El Marco Modérateur

3233 votes

  • Le Cycle du feu 2

    Hub

    8/10 Parce qu’ils ont empêché le mariage et se sont rendus coupables de meurtre, Okko et ses camarades doivent échapper aux hommes lancés à leurs trousses par Tojiro, le père de la victime, ainsi qu’à la populace qui n’attend qu’un faux pas de leur part pour les lyncher. Ils filent à la cité des mille-forges. Un opus à la hauteur du précédent, plus fondé sur les mécanismes d’un complot que sur la castagne, avec une belle révélation quant à une imposture à la clef. Le cycle suivant, le final, dit « du vent », avec les deux derniers tomes de cette série, va commencer.

    22/01/2022 à 16:47 1

  • Le Cycle du vide 1

    Hub

    7/10 Premier des deux tomes du « cycle du vide » qui va achever cette série. Pourchassés, à cran, Okko et ses amis en viennent à tuer des innocents par inadvertance (comme ce vendeur de nouilles venu leur apporter en courant leur plat). Parce qu’il se sent vieux, Okko a envie de rengainer son sabre, ce qui nous donne l’occasion d’en savoir plus sur son passé au gré de cette analepse. On y comprend d’où il vient, à quel point il était ingérable et batailleur, et comment il a rencontré un gang de gamins. Pas nécessaire, à part pour les fans de la série, même si le final réserve une belle révélation quant à deux des personnages récurrents.

    28/01/2022 à 22:08 1

  • Le Cycle du vide 2

    Hub

    8/10 Le final de la série. Cela commence avec un salon de thé déserté en raison de la présence d’un fantôme qui a définitivement fait fuir les hypothétiques clients. Flashback : un chemin jalonné de têtes de vaincus, les trophées de Shomon, mène le jeune Okko vers un duel. On apprend pourquoi Okko a renoncé à ses penchants vers l’alcool après la mort de Naoki et comment il a enfin fait la connaissance de Noburo. Une bien belle conclusion, sur le thème de la quête des origines, achevant avec intelligence une série vraiment très réussie.

    28/01/2022 à 22:09 1

  • Le Dahlia Noir

    James Ellroy

    10/10 Un chef-d'oeuvre absolu ! L'un des plus grands romans policiers jamais écrits !

    18/05/2006 à 19:37 3

  • Le Danseur mondain

    Henry Musnik

    6/10 A l’hôtel « Marvel », un grand palace sis aux Champs-Elysées, l’inspecteur Gaspin arrive parce que l’on vient de tuer l’une des clientes, Madame Gorfuna, vers trois heures du matin. Mirlobar, un danseur louant une mansarde au huitième étage, qui faisait également office de gigolo et lié à la défunte, est soupçonné et s’est volatilisé. Un autre suspect se dessine : un plombier-zingueur. Aidé de son adjoint Despeaux, il va se rendre compte que cette enquête est loin d’être bouclée.
    Une nouvelle agréable, où Gaspin va mener la danse avec culot et ne révéler le mécanisme de l’affaire qu’à la toute fin, avec beaucoup de patience et d’intelligence. Les ressorts sont connus et ne chambouleront personne un tant soit peu habitué à ce genre de littérature, mais l’ensemble, sans être révolutionnaire ni mémorable, est sympathique et permet de passer quelques dizaines de minutes d’une lecture divertissante.

    28/10/2021 à 08:14

  • Le Dard du scorpion

    Lincoln Child, Douglas Preston

    8/10 Au Nouveau-Mexique, le shérif Homère Watts tire sur un pilleur de sépulture. Dans la tombe, une croix d’une grande valeur datant du XVIIe siècle et un cadavre aux traits déformés par la douleur ou la terreur. Corrie Swanson, jeune agente du FBI, participe à une fusillade au cours de laquelle une gamine de sept ans manque de perdre la vie. C’est alors qu’on lui confie l’enquête sur les circonstances de la mort de l’inconnu découvert dans la fosse. Aux côtés de l’archéologue Nora Kelly, elle va se lancer sur la trace d’un étrange trésor tout en approchant de terribles secrets liés à la bombe atomique.

