubliés par le bonheur, fuis ou apeurés par l’amour, des miséreux sans être pour autant exclus de la société. Larry Brown peint la vie américaine comme il la voit, sans fioriture avec ses mots et un style inégalable qui touchent et emportent le lecteur tout au long des 160 pages.
Si Affronter l’orage (ou Faire face, titre de la première édition sortie chez Gallimard) est le dernier et ultime livre publié en France de l’auteur américain, il s’agit, paradoxalement de ses premiers écrits. On y trouve toute la pertinence, la justesse et la sensibilité qui composeront ses chefs d’œuvre que sont Joe, Fay et L’usine à lapins.
Mort en 2004, Larry Brown a gagné 2 fois le prestigieux Southern Book Award for Fiction. A la lecture de son œuvre, on comprend pourquoi il est le seul auteur à l’avoir remporté autant de fois. Larry Brown est un Maître du polar américain.
15/08/2021 à 11:28 2
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Sud
Olivier Berlion, Olivier Thomas, Antonin Varenne
7/10 Natacha et Henri poursuivent la traque des mafiosos. Avec un seul objectif : gagner leur liberté.
Dernier volet de Dos à la mer qui apporte de la tension à l’intrigue. Un deuxième tome qui redonne du noir à cette BD-polar qui mérite d’être découverte.
14/08/2021 à 17:27 1
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Ouest
Olivier Berlion, Olivier Thomas, Antonin Varenne
6/10 Henri est soudeur aux chantiers navals de Saint-Nazaire. Suite à un accident de travail causé par une de ses soudures, il est mis à pied, le temps de l’enquête. Un midi, au restaurant où il cantine, il récupère un portable tombé lors d’une rixe avec un mystérieux couple. Sa rencontre avec Natacha débute, cette jeune femme prisonnière de trafiquants.
Un scénario mainte fois exploité mais une lecture plaisante de cette BD.
14/08/2021 à 17:26 1
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Lëd
8/10 Norilsk. Cité la plus extrême de Sibérie. Extrême géographiquement et météorologiquement parlant. Les températures peuvent atteindre les – 60° C. Mais cette ville est avant tout une prison à ciel ouvert : par le passé, Staline en avait fait un camp de prisonniers politiques, et aujourd’hui, ironie du sort, les habitants sont quasi otages du seul gros employeur assurant leur survie grâce à sa mine de nickel. Et peu importe si l’usine pollue aussi bien l’air que l’eau. Dans cette cité sans espoir, autant mourir le plus vite possible.
Un soir de tempête, un toit d’immeuble est emporté découvrant le cadavre d’un Nenets, population autochtone d’éleveurs venant du cercle polaire. L’enquête est assurée par Boris. Gleb est un mineur qui cache son secret dans un univers slave empreint de machisme, de brutalité et d’arrogance. Valentina blogueuse écologiste qui pourrait être un témoin important dans l’affaire. Shakir, ouzbek, ancien vétéran d’Afghanistan, devenu chauffeur de taxi à Norilsk. Dasha qui souhaite découvrir un mystère sur sa grand-mère décédée…..
Et un autre personnage : le passé soviétique qui continue d’influencer la vie des Russes.
Caryl Férey nous dresse une peinture sombre des années Poutine, à travers ce polar. Une lecture marquante et instructive d’un univers glaçant.
14/08/2021 à 12:15 4
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Rêver
8/10 Dans ce polar, Thilliez exploite des sujets certes peu originaux et maintes fois exploités mais avec une telle maitrise qu’il offre un magnifique polar. Trouble du sommeil, disparitions d’enfants, une belle et jeune psychologue qui peut résoudre ces affaires par des visions intervenant lors de ses phases de narcolepsies.
Roman captivant (on dévore ce polar) et déstabilisant (on peste car on ne sait plus si ce qu’on lit est vrai ou un rêve), Rêver propose une lecture et une intrigue vraiment intéressantes.
01/08/2021 à 16:51 3
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Profession du père
9/10 Ce livre est rempli d’émotions. Profession du père ne fait que me confirmer le plaisir que j’avais eu à découvrir l’œuvre de Sorj Chalandon. Le lecteur, encore une fois, est soumis à tous les sentiments : du sourire aux larmes, dans cet ordre-là.
