Dany33

535 votes

  • Toutes blessent, la dernière tue

    Karine Giebel

    9/10 « Vulnerant omnes, ultima necat.
    Toutes les heures m’ont blessée, la dernière me tuera. »

    Toute classification de ce thriller serait inexacte … disons qu’il s’agit d’une étonnante histoire d’amour, cruelle et haletante, en milieu hostile. Mais au-delà de cela, ces 740 pages sont surtout un manifeste contre l’esclavage moderne, qu’il soit domestique ou sexuel. Tama est à l’image de ces toutes jeunes enfants déracinées, confiées à des familles métropolitaines sans scrupules et soumises à l’exploitation la plus ignoble, celle qui frappe des faibles vendues par leurs familles, elles aussi victimes du mensonge … Ne nous leurrons pas … cet asservissement frappe à côté de chez nous et ne sommes-nous pas complices du fait de ne pas vouloir voir ?
    Quelques rares moments de répit au cours des errances de Tama peuvent laisser espérer une issue positive, c’est cependant bien une aventure humaine, cruelle et haletante que nous allons vivre avec les petits braqueurs ratés, les voitures de luxe et les trafics en tous genres.
    Karine Giébel met tout son talent de conteuse au service du suspense qui entoure cette intrigue, sur deux tableaux, deux temporalités différentes mais imbriquées qui permettent au lecteur de découvrir le passé de Tama. Avec ce récit aussi fort que Meurtres pour rédemption, sans aucun doute Tama restera au panthéon de ses personnages emblématiques, au même titre de Marianne.

    11/11/2018 à 16:21 13

  • Tu tairas tous les secrets

    Hervé Jourdain

    9/10 On retrouve les protagonistes de Femme sur écoute, dans une intrigue plus classique, mais avec un duo féminin immanquable ! Une enquête complexe où l’auteur nous entraîne dans les Ardennes. C’est un peu le hasard qui fait se relier deux scènes de crime et qui va lancer Lola et Zoé sur les pistes de ces femmes disparues. Elles n’en ont pas la légitimité, elles devront jouer avec les personnages secondaires pour approcher de la vérité, toujours border line.
    Que feriez-vous si, avisé que vous êtes gravement malade, on vous proposait un traitement miracle ? Les pieds sur terre ou la tête dans les nuages, une galerie de personnages bien campés renforcent toute l’ambigüité posée par l’auteur.
    De nombreux thèmes sont abordés par Hervé Jourdain à la périphérie de cette enquête : l’exploitation des immigrés clandestins, les médecines alternatives, les sectes, les maladies rares, l’amour maternel, les SDF … procurent aux lecteurs des moments d’émotions dans ce monde de brutes. Notons aussi la sobriété du ton : pas d’effets spéciaux de superproduction, tout est précision et minutie. En prime une visite du Bastion, le new 36, maintenant opérationnel … ou presque !

    J’aime beaucoup, mais il n’aurait pas dû assassiner une 2CV !

    03/11/2018 à 09:59 6

  • Torrents

    Christian Carayon

    8/10 François, dessinateur de vocation, a tout perdu quand sa compagne Emilie a disparu en 1979. D’autres disparitions, par la suite, perturbent le microcosme campagnard où vit sa famille, avec en prime la découverte de restes humains dans le torrent. François va revenir dans son village natal car il ne croit pas en la culpabilité de son père, soupçonné d’être « le dépeceur ». L’enquête qu’il va mener avec l’aide de Camus, ancien flic, va l’entraîner à révéler les secrets de famille, ceux que le père a enfouis quand il a changé de région, après la seconde guerre mondiale et les exactions commises au nom de « l’épuration sauvage ». Ce père va passer de la position de notable à celle de proscrit … et s’il était innocent ? Comment François va-t-il pouvoir passer du doute au mensonge pour préserver le peu d’honneur qu’il reste à sa famille ?
    Ce sont bien ces questions que se pose le lecteur au cours de cette double enquête. On sent très bien la patte de l’historien quand François est obligé de rouvrir les vieux dossiers.
    Des chapitres courts et rythmés, trois narrateurs, contribuent à impliquer le lecteur dans la quête de la vérité avec un suspense final bien mené.
    C’est le quatrième roman de Christian Carayon … auteur à suivre notamment pour l’ambiance campagnarde qui n’est pas sans rappeler celle de Franck Bouysse, attirante et étouffante à la fois où le silence est une valeur partagée, complice de la religion du secret.

