El Marco Modérateur

3301 votes

  • Sacrificial Vote tome 1

    Edogawa Edogawa, Ryuya Kasai

    7/10 Sans que l’on sache pourquoi, une application apparaît sur les téléphones portables d’adolescents et désigne Kanna Iriyama qui « sera assassinée socialement d’ici 24H ! ». Pour éviter la sentence, la mystérieuse application doit être implorée par une série de clics. Mais ce « jeu » va rapidement s’emballer et tourner au jeu de massacre, notamment quand l’une des victimes désignées par ses « camarades » de classe va se jeter sous les roues d’un véhicule. Une histoire très prenante même si on a déjà vu ce genre d’histoires dans d’autres mangas, mais qui réussit le tour de force de se montrer diabolique sans sang ni sexe, avec juste un suspense très lourd, et de belles réflexions (souvent sous-jacentes, tacites) quant à la pseudo popularité via les likes à la gomme, la dénonciation, l’entraide et l’usage dangereux des réseaux sociaux.

    11/10/2020 à 18:43

  • Emprises

    Eric Corbeyran, Richard Guérineau

    6/10 Ça commence avec le suicide de Crombie, Secrétaire d’Etat à la Défense, à Washington, puis l’on arrive à entrapercevoir les stryges en pleine action, avant un passage par Lima. Un peu d’action (escalade et confrontation physique avec une stryge, une scène digne d’un western, une course-poursuite), et l’on finit par savoir la nature réelle de ces créatures. Toujours aussi sympa à lire, et le scénario commence à s’imposer, mais il manque toujours à mes yeux du je ne sais quoi pour rendre l’ensemble plus efficace (au choix, de l’originalité, du tonus, un graphisme différent, davantage de fantastique, ou un peu moins de déjà lu, à moins que ça ne soit les cinq à la fois).

    11/10/2020 à 18:42

  • Le Secret de l'éventail

    Serena Blasco

    5/10 … ou comment Enola Holmes, dans ce quatrième tome de ses enquêtes, en vient à rechercher une jeune femme qui a disparu, en s’intéressant tout d’abord au langage des éventails. J’avais apprécié la première bande dessinée, en me souvenant prioritairement de l’esthétique : sucrée, délicieusement girly (cela n’est pas nécessairement une critique de ma part), avec des teintes charmantes et un dessin exquis. Même si je ne suis pas spécialement fan de ce genre de graphismes, il faut reconnaître à Serena Blasco une patte très particulière et reconnaissable entre mille. En revanche, l’intrigue m’a bien plus laissé sur ma faim. Le coup du langage codé des éventails (en fonction de leur ouverture, de leur position par rapport au visage, etc.) était sacrément intéressant, mais le reste de l’histoire m’a paru bien palot. Une histoire de famille, quelques personnages savoureux, mais au niveau de l’intrigue pure, ça ne vole pas très haut et ne me laissera aucun souvenir durable. Même l’apparition (très furtive) de Sherlock Holmes n’épice guère cette fade affaire.

    11/10/2020 à 18:41

  • Portraits croisés

    Odile Guilheméry

    6/10 Mathieu Desaulty, désormais au chômage, est revenu de Paris pour habiter à Berck chez ses parents. Alors qu’il se balade, un octogénaire l’interpelle et lui demande de l’aider à remettre son épouse dans le lit d’où elle est tombée. Mathieu semble comprendre que Paul et Monica Slama sont en situation irrégulière, mais un portrait dans leur appartement va attirer son attention. Il n’en faudra pas moins pour le faire basculer vers le passé et déclencher une série de réactions en chaîne…