Emile Chouans est un collégien médiocre. Mais il est surtout le fils d’André, créateur des Compagnons de la chanson, conseiller intime de de Gaulle, (c’est lui qui a conseillé à de Gaulle de dévaluer le franc) et dont son ami américain, Ted, parrain d’Emile, est membre de la CIA, garde du corps de JFK américain.
Mais André est remonté contre de Gaulle qui souhaite « abandonner l’Algérie ». Le père décide alors de passer à l’offensive. Il souhaite tuer le Président français et pour cela, Emile sera son bras armé. Discipline militaire, conseils paternels en matière d’espionnage… tout se met en place pour atteindre l’objectif… Les délires du père vont avoir des conséquences malheureuses pour Emile. Si du haut de ses 13 ans, Emile courbe le dos et obéit à son père, il prend conscience, en grandissant de la folie de son père et du malheur vécu par sa mère.
Au fil des pages, le burlesque laisse donc place à la pitié et à la tristesse. La prise de conscience de la folie du père ne laisse pas insensible le lecteur. On partage la solitude d’Emile et son malheur. Un livre très émouvant.01/08/2021 à 16:20 2
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HHhH
7/10 HHhH est un roman relatant l’attentat contre Heydrich, à Prague, en mai 1942. Mais le terme « roman » ne convient pas à ce livre. Ce n’est pas non plus un ouvrage historique. Il serait plus un mélange des deux : un livre qui raconte l’écriture de cette page d’Histoire, l’opération « Anthropoïde », l’assassinat du chef de la Gestapo par deux résistants tchèque et slovaque.
Un style littéraire original qui alterne la genèse, les motivations, la recherche et l’écriture du livre, avec la présentation des faits historiques. Un style documentaire-fictionnel qui, je l’avoue, a été âpre pour ma part. Même si certains passages frôlent la perfection (j’entends par là que Laurent Binet offre une intensité et une émotion poignante dans son récit), certains chapitres-réflexions sur l’avancée de son livre, dignes d’une introduction ou d’une postface, cassent la dynamique de l’histoire dans l’Histoire.
Une ambition stylistique qui a séduit (ce livre a été récompensé du Prix Goncourt du premier roman), mais qui peut, comme je l’ai été, déconcerter.31/07/2021 à 19:26 2
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Ce que tu as fait de moi
9/10 Dans les locaux de la Direction départementale de la sécurité publique de L., le commissaire divisionnaire Jaubert et le commandant Delaporte, des bœufs-carottes, écoutent, chacun dans des pièces à part, le commandant Richard Ménainville, patron des Stups, et le lieutenant Laëtitia Gramisnky, toute jeune recrue dans le service.
Ils sont là pour raconter ce qui s’est passé cette nuit. Mais pour comprendre les faits, ils souhaitent relater toute l’histoire, depuis l’arrivée de la stagiaire Graminsky, celle qui a troublé le charmant quarantenaire, celle qui n’est pas insensible à la forte personnalité du commandant.
Dans ce huis-clos, et avec ces interrogatoires, on découvre par les voix de Richard et de Laëtitia, comment s’est construit leur relation, cette passion destructrice. Des sentiments ambiguës, contradictoires, forts et dévorants. On souhaite comprendre jusqu’où est allée cette folie amoureuse, cette drogue que peut parfois devenir l’amour. Karine Giebel retranscrit avec justesse, finesse et suspense cette histoire que l’on dévore jusqu’à la dernière ligne. Une habitude que nous donne l’auteure française.29/07/2021 à 13:24 7
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Les Abattus
8/10 « Je suis né au village un soir de novembre. Mon père était au bistrot. Ma mère m’a mis au monde, seule. Je n’ai pas crié. Une voisine est venue. Elle m’a enveloppé dans un linge. Quand mon père est rentré ma mère a dit, c’est un garçon. Mon père s’est couché. On m’a déposé dans le berceau dans lequel mes deux frères ont dormi avant moi. » Je savais, juste après avoir lu ce paragraphe qui ouvre le livre de Noëlle Renaude qu’il allait me plaire. Le ton simple, le style direct, l’usage de la première personne, rendant cette histoire plus percutante, avaient tout pour me séduire.
C’est ce « je », ce jeune benjamin, dont on ne saura jamais ni le nom, ni le prénom, qui nous relate sa vie. Une vie remplie de malheurs : le souffre-douleur de ses frères, un père qui part, la mère qui se jette sous un train, un frangin qui devait le petit caïd du coin, les voisins qui sont assassinés, leur gorge tranché… Et il nous relate ces événements, mais aussi ses amourettes, celles de ses amis,…avec sa vision à lui, avec détachement et simplicité voire l’innocence de sa jeunesse. Mais une pigiste va s’intéresser à ces meurtres et faire des liens entre différents événements.
