El Marco Modérateur

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  • A-Ban-Soom, le tavernier de Chinatown

    José Moselli

    6/10 Un steamer revient de Singapour, et le capitaine Thomson s’entretient en toute discrétion avec A-Ban-Soon. Il faut dire que la cargaison est sensible : 6000 livres d’un opium de contrebande (à 15 dollars de l’époque la livre, ça en fait, de l’argent !), au lieu du riz, du charbon, de la poudre et du whisky comme il l’est indiqué aux douaniers. Heureusement, John Strobbins est là… Une nouvelle d’une trentaine de minutes d’écoute, agréable, sans grande fièvre ni passion. La première manipulation de Strobbins est tellement téléphonée qu’elle en devient d’une rare banalité (à moins que ça ne soit justement cette banalité qui la rend si téléphonée), sans compter pas mal de clichés sur les Chinois (alimentation, apparence, et parfois quelques remarques fort déplacées, mais mettons cela sur le compte de l’époque, le tout début du vingtième siècle). L’ensemble se laisse néanmoins lire (écouter en ce qui me concerne).

    01/04/2021 à 18:54 1

  • Abominables bonshommes des neiges

    R. L. Stine

    7/10 Orpheline de père et de mère, Jane Forest a quitté Chicago pour aller vivre dans le nord avec sa jeune tante, Anna, dans un village montagneux envahi par la neige, Sherpia. Là-bas, elle y découvre une communauté resserrée et vivant dans l’inquiétude d’un effrayant bonhomme de neige qui serait une sorte d’ogre local, au point que les habitants confectionnent tous un bonhomme de neige devant chez eux, comme un talisman. Anna se souvient d’une comptine dont elle ne se rappelle que l’entame et qui pourrait être la clef de cette histoire. Un pitch assez atypique dans la bibliographie de R. L. Stine, une ambiance aimablement anxiogène, des personnages qui dissimule des secrets (l’original barbu et son loup vivant à l’écart du village), de l’inexplicable et un suspense bien mené de bout en bout. Même si je ne suis pas fan de la littérature mettant en scène de la magie, cet opus est fort agréable à suivre, original et prenant. Je regrette juste deux points : la toute dernière ligne, là où l’on attend le twist final de l’auteur, semble avant tout fondé sur une tentative d’humour qu’une volonté d’être un réel rebondissement, ce qui m’a un peu déçu. Et il y a la fin du chapitre 25, clin d’œil géant à une réplique culte du cinéma, mais qui est tellement connue que l’effet, bien involontaire, n’a pas été chez moi le bon : autant j’ai adhéré à ce rebondissement, autant la manière de le mettre en scène m’a davantage fait rire et quitter les rails du récit qu’autre chose.

    17/03/2021 à 17:59 1

  • Ados sous contrôle

    Johan Heliot

    7/10 Une histoire assez sombre et bien menée, pour une intrigue intelligente quant aux dangers de la délinquance et des moyens parfois douteux pour lutter contre ce mal. Une écriture efficace et des scènes tendues qui rapprochent parfois cet ouvrage de la littérature pour adultes.

    10/03/2016 à 18:36 1

  • Affreux, sales et gentils

    Guillaume Guéraud

    7/10 Un petit texte sympathique et enjoué, rédigé avec intelligence et calibré pour son lectorat. Assez loin des autres ouvrages de Guillaume Guéraud, car plus gamin et divertissant. Cependant, la fin est bien loin des canons du genre et l’on y retrouve un peu la patte de l’écrivain, dure et coupante. En sachant éviter la compromission tout en acceptant d’édulcorer son univers, avec cette cohérence personnelle et littéraire, l’auteur maintient habilement le cap de son style.

