El Marco Modérateur

3277 votes

  • Animal

    Sandrine Collette

    9/10 De Sandrine Collette, je n’avais jamais lu que le court polar « Une brume si légère ». Pour ce roman, j’ai vraiment été transporté du début à la fin. J’ai été happé par cette histoire, sombre et pourtant si humaine et crédible de Nun et de Nin, enfants frère et sœur pris dans la tourmente d’un Népal ténébreux et de leurs propres démons. Par la suite, la traque menée par ces sept individus (dont Lior et Hadrien) m’a largement tenu en haleine, notamment avec cet ours si intelligent et retors, avant un retour au Népal afin de boucler la boucle de cette histoire sans pareil. L’écriture de l’écrivaine est atypique, forte et poétique, narrant notamment de beaux passages dans les montagnes du Kamtchatka comme dans la jungle népalaise, avec, en ce qui me concerne, un moment particulièrement mémorable avec cette histoire d’appât. Et que dire de cette fin, tout à fait dans la continuité de cet opus à l’atmosphère pesante et empoisonnée, qui invite le lecteur à prendre la place de Mme Collette et imaginer son propre épilogue. Bref, une plume remarquable pour un ouvrage très noir qui, paradoxalement, me paraît plus relever de la littérature blanche en raison de son histoire, à mon avis très éloignée de l’univers policier.

    12/05/2020 à 08:54 5

  • Ballade au Texas

    Steve Dillon, Garth Ennis

    6/10 Jesse Custer est un jeune révérend qui officie dans un patelin paumé du Texas. Par le passé, une étrange force a pénétré là où il communiait avec ses fidèles et les a tous tués. Mais une entité appelée Génésis vient de s’échapper des cieux, et avec elle la promesse d’un sacré chaos. Une BD très étrange, constituée de trajectoires brisées et de flashbacks pour ce qui est de la narration, avec des personnages assez fêlés (notamment Cassidy et Tulip), un shérif à l’ancienne dont le gamin a eu le visage ruiné par une tentative de suicide par arme à feu, etc. Pas mal de sang et de mysticisme, mais je n’ai pas été plus emballé que ça : un peu trop bavard, un peu trop capillotracté, pas assez noir.

    12/05/2020 à 08:53 4

  • Baptism - Tome 01

    Kazuo Umezu

    8/10 Izumi Wakakusa est une star de cinéma adulée, et obsédée par sa beauté. Mais des taches sur sa peau s’emparent lentement d’une partie de son visage (même si elle estime qu’il ne s’agit que de rides qu’elle peut encore dissimuler avec le maquillage et la perruque), et elle finit par avoir une enfant, Sakura, et s’éloigne des studios. Désormais un peu âgée et vivant à l’écart, elle n’a pour seule obsession que la beauté de sa fille. Quand Sakura voit sa génitrice battre comme plâtre une camarade qu’il l’a légèrement et sans en faire exprès blessée au visage, puis tuer à mains nues un chien, elle comprend que quelque chose d’anormal se prépare. Le dessin a un peu vieilli (c’est compréhensible, ce manga date de 1974) et le cœur de la machination ourdie par sa mère est dévoilé un peu trop vite à mon goût (vers la fin du premier tiers), mais l’histoire est vraiment bonne et prenante, à mi-chemin entre l’horrifique et le hitchcockien. Pas mal de suspense et de scènes à tension (comme les diverses poursuites, l’anesthésie avec les pointes façon acupuncture et surtout sa suite, bien gore). Je serai assurément au rendez-vous avec les tomes suivants.

    12/05/2020 à 08:51 1

  • Duke

    Stan Silas

    7/10 Duke n’a pas grand-chose pour lui : fumeur, « vulgaire, raciste, misogyne, alcoolique », il a un frère jumeau, Jésus, qui est tant physiquement que moralement son parfait opposé. Duke rêve qu’ils remontent tous les deux sur un ring de catch, après quoi il fait la connaissance de Gisèle, une jeune femme au tempérament explosif, tandis que d’étranges personnages verdâtres rôdent en ville… Un dessin très coloré, des graphismes bon enfant limite manga, et une histoire qui pétille d’humour, avec des individus croquignolets (dont la prostituée Garcine ainsi que Madrigale). Après, ça a beau être décontracté, je ne suis pas persuadé d’avoir envie d’en lire d’autres tomes.

