Dodger

471 votes

  • Le châtiment des hommes-tonnerres

    Michel Honaker

    8/10 D’une plume très sûre, Michel Honaker nous fait voyager dans l’Amérique du XIXe siècle avec ce western fantastique mâtiné de polar. Le mélange des genres fonctionne très bien : la partie western nous plonge, entre réalisme et folklore, dans une atmosphère Far-West que l’on connaît par cœur – pour l’avoir vue et revue dans d’innombrables films – mais que l’on retrouve toujours avec plaisir ; la dimension fantastique s’appuie sur des légendes indiennes, dont le peuple est évidemment très présent dans ce roman ; et l’aspect polar assure le rythme et le suspense du récit, notamment dans un premier chapitre saisissant, très cinématographique.
    Le tout est rendu vivant par des personnages bien campés, pas forcément attachants mais tous marquants, avec leurs parts d’ombre et de lumière. (Mention spéciale en ce qui me concerne à Calder Weyland, le vieux cow-boy “courant d’air”.)
    Un premier tome palpitant et très documenté, qui donne envie de découvrir très vite la suite de la série !

    03/12/2011 à 11:43 3

  • Bettý

    Arnaldur Indridason

    9/10 Quand Indridason met Erlendur entre parenthèses, c'est pour écrire une tuerie qui s'appelle Betty. Cette histoire mettant en scène une femme obsédante, fascinante - donc forcément fatale - est déjà en soi un très bon roman noir, dans les règles de l'art. Mais Indridason va plus loin et dépasse les codes du genre en nous flanquant une surprise mémorable. Dire plus serait criminel... Mais que vous soyez amateur ou non du romancier islandais, foncez, c'est du très très bon !

    25/11/2011 à 20:53 5

  • Samedi 14

    Jean-Bernard Pouy

    8/10 C'est du Pouy bien frappé comme on l'aime : moqueur, irrévérencieux, dangereusement gauchiste, auteur de dialogues succulents et créateur de situations merveilleusement drôles (l'évasion de prison...) Et il sait aussi se faire émouvant, dans des pages d'amour tendres et inattendues. Un très bon cru pour lancer la nouvelle collection des éditions la Branche.

    24/11/2011 à 23:27 2

  • Quelque chose pour le week-end

    Sébastien Gendron

    8/10 Après avoir dynamité les codes du roman d'espionnage dans "Taxi, Take Off & Landing", Sébastien Gendron s'amuse avec ceux du célèbre nonsense britannique. Le résultat est hilarant, truffé de personnages plus frappés les uns que les autres et de pingouins cocaïnomanes, aussi dingues, aussi nuisibles et aussi drôles que les Gremlins de Joe Dante. Au passage, Gendron dézingue à tout va : la lâcheté des politiques, l’irresponsabilité écologique, ou tout simplement les mesquineries ordinaires qui font notre quotidien. Vous voulez quelque chose à faire pour le week-end ? Lisez Gendron !

    24/11/2011 à 23:23 1

  • Désolations

    David Vann

    8/10 Mika a tellement tout bien dit que je pourrais me contenter de copier-coller son avis. Qu'ajouter ? Que "Désolations" est différent de "Sukkwan Island", que ceux qui ont aimé le premier roman de David Vann (notamment pour sa grosse surprise et le choc inédit que celle-ci procure au lecteur, lui en laissant souvent un souvenir indélébile) ne doivent évidemment pas attendre la même chose, sous peine d'être déçus... même si, en deux romans, Vann montre déjà qu'il a un univers propre, un sens des personnages, des atmosphères, des décors et de la tragédie qui lui sont propres. Un auteur à suivre, décidément.

    24/11/2011 à 21:28 2

  • Quelque chose dans la nuit

    Mikaël Ollivier

    8/10 Une réussite singulière, surtout au sein d'un polar français parfois stéréotypé. Le rythme du récit peut dérouter au début : avant d’entrer dans le vif du sujet, le romancier prend le temps d’approfondir ses personnages, de fouiller leur psychologie et leurs histoires. Pour mieux nous aspirer dans la spirale démente du meurtrier, ce qui nous vaut quelques scènes angoissantes et éprouvantes, et une accélération progressive du tempo qui laisse peu au lecteur l’opportunité de respirer jusqu’à un final spectaculaire.
    Les amoureux du "Boss" Sprinsgteen seront comblés. Ceux qui ne connaissent pas son oeuvre se passionneront pour l'analyse du phénomène fan développé avec intelligence par Mikaël Ollivier.
    Bref, un polar rock et littéraire, vraiment original, pour ceux qui cherchent à sortir des sentiers battus du genre.

