El Marco Modérateur

3576 votes

  • Mondes impitoyables

    Jeff Lemire, Andrea Sorrentino

    9/10 Une entame détonante, entre atmosphère à la « 1984 », drone et chevaliers en armure, avant de basculer vers un décor de village western où les cafards continuent de pulluler. Nos protagonistes comprennent que la tâche n’est pas résolue puisqu’ils n’ont pas détruit la Grange noire mais qu’ils l’ont « libérée ». Un univers toujours aussi incroyable, kaléidoscopique, ardu à étiqueter ou à résumer, baigné de démence plus que de violence, au gré d’un graphisme unique et incroyablement déstructuré. Globalement, une série assez difficile d’accès mais grandiose !

    26/06/2024 à 17:16 3

  • Gannibal tome 9

    Masaaki Ninomiya

    9/10 On reprend la scène de l’échange où elle en était restée à l’opus précédent, et le chaos et la violence éclatent. Il y a notamment un combat titanesque entre deux des membres du clan, Keisuke et « Lui ». Le récit demeure d’une grande sauvagerie, particulièrement intelligent et brutal, avec une esthétique remarquable et un suspense incroyable autour de cette famille de tarés et de la malédiction. Il me reste encore quatre tomes pour boucler la série, mais celle-ci est probablement à mes yeux l’une des meilleures que je n’ai jamais eues entre les mains.

    26/06/2024 à 17:14 2

  • Mon Ami Charly

    David Belo

    9/10 1994. Bastien Maillet et son ami Charly, alors adolescents, inventent le concept du « BINGO » qui permet d’anticiper les dangers et ainsi de les éviter. De nos jours, Bastien, devenu adulte et père de famille, s’apprête à partir en vacances en Savoie avec sa femme Marion et leurs enfants Jade et Hugo. A la demande de sa fille, il accepte d’emmener également Chloé Tournaux, la meilleure amie de Jade, désormais âgée de dix-huit ans, au charme sulfureux et au comportement provoquant. L’escapade ressuscitera de vieux spectres et convoquera des démons à la table des vivants.

    Disons-le d’emblée : ce thriller de David Belo est une réussite totale. L’idée de l’auteur de proposer cette théorie du « BINGO » - permettant d’imaginer les périls à venir en fonction des situations et de leurs caractéristiques, d’évaluer les échappatoires et de trouver une solution favorable – est tout bonnement lumineuse. La suite du récit est difficile à résumer, et l’écrivain, en conteur adroit et suffisamment retors, multiplie les flashbacks et autres allers-retours entre les diverses époques pour déstructurer son récit. Le lecteur n’est pour autant jamais perdu, le fil rouge de son histoire demeure intact, et les chapitres défilent à toute allure tant on a envie de connaître le fin mot de l’ouvrage. Il faut dire que tout est mis en œuvre pour allécher : un prologue détonant avec un curieux accident, un rat, une femme de ménage et une sinistre découverte, et ce qui suit est du même – excellent – acabit. L’enlèvement et la séquestration d’un ado, une très jeune femme nettement inflammable et qui a un don pour allumer tous les hommes qui l’avoisinent, une ancienne disparition en Savoie, le père de Chloé qui n’inspire guère la confiance, et encore bien d’autres éléments très croustillants. Un rythme effréné, pas le moindre temps mort, des rebondissements nombreux et un final nerveux qui vient donner toutes les clefs et faire écho à cette introduction si particulière.

    Un roman remarquable, habile et atypique, qui marquera certainement les esprits. David Belo renouvelle le genre, et même si un des éléments est facilement devinable par les amateurs du genre, voilà un livre brillant qui séduit autant qu’il perturbe.

    25/06/2024 à 06:42 2

  • L'Affaire du Golden State Killer

    William Thorp

    8/10 Tout a commencé au printemps 1974 en Californie. Une série de méfaits impossibles à relier : des intrusions dans des maisons, des cambriolages, des chiens tués, puis des viols et des meurtres, et ce jusqu’en 1986. Un criminel mobile, intelligent, fuyant comme une anguille, ne laissant aucun indice dans son sillage. Les divers enquêteurs se sont cassé les dents sur cette histoire. Ce sont les progrès de la science et une sacrée dose de chance qui permettront de mettre un nom sur ce prédateur : Joseph DeAngelo.