    Habituellement, aux éditions du Chat Moiré, c’est Patrick S. Vast qui nous régale de ses ouvrages à suspense, forts d’un engrenage scénaristique de premier ordre, parmi lesquels Potions amères, Passé double, Duo fatal et Nuits grises. Ici, il a transmis le flambeau à Odile Guilheméry le temps d’un roman. On se rend vite compte que cette écrivaine, douée de ses propres personnalité et style, est allée à bonne école : une plume intéressante, une prose très agréable, des éléments du passé qui émergent lentement, et une histoire qui ne perd guère de temps pour se mettre en place. La suite de l’opus est particulièrement bien charpentée, et l’on n’ose imaginer le travail de préparation de l’auteure, avec cette multitude de rebondissements, d’interactions, d’anecdotes et autres éléments qui s’emboîtent parfaitement, du début à la fin du livre. Rarement un livre à suspense n’aura été si riche en jonctions entre les personnages, interférences entre les divers protagonistes, le tout étayé par force dates et détails, et c’est paradoxalement là que le bât blesse, parfois à en écorcher le malheureux lecteur. Car dès le deuxième chapitre, on comprend qu’Odile Guilheméry ne suivra pas exactement les traces de Patrick S. Vast, avec ses romans racés, simples et terriblement efficaces : on y trouve pléthore de personnages, de références au passé des personnages, avec des identités multiples et des contre-coups incessants. Et ce n’est pas fini, car les pages qui suivent réservent encore énormément d’informations. C’est bien simple : le début de ce Portraits croisés, c’est un peu vouloir se faire expliquer les dix premières saisons de Plus belle la vie par un ami dans un ascenseur entre deux étages. La formule est un peu exagérée, mais si vous tentez l’expérience – ce que l’on vous recommande chaudement, parce que cet opus est en soi une expérience littéraire, vous vous rendrez compte que la vérité n’est guère si éloignée. Des arbres généalogiques à faire passer celui des Atrides pour un végétal rachitique, et des chapelets de détails à coller une céphalée à Agatha Christie herself.

    Pour son premier roman, Odile Guilheméry frappe fort, très fort, voire trop. Certains lecteurs risqueront, à leur façon, de trancher ce nœud gordien par un abandon pur et simple de ces pages si complexes, pour ne pas dire excessivement complexifiées. Mais si vous êtes prêts à vous lancer dans une histoire dédaléenne recélant une multiplicité d’intrigues, vous serez aux anges.

    05/10/2020 à 07:05 1

  • All You Need Is Kill tome 1

    Takeshi Obata, Hiroshi Sakurazaka, Ryosuke Takeuchi

    7/10 Kiriya Keiji doit participer à une bataille au sein de la 17ème compagnie contre des extraterrestres, les Imitateurs, mais déjà un étrange phénomène l’inquiète : il a eu un rêve prémonitoire (rien de bien méchant, juste du gainage). Rita Vrataski, jeune soldate d’apparence inoffensive, se présente, et c’est une légende au combat. Lors de l’engagement, Keiji meurt… et se réveille dans son lit, comme le matin précédent. Un mauvais cauchemar ? Lorsque cette expérience se reproduit, le doute n’est plus permis : il est condamné à revivre la même journée… et doit donc devenir suffisamment fort pour vaincre l’adversaire et ainsi survivre. Un manga à l’esthétique typée et un scénario original (proche tout de même de « Un Jour sans fin ») avec des éléments bien trouvés (le numéro qu’il s’écrit sur le dos de la main pour signifier le nombre des boucles temporelles déjà vécues). C’est prenant et efficace, et même si j’en avais vu l’adaptation cinématographique avec Tom Cruise, je me suis laissé prendre par le fil de cet opus fort efficace. C’est certain, je serai au rendez-vous du tome suivant (qui est également le dernier, puisque c’est un diptyque).

    04/10/2020 à 08:13 1

  • L'Embuscade

    Chris Bradford

    9/10 Une nouvelle mission attend Connor Reeves, âgé de quinze ans et garde du corps : accompagner les époux Barbier – l’homme étant un diplomate – et leurs deux enfants, Ambre et Henri, au Burundi. Mais sur place, tout tourne au fiasco, entre règlements de comptes, révoltes, appât pour les ressources naturelles et autres luttes pour le pouvoir. Il se pourrait même que cette mission soit la plus épouvante pour Connor.

    Ce troisième tome de la série Bodyguard se montre particulièrement cohérent avec les opus précédents comme avec les suivants. Chris Bradford y déploie tout ce qu’est susceptible de demander son lectorat – a priori adolescent : de l’action. A l’instar de Robert Muchamore et sa célébrissime série CHERUB, l’auteur démarre son histoire sur les chapeaux de roues, garde le pied au plancher, et jamais ne s’arrête jusqu’à l’épilogue. Des passages particulièrement mouvementés, depuis les classiques mais réussies courses-poursuites jusqu’aux pièges tendus par l’adversaire en pleine savane tabassée par la chaleur, en passant par les trahisons et autres rebondissements. Ce qui retient davantage l’attention dans cet opus, c’est à la fois le décor et la faune, car il y a peut-être bien plus dangereux que les humains en ces terres burundaises. Crocodiles, lions, hippopotames, guépards, buffles, serpents : un véritable bestiaire de créatures sauvages et létales, que Chris Bradford met en scène avec beaucoup de talent. Parfois, le trait est un peu forcé, et l’on en vient à perdre le compte du nombre de fois où notre émérite et jeune garde du corps parvient à se sortir de situations périlleuses, mais il s’agit là de l’une des caractéristiques de ce genre de littérature : offrir suffisamment d’émotions fortes à ses lecteurs, comme on préfère que son invité sorte de table repu plutôt que léger.