    Après Tombes oubliées, Douglas Preston et Lincoln Child nous invitent à la deuxième enquête de Nora Kelly, toujours avec la délicieuse Corrie Swanson dont la première apparition remonte aux Croassements de la nuit. Les deux écrivains, en habiles et éprouvés conteurs, nous entraînent dans un récit prenant et efficace, de la première à la dernière page, sans le moindre temps mort. Les chapitres alternent habilement, nous offrant notre lot de sensations fortes et d’arcanes : une ville fantôme (High Lonesome), l’énigme de ce cadavre (en réalité un dénommé James Doolin Gower, décédé aux alentours de 1945), un butin remontant à l’époque des conquistadors, le projet « Trinity » lié au premier essai d’une bombe atomique ainsi qu’un récit lié à Geronimo lui-même. Un beau bouquet d’intrigues agréablement liées, dont on n’obtient la résolution que dans le final. L’écriture des deux auteurs est exemplaire, cadencée et addictive, faisant qu’on ne lâche pas l’ouvrage avant de connaître le fin mot de tout cela. Il y a de bien beaux moments, comme la reconstitution faciale réalisée par Corrie ou un duel digne des plus mémorables avec ce jeune shérif Watts, charismatique en diable. Certes, quelques passages sont un peu capillotractés et certains personnages – notamment chez les militaires – sont assez stéréotypés, mais l’ensemble ne manque néanmoins pas de sel ni de piment : voilà le prototype de l’histoire de chasse au trésor bien menée, resuscitant chez le lecteur son âme d’enfant. Et quel régal, vers la fin, de voir apparaître l’inénarrable Aloysius Pendergast, le plus célèbres des agents fédéraux, qui viendra résoudra l’une des énigmes.

    Un tome très réussi, qui nous fait déjà trépigner quant à la sortie du troisième opus de la série consacrée à Nora Kelly, L’Antre du diable.

    30/09/2022 à 06:59 3

  • Le Début d'une nouvelle vie

    Sophie Rigal-Goulard

    7/10 Colombe Golovine a douze ans et ses parents ont acheté et remis en état un ancien hôtel sur les bords d’un lac. Avec ses quatre frères particulièrement typés, le travail à la pension et ses amitiés naissantes, d’autres événements surprenants surviennent. Quel est le rôle de ce faucon qu’elle surnomme rapidement Alphonse ? Quid de cette étrange cliente, madame Fribourg, qui ne sort jamais de sa chambre ? Et de son jeune frère qui prétend converser avec un ami imaginaire qui ne l’est peut-être pas tant que ça ?

    Sophie Rigal-Coulard est une auteure pour la jeunesse que l’on n’a plus besoin de présenter. Avec ce roman, elle inaugure probablement une série dont on a déjà hâte de lire les prochains opus. Colombe est une adolescente pleine de ressources, aimable et bondissante, que l’on aura certainement plaisir à retrouver par la suite. Entourée de jumeaux taillés comme des réfrigérateurs, un autre, Esteban, très jeune, qui ne pense qu’à manger, et Caspar qui ne vit presque que dans sa bulle d’imagination, elle va faire la connaissance de Meredith, espiègle en diable, et Paul qui ressemble à s’y méprendre à une fille. Le quotidien de l’hôtel est sympathique, mais ce sont davantage les énigmes qui retiennent l’attention, comme de délicieux instants de suspense enchâssés dans son existence enjouée et trépidante. Un faucon qui semble porteur de messages, une cliente qui paraît dissimuler sa véritable identité ainsi que son visage, le passé américain de l’hôtel avec ces mystérieux Henry et Louisa Shawn… La fin, assez ouverte, constitue une porte délibérément béante sur d’autres tomes que l’on espère aussi allègres et rafraîchissants.

    Voilà un roman pour la jeunesse où le polar côtoie une littérature bien plus blanche et malicieuse. Un très agréable moment de littérature qui conviendra au plus grand nombre de nos chères têtes blondes.