    12/05/2020 à 08:51

  • L'Enlouve

    Eric Simard

    7/10 … ou le récit, à la première personne, de l’Enlouve, à savoir un mélange d’être humain et d’animal qui, comme pas mal d’autres jeunes (les humanimaux), est soigné dans un centre grâce à des gènes animaux. Avec son ami l’Enchien, ils trouvent un bébé d’une dizaine de mois, pleurant dans l’infirmerie, et décident de le prendre avec eux afin de s’en occuper. Il se pourrait que ça soit, pour l’Enlouve, le début d’une forme de mutation au contact de ce petit être. Un roman archi court (environ trente-cinq pages), écrit intelligemment, et qui met en relief l’humanité de tout un chacun, le droit à la différence, l’acceptation d’autrui, et la lutte contre les stéréotypes. C’est empli d’une belle bienveillance, et puisque l’opus est particulièrement lapidaire, il conviendra en priorité aux jeunes lecteurs. Une belle leçon, pas trop démonstrative ni trop badigeonnée de bons sentiments, avec un final appréciable.

    12/05/2020 à 08:49

  • L'Engourou

    Eric Simard

    7/10 L’engourou, mélange d’humain et de kangourou, vit depuis dix ans dans un centre où sont soignés des jeunes grâce à des gènes d’animaux. Un jour, un inconnu, Joe, vient lui proposer d’intégrer une équipe de basket en raison de ses prédispositions physiques (notamment le saut), ce que l’engourou accepte. Mais alors qu’il se sent pousser des ailes en s’imaginant membre d’une équipe d’humains, la désillusion ne va pas tarder à s’abattre sur lui. Une jolie réflexion sur la cruauté des hommes, avec une sorte de leçon sur le racisme, ce mal qui dénigre voire tranche tout ce qui dépasse d’un moule artificiellement créé. C’est également une réflexion sur la paternité, puisque Joe va devenir, en quelque sorte, le père spirituel, à défaut de l’être biologiquement parlant, de notre hybride homme-animal. Environ trente-cinq pages d’une belle littérature sur l’acceptation de la différence, en priorité destinée aux jeunes lecteurs, mais qui peut également convenir à des plus âgés pour passer un (très) court instant de plaisir.

    12/05/2020 à 08:48

  • L'Enfaon

    Eric Simard

    7/10 L’enfaon, vu à travers les yeux de Leïla, une enfant de neuf ans qui est tombée amoureuse de lui. L’enfaon est un gamin différent, rêveur, créé dans une couveuse artificielle, sans réels parents, car, puisqu’il avait une maladie mortelle, on lui a injecté des gènes de cerfs. Il est mauvais en mathématiques, mais très bon en sport (grâce à ses spécificités animales) et en français (cf. le poème qu’il a écrit). A la manière des autres opus de la série, une ode à la différence et à la lutte contre l’indifférence (la référence au conte « Le Vilain petit canard » est patente avec l’entrée de l’enfaon et de ses magnifiques ramures), mais avec, je trouve, une note supplémentaire portée sur l’émotion (à travers le destin de l’enfanteau, hybride homme-éléphant). Un joli petit tome, tout en félicité et en bienveillance, avec juste ce qu’il faut de morale, sans jamais devenir pesante.

    12/05/2020 à 08:48 1

  • L'Enbaleine

    Eric Simard

    8/10 L’enbaleine (hybride enfant-baleine) figure parmi les plusieurs dizaines d’humanimaux du centre. Entre ses rêveries marines et son violoncelle, et n’a comme seul ami que l’endauphin, avec qui elle partage l’évent et la nageoire caudale. Et c’est au cours de l’un de ses songes qu’elle entrevoit la photo d’une femme. Qui est-elle ? Parmi les tomes de cette série, au même titre que « L’Enfaon », c’est probablement l’un des plus émouvants, les plus poignants. Une très belle réflexion sur l’âme humaine et l’altérité, mais surtout sur la filiation et la quête des origines. L’enbaleine le comprendra d’ailleurs très vite (pour rappel, ce roman ne fait que trente-cinq pages environ), avec un final bien délicat, porté par l’écriture d’Éric Simard toujours aussi agréable. Un de mes ouvrages préférés dans cette collection.