Les abattus est un livre qu’il faut lire. Il propose une histoire intrigante, avec une structure en 3 parties qui permet d’avoir des réponses à toutes nos interrogations. Mais surtout on découvre une auteure, qui rentre avec ce livre dans l’univers du noir, sur qui il faudra compter désormais.
27/07/2021 à 09:23 4
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Toutes blessent, la dernière tue
9/10 Karine Giebel est une maitresse dans l’art de jouer avec les nerfs et les sentiments de ses lecteurs. Elle sait toucher ses points sensibles, là où ils ne sortiront pas indemnes. Dans ce roman, elle décrit la violence la plus crue, l’exploitation d’êtres humains de la manière la plus cruelle. Et avec une touche de naturelle et d’évidence. Et servi le long de plus de 700 pages. Et bien évidemment, ses pages défilent, tant on veut connaître le sort de ces deux malheureuses.
Il y a Tama. Encore jeune enfant, elle est vendue par sa famille algérienne, pour pouvoir subvenir à la vie des autres membres de la famille. Elle arrive en France et est placée chez les Charandon. Elle y vit dans une buanderie, pour faire la cuisine et le ménage. Elle se nourrit des restes de repas, et est privée de toute sortie et de toute scolarité. En plus des brimades, toute faute se paye cash par des privations de nourriture et autres violences physiques. Sa force la sauvera d’une mort évidente et son envie et son espoir lui feront apprendre, seule, la lecture, comme une évasion, et l’amour lui apportera l’espoir d’une vie normale.
Il y a également cette fille amnésique que Gabriel, un reclus dans une ferme isolée dans la campagne profonde, a retrouvée inconsciente dans sa voiture accidentée. Gabriel qui tue des personnes et qui se fait une obligation de devoir tuer cette fille. Il a même creusé sa tombe dans les bois. Mais une voix, celle de sa défunte fille, lui conseille de la considérer comme un ange venu du ciel.
Toutes blessent la dernière tue pourrait être perçue comme une version moderne des Misérables. Mais ce roman noir est un condensé de terreurs physiques et psychologiques. Les coups pleuvent sur Tama que le lecteur se prend en pleine face. Les espoirs sont comme des éclaircies temporaires : le ciel s’assombrit et cache tout soleil porteur d’espérance. L’amour y côtoie la haine, la foi, le désespoir total. Ce livre est violent, percutant et fait mal. C’est ce qui fait qu’il hantera le lecteur longtemps après l’avoir fermé.
23/07/2021 à 18:50 8
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Le Mur, le Kabyle et le Marin
8/10 Avril 2008. George Crozat, boxeur en fin de carrière, mène ce qui doit être son dernier combat. Face à André Gabin, jeune Black aux poings fermes et solides, Le Mur (qui tient ce surnom du fait qu’il encaisse bien les coups) gagne par KO, avec la gueule toute défoncée. Il va fêter sa victoire, comme à son habitude, dans les bras d’une pute avant de reprendre son travail. Flic. Mais ça ne rapporte pas grand-chose, lui qui apprécie la compagnie de Mireille. Or quitter le circuit, c’est perdre ses soirées à se payer des filles. On lui propose de casser la gueule à quelques types, des amants qu’il faut remettre à leur place, il paraît. George n’est pas regardant, tant que les biftons tombent. Et ça rapporte mieux que la boxe officielle.
Mai 1957. L’Algérie est à feu et à sang depuis trois ans. Tortures, exécutions sommaires, la guerre, qui n’en est pas une, est sale. Le service national est prolongé à 30 mois. Pascal Vérini doit délaisser ses études de dessin industriel et l’usine d’Aluvac. Pire que ça, il abandonnera ses lectures et ses rêves de voyage. Destination le Détachement Opérationnel de Protection (DOP) du secteur Rabelais, une ferme où certains « révolutionnaires » algériens sont détenus et interrogés. Mais Vérini est un pacifiste dans l’âme, un réfractaire aux interrogatoires musclés. Il sera mis au trou, ce qui prolongera sa présence à la Ferme.