    24/11/2011 à 21:03 1

  • Jusqu'à la folie

    Jesse Kellerman

    8/10 Bonne surprise finalement que cette deuxième publication en France de Jesse Kellerman. Autant "les Visages" m'avaient un peu déçu (surtout par rapport au déluge d'éloges l'accompagnant), autant j'ai été happé par la spirale infernale de ce thriller psychologique oppressant. Il ne faut certes pas s'attendre à une lecture haletante, Kellerman prend toujours autant son temps, mais les longueurs sont moindres ici et vite passées. L'immersion dans le monde hospitalier est très réussie, la montée de la tension et de l'horreur également.
    Faute de hausser le ton, la fin manque un peu de punch et de surprise. Mais l'ensemble vaut le déplacement.

    24/11/2011 à 20:52 1

  • L'armée furieuse

    Fred Vargas

    8/10 Vargas fait du Vargas, ce qui en soi suffit largement - car il n'y a qu'elle pour savoir le faire. Tout ce qui plaît à ses fans est donc au rendez-vous : Adamsberg, toujours aussi pelleteur de nuages, et son armée d'adjoints déphasés ; le sens du décalage de l'auteur, sa manière bien à elle de raconter une enquête policière en privilégiant les personnages et les situations improbables au détriment du réalisme procédural (et tant mieux) ; une idée d'intrigue invraisemblable, tirant légèrement sur le fantastique comme dans le précédent opus, inspirée d'une légende médiévale...
    Après, on peut lui reprocher de ne plus trop se renouveler, de ne plus vraiment faire avancer son héros (même si la relation d'Adamsberg avec son "grand" fils, Zerk, est assez bien trouvée) ; d'escamoter à nouveau Camille et son fils... Tout ceci est vrai, mais encore une fois, le Vargas nouveau est un bon Vargas, moment de lecture plaisir garanti, et c'est tant mieux !

    19/05/2011 à 22:54 2

  • Moonlight Mile

    Dennis Lehane

    7/10 C'est sans doute le roman le moins sombre de la série Kenzie-Gennaro, le moins drôle aussi - alors que dans les précédents, un humour virtuose s'invitait souvent dans les dialogues, équilibrant des situations plus violentes.
    En contrepartie, Lehane joue avec des émotions plus nuancées, mène ses héros ailleurs (ils sont parents), ajoute un peu de mélancolie et pas mal de tendresse, et il le fait avec sa maîtrise narrative habituelle.
    Moonlight Mile ne restera pas mon roman préféré de Lehane, ni de la série, notamment en raison d'une intrigue plus moyenne que d'habitude, comme si le romancier n'avait pas bien su où emmener son excellente idée de départ. Mais cela reste du Lehane, donc cela vole assez haut dans la stratosphère polardesque !

    19/05/2011 à 22:45 3

  • Le signal

    Ron Carlson

    7/10 S'il ne s'anime véritablement d'un peu de suspense que dans son dernier tiers, Le Signal est avant tout un roman magnifique, émouvant, tant par les sujets qu'il aborde - les illusions perdues, les échecs de la vie, les amours finissantes -, que par la beauté des paysages du Wyoming dont Carlson éclaire son récit, au fil de descriptions saisissantes.

    Un livre que l'on referme en ayant envie d'enfiler ses chaussures de randonnée, de partir en balade à cheval ou d'apprendre à pêcher à la mouche...

    19/03/2011 à 16:09 4

  • Au-delà du mal

    Shane Stevens

    9/10 Plus de trente ans après sa publication initiale aux Etats-Unis, ce roman littéralement monstrueux reste d'une modernité saisissante. Alternant temps forts - moments de suspense aussi cruels et brutaux -, et des passages plus lents, plus détaillés, où l'auteur fait preuve d'une précision documentaire dans sa description de son époque ou ses réflexions sur la violence, la peine de mort, le traitement journalistique des faits divers, "Au-delà du mal" marque surtout les esprits par la manière dont il aborde la figure du tueur en série. On comprend pourquoi ce livre, dense et intense, a autant influencé nombre d'auteurs des années 80 et 90, de James Ellroy à Thomas Harris. Un incontournable sans doute, à condition d'avoir le coeur bien accroché, car certains passages sont extrêmement éprouvants...