    12/05/2020 à 08:46

  • Trois petits singes 1/2

    Emilio Van Der Zuiden

    8/10 Le lieutenant colonel de l’armée française à la retraite De Crécy charge le détective privé McQueen de retrouver sa nièce, Millie, disparue avec son secrétaire François Bonnard qui s’est taillé en emportant également une statuette représentant les traditionnels trois petits singes (un qui ne voit pas, un autre qui ne parle pas, le dernier qui n’entend pas). Mais l’enquête, de prime abord classique (surtout au vu des demandes régulières des clients de McQueen) se révèle plus complexe que prévue. Un scénario assez familier pour quiconque apprécie les romans policiers des années 1950 et 1960, avec ce qu’il faut d’action, de suspense et de dialogues (l’ensemble m’a paru parfois un peu trop bavard). McQueen, avec son physique de « macaque », tranche un peu avec ce que l’on trouve dans la littérature et la BD du genre, notamment dans sa relation avec sa psy, les flashbacks de l’accident de voiture, et ses hallucinations (où ses êtres chers et morts ou dans le coma viennent à ses côtés, voire peuvent l’interpeler). Bref, j’ai beaucoup aimé cet hommage (avec cet immense cline d’œil final à un personnage dont le nom de famille est Hammett) qui se paie le luxe de se réinventer en partie.

    04/05/2020 à 16:40 1

  • Racines électriques

    Jean-David Morvan, Nesmo

    8/10 Une BD assez étrange, qui commence avec de nombreuses pages sans dialogue, et un individu lambda, très attaché à la luxuriance et la pureté de la nature, qui s’en va rejoindre une ville où sévit un tueur en série. On suit à la fois le policier Edouard Mornières et ce malheureux bougre, qui a la fois le regard apeuré d’un enfant et des capacités physiques monstrueuses (et dont les dernières images nous indiquent quelle pourrait être la nature réelle de cet homme). Un dessin magnifique, une intrigue sombre et palpitante, d’autant qu’elle sait véhiculer autour d’elle de nombreux mystères, et des scènes vraiment mémorables (comme la course-poursuite dans le métro, ou le massacre dans l’une des voitures de ce dernier). Une bande dessinée où le polar se mêle à quelque chose de bien plus fantasy sur la fin, et dont le reste tend surtout vers le steampunk. Je ne sais pas où mène le reste de la série, mais en ce qui me concerne, je suis ferré.

    04/05/2020 à 16:39 1

  • Origin tome 1

    Boichi

    6/10 Printemps 2048 à Tokyo. La mise en place de la ligne ferroviaire Eurasie a entraîné le développement du crime. Origin fait partie de ces robots que l’on a tant de mal à distinguer des humains. J’ai été bluffé par la qualité des dessins, absolument remarquables, et charmé par les errements d’Origin, qui tente de se fondre dans la masse des humains tout en réfléchissant à chacun de ses actes pour ne pas être découvert. Les combats (l’essentiel de ce manga, en fait) sont magnifiques à observer, millimétrés comme de pures chorégraphies, mais au-delà de ce côté purement distractif et baston, je reste un peu sur ma faim, car ce premier tome ne m’a pas suffisamment embarqué du point de vue scénaristique. A voir ce que les opus suivants réservent…

    04/05/2020 à 16:38

  • Mission Seattle

    Stéphane Bervas, Sylvain Runberg

    8/10 Seattle, fin du XXIe siècle. Katryn Horst et Valdo Reyes doivent infiltrer un réseau de trafiquants d’êtres humains, spécialisés dans la prostitution. Katryn dispose de nano-caméras dans les pupilles qui la relient en direct à ses collègues en même temps qu’elles influent sur son métabolisme. Leur cible deviendra plus spécifiquement Lewis, un riche médecin aux appétences pédophiles. Une BD au graphisme qui m’a beaucoup fait penser à celui des comics, propre et très agréable. Des scènes d’action bien échevelées (notamment près de la piscine et sur le port) et des informations finales quant au passé de Katryn qui donnent bien envie de voir de quoi se composera le tome suivant.

    04/05/2020 à 16:38 3

  • La Grande Odalisque

    Florent Ruppert, Bastien Vivès

    7/10 Un vol au Musée d’Orsay. La cible ? « Le Déjeuner sur l’herbe », de Manet. Un cambriolage mené par Carole et Alex, un duo d’expertes qui va bientôt intégrer une championne de moto, Sam, pour récupérer au Louvre « La Grande Odalisque » d’Ingres. De l’action, des cascades et de l’humour, ce qui est très plaisant, mais comme Hoel, j’ai été moyennement emballé par le graphisme : on va dire qu’il est « épuré » pour rester neutre, mais pour ma part, je l’ai trouvé trop simpliste.