    02/03/2023 à 07:07 2

  • Le Défenseur

    John Fairfax

    8/10 William Benson n’est pas un avocat comme les autres. Après avoir purgé une peine de prison pour meurtre, il dirige à présent son propre cabinet à Londres. Détesté de tous en raison de ce passif judiciaire, son cas est même suivi de près par le Ministre de la Justice. Secondé par Tess de Vere, il doit défendre Brent Stainsby, accusé d’avoir pendu son ex-compagne, Diane, que l’on a retrouvée avec une orange sanguine dans la bouche. Stainsby a tellement accumulé les mensonges qu’il en est presque condamné d’avance. Mais il se pourrait que l’affaire soit bien plus complexe…

    Après Reconnu coupable, voici le deuxième opus de la série consacrée à Benson et de Vere. Poursuivant son exhumation du passé de Benson, John Fairfax nous livre dans le même temps un roman policier de très haute tenue. Ancien avocat lui-même, l’auteur maîtrise parfaitement les rouages du système judiciaire anglais, les protocoles des procès, les techniques employés par les magistrats, et tous ces petits éléments qui, accolés, concourent à bâtir un ensemble cohérent et diablement crédible. On se plaît ainsi à (re)découvrir William Benson, hanté par la mort de Paul Harbeton, suivi par un psychiatre, ayant un frère handicapé, vivant dans une péniche, et luttant du point de vue financier pour ne pas perdre à la fois son cabinet et la péniche où il vit. Parallèlement, l’affaire dite de « l’orange sanguine » est très prenante, puisqu’au-delà des apparences, tout y est bien plus nuancé et dédaléen que prévu. La personnalité de Benson et celle de la victime offriront de nombreux rebondissements, tandis que de leurs passés respectifs jailliront tantôt des incertitudes, tantôt des vérités inattendues. Il y sera question d’amours éconduites, de personnalités fragiles et brisées, de trafics humains… et d’un enfant capable de faire rebattre les cartes d’un procès. Un opus dense et riche de bout en bout, se concluant sur une future affaire dite de « Limehouse »

    Un ouvrage très bien documenté et construit, et doublé d’une intrigue de premier ordre. On a d’ailleurs hâte que le troisième opus de cette série, Forced Confessions, soit traduit en français.

    25/05/2020 à 17:50 1

  • Le Déluge

    Yohan Barbay, Eric Corbeyran

    6/10 Howard vient de faire un cauchemar au cours duquel Sally était emportée par les eaux. Persuadé que c’est prémonitoire, il décide de quitter l’étrange bâtiment où il se trouve pour voler à son secours.
    Une atmosphère très curieuse, entre steampunk et SF, où il est question d’un ancien déluge qui aurait tout balayé sur son passage. Une esthétique réussie, une histoire plutôt agréable mais encombrée par des termes issus de « l’argot carabin » expliqués en fin d’ouvrage. Rien de sensationnel selon moi à ce stade du triptyque mais ça reste plutôt plaisant.

    05/02/2024 à 18:03 2

  • Le démon dans ma peau

    Jim Thompson

    10/10 Lou Ford est shérif adjoint à Central City, bourgade perdue en plein cœur du Texas. Mais derrière son insigne et son uniforme se cache un homme d’une rare violence et au cœur meurtri par le passé, prêt à se livrer aux pires atrocités. Quand il est chargé par un notable local de devenir un intermédiaire dans une petite histoire de chantage, son intervention dérape et tourne au massacre. Il sera alors prêt à tout pour dissimuler ses responsabilités, quitte à faire couler le sang.

    Auteur culte du roman noir, Jim Thompson nous a livré il y a quarante ans un véritable bijou littéraire. Personnages fouillés et justes, dialogues courts et criants de vérité, analyse sombre de l’Amérique, excellent scénario aux rouages parfaitement huilés, violence présentée sous sa forme la plus crue et pure, Le Démon dans ma peau est très certainement l’un des plus grands romans noirs jamais écrits ! Une lecture obligatoire pour tous les adeptes d’univers ténébreux, et assurément l’un des meilleurs ouvrages pour découvrir ce genre littéraire !

    10/01/2008 à 06:52 2

  • Le Démon de la perversité

    Edgar Allan Poe

    9/10 Une nouvelle terriblement marquante, qui commence par l’analyse du narrateur méditant le cas de ce qu’il appelle « le démon de la perversité », à savoir cette puissante et implacable inclination de l’être humain à aller vers l’anomal, l’illégal, voire l’autodestruction. Il passe en revue des notions riches comme la religion, le suicide, la phrénologie, et ce n’est que vers la fin que l’on apprend que le narrateur est également concerné par les penchants criminels, qu’il y a cédé par avarice, et qu’il va à son tour tomber sous l’emprise de cette pulsion. C’est un récit très riche et dense (à ne s’y forer un passage qu’au coupe-coupe au beau milieu de cette jungle de notions), exigeant, et dont la fin (où il est question d’une certaine forme de « liberté ») appelle nécessairement le lecteur à la réflexion.