    Après L’Affaire Alice Crimmins, voici le deuxième ouvrage de la collection True crime chez 10-18. William Thorp nous décrit en quelque cent soixante-dix pages les prémices de cette affaire révoltante et marquante, qui a durablement chamboulé les esprits des Américains. Ce qui sidère d’entrée de jeu, c’est l’aspect polymorphe et évolutif du monstre : d’abord simple rôdeur, il se commue ensuite en redoutable violeur et assassin, multipliant les abominations sans jamais se faire pincer. Opérant sur plusieurs territoires connexes, échappant au regard des témoins, devenant de plus en plus effroyable à mesure qu’il commet ses horreurs, il va longtemps rester une énigme pour les policiers. L’auteur s’est beaucoup documenté sur le sujet et a même interviewé des protagonistes comme Richard Shelby, Carl Daly, Ken Clark – tous trois policiers – ainsi que la procureure Anne Marie Schubert. Un véritable trauma pour la société américaine qui a longtemps vécu dans la peur et la paranoïa dès que venait la nuit et sa cohorte de fantômes. Parallèlement, William Thorp nous dépeint un individu cyanosé de démons, saturé de contradictions, à la fois gentil père et grand-père dans les apparences alors qu’il était capable des pires vices. Et son modus operandi autant que sa capacité à opérer sur plusieurs zones lui ont valu divers surnoms, comme l’East Arena Rapist, le Visalia Ransacker, l’Original Night Stalker ou le Golden Gate Killer. Finalement, c’est l’ADN et la généalogie, à partir d’une idée émanant de Michelle MacNamara puis de Ken Clark, qui mettront les enquêteurs sur la piste concrète de Joseph DeAngelo.

    Un ouvrage documentaire très réussi, à la fois précis et circonstancié tout en restant concis et facilement accessible. Ou l’occasion de découvrir une traque criminelle de premier ordre autant qu’un esprit retors et sacrément altéré, version contemporaine du croque-mitaine.

    24/06/2024 à 06:51 3

  • Austerlitz sous le soleil

    Régis Hautière, Frédérik Salsedo

    6/10 30 novembre 1805, à quelques jours de la bataille d’Austerlitz : suite et fin de ce triptyque. Les gags demeurent parfois attendus et rabâchés (l’étang gelé, le soldat qui se fait uriner dessus, le pantalon dont le tissu craque aux fesses) mais les belles planches réalisées par Frédérik Salsedo viennent nuancer ce ton un peu bidasse, et j’ai globalement passé un bon moment avec chacune de ces trois bandes dessinées même si je suis lucide quant au fait que je les oublierai probablement assez vite.

    23/06/2024 à 15:51 1

  • Suite autrichienne

    Régis Hautière, Frédérik Salsedo

    6/10 Cette « Suite autrichienne » démarre en Moselle en 1805. Nos trois compères, gentiment bidasses, poursuivent leurs plaisantes aventures. Les gags ne sont pas toujours très finauds (entre chutes dans la rivière, énormes rots, baïonnette plantée dans la croupe d’un cheval et travestissement en femme), mais les dessins très agréables de Frédérik Salsedo demeurent attachants et l’intrigue sympathique à suivre.

    23/06/2024 à 15:49 1

  • Proies faciles

    Miguelanxo Prado

    8/10 Un tueur en série semble s’en prendre à des gens travaillant pour une banque, il y a déjà trois cadavres et ça ne fait que continuer. Une BD au graphisme somptueux et aux couleurs alléchantes (alors qu’il s’agit en réalité de dégradés de gris, donc pas véritablement de couleurs) au service d’un polar à la veine évidemment sociale et anticapitaliste, avec un chouette duo d’enquêteurs que j’aurai plaisir à retrouver dans le deuxième tome. Le final, peut-être un peu téléphoné, n’en reste pas moins intéressant et presque légitime à défaut d’être parfaitement légal.

    23/06/2024 à 08:02 4

  • Vamos, vamos !