    08/06/2014 à 08:41 1

  • Agent double

    James Ponti

    6/10 Ils sont cinq : Brooklyn, Paris, Sydney, Rio et Kat. Un quintet d’adolescents qui utilisent leurs talents complémentaires pour servir l’Angleterre au sein d’une cellule secrète du MI6, le service britannique de renseignement extérieur. Leur chef, baptisé « Mère » alors qu’il s’agit en réalité d’un homme, en vient à avoir des nouvelles de ses deux enfants, Anne et Robert, partis avec leur mère depuis passée dans l’organisation criminelle « Umbra ». Les City Spies apprennent dans le même temps qu’un de leurs agents, Rutledge, ornithologue expérimenté, est mort d’une crise cardiaque à San Francisco. Mais est-ce réellement un décès naturel ou un assassinat dissimulé ?
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    Après City Spies tome 1, James Ponti nous livre le deuxième tome de ses espions en herbe. L’amorce de ce roman, avec une tentative de kidnapping sur un yacht, avec comme cible un lointain membre de la famille royale, met d’entrée de jeu dans le bain : pas mal d’action, des protagonistes hautement sympathiques, et une suite que l’on espère à la hauteur. L’auteur joue ensuite sur un canevas réussi où il est impossible de ne pas voir l’influence de Robert Muchamore, avec sa célébrissime série CHERUB, ou encore ses livres consacrés à la terrible famille Aramov. Les agents secrets adolescents, l’intrigue qui commence sur les chapeaux de roues, de l’humour et de l’action : à défaut d’être très original en soi, le concept est ici suffisamment bien maîtrisé pour captiver le lectorat, de préférence jeune. On suit alors nos héros de par le monde, de l’Angleterre à l’Australie en passant par la Californie, avec un séjour intéressant à Alcatraz. L’histoire préserve quelques rebondissements habiles et ne montre aucun temps mort, ce qui fait que l’on dévore ce roman plus qu’on ne le lit, avec également à la clef quelques références à des cas historiques de réels agents doubles. Cependant, comme indiqué plus haut, sans mépris aucun, James Ponti n’a pas le panache de Robert Muchamore. Il est toujours déplacé de vouloir comparer deux écrivains et leurs ouvrages respectifs, mais lorsque l’un d’entre eux s’inspire si directement d’un si prestigieux aîné, il faut proposer mieux, ou alors une variation sur la partition. Or, indéniablement, cet opus, efficace au demeurant, n’a pas la fougue ni la virtuosité de ceux de son prédécesseur.

    Un ouvrage qui plaira sans mal aux jeunes et moins jeunes lecteurs, mais sur lequel plane l’ombre un peu trop envahissante de ceux de Robert Muchamore. Il n’en demeure pas moins énergique, au point de proposer un succédané attachant aux romans de la série CHERUB.

    07/01/2022 à 07:23 1

  • Allo Jésus, ici Momo

    Eric Simard

    6/10 Une histoire gentillette et pleine de bons sentiments quant au racisme. Une plume agréable pour une morale mignonne, avec ce roman particulièrement court.

    10/03/2016 à 18:36 1

  • Amandine et les brigades du Tigre

    Lucienne Cluytens

    7/10 1909, au Crotoy. Amandine, fille de bonne famille, s’égaie des exploits aéronautiques des frères Caudron, rencontre l’écrivaine Colette en villégiature. C’est alors qu’un vol de bijoux suivi du meurtre d’Anaïs, domestique de sa maison, plonge les alentours dans la stupéfaction. Amandine décide de prêter son concours aux forces de police pour démêler cette affaire.

    De Lucienne Cluytens, on a déjà apprécié, entre autres, Les Bagnoles ne tombent pas du ciel ou LaPanthère sort ses griffes. Ici, elle nous revient avec cet ouvrage issu de la collection Belle Epoque. Un livre enthousiasmant et rafraîchissant, du début à la fin. L’ambiance du début de siècle est parfaitement restituée, les lieux également, et c’est avec plaisir que l’on se laisse promener par l’auteure au gré des pages. L’intrigue est intelligente, bien menée et parfaitement plausible, sans effet de manche ni artifice malvenu, avec l’esprit qui caractérise Lucienne Cluytens. Ce livre est aussi un joli portrait de femme, en la personne d’Amandine : dégourdie et impatiente, pugnace, en butte aux préjugés et mœurs de l’époque où les dames ne peuvent prétendument s’accomplir qu’au travers de mariages de convenance, sans réelle liberté. Elle découvrira l’amour avec le bel Alexander, mais aussi les frissons de l’enquête criminelle avec Raoul Plantier, policier issu des Brigades du Tigre, jusqu’à la résolution de ce vol et de deux homicides.

    Une efficace énigme déposée sur une élégante carte postale : idéal pour se divertir !