    17/07/2020 à 22:56

  • Le département du diable

    Michel Honaker

    7/10 Dave Ofrion est un jeune informaticien de génie qui a mis ses talents au service de Surveyor System, une société qui épie des personnalités. Au cours de l'une de ses opérations, Dave voit sa mission basculer : l'homme qu'il surveillait est assassiné, et les tueurs semblent être sur sa piste. Qui sont-ils ? Quelles sont leurs motivations ? Dave n'a désormais plus le choix : il doit se retourner contre ses employeurs pour comprendre les raisons d'un tel drame.

    Auteur à succès de romans destinés à la jeunesse, Michel Honaker livre un thriller habile dans la collection Tribal de Flammarion. On y retrouve tous les éléments attendus : des personnages ambigus, un scénario qui tient la route, un style visuel et un ouvrage court pour plaire aux jeunes lecteurs. Les divers protagonistes sont bien campés, marqués par leurs zones d'ombre et leurs faiblesses, avec une mention particulière pour Dave, terrifié par le blanc de la neige depuis un drame passé et attaché à retrouver un père manquant. Ses connaissances en matière informatique lui seront d'une grande utilité, et on ne peut que louer l'imagination et l'efficacité de Michel Honaker. Certes, on pourra reprocher quelques ficelles un peu trop grosses par moments, mais certaines trouvailles ainsi qu'un rebondissement vers la fin du livre viennent rattraper ces petites lacunes.

    Au final, Le département du diable est un bon thriller pour adolescents, bien mené et à l'intrigue solide, mais qui pourra sembler parfois un peu « facile » pour les lecteurs adultes habitués à ce type de littérature.

    26/01/2011 à 12:44

  • Le Dernier assassin

    Barry Eisler

    6/10 Parce qu'il sait désormais qu'il est père d'un petit Koichiro, né de l'union avec la belle Midori, le tueur John Rain cherche à se racheter une conduite et épouser une nouvelle existence. Mais pour préserver la vie de sa famille, il doit exécuter un contrat, personnel cette fois-ci : l'attendent de terribles yakuzas ainsi que les membres de triades chinoises.

    Cet épisode de la série consacrée à John Rain et écrite par Barry Eisler ravira les amateurs. On retrouve l'assassin à gages, toujours aussi efficace dans ses missions et prompt au combat tactique. Pour l'aider dans cette guerre intime, viennent à son secours la magnifique Delilah, l'agente du Mossad au charme vénéneux, et Dox, sniper à la gouaille colorée. L'action est toujours omniprésente, virile et prenante, avec quelques touches d'un humour bienvenu, rappelant certains écrits de Chris Ryan. L'intrigue s'insère bien dans le fil de la saga, et le lecteur sera heureux de voir John Rain douter face à ses responsabilités de père, entrevoir un autre avenir, et croiser le fer sans aucun autre but que de défendre les siens. Certaines scènes sont assurément marquantes, comme l'affrontement contre les sumos ou l'attaque du club, remplissant amplement les objectifs distractifs du roman. On ne peut dès lors que regretter quelques personnages manquant de profondeur ou altérés par des clichés, et certaines situations trop téléphonées pour être crédibles.

    Le dernier assassin est donc un ouvrage pleinement orienté vers la satisfaction de lecteurs à la recherche d'action hollywoodienne. À cet égard, le roman est une réussite. Néanmoins, les écueils propres à ce genre littéraire – invraisemblances et manque de profondeur des protagonistes – ternissent le tableau.