    04/05/2020 à 16:36 1

  • Spectres innombrables

    Cullen Bunn, Tyler Crook

    7/10 Les habitants du patelin de Harrow County ont lynché Hester Beck, une sorcière. Dix-huit ans plus tard, la jeune Emmy est hantée par des questionnements étranges. Serait-ce le retour d’Hester ? Un récit bien cauchemardesque, peuplé de scènes fantasmagoriques, où l’on découvre dans le même temps un graphisme bien particulier (parfois un peu « grossier ») mais où plane toujours la violence et la folie. On y retrouve toutes les cases à cocher de ce type de récit (la malédiction, le pacte, le cimetière maudit, les fantômes, les hallucinations, des personnages créés comme des golems, et que dire de ce gamin vidé comme un poulet et dont il ne reste que la peau, etc.) autour de cette histoire que l’on croirait inspirée de l’univers de Lovecraft. Donc, pas fan du type de ces dessins, mais l’histoire convainc sans pour autant bouleverser les codes, avec une planche finale qui intrigue.

    04/05/2020 à 16:35 1

  • GTO tome 1

    Tôru Fujisawa

    5/10 Onizuka Eikichi, 22 ans, as du karaté, mateur invétéré, fêtard, fumeur et buveur, ne sait pas quoi faire de sa vie. Il se décide, par un curieux hasard de circonstances, à d’être enseignant. Ses ambitions de devenir le plus « great teacher » du monde vont se fracasser sur son public de lycéens de la section O. Des traits agréables, très typés manga, où se mêlent un érotisme très gentillet, un tout petit peu de violence, et où rien n’est d’abord épargné à Onizuka (pas même le chantage), jusqu’à un brusque changement de la donne. Si cet opus pose les bases de la série, je n’ai en revanche pas spécialement accroché, notamment en raison de longueurs, de bavardages, et d’une intrigue un peu effilochée qui ne me donne pas spécialement envie de connaître la suite.

    04/05/2020 à 16:35 1

  • L'Objet

    Andreas

    5/10 Un dirigeable complètement vide qui s’abat sur New York, une bibliothèque qui s’embrase, des visages de SDF verdis par une matière inconnue : bien d’étranges phénomènes qui accompagnent l’arrivée à New York de Capricorne. J’ai trouvé l’ensemble un peu confus, le graphisme pas spécialement affriolant, et certains éléments de l’intrigue (le dirigeable qui s’effondre dans une ville immense sans que ça n’alerte personne, les anciens tunnels creusés par les Indiens, la base souterraine secrète, etc.) beaucoup trop tirés par les cheveux. Peut-être que les tomes suivants viendront apporter du liant à tout cela, mais en plus d’avoir trouvé le héros Capricorne sans aura ni charisme particuliers (et le fait qu’il est astrologue n’apporte rien à l’intrigue), je ne suis pas spécialement pressé de passer à la suite.

    04/05/2020 à 16:34 1

  • Crâne de bois

    Jérôme Jouvray, Olivier Jouvray

    5/10 Ce pauvre gosse que l’on a toujours appelé « Crâne de bois » a décidé de lui-même de se prénommer Lincoln. En découle une vie de rapines, de vols à main armée et de débrouillardises pas toujours légales et encore moins légitimes, jusqu’à ce qu’il croise la route d’un type d’allure mexicaine qui prétend être Dieu et lui propose un deal : s’amender et obtenir l’immortalité. Une idée vraiment sympa, quelques touches d’humour bienvenues, et un personnage central qui tranche vraiment avec ce que l’on voit habituellement. Mais je n’ai pas été séduit par le dessin, assez grossier (c’est voulu, bien évidemment, mais ça n’est pas trop ma pointure), ni par les jurons incessants de Lincoln (ça n’est pas que je sois prude, c’est juste qu’ils finissent par être barbants et qu’ils remplacent inutilement des silences ou des dialogues plus intéressants). Moyennement convaincu, donc.

    04/05/2020 à 16:29 1

  • Une Confession

    John Wainwright

    9/10 John Duxbury est un citoyen tout ce qu’il y a de plus insoupçonnable. Marié, un enfant, il dirige une imprimerie. Une vie sans le moindre accroc, la respectabilité à l’état pur. En réalité, son couple bat de l’aile. Quand son épouse, Maude, chute du haut d’une falaise alors qu’ils sont tous les deux en vacances, l’accident apparaît évident. Sauf qu’un témoin, Raymond Foster, affirme avoir vu l’époux pousser sa femme. Alors, meurtre ou malheureuse glissade ? L’inspecteur Harry Harker enquête.