    26/04/2017 à 17:36 1

  • Au voyeur !

    Carter Brown

    7/10 Un roman typique de la collection Carré noir, gorgé de tous ces ingrédients que l’on se plaît à retrouver : un détective privé obstiné, toujours prompt à filer des mandales, et trouvant sur sa route des femmes magnifiques et peu farouches. Une intrigue qui n’a rien d’extraordinaire, mais ramassée, prenante et efficace, ou comment Rick Holman parvient à comprendre le vitriolage d’une jeune actrice lors d’une croisière sur un yacht privé. Une baignade où le noir le dispute au cabotinage et à la gaudriole, au cours d’un récit court et plus qu’agréable. J’avais déjà apprécié précédemment des ouvrages de Carter Brown, et celui-ci confirme sans le moindre doute que je me lancerai dans la lecture d’autres de ses livres.

    25/06/2016 à 12:24 1

  • Ava et Marilyn

    Alexandra Schwartzbrod

    7/10 Un chassé-croisé ensorcelant et une chute originale, avec cet épilogue qui obligera nécessairement à repenser l’ensemble du récit pour se le réapproprier. Une histoire où l’érotisme affleure, tant dans les mots que dans les dessins de Miles Hyman.

    30/11/2014 à 18:18 1

  • Avant la chute

    Noah Hawley

    7/10 Onze personnes embarquent à bord d’un jet privé depuis l’île de Vineyard. Principalement deux familles avec leurs enfants, plus l’équipage, un garde du corps et un invité de dernière minute, Scott Burroughs, un artiste sur le retour. Seize minutes plus tard, l’avion s’écrase en mer. Seuls le peintre et JJ Bateman, âgé de quatre ans et héritant ainsi d’une véritable fortune, survivent miraculeusement. Mais quel aura été la part de l’accident, de la machination ou du hasard dans ce crash ?

    Dépeint comme un thriller dès la première de couverture de la version poche, ce roman de Noah Hawley saisit l’attention dès les premières pages. L’écriture est très agréable, le style également, et l’on se passionne vite pour le décor planté par l’auteur, celui des minutes et circonstances précédent le décollage. Par la suite, l’ouvrage étonne : son aspect policier semble s’éloigner au profit de l’étude psychologique des divers protagonistes. Certains retiennent nettement l’attention, comme Scott, peintre raté ayant décidé d’abandonner ses vieux démons pour essayer de croquer un peu de gloire, Bill Cunningham, journaliste sans scrupule de la chaîne d’information ALC et prêt à toutes les bassesses, ou encore Gil Baruch, le garde du corps. De belles tranches de vie, assurément, que Noah Hawley rend d’autant plus poignantes qu’elles se sont unies, au dernier moment, dans une même tragédie. Mais, malgré ces qualités indéniables, le temps est un peu long pour l’amateur de thrillers. Et puis, arrive la trois-cent-quatre-vingt-douzième page, qui rebat les cartes de l’intrigue en injectant une dose salvatrice et dynamisante dans le récit, mais qui n’est que de courte durée. La suite du livre, encore une fois très bien écrite, demeure dans la droite ligne de son entame : un drame, vif et mordant, rendu très humain par cette description chorale des événements, mais qui n’atterrit jamais sur le tarmac tant attendu du thriller.

    Noah Hawley livre un opus soigné et réussi, mais dont l’étiquette « thriller » paraît usurpée. Une frustration comparable au fait de prendre un avion qui, malgré d’excellentes conditions de vol, ne vous emmène pas à la destination prévue.

    20/07/2020 à 10:35 1

  • Aveugle, que veux-tu ?