    28/10/2018 à 11:29 8

  • Enfermé.e

    Jacques Saussey

    10/10 On sait quand on suit Jacques Saussey, qu’il n’est jamais aussi déroutant que dans ses one-shots … Après Le loup peint et le pied de nez à notre conscience écologique, c’est notre plus profonde intimité qu’il ébranle avec Enfermé(e).
    Deux temporalités se mettent au service de la démonstration. La première au passé nous fait revivre l’histoire de Virginie, prisonnière d’un corps qui ne convient pas à ses émotions, son parcours et son coming out….. la seconde au présent se consacre à l’intrigue de nos jours …
    Mais ça ne s’arrête pas là … trop simple pour Jacques Saussey. C’est plus généralement de la domination des faibles par les pervers, les toxiques, ceux qui ne peuvent accepter la différence mais aussi de la fin de vie et du traitement réservé à ceux qui ont eu un passé et qui sont en train de perdre leur identité « au bénéfice » de l’âge qu’il parle ici. Mais ne sommes-nous pas tous complices de détourner le regard de ce que nous ne voulons pas voir …
    On a déjà beaucoup écrit sur ce thriller et c’est tout à fait légitime pour ce roman noir bien foncé, ces 373 pages d’une densité rare et hyper documentées. C’est pour moi un véritable coup de cœur 2018 !
    Des « artifices » de rédaction rendent ce récit encore plus dérangeant : pas de noms propres pour ceux qui sont en perte d’humanité, seuls les personnages ayant abouti dans leur parcours trouvent un nom.
    Plus déglinguant que Meurtre pour rédemption de Karine Giébel auquel on pense immanquablement lors de la description du parcours carcéral, c’est une vision optimiste néanmoins pour ceux et celles qui viennent à bout de tous les obstacles posés par notre société bien (trop) pensante.

    26/10/2018 à 10:14 9

  • Cross

    Marc Masse

    8/10 Eric, le narrateur, détective privé, ancien flic, en instance de divorce et quasi sans le sou (clichés !) se voit contraint de passer «du côté obscur» en acceptant un contrat sur la tête d’un chauffard en participant à une course de l’extrême. Au bout de quelques foulées, le lecteur se doute bien qu’il a été manipulé et que le commanditaire cache sa vérité. Tous les suspects rencontrent des sorts peu enviables et douloureux.
    C’est en accompagnant Eric, cet antihéros, ce loser, dans l’épreuve, en esquivant avec lui les pièges de ses poursuivants, en immersion au sein des coureurs que l’on découvre avec plaisir les difficultés du cross, en milieu hostile.
    Des chapitres courts, une narration à la première personne, maintiennent le rythme jusqu’au twist final à double détente et j’ai apprécié le style de cet auteur dont je lis un roman pour la première fois, alors qu’il en est à son septième. L’humour et la dérision sont toujours là. Une belle découverte. Il faudra lui demander s’il est pratiquant de fond car les coulisses et ressentis sont très bien documentés.