Deux époques, différents protagonistes, et deux temps dans ce roman. Antonin Varenne a écrit ce livre en hommage à son père, soldat en Algérie, dont les confidences et le témoignage devaient être portés aux futures générations. Un livre sombre, tendu, mais poignant sur ces « événements » qui ont laissé des traces indélébiles dans les deux camps.23/07/2021 à 17:53 4
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Venge-Moi
9/10 Si j’ai eu du mal à rentrer dans le livre, c’est pour mieux rester scotché à la dernière page du livre. Car cette histoire est d’une tristesse addictive. Car la promesse faite par Simon à sa mère sur son lit de mort est tellement humaine que l’on est partagé entre compassion et horreur. Cette rescapée des camps de la mort a fait jurer à son fils de retrouver et de tuer la femme qui l’a dénoncée, celle par qui le malheur est arrivé, celle qui a détruit sa famille, sa vie… C’est grâce à une vieille photo que Simon va retrouver celle qui fut une amie de la famille…
Mais l’histoire ne s’arrête pas là, ce n’est pas une « simple histoire » de vengeance. C’est un drame qui se profile. Mais c’est plus qu’un drame. C’est un véritable malheur que le lecteur découvre au fil des lignes, agrémenté de différents rebondissements. Que de surprises et de stupéfaction au fil de la lecture de Venge-moi. On en sort véritablement et profondément secoué.
17/07/2021 à 15:07 5
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Froid mortel
8/10 C’est après avoir lu (et adoré) la tétralogie « Gerlof Davidsson » se déroulant sur l'île d'Orland que je me suis intéressé à ce polar. Changement radical de registre pour Johan Theorin, qui délaisse les grands espaces, les pensées philosophiques de Gerlof et l’approche socio-historique de la Suède.
Si avec son personnage de Gerlof Davidsson, Johan Theorin prenait le temps d’installer le cadre de son roman, Froid Mortel est un roman qui ne laisse aucun répit au lecteur. On rentre à cent à l’heure dans l’histoire de Jan Hauger, assistant maternel qui se fait recruter dans une école maternelle hors du commun : elle est dédiée aux enfants de parents internés dans l’hôpital psychiatrique voisin. Et les enfants y accèdent par un tunnel souterrain interdit au personnel. Mais Jan souhaite coûte que coûte braver l’interdit et accéder aux étages du centre psychiatrique.
Mais quelles sont les motivations de Jan, alors que l’on découvre au fil des pages son passé torturé ? Les interrogations sur les collègues de Jan, sur cette maternelle et sur ce centre psychiatrique prolifèrent et Johan Theorin a l’art et la manière de semer le doute chez le lecteur en multipliant les retours passé-présent et en proposant des personnages aussi mystérieux qu’inquiétants.
Froid Mortel ne saurait souffrir d’une comparaison inutile voire stérile avec le cycle « Gerlof Davidsson », tant les objectifs de l’auteur sont tellement éloignés. Mais je peux vous affirmer une chose : Johan Theorin sait toujours autant captiver le lectorat de polars. Il vous sera difficile de lâcher ce livre tant que vous n’aurez pas lu le fin mot de l’histoire. Qui s’avère déroutant et glaçant.12/07/2021 à 18:48 5
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En ce lieu enchanté
7/10 Le pire endroit de la prison : le couloir de la mort. Pourtant, pour Arden, le prisonnier que tout le reste des détenus craint autant qu’il fascine, c’est un endroit enchanté. Lui, il y voit des oiseaux de nuit duveteux choir du firmament et des chevaux d’or courir dans les profondeurs de la terre. Pour lui, il s’y passe toutes sortes de choses merveilleuses. Qu’il souhaite nous raconter…
Dans cet univers radieux, le lecteur va rencontrer la « dame », une avocate chargée de la révision des dossiers des condamnés à mort, dont York, qui va être exécuté, et qui ne souhaite pas de changement de sa condamnation ; le « prêtre déchu » de la geôle, qui rêve d’une autre vie, revivre l’Amour ; le garçon aux cheveux blancs, une proie facile pour les chefs de gang ; et le directeur de la prison…
Tous ces êtres ont été ravagés, bien avant d’atterrir dans cette prison, privés de toute liberté ou non. Rene Denfeld utilise une belle plume pour raconter l’histoire de ces pauvres hères. Une histoire émouvante et éprouvante. Un roman dont j’ai apprécié la lecture sans être subjugué comme certaines personnes ont pû l’être.04/07/2021 à 17:23 2