    Jean-David Morvan, Toru Terada

    6/10 Un monde fragmenté où les pauvres vivent en contrebas dans une sorte de bidonville surnommé « Le petit monde » mais où les riches peuvent se rendre virtuellement. Dans la société des pauvres, des brigades de la mort se baladent librement et abattent les gosses.
    Le graphisme de prime abord simple et presque enfantin tranche avec la violence de certains passages (le gamin exécuté d’une balle dans la tête avec le crâne béant ou le passage de la joue entaillée au couteau). L’histoire n’est pas en soi follement originale et brasse diverses caractéristiques déjà vues ou lues bien des fois, mais l’ensemble n’en demeure pas moins agréable, avec une forme de candeur et d’innocence qui est ici bienvenue.

    23/06/2024 à 08:00 2

  • Détonations tome 2

    Tsutomu Takahashi

    8/10 Je poursuis avec ce second et ultime tome qui ravit dès les premières planches : traits particulièrement sombres et expressifs, ambiance lourde. Kaiya, le neveu de Daigo, a disparu – en réalité, il a été kidnappé. Le scénario reste aussi noir que l’esthétique, l’un et l’autre se servant mutuellement, et cette même noirceur ne met que davantage en évidence les moments d’émotion – comme l’exécution de l’un des personnages centraux. Des passages marquants, comme Satoru renonçant à une part de sa masculinité pour mieux atteindre ses objectifs de vengeance, ou cet épilogue si poignant. Un diptyque très réussi, entre roman noir et thriller, même si le mangaka aurait pu ôter quelques planches dans cet opus comme dans le précédent.

    20/06/2024 à 19:34 1

  • Empereur Pingouin - 1ère partie

    Jason Fabok, John Layman

    7/10 Généreux mécène le jour, Bruce Wayne devient un redoutable casseur de gangsters sous l’identité de Batman quand vient la nuit. Le Pingouin a décidé trois jours plus tôt que c’en était fini, et il compte bien le neutraliser tout en proposant à Gotham une aile du centre social dédiée aux enfants malades.
    Graphismes impeccables, apparition de nombreux superhéros, scénario intelligent, action tonitruante, flashbacks multiples : le premier tome d’un diptyque consacré au Pingouin, un de mes personnages préférés de DC Comics, vraiment enthousiasmant, même si je regrette qu’il ne soit pas plus au cœur de l’histoire, abandonnant un peu trop la vedette à Poison Ivy, Gueule d’argile ou le Boute-en-train. Mais côté distraction, assurément, j’en ai eu pour mon argent.

    20/06/2024 à 19:31 1

  • Hound Dog

    Nicolas Pegon

    9/10 … ou comment ces deux amis, perdants du début de leur existence jusqu’au moment du récit, César et Alex, en viennent à enquêter sur la mort du propriétaire d’un chien qui ne les quitte plus, dont la maison a également été incendiée. Un ton résolument fantasque et dans le même temps désenchanté, où deux losers sont au centre d’une intrigue où le noir côtoie un humour parfois absurde (cf. la révélation des circonstances exactes de la mort de Cortez, ou encore le darwinisme appliqué par les vieilles mémés à la caisse des magasins : une sacrée trouvaille !). Un ouvrage de presque 200 planches où plane l’ombre d’Elvis Presley qui serait un avatar ou une matérialisation de Dieu. Indispensable pour tout fan de BD qui ne ressemblent pas aux autres.

    18/06/2024 à 18:34 1

  • Nicolas

    Yomgui Dumont, Franck Thilliez

    8/10 Sarah, Tristan et Esteban ont un nouveau patient à traiter, Nicolas, mais des événements inquiétants surviennent, comme ce sabotage des câbles électriques à la clinique ou l’évasion de Léonard (Alice, la femme du professeur Angus, est toujours bloquée dans son esprit) qui va à son tour se retrouver coincé dans la tête de Nicolas. Nos héros gamins vont être alors projetés dans une ville au risque nucléaire.
    Une BD au scénario toujours aussi fou et atypique, une esthétique que j’adore, et un niveau de tension qui ne baisse pas. L’onirique le dispute au cauchemardesque et la résolution, très symbolique, est finement trouvée à mon goût. Comme le disent jackbauer et newsovski, le cliffhanger final quant à l’identité et la nature d’Esteban est remarquable, donnant méchamment envie de connaître la suite, ce que je compte faire. Ah, au passage, foncez sur les novélisations écrites par la regrettée Agnès Laroche, elles valent sacrément le détour !

