El Marco Modérateur

3404 votes

  • L'Escalier de fer

    Georges Simenon

    9/10 Etienne Lomel en est intimement persuadé : on essaie de l’empoisonner. Il est victime de crises depuis quelque temps (nausées, maux de ventre, vertiges, etc.) et notre scrupuleusement ls symptômes. La seule personne qui peut lui faire subir en catimini ce calvaire ne peut être que son épouse, la belle et désirable Louise. Le doute se met à le ronger encore plus sévèrement que ce que l’on essaie de lui faire ingurgiter à son insu, et il en vient autant à s’interroger sur son couple que sur les raisons qui pourraient pousser Louise à vouloir le tuer : et s’il était en train de subir le même sort que Guillaume, le premier mari de sa femme, qui, à sa mort, « était si maigre, quand il est mort, que les hommes qui l’ont mis dans le cercueil […] ont dit qu’il ne pesait pas plus qu’un enfant de dix ans » ?
    Une énième réussite littéraire pour Georges Simenon dont je ne me lasse pas de découvrir l’immense œuvre, avec un plaisir constant. Des mots simples, des évocations fulgurantes, des images qui saisissent, et des interrogations pertinentes de lucidité quant au devenir d’un couple apparemment lambda. J’avais vu l’adaptation télévisuelle (avec Laurent Gerra, assez mauvais selon moi, et Annelise Hesme, solaire comme à son habitude), et je découvre que ce roman a été assez fidèlement adapté. Une belle économie de moyens pour un résultat à la fois sulfureux, impressionnant de maîtrise, et un récit qui jamais n’ennuie alors que tout y est pourtant assez calme et apaisé. La manière si singulière que l’écrivain a de faire naître la suspicion chez Etienne est remarquable, avec notamment un final sombre et épuré, d’une rare habileté, et qui s’impose comme un épilogue au moins aussi réussi que tout ce qui l’a précédé. Bref, un nouveau coup de cœur pour ce roman noir intemporel et prodigieux de percussion psychologique.

    21/05/2022 à 08:17 3

  • Kharis

    Jerry Frissen, Peter Snejbjerg

    5/10 Flashback en 1957 avec une expédition programmée vers la Lune où il est déjà question de ces mystérieux sarcophages. Le mystérieux Hélius révèle son identité autant que sa mission : cet humanoïde doit faire en sorte que les extraterrestres restent dans leurs sarcophages. Un récit toujours ponctué de moments antérieurs (ici, une attaque à Alméria, en Espagne, cent quarante-deux ans avant notre ère), avec un graphisme plutôt simpliste mais agréable, et un scénario panachant Terminator, Alien et autres références cinématographiques de renom. Cependant, comme pour l’opus précédent, j’ai du mal à situer la série : est-ce volontairement de la pure série B ? Car rien de très original ni de percutant ne m’a encore sauté aux yeux. A voir ce que le troisième et dernier tome donnera…

    19/05/2022 à 19:38

  • L'Homme à la peau de bique

    Maurice Leblanc

    9/10 A Saint-Nicolas, tout le monde voit un véhicule foncer dans le village avant de disparaître avec, à son bord, un conducteur « couvert d’une peau de bique, coiffé de fourrure, le visage masqué de grosses lunettes » ainsi qu’une passagère « dont la tête ensanglantée pendait au-dessus du capot » tandis que la malheureuse hurlait. La femme est retrouvée dans un virage impossible à négocier à vive allure, décédée, mais le chauffeur s’est volatilisé. L’affaire se complique encore par la suite au point qu’un journaliste écrit : « Tous les Sherlock Holmes du monde n’y verraient que du feu, et Arsène Lupin lui-même, passez-moi l’expression, donnerait sa langue au chat ». Sauf qu’Arsène Lupin en personne est piqué dans son amour-propre et résoudre à distance cette énigme… en s’appuyant sur un célèbre écrit d’Edgar Allan Poe.
    Une histoire très prenante et où le tragique de la situation de départ – des morts et une femme à la tête écrasée par une grosse pierre, tout de même, contraste avec la légèreté de la démonstration faite par l’immense Arsène Lupin. Une solution finalement bête comme chou et d’autant plus prenante, primo, qu’elle se montre crédible et, deuxio, elle est le prétexte pour Maurice Leblanc d’incliner son chapeau à l’égard de Poe avec la formule suivante : « Vous voyez bien que ma lettre n’était pas absolument inutile, et que l’on peut se permettre de redire aux gens ce qu’ils n’ont appris que pour l’oublier ». Un excellent moment de lecture.

    18/05/2022 à 18:00 1

  • Psychometrer Eiji tome 4

    Masashi Asaki, Shin Kibayashi

    7/10 Un groupe de musiciennes, les « Square Dolls », sont harcelées par un mystérieux personnage, jusqu’à ce que l’une d’elles, Izumi Okamura, soit assassinée, le cadavre mis en scène. Un ton d’entrée de jeu beaucoup plus sombre que dans les précédents opus, et un graphisme toujours réussi (cf. notamment l’agression de la deuxième chanteuse, efficace et anxiogène). Un petit passage en mode clin d’œil avec la rencontre en prison d’Akira Sawaki, un tueur assez marquant avec cette longue langue pendante, et un scénario qui tient bien la route et se laisse lire avec plaisir jusqu’aux dernières pages.

    17/05/2022 à 20:34 1

  • Qui est cet homme ?