    19/03/2011 à 15:33 4

  • L'Oeil de la Lune

    Anonyme

    7/10 Légère déception à la lecture de ce deuxième opus, que j'ai trouvé moins malin, un peu moins bien écrit, beaucoup plus bourrin et primaire que le premier. Peut-être le fait que l'effet de surprise ne fonctionne plus y est-il pour quelque chose... L'intrigue m'a paru également plus confuse, plus diluée, en tout cas sur une grosse première moitié du roman. Cela dit, notre auteur anonyme manie toujours aussi bien le suspense et la mécanique du page-turner, et le dernier tiers du livre m'a semblé renouer avec l'action, l'humour et l'originalité que j'avais adoré dans "Le Livre sans Nom", pour atteindre une fin effectivement inattendue et pour le moins ouverte.
    Le pitch du troisième volume (à paraître en juin 2011) étant particulièrement alléchant, j'attends le résultat avec impatience !

    14/03/2011 à 10:59 1

  • Fractale

    Marin Ledun

    7/10 Mon avis rejoint les précédents. Un très bon texte de Marin encore une fois, exploitant avec intelligence l'un de ses sujets favoris, la souffrance et l'aliénation au travail. On se prend juste à regretter qu'il soit un peu trop court, tant on devine que, s'il n'avait pas été soumis à une contrainte d'écriture très spécifique (une pièce radiophonique), Marin aurait pu aller encore plus loin, à la fois en terme de suspense et de traitement du sujet. Mais ça mérite le détour, à n'en pas douter.

    14/03/2011 à 10:52 3

  • Serena

    Ron Rash

    10/10 Le premier roman de Ron Rash était brillant, le second confirme le talent du bonhomme au-delà de toute expression. Portrait de femme exceptionnel, reposant sur une intrigue noirissime dont la structure emprunte autant au drame élisabéthain qu'au grand roman américain, "Serena" est porté par un souffle admirable, un superbe travail sur la langue et un soin méticuleux apporté à la reconstitution d'une époque (l'histoire se déroule au début des années 1930, pendant la Grande Dépression qui suit la crise de 1929.) Comme dans "Un pied au paradis", Rash fait entrer en résonance l'intime obscur des âmes avec la nature et l'Histoire. Un roman fascinant, intelligent et vénéneux, qui monte inexorablement en puissance au fil des pages. Magnifique !

    06/02/2011 à 22:27 5

  • Zone Est

    Marin Ledun

    9/10 Un thriller d'anticipation époustouflant, dans lequel Marin aborde avec brio ses sujets de prédilection (nanotechnologies, dictature marketing et technologique, rapport entre corps et machine...) sans jamais négliger la mécanique du suspense. Spectaculaire, intense, brillamment "mis en scène", Zone Est repose en outre sur des personnages ultra-crédibles, forts et attachants, Zigler et la sublime Sylia en tête. Marin se renouvelle tout en poursuivant une oeuvre singulière et audacieuse. Bravo !

    06/02/2011 à 20:51 2

  • Les Harmoniques

    Marcus Malte

    7/10 Il y a de belles idées dans ce nouveau roman de Marcus Malte : tout d'abord, celle de le nourrir de jazz, dont l'auteur est un fin connaisseur, et dont il se sert pour animer son récit, empruntant à ce genre musical son sens de la digression, de l'improvisation, de la variation et du changement de rythme. Faire de la victime et de quelques autres personnages du récit des rescapés de la guerre des Balkans a le mérite de nous emmener également vers de sombres territoires qui, s'ils ne sont pas inédits, gorgent de violence et de noirceur l'histoire imaginée par Malte.
    Dommage, dès lors, que l'intrigue de l'enquête ne soit pas à la hauteur, affaiblie par un manque de dynamique, de rebondissements, et par une construction du roman quelque peu boiteuse. Au fil de déductions hasardeuses, les héros font quelques rencontres plus ou moins instructives, imaginent quelques solutions plus ou moins téléphonées, avant que l'auteur ne consacre les 80 dernières pages du roman à fournir de longues explications dans une séquence statique dépourvue de suspense.
    S'il ne s'agit pas de comparer ces "Harmoniques" au précédent roman de Marcus Malte - "Garden of Love", une réussite inouïe et si brillante qu'elle a toutes les chances de rester totalement à part dans l'oeuvre de l'écrivain -, on peut regretter tout de même de ne pas retrouver ici le sens de la construction littéraire et la pertinence psychologique qui avaient pu nous emballer auparavant. Le style est là, néanmoins, et le roman contient suffisamment de matière, d'originalité et d'émotion pour être considéré comme un bon moment de lecture.