    Un opus très réussi, survolté et rythmé, qui évite le côté aseptisé, avec certaines scènes de violence guère fardées. Un roman particulièrement distractif, mais qui n’oublie pas d’évoquer de honteuses réalités, comme le trafic de diamants, la corruption des élites politiques ou les enfants soldats.

    01/10/2020 à 21:16 2

  • Rivière Maudite

    Lincoln Child, Douglas Preston

    7/10 Des dizaines et des dizaines de pieds amputés commencent à s’échouer sur l’île de Captiva, en Floride. Qui sont les victimes et qui est responsable de ces horreurs ? L’affaire revient rapidement à Pendergast, agent du FBI, aussitôt flanqué de l’inspecteur Coldmoon qui l’avait aidé dans l’opus précédent, Offrande funèbre. Mais pour ces deux hommes, aidés de la ténébreuse Constance, il va falloir agir vite, car les monstres à l’origine de ces abominations n’ont pas l’intention de s’arrêter…

    Ce dix-neuvième tome de la série consacrée à Pendergast séduit dès les premières pages, avec ce postulat sacrément alléchant et atypique. Les mystères vont alors s’accumuler : d’où proviennent ces membres ? Qui est l’auteur de ces mutilations ? Pourquoi ? Dès lors, les auteurs Lincoln Child et Douglas Preston vont mener habilement la barque de l’intrigue, avec de nombreuses incursions scientifiques dans des domaines aussi variés que l’océanographie et les courants marins, l’industrie de la chaussure, les diverses strates des forces de police, etc. Ce rendez-vous annuel avec cette saga régalera sans mal les aficionados, nous permettant de renouer avec Pendergast bien évidemment, mais aussi Coldmoon qui s’impose comme un personnage désormais majeur, et Constance, cette femme au charme magnétique néanmoins capable de déchaînements de pure violence. Si l’intrigue manque un peu de peps ou d’action au début, elle permet néanmoins quelques voyages intéressants, en Chine et au Guatemala, et également de se frotter à l’intrigue d’une étrange maison abandonnée (dont la résolution est malheureusement tardive et sans grand intérêt). Nos limiers auront ici affaire à un complot ignoble, avec des expérimentations atroces et marquantes, au gré d’une histoire qui se soldera par quelques actions de commandos hollywoodiennes prenantes et échevelées.

    Un opus peut-être un cran inférieur aux précédents, mais qui prodigue néanmoins son lot d’émotions fortes, de suspense et de puissance de percussion visuelle pour cette série qui demeure l’une des plus palpitantes qui soient. Et le final conduit déjà nos protagonistes vers un étrange événement qui a eu récemment lieu à Savannah, probablement pour un vingtième épisode à propos duquel on trépigne déjà.

    30/09/2020 à 07:46 6

  • My Home Hero tome 5

    Masashi Asaki, Naoki Yamakawa

    7/10 Un opus à la hauteur de la série : sobre, efficace, terriblement crédible, et finalement assez complexe. Pas mal de suspense d’entrée de jeu avec la recherche d’un butin, et quand on croit le tenir, les billets dans le sac sont en réalité… les os de Nobuto Matori. Mais il faut absolument garder en tête la structure de la série ainsi que les événements des précédents opus pour conserver le sel de ce tome. Le suspense reste d’ailleurs entier à la fin de ce livre, avec une confrontation physique dont on ne sait pas comment elle va se terminer.