    22/10/2018 à 09:43 3

  • La Coupure

    Fiona Barton

    8/10 Tout d’abord nous retrouvons Kate, journaliste qui avait permis dans le premier roman de Fiona Barton, d’élucider l’énigme de l’enlèvement de Bella. Toujours aussi âpre à la tâche, avec ses méthodes border line, elle va aller où la police ne pense pas aller, se mettre en difficulté pour trouver qui est l’enfant dont on a retrouvé le squelette. La narratrice c’est Emma, pleine de problèmes d’adolescence non résolus, on comprendra pourquoi au fil de ces presque 500 pages que l’on tourne avec avidité. Mais comment l’ADN de la petite victime peut-il correspondre à deux suspectes qui ne se connaissent pas ?
    Flanquée de son jeune stagiaire, notre journaliste n’hésitera pas à remonter le temps, pour retrouver les potentiels témoins et suspects, avec la bienveillance de la police jusqu’à un certain point …
    A une centaine de pages de la fin, quand le lecteur tient toutes les ficelles en main, il n’est pas au bout de ses surprises.
    Un roman noir plus que polar, une noirceur bien britannique, plaisant à lire, qui assène quelques vérités sur le temps qui passe.

    21/10/2018 à 14:53 4

  • Sadorski et l'ange du péché

    Romain Slocombe

    9/10 Qui est-il vraiment ce Léon Sadorski ? Un être méprisable assurément et chaque fois que le lecteur est heureux de le voir essayer de s’amender, comment dire … ça dérape !
    Ses relations avec les femmes, quelles qu’elles soient … la sienne, celles des autres, les juives et celles qui ne le sont pas, les jeunes et les moins jeunes, sont tout simplement inexcusables.
    Son attitude avec les juifs, dans le contexte, connait peu d’excuses aussi mais l’époque nourrit l’ambigüité.
    Les plus crédules ne peuvent cependant pas ignorer les exactions perpétrées au nom de la pureté de la race aryenne.
    Tout est humiliations et exactions … mais attention ça n’est pas l’exclusivité de Léon Sadorski.
    C’est le « jeu » de tous ceux qui détiennent une autorité et entretiennent un lien de domination avec de plus faibles qu’eux, renforcé quand ils sont minables car c’est le seul moyen pour eux d’exister, alors dans le contexte des années 42-43 en France occupée, dans l’ex-capitale tout prend une importante vitale.
    C’est le « jeu » de ceux qui choisissent la collaboration et l’enrichissement personnel à la résistance et la solidarité.
    C’est le « jeu » de ceux qui font « semblant » et de ceux qui font « comme si ».
    Rien ne plaide donc en la faveur de Sado dans ce troisième et dernier volet de ses aventures malsaines et l’auteur distille le venin au fil des pages avec un suspense mêlé aux références historiques, politiques, littéraires, cinématographiques … une ambiance réaliste et un récit qui en apprend aux plus documentés sur l’époque. La précision des référence peut sembler parfois superflue mais avec le recul rien n’est gratuit.
    Déroutante la façon dont Romain Slocombe mêle les intrigues au point où le lecteur ne sait plus qui sont les héros principaux, l’intrigue majeure, les détails superflus. Cependant il lit, dévore, tourne les pages avec ardeur, surpris et envouté qu’il est par ce style incomparable, en espérant que les méchants seront punis … et qu’ils souffrent aussi !
    Une écriture cinématographique qui image à merveille les situations les plus atroces.
    Enfin pour compléter, le lecteur ne peut échapper à la réflexion sur la xénophobie et au sort réservé aux migrants qu’ils soient économiques ou politiques ainsi qu’aux risques encourus d’une société qui épouserait les extrémismes en la matière.
    J’ajoute que j’ai lu ce troisième volet sans avoir lu les deux premiers et que même si ça n’est sans doute pas le plus académique pour approcher la psychologie des personnages, ça n’est pas franchement un handicap.
    Un noir plus que noir et dérangeant, qui laisse sans voix !