    07/05/2012 à 19:38

  • Le Dernier des maîtres

    Philip K. Dick

    8/10 Je découvre un peu l’univers de Philip K. Dick, au-delà des nombreuses adaptations cinématographiques, et ce recueil de nouvelles me donne envie de poursuivre la lecture de sa bibliographie. On y trouve vraiment de tout : une révolte de jouets ; John Cupertino, persuadé d’avoir déjà tué sa femme ; des robots, les « Plombés », qui mettent tout en jeu pour protéger les humains suite à un conflit et faire en sorte que leur race ne s’éteigne pas en un vain conflit ; une très habile – et très courte – histoire autour d’êtres étranges, les « Rampeurs », qui bouleversent les codes au travers de thèmes comme les mutations génétiques et l’eugénisme, avec une stupéfiante phrase finale ; un flipper destiné à tuer son joueur ; etc. Une écriture qui ne m’a pas spécialement chamboulé (rien de mirifique pour ce qui est du vocabulaire, des tournures de phrases, bref, ce qui a trait à la forme littéraire), mais de véritables mondes étranges, brillamment imaginés et mis en scène, baignant dans la paranoïa (la Guerre froide bat son plein au moment où étaient écrites ces fictions), et touchant du doigt d’une manière magistrale et très originale ce qu’est l’humanité, la réalité, la mémoire, les diverses formes de vie. Un régal !

    29/08/2017 à 17:20 4

  • Le dernier des templiers

    Arthur Ténor

    5/10 Un roman assez pâlichon à mes yeux. Scènes téléphonées, dialogues convenus, personnages stéréotypés, et une chasse au trésor qui manque singulièrement de panache. Les jeunes lecteurs auxquels s’adresse ce livre seront certainement moins exigeants que je ne l’ai été, mais je dois avoir été déçu par cet ouvrage d’Arthur Ténor dont j’apprécie habituellement les productions.

    22/02/2016 à 20:07

  • Le Dernier Festin des vaincus

    Estelle Tharreau

    9/10 Nul ne sait où est passée Naomi Shehaan, seize ans, membre de la réserve indienne de Meshkanau. Sur place, la misère est endémique, l’addiction à la drogue et à l’alcool également, et l’on ne compte plus les disparitions ainsi que les cas de violences à l’égard des femmes autochtones. Cette affaire paraît presque anodine, d’autant que l’on apprend qu’un projet visant à construire une scierie alimentée par une grande route, va bientôt se concrétiser au grand dam des habitants. Pour comprendre ce qui s’est passé, trois personnages vont, à des degrés variés, remonter la piste de l’adolescente et aboutir à la révélation d’une terrible succession de faits sordides.

    Autant être honnête dès le début : à Polars Pourpres, on adore Estelle Tharreau. Ses romans tels Mon Ombre assassine, La Peine du bourreau, Les Eaux noires ou encore Il était une fois la guerre nous ont tellement plu que l’on attendait avec impatience son nouvel ouvrage, et le moins que l’on puisse dire, c’est que celui-ci est excellent. Une ambiance sombre, servie avec intelligence par une plume remarquable. Un style très réussi dans un cadre original, mettant en lumière de froides ténèbres et une belle galerie d’individus. On y trouve ainsi Logan Robertson, jeune policier un peu effacé, qui n’a strictement rien du héros et qui tient simplement à effectuer honnêtement son travail ; Nathan Lebel, fils d’un potentat local propriétaire d’un beau chalet où il semble se dérouler des événements peu reluisants ; Alice Tremblay, compagne de Nathan qui, même si elle est indienne, est en conflit avec elle-même ainsi qu’avec ses origines. L’histoire est aussitôt addictive et les chapitres très courts – rarement plus de trois pages – impriment un tempo relevé. Le récit s’avère efficace, proposant de multiples fausses pistes, au point que l’identité de l’assassin livrée à la fin du roman en surprendra plus d’un. Mais ce qui marque le plus dans cet opus, c’est finalement que les personnages paraissent presque en retrait malgré leurs belles caractérisations humaines : ils s’effacent au profit d’un tableau plus global où presque tous ont leur part de responsabilité – voire de culpabilité – dans la mort de Naomi. Pauvreté, incestes, viols, magouilles, dépendances narcotiques et alcooliques, affaires abjectes passées sous silence et autres lâchetés composent alors les mécanismes d’un ignoble engrenage.

    Une fois de plus, Estelle Tharreau signe un thriller mêlé d’éléments dignes du roman noir de haute volée. Un magnifique réquisitoire contre les veuleries et vices de l’âme humaine qui se double d’une excellente intrigue, où l’ultime phrase vient donner son titre à ce livre puissant.