    18/06/2024 à 18:32 1

  • Mission pyramides

    Emmanuelle Kecir-Lepetit

    7/10 Vous êtes plongés dans l’Egypte antique en 2525 avant notre ère, et vous incarnez un adolescent de moins de quatorze ans, et vous êtes vite conscient que l’on essaie de s’en prendre à la vie et au trône de Mykérinos, l’actuel pharaon. Un complot est en cours et ça va être à vous de l’empêcher au gré de cet escape game. Un livre-jeu bien construit, truffé de références historiques, géographiques, langagières, cultuelles, architecturales et sociétales, agréablement illustré et proposant quelques jolis moments. Comme d’habitude, une arborescence pouvant autant aboutir à des impasses et des échecs comme à des situations qui vous mèneront, pas à pas, vers la victoire… ou pas. Emmanuelle Kecir-Lepetit a bâti un ouvrage extrait de la série « Le docu dont tu es le héros » réussi, classique mais prenant, proposant son lot de choix voire de dilemmes, avec parfois des dénouements parfois volontairement en demi-teinte qui pousseront le lecteur-acteur à recommencer le parcours jusqu’à obtenir un succès plus flagrant, plus total. Idéal pour des ados afin de se distraire, mais aussi pour se cultiver grâce aux indications de l’auteure, ses pages consacrées aux dieux, à la société, etc. Un chouette moment de divertissement comme d'érudition ludique.

    17/06/2024 à 17:34 1

  • Lignes de feu

    Jeffery Deaver

    8/10 Une attaque sur le réseau électrique de New York. Des passagers d’un bus mitraillés par des projectiles dus à du courant braqué sur eux. Lincoln Rhyme et sa collaboratrice Amelia Sachs ainsi que d’autres enquêteurs se mettent sur cette affaire tandis que le terrible tueur à gages baptisé « L’Horloger » s’est envolé vers le Mexique.
    J’ai adoré me replonger dans la bibliographie de Jeffery Deaver, d’autant que ce présent ouvrage fait partie de la série consacrée à l’immense limier tétraplégique C4. Un pavé conséquent (environ 600 pages dans cette version de poche) mais un rythme haletant et une cadence infernale imposée par l’auteur. Le sujet ici au cœur de l’enquête – l’électricité – est à la fois original et intelligemment traité, avec une solide base de documentation, et toujours chez l’écrivain cette incroyable facilité à nous embarquer. Certains passages sont remarquables tant ils sont cinématographiques (l’électrocution collective dans le restaurant) et Jefferey Deaver est décidément passé maître ès twists enchâssés eux-mêmes dans des rebondissements (la manière dont les deux histoires se télescopent est à cet égard admirable), sans même parler de la manière dont Rhyme parvient malgré tout à affronter cérébralement son adversaire. Un opus encore une fois vraiment bon et soigné, même si je regrette la présence seulement anecdotique de Kathryn Dance, ou encore le fait que l’auteur use de certaines ficelles scénaristiques, ce qui fait que le contenu du chapitre 78 sera moins surprenant pour ses fans que pour les autres. Bref, encore de la bien belle ouvrage, d’autant que l’épilogue apporte son lot de révélations sur ce qu’il va advenir de Rhyme du point de vue moteur. Sincèrement dommage que les romans suivants ne soient plus traduits chez nous.