    03/10/2018 à 16:03 6

  • Sur le toit de l'enfer

    Ilaria Tuti

    9/10 Sans doute le portrait de femme flic le plus original depuis Cécile Sanchez de Ghislain Gilberti. Le lecteur très vite se rend compte qu’elle a de réels problèmes en plus de son âge frisant celui de la retraite, cependant elle ne voit pas sa mission derrière un bureau et génère un grand respect autour d’elle et une grande curiosité de son nouvel adjoint Marini, qu’elle malmène à souhait. Dans la montagne du nord-est de l’Italie, région natale de l’auteure et personnage à part entière de l’intrigue, Teresa va devoir convaincre de la présence d’un tueur en série où d’autres voient un crime crapuleux ou un acte de résistance écologique.
    Même si le lecteur se doute du mobile et de l’auteur des crimes, la sociologie de ce microcosme va influer sur le déroulement de l’enquête. Et en plus de tout ça … des enfants ont été malmenés par le passé et d’autres le sont aujourd’hui.
    L’histoire rejoindra-t-elle le présent ? Le diabète et les troubles profonds de la mémoire de Teresa entacheront-ils son raisonnement ? Marini saura-t-il mettre son intuition au service de l’enquête ?
    Beau suspense et dénouement inattendu … premier volet d’une trilogie annoncée réussi.

    19/09/2018 à 11:04 5

  • Une Bonne intention

    Solène Bakowski

    8/10 C’est la très touchante chronique d’une petite fille, dont la mère s’est suicidée et qui cherche à communiquer avec elle. C’est aussi la chronique d’une micro communauté régie par la grand-mère et où les hommes sont bien discrets, pour ne pas dire absents. C’est aussi la rencontre et l’amitié de Mati et de Rémi, ce jeune homme différent, à l’âme d’enfant, un peu comme Lennie, le héros de Steinbeck dans Des souris et des hommes.
    Roman noir, psychologique, écrit de manière remarquable, qui fait mouche à chaque ligne et bien dans la lignée du premier roman de Solène Bakowski, Un sac. Cette auteure sait parler de l’amour maternel et des extrêmes où il peut mener.
    Pour le blog Collectif Polar – Chronique de nuit, j’ai été amenée à questionner Solène sur ses inspirations notamment. J’y ai rencontré une personnalité toute en sensibilité, en perpétuel doute, qui nous promet de belles choses pour son prochain roman qu’elle annonce différent !

    Pour en savoir plus sur l’auteur :
    https://collectifpolar.wordpress.com/2018/09/11/gav-solene-bakowski-sous-le-feu-des-flingueuses-episode-1/
    la série d’entretiens comporte 4 épisodes en cours de diffusion

    13/09/2018 à 09:05 4

  • Le Supplément d'âme

    Matthieu Biasotto

    9/10 Que d’émotions en refermant ce livre, véritable parcours initiatique et métaphorique. Thomas est dans le coma et il a perdu ses souvenirs. Au moment de l’accident, on peut dire que c’est un vrai « connard » ! Le jeune garçon qu’il a été, va le guider, comme Virgile dans la Divine Comédie dans un espace parallèle : le supplément d’âme, … de l’autre côté. L’histoire pourrait être celle d’un triangle amoureux classique, celle d’un ambitieux qui fait passer sa carrière avant sa famille. C’est bien plus que ça, c’est celle des choix de la vie. Quand donc Thomas a-t-il rompu avec ses rêves, quand donc a-t-il trahit TK ? Sa quête de vérité, il va la faire pendant son coma, aux portes d’une mort annoncée et ainsi découvrir les malversations de ses collaborateurs, jusqu’au dénouement final, révélation inattendue et violente. La narration de Thomas rend le lecteur complice.
    Inclassable roman à suspense, très fort et dérangeant, c’est le premier que je lis de Matthieu Biasotto. Sa sensibilité à fleur de peau, son style affuté et surréaliste à la fois m’ont fait penser aux Thanatonautes de Bernard Werber.