    28/09/2020 à 18:38 2

  • Lesson of the evil tome 1

    Eiji Karasuyama , Yusuke Kishi

    5/10 Première A. Une vraie classe à problèmes, sans compter les professeurs, tous aussi barrés les uns que les autres, et comme le dit l’un des personnages, « il suffirait d’une toute petite étincelle pour que tout explose ! ». Seiji Hasumi, jeune enseignant d’anglais passionné de corbeaux, se voit demander par la Direction d’arrondir les angles avec cette classe après un énième souci, ici avec le professeur d’EPS. Surtout une histoire psychologique pour le moment, mais peut-être est-ce dû au fait qu’il s’agit du premier tome de la série et qu’il doit poser les personnages. En attendant, ça se laisse lire facilement, c’est plutôt adroit et esthétiquement agréable à lire, mais ça reste bien plan-plan, presque mou, et avec pas mal de clichés à la clef. J’essaierai de voir les opus suivants pour savoir si ça devient enfin plus nerveux ou original.

    28/09/2020 à 18:37 2

  • Pièges

    Eric Corbeyran, Richard Guérineau

    7/10 On commence par une scène dans l’Altiplano andin (Pérou) avec ce flashback présentant un dénommé Charles Grosvenor qui est assassiné et dont l’empire industriel pourrait tomber entre des mains malintentionnées, tandis que Mélinda est séquestrée dans une cellule capitonnée aux allures d’asile psychiatrique. Un sacré clin d’œil à « Pulp Fiction » avec ce tueur qui ressemble au personnage interprété par John Travolta tandis que le nom des Stryges apparaît pour la première fois et que naît ainsi l’identité de la chose trouvée après l’incendie du tome précédent. Pas mal du tout, ça se laisse lire.

    27/09/2020 à 18:24 1

  • Une Descente dans le Maelstrom

    Edgar Allan Poe

    7/10 … ou comment le narrateur, flanqué d’un guide en haut d’un sommet se trouvant en Norvège, en bord de mer, se voit confier l’histoire survenue, trois ans plus tôt, à laquelle a échappé son guide : un incroyable naufrage, dû à un maelström, appelé localement le « Moskœ-Strom ». Un récit qui oscille entre deux genres narratifs : l’aventure vécue par le survivant, et son côté irréel, presque fantastique, avec notamment des descriptions tellement dantesques qu’elles penchent vers un surnaturel qui ne dit presque jamais son nom. J’ai adoré la manière dont Edgar Allan Poe décrit la monstruosité de ce phénomène naturel, avec force détails, presque de manière « clinique », comme on autopsie une dépouille. Dans le même temps, la furie des éléments est telle qu’elle a fait blanchir soudainement les cheveux du rescapé et modifié sa physionomie, preuve du sceau laissé sur lui et dans son âme ; même si je ne suis pas spécialement fan des récits d’aventures, je suis bien obligé de reconnaître que celui-ci, sous la forme d’une nouvelle, est très réussi.

    27/09/2020 à 18:22 1

  • Rambo

    David Morrell

    9/10 Parce que son allure et son effronterie ne plaisent pas au shérif de Madison William Teasle, le jeune John Rambo est arrêté et conduit au poste de police. Mais la situation va dégénérer, Rambo s’échapper dans les montagnes avoisinantes, et les morts se multiplier. Ce que Tealse ignore, c’est que Rambo est un béret vert et un vétéran de la Guerre du Vietnam. Deux fauves vont alors s’affronter dans une lutte mortelle.

    Vous qui avez vu le film de 1982, réalisé par Ted Kotcheff et avec Sylvester Stallone dans le rôle principal, oubliez-le immédiatement. Ce long-métrage reproduit la trame de ce roman de David Morrell avec une certaine fidélité scénaristique, mais le livre s’avère bien plus dense, fort et marquant. Notre ancien soldat s’y révèle beaucoup plus jeune, barbu, et avec un sens de la répartie remarquable, l’une des raisons pour lesquelles le shérif Teasle en viendra à l’appréhender. Malmené durant l'enfance par un père alcoolique et violent, robotisé par l’entraînement militaire, détruit par une longue période de séquestration et de tortures répétées au Vietnam, Rambo est une grenade dégoupillée qui revient sur son sol natal, accablé de tant de démons que ces derniers ne pouvaient que rejaillir. De même, Teasle est bien plus complexe dans sa version littéraire : également ancien combattant (de la Guerre de Corée), presque adopté par le dénommé Orval qui lui a tout appris, éreinté par une situation conjugale compliquée après le départ de sa femme Anna, il va venir à éprouver des sentiments ambivalents, voire paradoxaux, pour l’homme qu’il traque. La plume de David Morrell est impressionnante de retenue, assez sèche, sans artifice particulier, ce qui ne l’empêche nullement de déployer un immense éventail de nuances, notamment dans les portraits psychologiques. On retiendra de cet opus datant de 1972 de multiples scènes, mémorables, comme la cavale de Rambo dans une mine désaffectée saturée de chauves-souris, les abondantes mises à mort de notre homme pourchassé (qui s’illustre par ses talents de tueur bien plus violent que dans le film), ou encore le final, le mettant aux prises avec l’ancien directeur de l’école qui l’a formée, le colonel Sam Trautman.