    Robert Destanque

    6/10 Un bon petit polar bien noir, qui m’a littéralement pris par la main pour m’accompagner du début à la fin du récit. Je me suis laissé prendre par cette étrange – et assez peu plausible, reconnaissons-le – histoire d’amitié entre Robert Nolan, ancien comptable et homme de main de Goldman, un mafieux, et Michel Cotin, gamin un peu délaissé par sa famille opulente. Un roman court, qui va à l’essentiel, à l’image du vocabulaire employé et des tournures en général, assez simples. Un règlement de comptes en milieu varois, où le gosse se montra sacrément utile à Nolan, notamment pour lui prêter ses yeux lors du combat final, nécessairement violent. Cependant, là où je reste un peu sur ma faim, c’est au niveau des sentiments, des textures humaines : tout y est assez plat, froid. Robert Destanque, à force d’économiser ses mots, en est, selon moi, venu à trop peu dépeindre les émotions. Cela manque de chair entre Nolan et Michel, à moins que cela ne soit voulu ; je m’imaginais une relation fils/père de substitution, voire une forme d’envoûtement auprès de ce mioche déjà passionné par les armes et les figurines de soldats. Au final, un joli moment de lecture, mais trop décharné en termes de psychologie pour entièrement me faire adhérer.

    08/08/2017 à 08:57 1

  • Baby Leg

    Brian Evenson

    8/10 Kraus ne sait plus où il en est. Il se réveille au beau milieu d’une forêt, amputé d’une main, et poursuivi par une mystérieuse femme armée d’une hache et dotée d’une jambe de bébé. Ce qu’il ignore encore, c’est qu’un docteur Varner est à sa recherche et qu’il ne semble pas décidé à le laisser s’en aller.

    Kafkaïen. Cauchemardesque. Monstrueux. Les qualificatifs ne manquent pas si l’on souhaite caractériser cet ouvrage de Brian Evenson. On lui devait déjà un déjanté Confrérie des mutilés où le simple synopsis, profondément atypique, offrait des perspectives détonantes de lecture. Avec ce Baby Leg, le stade de l’anormalité est amplement franchi. Cent pages d’un pur délire littéraire, où se télescopent des personnages étranges placés dans des situations baroques. Le ton est également inhabituel, au point que le lecteur perd souvent pied, entre hallucinations et distorsions du réel. Il est d’ailleurs impossible de totalement définir cet Objet Littéraire Non Identifié car, quand se tournent les ultimes pages, des questions subsistent. Quiconque pensera détenir une vérité, ou tout du moins la sienne, car Brian Evenson a éparpillé quelques clefs que tout un chacun pourra faire entrer dans des serrures de sa convenance, ouvrant les portes sur d’hypothétiques éclaircissements. Si certains pourront, bien légitimement, reprocher à l’auteur de ne pas avoir opté pour une solution unique et rationnelle, il faut soutenir, tout aussi légitimement, le choix narratif de l’écrivain d’avoir choisi de ne pas choisir. Au final, chaque lecteur, avec son ressenti et l’explication qui lui semblera la plus évidente ou la moins douteuse, partagera un arpent du cauchemar vécu par Kraus.

    27/05/2014 à 16:04 1

  • Baignade accompagnée

    Serge Brussolo

    7/10 Un bon petit polar original et qui se laisse lire avec grand plaisir, même si l'intrigue concernant la mystérieuse drogue m'apparait un peu inutile, et celle du Club des Dévorés Vifs sous-utilisée

    30/04/2006 à 09:22 1

  • Barjoland

    Jean-Luc Luciani

    8/10 Les temps sont rudes pour Damien : il vient d’apprendre par un texto l’élection de Donald Trump et sa mère, Marlène vient de se mettre en couple avec Jacques Colvert, un pédopsychiatre qui anime une émission de radio, alors que son père n’est décédé que depuis trois ans. Pire : Marlène compte les faire emménager chez Colvert. Dans le même temps, un vent de révolte se met à souffler dans les crânes des amis de Damien qui a fermement décidé de venir à bout du nouveau compagnon de sa mère, en commençant par saboter son émission. Et leur professeur d’HG, Gallois, qui s’en prend au nouveau Président des Etats-Unis pendant ses cours au point de fortement irriter Santoro, le proviseur. Décidément, les mauvaises planètes étaient en train de s’aligner : et si on était à Barjoland ?
    La plume de Jean-Luc Luciani, je la connais (j’ai déjà lu quelques-uns de ses autres romans), et je me suis fait plaisir en m’attaquant à cet ouvrage, présenté comme différent des autres, et paru dans la collection « Rester vivant » que j’apprécie également. D’entrée de jeu, effectivement, ce roman ne ressemble pas à ses autres écrits : un style plus tranché, barré, pour un univers davantage destiné aux ados qu’aux jeunes lecteurs. La lente descente aux enfers de Damien, miné par une société qu’il rejette en bloc et détérioré par le nouvel amour de sa mère – qui s’avère rapidement être un abruti de première, égocentré, possessif et plus attaché aux objets qu’aux êtres humains. Entre les deux, la tension va monter, d’incendie en internement en hôpital psychiatrique. Une vision désenchantée de l’adolescence presque autant que de notre monde, mais d’où jaillissent quelques traits d’espérance. L’ensemble est très agréable à lire, original et prenant de bout en bout, même si je regrette l’absence d’un élément que je n’ai pas encore cerné. Peut-être aurais-je préféré plus de noirceur, d’absurde, de pessimisme, ou alors une histoire mettant moins à l’arrière-plan des personnages qui auraient, selon moi, mérité une place plus large, comme Gallois qui s’éclipse de la scène trop rapidement alors qu’il aurait pu bénéficier de plus d’attention de la part de son géniteur littéraire. Bref, une lecture très estimable, indéniablement, mais avec un très léger goût d’inachevé.