    16/06/2024 à 18:38 4

  • Alors, tout tombe - Première partie

    Juan Diaz Canales, Juanjo Guarnido

    9/10 Je me faisais une fête de retrouver cette série géniale, et je me suis régalé. Une entame intéressante et inattendue (un spectacle de théâtre en plein air et une agression dans une ruelle) avant de basculer dans une intrigue féroce, sombre, rendant encore une fois un hommage appuyé au genre noir d’antan. De nombreux ingrédients (syndicats, constructions, déguisement, infiltration, sécurité rapprochée, politique, etc.) pour un excellent cocktail qui m’a ravi de la première à la dernière goutte. Et que dire du graphisme (succulent) et de l’idée (éblouissante d’originalité) d’utiliser des faciès animaux pour les protagonistes. Un final accrocheur, avec Blacksad qui retrouve une vieille connaissance sur la scène. Vraiment excellent d’un bout à l’autre, vivement la suite !

    16/06/2024 à 18:35 4

  • Madame B.

    Sandrine Destombes

    4/10 Blanche Barjac officie au sein de RécureNet & Associés. Elle nettoie, mais pas n’importe quoi. Sa spécialité : les scènes de crime et les corps. Rien ne résiste à son coup de torchon et à sa technique pour faire disparaître les cadavres contre rémunération. Mais pour sa 93ème mission, ça part en vrille. Des messages curieux, un foulard, un corps dans le frigo, une main aux doigts coupés : devient-elle folle comme sa défunte mère ou est-on en train de la manœuvrer ?
    J’avais déjà lu de Sandrine Destombes « Ils étaient cinq » et j’avais relevé une bonne rythmique mais une histoire sans grande originalité, et là, mon verdict est le même. Le pitch est intéressant, renouant avec des idées déjà apparues dans d’autres films, mais dans le fond, pourquoi pas. Le style est simple et évident, presque chaque chapitre se conclue sur un cliffhanger prometteur et la dynamique du récit est indéniablement véloce. En revanche, pour le reste, je suis plus que déçu. Le roman quitte beaucoup trop vite le milieu de l’effacement des zones criminelles dont au final on n’apprend strictement rien de nouveau (pas de procédé amusant ou singulier, comme si ça tombait sous le sens ou que tout le monde pouvait le faire). Le livre s’enlise ensuite sur une pluie de rebondissements qui m’ont rapidement lassé tant ils étaient répétitifs : j’ai vraiment frôlé l’overdose de ces effets au point que j’ai failli décrocher à de multiples reprises. Les autres personnages sont sans la moindre épaisseur, l’identité de l’un des criminels en devient presque évidente du fait du nombre peu important de suspects, et les clichés drachent. Il n’y a que l’histoire de la mère de Blanche et d’Adrian, son beau-père et mentor, qui tire vaguement son épingle du jeu, mais pour le reste, je me suis franchement ennuyé. Pire : je ne saurais comment l’expliquer, mais le côté artificiel, lointain et jamais décrit de ce milieu fait que je ne suis jamais vraiment rentré dans le récit, comme si tout y était factice, impalpable, hors d’atteinte. Bref, à mes yeux, un début original et séduisant mais aussitôt gâché par une cascade de poncifs, de twists sans intérêt et mal scénarisés, surnuméraires comme si l’écrivaine elle-même ne savait pas boucler son bouquin. Une grosse déception.

    13/06/2024 à 19:47 4

  • Régression

    Fabrice Papillon

    7/10 Un passage résume bien le début de ce livre : « Quel genre de cinglé avait pu dérober des lames vieilles de plus de trois mille ans, et, dans le même temps, dépecer un cadavre, lui arracher le cœur pour le loger au centre d’un olivier millénaire, avant de dresser une sorte d’autel en y gravant lettres et symboles sans queue ni tête ? Sans compter les moutons égorgés, et, clou du spectacle, le crâne scié et fourré de cervelle cuite… ». Sur cette enquête au début détonnant, deux limiers : Vannina, gendarme corse qui a des dons de voyance, et Brunier, policier ayant perdu sa fille, sujet à des crises d’épilepsie. Un récit assez fort, où il sera question, en vrac, de tueurs préhistoriques, de services secrets, de sacrifices, de la mythologie, d’évolution de l’humanité et d’involution, de régression également, de génétique, d’écologie, etc. Un livre vraiment prenant et que j’ai bien apprécié, même sans avoir lu le précédent opus (« Le Dernier Hyver »), brassant une grande quantité de thématiques, mais à propos duquel j’ai tout de même quelques griefs. Certains passages ne m’ont pas du tout convaincu (cf. les scènes de parkour, à la limite de certains films de Luc Besson), sans compter qu’il y a à mon goût un peu trop d’éléments dans le shaker de Fabrice Papillon : une intrigue un peu plus resserrée autour des moteurs scénaristiques – les fondamentaux – et éviter l’étirement inutile, voire la distension du tissu narratif nuisant à la tension et à la crédibilité de l’ensemble. Néanmoins, je suis plus que satisfait de cette lecture.