    Un ouvrage puissant et sulfureux, où Teasle et Rambo vont se défier, hors de tout conflit déclaré ou raisons impérieuses, juste pour des peccadilles, dans un vertigineux face-à-face dont nul ne sortira indemne. Indéniablement, un jalon de la littérature policière, autant qu’un troublant réquisitoire contre les conflits armés qui engendrent, parfois, de pauvres diables incapables d’éconduire les fantômes qui les hantent.

    23/09/2020 à 09:43 6

  • A Cache-cache

    M. J. Arlidge

    9/10 Disgrâce totale pour la commandant de police Helen Grace : la voilà en prison après la manipulation opérée par Robert Stonehill dans Oxygène. Peu de temps après, on retrouve une détenue, Leah, morte, la bouche et les yeux cousus, les autres orifices bouchés à la vaseline. Alors que l’heure de son procès approche, Helen ne peut faire autrement que de mener l’enquête.

    Voici le sixième volet de la série consacrée à Helen Grace, et c’est de nouveau une réussite. M. J. Arldige nous permet de retrouver notre policière de choc dans une situation pour le moins compliquée, puisqu’emprisonnée et donc incapable de prouver son innocence, et confrontée à un ennemi particulièrement diabolique et mystérieux. L’auteur réussit, une fois de plus, à imprimer un rythme fou à son ouvrage, avec cent quarante-et-un chapitres, la majorité d’entre eux ne comptant que deux ou trois pages. Chacun s’emboîte à merveille au précédent et au suivant, ce qui fait que le livre est impossible à lâcher. On découvre, dans cette prison d’Holloway, des personnages variés et denses, depuis le terrible Campbell, maton acéré et brutal, aux prisonnières altruistes, en passant par les ignobles Annie et Alexis, la première étant handicapée par une sclérose en plaques et devenue chef de meute, la seconde jouant les gros bras et prête à se mesurer à Helen. M. J. Arldige joue habilement sur les faux-semblants, les rebondissements et les psychologies, et l’on ne voit pas passer les quelque trois cents soixante-dix pages. De plus, en dehors du pénitencier, l’action se poursuit avec Charlie Brooks, fidèle à son ancienne supérieure hiérarchique désormais derrière les barreaux, et prête à tout pour retrouver le retors neveu d’Helen, héroïnomane et usurpateur d’identité, et ainsi démontrer l’innocence de la capitaine.

    M. J. Arldige mène son histoire pied au plancher, avec un scénario de prime abord classique mais redoutable d’efficacité. Probablement l’un des meilleurs opus de la série.

    22/09/2020 à 07:22 8

  • Histoires criminelles : L'empoisonneuse de Corrèze et autres récits glaçants

    Christophe Hondelatte

    8/10 Vingt-quatre : c’est le nombre de cas criminels traités ici dans ce recueil signé par Christophe Hondelatte. Des histoires sanglantes, monstrueuses, s’étant déroulées pour leur immense majorité en France, et ayant marqué les annales de la perversité. Traitées pour la plupart en une dizaine de pages, ces récits permettent de s’approprier les grands traits de ces événements. De l’affaire Dominici au massacre perpétré par les séides de Charles Manson, d’Hamida Djandoubi – le dernier condamné à mort en France – à un prisonnier rouennais ayant tué puis mangé un bout du poumon de son codétenu, du récit de ce père ayant drogué les adversaires de son tennisman de fils au passé de l’écrivain Georges Arnaud, voilà amplement de quoi satisfaire la curiosité des lecteurs. En spécialiste du crime et animateur télévisé et radiophonique d’émissions sur ce sujet, Christophe Hondelatte maîtrise ces épisodes féroces, en offrant suffisamment d’informations sans pour autant se perdre dans les détails et autres conjectures. Bien évidemment, certains lecteurs se sentiront peut-être frustrés de ne pas avoir plus de renseignements sur ces faits divers, mais là n’est pas le but de l’auteur : il s’agit d’obtenir les grandes lignes de ces intrigues, en laissant bien évidemment celles et ceux qui le souhaitent creuser davantage leurs connaissances sur telle ou telle affaire. Au-delà de l’énoncé des faits, nous avons également la possibilité de voir se dessiner des sujets très intéressants, depuis la médiatisation internationale bien avant Internet (cf. l’affaire du procureur Fualdès), ou la question de la rédemption (Jacques Fesch, et le docteur Bougrat).