    10/01/2011 à 17:43 2

  • Vampires

    Thierry Jonquet

    7/10 Il y a sûrement quelque chose d'un peu absurde dans le fait d'attribuer une note à ce roman : dans la mesure où il est - nettement - inachevé (on peut estimer qu'il manque au moins un tiers, si ce n'est une moitié du texte final), on peut difficilement juger de la pertinence du propos, de la qualité du suspense, du mystère, du traitement du sujet... Au vu des à peine 200 pages, n'ayant pas subi de relecture ni de travail de correction approfondi, laissées par Thierry Jonquet à son éditeur juste avant son décès, j'aurais vraiment aimé connaître le fin mot de l'histoire. Car, indéniablement, et même s'il y a quelques scories inhabituelles au fil du texte, ce roman extrêmement singulier porte la marque de son auteur, et révèle qu'une fois de plus, il allait nous proposer quelque chose de nouveau, de différent, d'audacieux. Sans doute réservé avant tout aux fans de Jonquet, "Vampires" est habité de personnages incroyables, traversé de beaux moments autant que de scènes d'une violence qui serait insoutenable si elle n'était éclairée d'un humour aussi noir que salvateur. Ce texte inachevé et, sans doute, fatalement inabouti, ce texte est un document, surtout pour ceux qui considèrent l'œuvre de Thierry comme l'une des plus importantes du polar français. Une sorte de cadeau aussi, même s'il est un peu frustrant.

    08/01/2011 à 18:40 1

  • Code 1879

    Dan Waddell

    9/10 Ça vaudrait même un 9,5, tant la surprise est de taille ! Rien que pour l'idée, novatrice, d'utiliser la généalogie comme moteur de l'enquête, ce premier roman vaut le détour. Mais en plus, pas seulement : sans qu'il s'agisse d'un thriller échevelé, le suspense est parfaitement tenu de bout en bout, jusqu'à une fin haletante et parfaitement réussie ; les personnages sont bien construits, intelligents et profonds, et fonctionnent superbement ensemble ; et la double intrigue, partagée entre l'enquête contemporaine et celle sur la série de meurtres de 1879, révèle le talent de l'auteur à nous plonger aussi bien dans l'atmosphère du Londres contemporain que dans celui de la fin du XIXe siècle, s'appuyant sur un travail de recherche historique que l'on devine colossal. De plus, Dan Waddell gère à la perfection temps forts et temps faibles de son intrigue et maîtrise le rythme comme un vieux briscard du polar. Un vrai grand coup de cœur pour ce thriller classe et bluffant.

    08/01/2011 à 13:36 8

  • Le Jeu du pendu

    Aline Kiner

    8/10 Un bon premier roman français, qui, par son sujet et son traitement, sort des sentiers battus. Fille de mineur, ayant grandi en Moselle, Aline Kiner fait la part belle à l'histoire riche et douloureuse de sa terre d'origine, dont elle évoque les paysages avec autant de poésie que de précision. Elle exploite également avec intelligence deux aspects fondamentaux de la Lorraine : d'une part, l'importance qu'y a tenu l'exploitation des mines, et la manière dont le territoire comme les hommes en portent les cicatrices aujourd'hui ; d'autre part, l'histoire complexe d'une région annexée par l'Allemagne après la défaite de la France en 1940, et marquée plus que d'autres par la violence, la honte et les règlements de compte à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Le résultat est un polar psychologique original, porté par une galerie de personnages complexes, tous plus ou moins hantés, et dont l'intrigue, pour être correctement menée, est finalement surtout un prétexte à évoquer une histoire méconnue mais passionnante. Une jolie réussite, qui permet d'explorer de nouveaux horizons.

    08/01/2011 à 12:48 1

  • L'Homme inquiet

    Henning Mankell

    8/10 Pour la dernière enquête de Wallander, Mankell se concentre sur son héros. Si une intrigue historico-politique élaborée et assez complexe sous-tend le roman, on sent bien que c'est sur le policier en fin de carrière, et l'homme obnubilé par l'approche de la fin de sa vie, que se fixe davantage l'enquête. D'ailleurs, à la différence des opus précédents, c'est en solitaire que l'on voit évoluer Wallander, et non plus en équipe, comme dans les meilleurs titres de la série. Un choix finalement intéressant et émouvant, qui permet à Mankell de conclure d'une belle manière l'une des épopées littéraires majeures du polar contemporain.

    13/12/2010 à 11:55 2