    15/03/2024 à 06:56 6

  • Le dernier ours

    Charlotte Bousquet

    9/10 Groenland, 2037. Dans cette île transformée en désert par le dérèglement climatique, l'ours Anuri constitue la principale attraction du NC Zoo. Sa soigneuse, Karen, l’aime comme un frère, avec une certaine dose de culpabilité : son propre père l’a capturé douze ans plus tôt. Au cours d’une banale expérience, Anuri tue l’un de ses soigneurs et blesse le second. La décision tombe : il faut tuer l’ours. Karen ne l’entend pas de cette oreille. Avec Lone et Sila, deux adolescents paumés, elle décide de fuir avec l’animal. Mais Svendsen, un fourbe scientifique, n’est pas décidé à laisser partir le plantigrade. Car l’accident dont s'est rendue coupable la bête dissimule un étrange projet…

    Premier ouvrage de Charlotte Bousquet à paraître dans la collection Thriller de Rageot, ce roman sort indéniablement du lot. L’intrigue est particulièrement originale, s’appuyant habilement sur des réflexions intelligentes sur l’écologie, la responsabilité humaine, les liens avec les espèces animales, et les enjeux scientifiques. Les décors comme les personnages sont dépeints de manière admirable, au point que ce futur, pourtant imaginaire, semble immédiatement crédible. Les relations entre Karen et Anuri, mais aussi avec les deux ados, offrent d’attendrissants moments de littérature, sans jamais tomber dans la naïveté ou la facilité. C’est d’ailleurs l’un des talents de Charlotte Bousquet qui s’illustrent dans cet ouvrage : être capable de s’adresser à des jeunes sans bêtifier ni multiplier les poncifs.
    Le suspense est haletant, et il est d’autant plus tonique que la rythmique, soulignée par des chapitres courts et l’alternance entre les divers points de vue des protagonistes, le renforce. Et au-delà de l’histoire, c’est aussi un beau livre engagé, activiste à sa manière, poussant le lecteur, citoyen et acteur en devenir du sort du monde, à se poser des questions justes et utiles.

    Avec un final poignant et inattendu dans ce type de livres, ce Dernier ours constitue un roman exemplaire. Nerveux, intelligent, atypique, il affermit et confirme la diversité comme la qualité des livres paraissant dans la collection Rageot Thriller.

    10/10/2012 à 13:30

  • Le Dernier pape

    Edouard Brasey

    7/10 Le pape est sur le point de mourir, et de sombres complots semblent agiter le Vatican. Stéphane, ancien soldat et membre d’un organisme étudiant les phénomènes ufologiques et spatiaux, apprend qu’un astéroïde s’approche dangereusement de la Terre. Et si toute cette histoire était déjà écrite ?

    Dans cet ouvrage écrit par Edouard Brasey, les aficionados de cabales trouveront leur compte. S’y mêlent des conjurations religieuses, des traductions d’événements anciens, des promesses de fin du monde, ainsi que de nombreuses considérations scientifiques. Comme le firent Dan Brown, Raymond Khoury et consorts, l’action bat son plein et les révélations éclosent au fil des chapitres, servies par une écriture nerveuse et expérimentée. Indéniablement, Edouard Brasey a consciencieusement préparé son livre et s’est documenté. Autre élément qui ravira les fans du genre : les passages obligés. Le héros est charismatique et prompt à distribuer les coups, les ennemis sont particulièrement retors, et de multiples secrets – ou prétendus tels – liés à la croyance chrétienne sont dévoilés. Et à ces ingrédients s’ajoutent les extravagances, des invraisemblances ainsi qu’un manichéisme tartiné à la truelle. Mais, paradoxalement, cela constitue probablement un point fort pour les amateurs de conspirations littéraires : Edouard Brasey enfile certains poncifs au gré de son intrigue comme les petites perles d’un chapelet, et les lecteurs auxquels il destine son récit auraient certainement été déçus de ne pas les trouver.

    Même s’il ne ralliera probablement pas les suffrages des allergiques aux complots ésotériques, Edouard Brasey a su bâtir une histoire vive et endiablée, à même de tailler des croupières à certains ouvrages anglo-saxons jouant sur la même partition.

    12/05/2013 à 19:59 1

  • Le dernier petit singe

    Sarah Cohen-Scali

    9/10 Karim, douze ans, aurait dû être plus attentif aux signes : parce qu’il doit se faire faire des photos d’identité, il tombe d’abord avec sa mère sur une inquiétante employée de la mairie, puis une cabine photographique bien loin de chez lui où il se retrouve enfermé. Pire : après une série d’événements inexplicables, une vieille femme spectrale lui indique qu’il a trois jours pour sauver une gamine. D’abord dubitatif, Karim comprend que la malédiction est bien réelle.