    Un recueil très intéressant, qui panache affaires notoires et cas moins connus. Vingt-quatre pétales de fleurs du mal que l’on effeuille pour mieux cerner les vices, travers et abominations de notre société.

    21/09/2020 à 08:02 3

  • Pieds humides

    William O'Farrel

    8/10 … ou comment Rudolph Valentino – dit Rudy – Callahan, nouvellement nommé garde-frontière au poste d’Arroyo Seco, en vient à tomber dans un piège qui pourrait être mortel. Pourtant, Rudy présente bien : jeune, paroles distinguées, beau gosse. En réalité, c’est une fine crapule. Amateur de femmes, quitte à se montrer violent voire violeur, passablement raciste, joueur invétéré, ancien tireur d’élite pendant la Guerre de Corée – mais il n’est même pas certain que ce soit vrai, il cumule les défauts et péchés, drapé de son uniforme. Mais ses errements et fautes vont finir par le rattraper, notamment en raison d’interactions imprévues avec d’autres individus. Pas mal de personnages secondaires retiennent l’attention dans ce roman dans la plus pure tradition de la littérature noire, et ce sont à mon avis les femmes, notamment Gloria Jean Hansen. Elle est la fille du cultivateur et magnat local, mais surtout une remarquable allumeuse au physique vertigineux, une érotomane de première, une alcoolique, et une femme fatale, à sa façon, qui conduira à leur perte plusieurs hommes. La plume de William O’Farrell correspond sans mal à ce que l’on attend de ce type de livre : sec, sombre, allant à l’essentiel. Une intrigue intéressante, bien charpentée et offrant son lot d’émotions contradictoires, jusqu’au final, en plusieurs étapes, avec des conclusions mémorables quant aux existences de Gloria Jean et de Rudy. C’est aussi une belle peinture des ouvriers mexicains venus travailler sur les terres texanes en fonction des besoins des maraîchers locaux. Je ne regrette au final que deux choses dans ce bouquin épatant : le titre (« Wetbacks », littéralement « Dos humides », comme on appelle les émigrés clandestins traversant le Rio Grande pour rejoindre les Etats-Unis, devenu ici dans sa traduction française « Pieds humides », bof bof…), et peut-être que la personnalité de Rudy aurait davantage pu être creusée, car il y avait matière à faire avec ce personnage.

    15/09/2020 à 18:25 3

  • Ombres

    Eric Corbeyran, Richard Guérineau

    7/10 Alors que le Président des Etats-Unis passe en revue une base militaire, une jeune femme et un groupe paramilitaire y accède et l’attaque. Viré suite à ce désastre, Kévin est traqué alors qu’on a découvert dans l’incendie le cadavre d’une « chose », peut-être de type vampirique. Un scénario intéressant, Kévin cherchant avec l’aide de Mélinda pourquoi il a ainsi servi de bouc émissaire. Voilà un opus qui pose plutôt pas mal le décor, les personnages et le fil rouge de l’intrigue, même si je ne suis pas un grand fana du graphisme qui a nécessairement vieilli en plus de deux décennies.

    14/09/2020 à 16:40 2

  • Perfect Crime tome 9

    Yuya Kanzaki, Arata Miyatsuki

    7/10 Tadashi Usobuki est de retour. Un contrat à propos d’un monsieur âgé qui pense avoir raté sa vie, une femme au foyer au bord de l’implosion, et d’autres histoires (qui développent principalement les liens entres les enquêteurs et notre tueur si particulier), mais je demeure nostalgique du premier « format » des opus de cette série, avec des affaires non connectées, comme des nouvelles indépendantes, où j’étais resté baba de tant de noirceur, d’intelligence et d’originalité.