    De John Wainwright, on connaît déjà l’immense Bois de justice ainsi qu’A table !, adapté au cinéma sous le titre Garde à vue avec Michel Serrault et Lino Ventura, et dialogué par Michel Audiard. Ce roman, datant de 1984, a été encensé par Georges Simenon, et l’on comprend rapidement pourquoi le grand auteur l’avait tant apprécié. Une écriture remarquable, râclée jusqu’à l’os, simple sans jamais être simpliste. Des portraits particulièrement denses et humains, où les écarts, l’hypocrisie et les non-dits s’expriment parfois en quelques formules lapidaires bien senties. Et il y a ces portraits psychologiques, remarquables. Le policier Harker, boiteux, doué d’une immense mémoire, obstiné jusqu’à éclater en colères volcaniques. Maude, harpie aux allures de parfaite épouse lorsqu’elle se trouve en société. John, pauvre bougre parfois trop poli ou complaisant, même lorsque l’un de ses employés le vole. On apprend à saisir toutes les subtilités de ces personnages au gré d’un récit atypique, entre fractions du journal intime du mari et les points de vue des autres protagonistes, jusqu’à la révélation finale, qui est un pur joyau. On saisit à ce moment-là, avec encore plus d’acuité, pourquoi Georges Simenon a qualifié ce livre de « roman inoubliable ». Ce que Harker va dévoiler est d’une incroyable justesse, faisant jaillir le pus du furoncle marital. Quelques pages, pourtant d’une rare sécheresse stylistique, suffisent à divulguer l’ampleur de la tragédie sous-jacente. Un rebondissement, sans surenchère stérile ni effet de mauvais aloi, que l’on retrouve d’ailleurs dans certains des ouvrages du maître belge.

    Un opus magistral, dont l’efficacité est d’ailleurs inversement proportionnelle aux moyens mis en œuvre. Quelques individus, une intrigue de prime abord fluette, et pourtant, à l’arrivée, un grand moment de littérature noire et humaine. Tout simplement.

    03/05/2020 à 23:35 7

  • American Gothic

    Xavier Mauméjean

    9/10 … ou comment, en pleine période maccarthyste, le patron de la Warner Bros veut racheter les droits d’un recueil de contes, « Ma Mère l’Oie », à Daryl Leyland. Mais afin de s’assurer le succès, il faut d’abord vérifier que ce Leyland ne présente aucun accroc dans sa vie ni dans son passé. On va donc charger Jack Sawyer, un dialoguiste et scénariste de seconde zone, d’enquêter sur l’écrivain.
    Un livre incroyable, franchement atypique, tant dans la forme que dans le fond. Ce n’est pas un récit classique, mais une juxtaposition de textes (rapports, analyses, témoignages, conférences, ou contes extraits du spicilège). C’est également une puissante plongée dans l’univers d’un auteur, ce Daryl Leyland, à la trajectoire brisée. L’orphelinat, les maltraitances à la ferme, l’asile, la guerre, la ville de Chicago (qui restera à jamais si intimement plaquée à l’existence de l’écrivain, à moins que ça ne soit l’inverse), etc. C’est aussi l’occasion de croiser des personnages mémorables, de François Parisot (traducteur de l’ouvrage de Leyland et donc avatar littéraire de Xavier Mauméjean) à Max Van Doren (l’illustrateur du recueil, un pauvre gosse un brin gentillet qui était en réalité un bien piètre dessinateur au sens classique, déboussolé par le succès, et dont les ultimes instants constituent un monument de littérature comme de surprise). C’est aussi une pure épopée de l’Amérique, portée par l’érudition de Xavier Mauméjean, remarquable, et qui aborde tant et tant de thèmes, depuis trois guerres (Première, Seconde et de Corée) à une campagne de publicité pour des bonbons, du maccarthysme à l’essor de la télévision, du film pour enfants au film porno. Un ouvrage fort, très original et dense, où l’on se plaît à s’égarer dans cette ballade littéraire tout en essayant de décortiquer où s’arrête la fiction et où commencent les faits réels, car tout sonne si juste que l’on se méprend à coup sûr entre ce qui a été inventé par l’auteur et ce qu’il a retranscrit. Grandiose, tout simplement.

    03/05/2020 à 23:33

  • Kurosagi - Livraison de cadavres tome 5

    Ôtsuka Eiji, Yamazaki Hôsui

    8/10 Un divertissement dans une maison de retraite, et voilà nos experts du surnaturel entraîné vers un village dont les habitants ont été anéantis, avec une référence au massacre de Nankin : classique mais efficace. Puis des récits avec, respectivement, une momie vengeresse, des cérémonies funéraires, des têtes découvertes congelées et empaquetées dans des capsules de verre dans une grotte : le dernier sort vraiment du lot, avec cette intrigue autour de la cryogénie et d’une escroquerie. Au final, un recueil très réussi.

    02/05/2020 à 08:36