    11/09/2018 à 11:06 7

  • Mourir, encore... (et plein d'autres choses)

    Nick Gardel

    9/10 Après deux trilogies et quatre « one shot » où les personnages se croisent pour notre plus grand plaisir et auxquels il faut ajouter un poulpe, c’est un recueil de nouvelles que nous propose cette fois cet alsacien d’adoption, jongleur de mots et addicte aux calembours.
    Le fil rouge c’est le nôtre … le temps, le temps qui passe, qui apporte tracas ou sérénité. Et sa durée toute relative … et au-delà Nick Gardel nous livre une réflexion, toute personnelle sur le métier d’auteur.
    Même si la nouvelle n’est pas le format que je préfère en général, c’est bien en lisant une nouvelle (un état d’esprit) qu’il avait publiée comme feuilleton dans FaceBook que j’ai fait connaissance avec cette plume caustique et hilarante. C’est une nouvelle version remaniée de 20 nouvelles, inédites pour la plupart, qu’il nous livre aujourd‘hui. Oui Nick Gardel sait aborder des sujets graves avec dérision et déraison … et c’est sans compter avec sa galerie de personnages cocasses et qui ressemblent terriblement à vos voisins ! Certes le temps est relatif et le temps de lire les nouvelles de Nick Gardel ne dure pas assez pour le plaisir qu’elles nous procurent.
    Idéal pour une pause entre deux romans sérieux ou sanglants, un univers déjanté, des histoires saugrenues, des personnages fous, une certaine forme de philosophie et ce foutu style incomparable … tout y est, même le bonheur !

    11/09/2018 à 10:12 2

  • L'Arménien : nuits nantaises

    Carl Pineau

    8/10 Luc, jeune émigré Arménien est bien seul. Une gueule d’ange, l’ambition de devenir le caïd des nuits nantaises, il progresse pas à pas en imaginant pas qu’il taille sa route vers sa perte.
    Deux narrateurs se côtoient pour aider le lecteur à assembler les pièces du puzzle : son pote Bertrand, coiffeur et coureur de jupons et compagnon de beuveries de Luc et Françoise sa psy bourgeoise et rangée qui, par le hasard des circonstances devient l’auxiliaire du flic de service, Brandt quant à lui frappé de tous les clichés de romans noirs, alcool, ruptures.
    J’ai été déroutée au début par cette double narration et ces retours-arrières indispensables à l’éclaircissement de cette nébuleuse guerre de la nuit. Et que dire de Luc ? Attachant et tellement en souffrance que le lecteur est tenté de l’excuser … On n’oubliera pas non plus de s’attacher au contexte et à tous les trafics de femmes, d’enfants etc. Un premier roman prometteur, de construction originale et un bon suspense.
    Merci à l’auteur Carl Pineau de m’avoir fait confiance en me proposant ce bon moment de lecture.

    09/09/2018 à 17:18 2

  • Artifices

    Didier Fossey

    8/10 C’est avec un vrai plaisir que j’ai découvert Didier Fossey. Certes polar-thriller avec sa quantité de flics fatigués et dépressifs … le minimum syndical quoi ! … mais avec une galerie de personnages féminins assez originale.
    Le plan de ce roman est aussi devenu assez classique puisqu’il mêle des retours-arrière et deux chronologies qui s’entrechoquent mais ici, point de confusion sur les temps des actions, le lecteur se repère parfaitement. Grâce à cet « artifice » (oui j’ose !) le lecteur va découvrir l’auteur des méfaits bien avant les flics, par la suggestion.
    Enfin nulle compassion pour les pervers punis par où ils ont pêché, c’est même avec une certaine forme de jubilation que l’on anticipe leur souffrance !