    14/09/2020 à 16:40 1

  • Manuscrit trouvé dans une bouteille

    Edgar Allan Poe

    8/10 … ou le récit ébouriffant d’un naufrage raconté par un jeune homme dix-huit ans. Comme toujours, la plume d’Edgar Allan Poe sert à merveille l’histoire, qui mélange à la fois l’aventure (les scènes où naissent les vagues qui frappent le navire sont impeccables) et le fantastique (avec l’autre navire et ses marins fantomatiques). Les descriptions physiques sont toujours aussi sidérantes et anxiogènes, et je ne regrette au final que sa conclusion, peut-être prévisible dès l’entame.

    13/09/2020 à 18:32 2

  • Le Parfum disparu

    Pierre Christin, Annie Goetzinger

    3/10 Paris, 1955. Edith Hardy, détective privée, se voit confier une nouvelle affaire : Lecauchois, industriel, lui demande de retrouver l’un de ses jeunes chimistes, Antoine Dubreuil, qui a disparu alors qu’il s’apprêtait à déposer un brevet pour un nouveau parfum qui devait être incorporé à une crème cicatrisante. Mais rapidement, les apparences presque banales s’effacent pour laisser la place à une histoire d’espionnage. Je n’ai vraiment pas accroché à cette BD. Une esthétique surannée (et qui n’est pas qui liée à son âge, datant de 2001, probablement y a-t-il aussi une forme d’hommage), des dialogues particulièrement longuets, et un personnage central sans la moindre aspérité et lisse comme un galet. En outre, elle manque sévèrement de rythme et n’a pas instillé de réelles informations ni éléments marquants, au point qu’aux dernières planches, on pourrait résumer ce premier opus en quelques phrases. Bref, j’ai trouvé ça assez tarte graphiquement, très mou, et bavard, en plus d’être une coquille vide. Vraiment déçu.

    13/09/2020 à 18:31 1

  • L'Envers du miroir

    Mark Zellweger

    8/10 Alors que la Seconde Guerre mondiale fait rage en Europe, la Suisse a un positionnement assez particulier, du fait de sa neutralité. Néanmoins, cela ne l’empêche pas de recueillir de nombreux renseignements contre l’Allemagne nazie, au cas où cette dernière tenterait finalement de l’envahir (comme le prévoit l’opération Tannenbaum), au profit des Alliés. C’est ainsi que Victor Farrell, le vice-consul britannique, et son cabinet en viennent à créer une escouade de jeunes femmes, baptisées « Les Louves » ou encore « Les espionnes du Salève », afin de lutter de manière discrète contre le Troisième Reich : Thela, Sev, Ruth, Marieke, Adèle, Marie et Louise vont ainsi unir leurs forces pour contrer un ennemi géographiquement si proche.

    Premier opus de la série consacrée aux espionnes du Salève, ce roman de Mark Zellweger séduit dès les premières pages. Prenant place dans la Suisse du début de la Seconde Guerre mondiale, ce qui constitue un cadre géographique original dans la longue liste des ouvrages se déroulant durant cette période. Avec un style simple et une plume qui va à l’essentiel, l’auteur nous décrit le contexte international, les divers services de renseignements, les luttes de pouvoir, les pressions, chantages et exactions, etc. Plusieurs intrigues naissent dans ce premier tome de la série, depuis l’arrestation d’un lycéen dont le père a été exécuté en raison des messages hostiles à l’Occupant que le jeune homme avait laissés jusqu’à la probable présence d’un traître dans le réseau de Résistance, en passant par un gradé faisant disparaître des tableaux afin de pouvoir les récupérer. Une série d’histoires qui s’emboîtent à merveille, toutes prenantes et sonnant avec authenticité, même si on pourrait reprocher, à la marge, que l’auteur ne creuse pas davantage les psychologies de ses protagonistes, ou que certains passages ont un goût de déjà-vu ou de déjà-lu.

    Une saga littéraire qui commence fort bien, sortant du lot des autres romans d’espionnage, solidement documenté, et proposant des histoires intelligemment enchâssées. Voilà qui donne furieusement envie de lire les ouvrages suivants, à savoir Bletchley Park et Le Pacte Allen Dulles.

    06/09/2020 à 20:09 3