    10/07/2022 à 08:40 1

  • Belles et putes

    Claude Ardid

    7/10 Un juge est assassiné à Toulon à coups de crucifix, un autre est grièvement blessé suite au plastiquage de sa voiture... Tout porte à croire qu'une mouvance sataniste est à l'origine de ces actes terroristes. Gabriel Lecouvreur, également connu sous le sobriquet du Poulpe, se rend sur place et découvre que ces sectaires sont également en pleine collusion avec l'extrême-droite locale. Ça va saigner !

    Cent-soixante-et-onzième opus du Poulpe, Belles et putes ne déroge pas à la règle érigée par l'initiateur de la série, Jean-Bernard Pouy : le ton est alerte et Gabriel toujours prompt à bastonner les fascisants. Les lieux et milieux décrits sont connus de l'auteur, Claude Ardid, qui a signé des œuvres sur l'assassinat de Yann Piat ainsi que sur l'extrême-droite. On ne peut pas dire que le lecteur va manquer d'action : explosions, fusillades, courses-poursuites, etc. Ça dézingue, cartonne et castagne fréquemment. Par ailleurs, le Poulpe affronte des ennemis particulièrement retors, en l'occurrence des séides de Satan, aux idéologies, rites et agissements détonnants : c'est à se demander s'il sait encore où donner du tentacule. Certes, on pourra objecter que le trait est parfois épais au niveau des personnages décrits, des cordes à nœuds font souvent office de ficelles scénaristiques, et certaines situations frisent le burlesque, mais ouvrir un roman mettant en scène Gabriel Lecouvreur, c'est aussi faire un choix, accepter un postulat. On en redemande quand il bousille du malfaisant, et l'appétit presque gamin avec lequel on dévore ses enquêtes est comparable à celui d'un cinéphile regardant une série B caricaturale à certains égards, mais terriblement efficace et détendante.

    Belles et putes constitue donc un ouvrage réjouissant si l'on consent à pardonner la patte parfois un peu lourde de Claude Ardid. Au fil des cent-quarante pages du livre, on passe un bien agréable moment de distraction pure et décomplexée. N'est-ce déjà pas en soi un gage de qualité ?

    14/04/2011 à 17:14 1

  • Bérénice

    Edgar Allan Poe

    8/10 Le narrateur, Egaeus, nous narre son amour avec sa cousine, Bérénice, qui biffe leurs divergences : lui est physiquement fragile et rêveur, elle enjouée et rayonnante. Puis il en vient à devenir monomaniaque, obsédé jusqu’à la névrose pour les objets qui agrippent sans fin son attention, et Bérénice subit des crises d’épilepsie dégénérant en catalepsies, devenant squelettique. Leur curieuse relation va se poursuivre, même par-delà la mort. Une nouvelle très intéressante – même si certains passages, notamment vers la moitié du texte – m’ont semblé un peu redondantes et recyclant des réflexions un peu inutiles, mais la suite m’a emballé. Et puis, il y a ce final, gothique et morbide en diable, avec une pointe de « Horla » et de fétichisme, férocement décrit, et qui me marquera certainement très longtemps.

    07/06/2020 à 17:56 1

  • Birdman

    Mo Hayder

    9/10 Un thriller très âpre, dur au possible, avec ue intrigue vraiment forte !