    03/09/2018 à 19:03 2

  • La Vengeance de Gaïa

    Jean-Luc Aubarbier

    8/10 Palpitante aventure à double détente … la parallèle entre notre époque contemporaine et ce qu’a vécu l’humanité il y a 11 000 ans, quand l’homme est passé de la cueillette et la chasse à l’élevage, est sidérante. Hier comme aujourd’hui, le réchauffement climatique et la remontée des eaux impliquent des migrations communautaires et les gourous imposent leurs religions. Dans cette fresque très réaliste, aujourd’hui des écologistes « intégristes » sont prêts à toutes les extrémités pour faire aboutir leurs idéaux et les archéologues Pierre et Marjolaine, tentent au nom des valeurs humanistes de la franc-maçonnerie de sauver ce qui peut encore l’être.
    Extrêmement documenté, il s’agit d’un véritable thriller, sur deux époques qui se ressemblent, qu’on ne peut lâcher avant son dénouement. Est-ce pour autant fini à la page 308 ? Non sans aucun doute, car la réflexion est amorcée avec cette vision philosophique où se confrontent humanisme et humanité, où s’exprime le rôle que consentent les terriens à la nature, exploitée à leur bénéfice ou pas ! C’est bien la question fondamentale qui est posée ici.

    01/09/2018 à 14:30 2

  • Violence à l'origine

    Martin Michaud

    8/10 Le quatrième roman de la série Victor Lessard vient de sortir en France. Je n’ai pas lu ses deux premières aventures et même si je me doute que j’y gagnerai en approche des personnages, ceci n’est pas un handicap à la compréhension de l’intrigue. Le québécois donne toujours un petit côté exotique et les répliques sont souvent savoureuses, surtout dans la bouche de l’adjointe Jacinthe.
    Lessard, meurtri par ce qui ressemble à une bavure, a porté pendant des années le poids de la culpabilité en se réfugiant dans l’alcool. Il a refait sa vie et s’en sort semble-t-il bien quand le passé sordide le rattrape.
    Meurtres en série, vengeance, gangs de rue, trafic, enlèvements, manipulations, corruption … tout y est dans ce monde de brutes où la hiérarchie est elle aussi trouble que les malfrats. Oui le Saint-Laurent n’est pas un long pleuve tranquille !
    Certes une fiction … mais très proche de la malheureuse réalité urbaine où tout peut s’acheter et surtout l’innocence.
    J’ai beaucoup aimé !

    26/08/2018 à 10:46 4

  • Le Tricycle Rouge

    Vincent Hauuy

    7/10 Une enquête complexe fait que les équipes canadiennes et américaines vont devoir si non collaborer, au moins échanger leurs informations … c’est pas gagné ! Noah, profileur, est en pleine reconstruction après des événements douloureux dont le lecteur prendra connaissance au fil des pages. D’énormes séquelles physiques mais aussi psychologiques entachent ses raisonnements, alors que des hallucinations couplées à son don de déduction le rendent performant et attachant. Mais … ange ou démon ? Parallèlement Sophie, journaliste et blogueuse mène une investigation acharnée … Tous les éléments sont ainsi rassemblés avec une bonne dose d’hémoglobine, pour nous accompagner dans une traque haletante.
    Un premier roman prometteur (2017) … déjà suivi du Brasier(2018) où l’on retrouvera les protagonistes du Tricycle, du moins ceux qui ont survécu à l’aventure !

    17/08/2018 à 15:14 2

  • Les Sanglots de pierre

    Dominique Faget

    8/10 Entre 1942 et 1956, que de vies chamboulées ! Hannelore future maman, David et Nathan, ses frères et son mari échappent de peu à la rafle du Vel d'Hiv. Alors que David tente de détourner l'attention, la famille va à la rencontre de ses justes, les Beaulieu de Chayssac, bourgeois exploitants viticoles du bordelais. On suivra en parallèle les destins contrariés de cette fratrie, les pérégrinations de David dans les abîmes du nazisme et les relations ambiguës des deux familles contraintes à la cohabitation. Une série de meurtres quatorze années plus tard va mettre le microcosme girondin en ébullition : rien n'est neutre et ceci doit forcément expliquer cela … un vrai suspense campagnard et bucolique. Un drame que le lecteur classera malheureusement dans les désordres « ordinaires » de notre histoire récente, qu'il ne faut pour autant ni excuser, ni oublier.
    Avec ce roman l'auteure confirme son talent de conteuse, son amour de l'histoire et de la Gironde. Elle nous promet un dépaysement radical pour le prochain … Un personnage attachant que cette auteure qui prend un réel plaisir à s'entretenir avec ses lecteurs avec beaucoup d'humour ! Merci Dominique et à très bientôt de l'autre côté de la Méditerranée !