    12/06/2024 à 18:41 3

  • Nouméa-Tchamba

    Fred Duval, Emem

    7/10 Infiltration en terres néocalédoniennes, intelligence artificielle, robots, plongée au fin fond de l’océan, exploitation du nickel, découverte rapide des coutumes locales, fusillade nocturne où Carmen mange du plomb, grand requin blanc : un cocktail survitaminé, entraînant et toujours aussi réussi du point de vue esthétique.

    12/06/2024 à 18:38 2

  • Steve Rowland

    Richard Guérineau, Fabien Nury

    7/10 La genèse de Steve Rowland : son enfance, l’apprentissage d’une justice expéditive, la natation, l’amour, la vengeance après l’accident subi par ses parents et tant d’autres éléments fondateurs… Un agréable bonbon pour les fans de la série, une belle réjouissance esthétique et une histoire intéressante.

    12/06/2024 à 18:36 2

  • Sommeil de cendres

    Xavier Boissel

    9/10 Janvier 1974. Le corps d’un jeune homme est découvert sur l’échangeur de la porte de Bagnolet. L’inspecteur Eperlan est chargé de l’affaire et va lentement remonter vers deux personnages équivoques : Alexia Zorn en train de fuir Paris pour rejoindre au plus vite l’Ardèche, et Müll, homme de main du Service d’Action Civique – le SAC. Leur rencontre promet d’être à la fois sauvage et révélatrice de sinistres trafics.

    Xavier Boissel livre ici un roman noir de premier ordre. Son ouvrage se présente dans un premier temps de manière chorale, chacun des chapitres présentant le point de vue de l’un des trois protagonistes. Eperlan, en fumeur invétéré de cigarillos, en partie désabusé et dont le couple a explosé en pleine vol, homme droit et attaché à la lutte contre le communisme depuis ses combats de la guerre de Corée, va lentement comprendre qui était la victime : Ghislain Breil-Martel, un fils de bonne famille, rattrapé par la mouvance maoïste, prostitué et amateur de jeux de cartes. Parallèlement, Alexia tâche de s’éjecter loin de la capitale, elle qui a longtemps consommé de la drogue et s’est formée au krav-maga : les prédateurs qui sont à ses trousses sont prêts à tout pour planter leurs crocs en elle. Et il y a Müll, à l’estomac douloureux, membre de la pègre et très actif dans le domaine de la drogue, avec toujours quelques arrière-pensées politiques dans le viseur. L’auteur signe un récit concis mais très sombre, où nos trois héros vont méchamment se percuter, qu’ils soient cognés par des balles, des inclinations amoureuses ou d’incroyables désillusions. La mécanique policière est tout bonnement impeccable, imprenable, les engrenages parfaitement huilés amenant les personnages à une inévitable confrontation, lapidaire mais retentissante, où l’on sent même l’influence littéraire de Jean-Patrick Manchette. Ce cadre des années 1970 est également très intéressant en raison des courants politiques à l’œuvre à cette époque, post Mai 68 et agités par bien des tractations et des contradictions. Ce roman propose également une fine analyse des pratiques de la police scientifique de cette ère. Xavier Boissel nous gratifie aussi de belles citations qui viennent agrémenter son histoire qui vient se mêler à celle qui s’écrit avec une lettre majuscule, ainsi que d’un final poignant.

    Remercions très chaudement Xavier Boissel pour ce roman efficace et atypique, servi par une plume laconique et percutante. « Une petite immersion dans la France du pompidolisme agonisant », a-t-il si gentiment écrit en guise de dédicace à un certain chroniqueur littéraire : voilà une immersion plus que marquante.

    11/06/2024 à 07:00 4