    19/06/2006 à 18:10 1

  • Blanche et la bague maudite

    Hervé Jubert

    9/10 Avec son effervescence créatrice, sa restitution de lieux et époques passés, et sa plume émérite, Hervé Jubert signe un véritable bijou, aussi magnifiquement taillé et ensorcelant que le joyau après lequel courent tant de ses créatures d’encre dans cet ouvrage. En sera-t-il de même pour Blanche et le vampire de Paris ? Très probablement. L’on en vient surtout à se poser une question hautement improbable – à étudier dans la tempérance que nécessite l’emploi de tels termes – et pourtant si évidente à la lecture de telles réussites littéraires : Monsieur Hervé Jubert, pourquoi ne violenteriez-vous pas le concept de la trilogie pour lui donner de nouveaux enfants ?

    17/06/2015 à 16:48 1

  • Bletchley Park

    Mark Zellweger

    8/10 Août 1941. Les espionnes regroupées sous le titre d’Espionnes du Salève et basées en Suisse sont devenues les fers de lance de l’activisme antinazi. Ces femmes, mues par des raisons diverses, sont unies dans la lutte contre l’ennemi allemand et prêtes à tout donner pour détruire cette hydre. Et certaines d’entre elles seront d’autant plus zélées que l’on vient de s’en prendre à leurs proches.

    Après le très bon L’Envers du miroir, Mark Zellweger signe ici son deuxième roman de la série consacrée aux espionnes du Salève. On y retrouve le style si particulier de l’écrivain : des phrases courtes et sèches, pour un style simple et direct, et surtout, une documentation et une maîtrise impressionnantes des sujets abordés. D’ailleurs, à cet égard, les pages finales, comptabilisant les « personnages ayant existé, par ordre d’entrée en scène », sont au nombre de cinq. Il faut ainsi souligner l’ampleur de la préparation de l’auteur qui se livre à une reconstitution remarquable du panorama des forces en présence : les divers protagonistes, les services de renseignements, les officines de dénonciateurs et autres agitateurs, les réseaux naissants ou avortés de résistance dans tous les pays concernés, les dates et événements-clefs, etc. Mark Zellweger se fait le scribe adroit d’une époque particulièrement trouble, puisant dans de solides connaissances pour nous rendre l’époque comme les jeux de pouvoir aussitôt accessibles. Dans le même temps, l’intrigue nous fait voyager : du Maghreb à la Libye, de la Norvège à l’Angleterre, de la France à la Suisse, nos héroïnes, femmes au caractère affirmé et d’une rare efficacité, vont déployer des trésors de courage et d’abnégation pour lutter contre les Allemands et leurs séides. Elles vont ainsi guerroyer pour dénoncer les camps d’extermination, mettre à terre une usine utilisant de l’eau lourde, aider à la lutte contre le Generalfeldmarschall Rommel, ou encore aider à empêcher l’infiltration de contre-espions au QG de Bletchley Park. En trois cents pages, Mark Zellweger convainc du début à la fin, même si on peut, à la marge, lui reprocher quelques détails, dans la forme (la surabondance souvent injustifiée de points d’exclamation, ou le recours à l’expression « des plus » qui tourne au tic verbal) comme dans le fond (des protagonistes toujours sauvées de situations inextricables, capables de prouesses physiques qui défient l’entendement, ou dont les succès dans le contrespionnage sont un peu trop énormes pour être crédibles).

    L’auteur, en habile acrobate des mots et intrigues, maintient avec conviction l’équilibre entre l’historicité de certains événements et la fantaisie littéraire qu’il y introduit. Un ouvrage prenant et efficace, et qui donne d’autant plus envie de lire le troisième et dernier opus de la série, Le Pacte Allen Dulles.

    08/06/2021 à 07:05 1

  • Blood sample

    Karim Madani

    8/10 C’est le lot de toute série littéraire de voir certains de ces épisodes être moins bons que les précédents. Et c’est donc avec un plaisir décuplé que l’on finit cet ouvrage noir et bouleversant, rythmé et incisif, où la localité brossée nous renvoie l’image acide de la déchéance de nos banlieues où subsiste néanmoins le fil ténu de l’espoir.

    11/05/2014 à 18:38 1