    16/08/2018 à 13:27 4

  • Ce qui se dit la nuit

    Elsa Roch

    7/10 Amaury Marsac a décidé de prendre de vacances pour tenter de se rapprocher d’Elsa, une ancienne compagne. Il replonge dans l’ambiance qu’il a bien connue pendant son enfance. Il aime ce village et les villageois l’aiment. Il va se faire absorber par l’ambiance glauque de cette campagne proche de la mare au diable de George Sand. Il connaît tous les probables suspects d’un sordide meurtre et va jouer les auxiliaires de police, lui le cador du 36. Les évidences sont-elles réalistes ou pures spéculations, la vérité n’est-elle pas plus simple qu’il n’y paraît, la sorcellerie est-elle encore de mise de nos jours ? Elsa Roch se plaît à perdre le lecteur sur les fausses pistes !
    Un véritable thriller campagnard et bucolique …

    30/07/2018 à 18:17 3

  • Eté pourri à Melun-Plage

    Nicolas Duplessier

    7/10 Un antihéros, que dis-je un vrai loser, Florian répond chaleureusement une invitation de Roxane, son ex, alors que son couple avec Marion bat de l’aile. Englué dans ses problèmes financiers et professionnels, il ose imaginer une vie meilleure. C’est sans compter avec la disparition de l’amour de sa vie et la cascade d’emmerdes qui en découle. Trafic d’objets archéologiques, proxénétisme sanglant, combats musclés mais qui ne lui laissent que peu de chance … un vrai calvaire pour Florian.
    Ce premier roman de Nicolas Duplessier est une agréable découverte, sur un ton rafraichissant avec un vocabulaire ma foi … cru comme il faut ! Tous à la plage à Melun donc, en ces temps de canicule mais, ce n’est pas sûr que ce soit pour les vacances !

    24/07/2018 à 13:59 3

  • Flic de papier

    Guy Rechenmann

    8/10 En commençant ce « flic de papier » je savais que j’allais découvrir ce qui me manquait à la lecture des autres aventures de ce héros atypique. Ben oui, j’ai fait connaissance avec Anselme Viloc dans le plus grand désordre. Cela n’affecte pas la compréhension, les références au passé de l’enquêteur étant suffisamment explicites pour ne pas se perdre. Néanmoins la lecture de ce premier opus de la série facilite l’approche psychologique du personnage.
    En tout début de roman, Anselme, plus à l'aise dans la paperasse que dans l'action, va faire la rencontre de Lily. Comme dans le film « jeux interdits », elle est prête à accorder plus d’importance à la mort de son chat plutôt qu’à la disparition de son père. Quel point commun peut-il y avoir entre ce père, chauffeur routier, un vétérinaire collectionneur de chats et ce mécanicien inspiré ? Anselme, nouvellement arrivé sur le bassin, victime d’un traumatisme psychologique majeur que nous allons découvrir au fil de ces 248 pages, va la jouer à l’intuition qui lui revient petit à petit et ses potes experts du cru.
    Outre cette intrigue bien menée, ce volume nous permet de découvrir la galerie de personnages locaux qui nous aurons plaisir à retrouver dans les prochaines aventures de Viloc, sans oublier un personnage de premier plan : le bassin. Le style de l’auteur, friand de poésie, apporte une fraîcheur bienvenue dans une enquête qui a tendance à s’enliser. Incipit prometteur d’une série plaisante !

    24/07/2018 à 10:52 2