    On ne présente plus Sarah Cohen-Scali, écrivaine ayant à son palmarès une riche bibliographie et de nombreux prix littéraires. Avec ce roman, elle intègre la collection « Hanté », y révélant une fois de plus l’étendue de son talent. Sa plume est riche, exquise, mettant en relief avec beaucoup de malice les peurs primitives et les sensations fortes. En guise d’exemple, la séquestration dans le Photomaton, qui s’étend sur trois (courts) chapitres, aurait facilement pu virer à une série de descriptions sans âme ou au grandguignolesque, mais, grâce à Sarah Cohen-Scali, on est véritablement kidnappé, au même titre que le protagoniste de cette histoire, et tout aussi chamboulé. Pareillement, le huis clos dans l’appartement qui intervient plus tard est un petit bijou de littérature anxiogène. Le suspense est habilement entretenu, et le livre prend une tournure inattendue dans le dernier tiers, faisant écho à un véritable – et révoltant – phénomène de société auquel les lecteurs ne pourront qu’être sensibilisés. Et l’on ne parle même pas de l’ultime rebondissement, fort et inattendu, où l’auteure surprend autant qu’elle conclut avec maestria ce roman à la fois riche en tension et en émotions.

    Un opus aussi court qu’efficace qui, pour notre plus grand plaisir, entremêle les frémissements du thriller fantastique pour jeunes et engagement sociétal.

    20/01/2022 à 06:46 1

  • Le Dernier tigre rouge

    Jérémie Guez

    9/10 1946. La France n’a pas encore pansé les plaies de la Seconde Guerre mondiale que celle d’Indochine s’amorce. Parmi les troupes hétéroclites françaises se rendant sur place, il y a Charles Bareuil. Ancien étudiant en philosophie, ravagé par la mort de sa femme, il n’a pas été par le passé ce que l’on pourrait qualifier de héros. Il a néanmoins un atout : c’est un tireur d’élite, marqué par une enfance brimée par un père qui ne lui a transmis que ce talent. Cette compétence va rapidement faire écho à celle d’un mystérieux sniper, enrôlé par les forces adverses, qui lui a néanmoins un jour laissé la vie.

    Jérémie Guez s’est rapidement hissé parmi les écrivains les plus prometteurs de sa génération. Paris la nuit, Balancé dans les cordes, Du vide plein les yeux ou encore sa nouvelle La Veuve blanche ont séduit le public comme la critique. Il s’essaie ici à un genre différent, avec à la clef un voyage à la fois spatial et temporel. La Guerre d’Indochine n’est assurément pas un sujet moult fois évoqué en littérature. Trop récent, trop controversé, mal cicatrisé, ce conflit a si durablement marqué les esprits qu’il contient probablement encore trop de soufre. Aussi, le pari de l’auteur d’y plonger le lecteur était osé. Pourtant, le résultat est on ne peut plus réussi. Grâce à une plume magnifique qui sait pourtant se mettre en retrait – peu de longues descriptions, caractères dépeints rapidement, et un souci de reconstitution historique indéniable mais jamais bavard, Jérémie Guez rend avant tout un magnifique hommage aux hommes et femmes qui ont participé à cet affrontement. Sans jamais être simpliste, avec une humanité et une générosité qui transpirent à chaque page, il sait mettre en relief la fraternité d’armes, la solidarité des soldats, ainsi que les points de vue des deux belligérants. Charles Bareuil est à cet égard troublant de crédibilité. Mais c’est surtout le tireur ennemi, que l’on surnomme « Le dernier tigre rouge » qui interpelle par son profil, sa complexité intellectuelle, la subtilité des raisons de son engagement armé, avec l’ultime page du récit qui complète ce puzzle psychologique.

    Magnifique épopée humaine aux scènes marquantes, comme cet avant-dernier chapitre où l’un des tireurs va épauler son adversaire, cette adroite peinture des sentiments éblouit. Non seulement Jérémie Guez confirme tout le bien que l’on pensait de lui, mais il a en plus cette capacité d’étonner et d’envoûter. Souhaitons, autant à lui qu’à son lectorat, d’autres ouvrages de cet acabit.

    09/01/2015 à 18:28 4