    Marcel Priollet

    6/10 Madame d’Orsen vient rendre visite à Claude Prince, le détective radiesthésiste, pour une affaire assez délicate. Par le passé, elle a éconduit l’amour de son cousin, Henri Burguet, afin de pouvoir épouser Christian dont elle était follement éprise. Mais au quatrième mois de la Première Guerre mondiale, Christian a été porté disparu. Henri revient à la charge, et elle et lui se jurent qu’un an après la fin des combats, sans nouvelles de Christian, ils se marieront. Sauf que Christian est de retour ; trépané, amoindri, fugueur, certes, mais là. Et voilà que Henri trouve en Belgique, à Ramscapelle, une tombe portant le nom de ce cher Christian. Dix-huit ans après le retour du l’être aimé, Claude Prince va donc devoir tirer le vrai du faux.
    Une nouvelle avec un scénario intéressant, une écriture agréable et une belle concision. J’ai un instant cru que le chapitre 3 venait apporter trop rapidement et trop facilement les ficelles de l’intrigue, mais l’auteur a préservé quelques rebondissements ultérieurs bienvenus, ce dont je me réjouis, d’autant que le final est assez ouvert même si Marcel Priollet imagine ce qui va pouvoir se passer sous peu. Un bon moment d’une lecture distractive. Je regrette en revanche que le protagoniste qu’est Claude Prince ne soit pas un peu plus caractéristique.

    16/05/2022 à 18:10 1

  • Opération Judas

    Pierre-Mony Chan, Jean-Luc Sala

    6/10 Avec force gadgets, un commando infiltre un supposé chantier archéologique au Canada pour récupérer quelque chose étant en lien avec les Templiers. Après un prologue se déroulant au XIVe siècle, un début assez musclé et agréable, même s’il n’a rien de très original. Un tueur à gage de la mafia, Angelo Costanza, est « prêté » au Vatican afin d’aider d’Agostino, la membre du commando précédemment cité. Une BD pour le moment classique, avec une esthétique sympa, un contenu divertissant, un graphisme léché et proche de celui du jeu vidéo, avec quelques aimables touches d’humour.

    14/05/2022 à 17:52 1

  • Dead Tube tome 16

    Touta Kitakawa, Mikoto Yamaguchi

    7/10 On rembraie directement sur la fin du tome précédent, avec la psychologie d’un des personnages qui nous est dévoilée : il croyait connaître le bonheur avec sa femme mais s’est vite rendu compte que c’était faux. Il pense au suicide avant de découvrir le Dead Tube et de se déchaîner dans un déluge de violence, devenant à son tour un évangéliste du bonheur », à savoir un tortionnaire du sexe et de la violence. Beaucoup plus de noirceur et de psychologie (et également de bavardages) que dans de précédents opus. Un paraplégique qui cache son jeu de pervers et un tome qui m’a donc davantage accroché que d’autres qui se perdaient dans l’ultraviolence stérile.

    14/05/2022 à 17:51 1

  • Les Cloueurs de Nuit

    Bruno Gazzotti, Fabien Vehlmann

    7/10 Yvan essaie de vivre à Kerdol, et Camille le retrouve… dans une hallucination. Et c’est un bus qui sort des eaux, avec à son bord des enfants zombies qui s’en prennent à la maison qu’Yvan venait de fortifier de planches de bois… en posant eux-mêmes des planches à l’extérieur. Une ambiance très curieuse, presque délirante (il y est tout de même question de mouettes qui emportent un bras tout juste coupé…), où « Le Ravaudeur » et ses fidèles « Cloueurs de la nuit » apportent cette note de peur. Un bon opus, agréable et toujours aussi joli du point de vue graphique, et le dessin final, canonnant, annonce peut-être un virage dans la série.

    12/05/2022 à 18:41

  • The Fable tome 5

    Katsuhisa Minami

    6/10 Kojima fait toujours la démonstration de sa froide sociopathie tandis que le disciple de « The Fable » se montre de plus en plus empressé à lui démontrer l’étendue de sa passion pour lui. C’est parfois un peu longuet et bavard (cf. la scène du bar avec Yuuki). L’ensemble demeure très crédible, agréable à suivre et très réussi graphiquement, mais il manque à mon goût un bon coup de pied aux fesses du scénario pour relancer la série et lui donner davantage de dynamisme.

    10/05/2022 à 20:35 1

  • Alienés

    Fabrice Papillon

    7/10 A près de 400 kilomètres de la Terre, Bob Jenkins meurt éventré dans une station orbitale. Il n’y a que cinq autres astronautes qui ont pu ainsi le tuer, mais pourquoi ? Dans le même temps, Louise Vernay, commandante à la PJ de Lyon enquête sur un assassinat tout aussi étrange : Tony Jermal, ressortissant américain, est retrouvé éviscéré dans une galerie souterraine. Quel peut bien être le lien entre ces deux homicides si similaires ? Il faudra l’aide de Frère Lupo, dit Federico, ainsi que celle d’Ethan Miller, le petit-neveu de l’écrivain sulfureux Henry Miller, pour tirer cette affaire au clair et répondre à la question qui frémit sur toutes les lèvres : doit-on voir dans ces actes atroces l’œuvre d’une entité extraterrestre ?

    Après Le Dernier Hyver et Régression, Fabrice Papillon nous revient avec ce thriller fantastique qui débute sur les chapeaux de roues. Il captive dès le début avec ce meurtre dans l’espace – une première dans le genre – tandis qu’une exécution presque symétrique a lieu sous la surface de la Terre, dans un réseau de galeries dont la configuration intrigue. On sent très rapidement l’empreinte d’autres auteurs américains, comme Michael Crichton, Dan Brown ou encore Raymond Khoury : le cocktail est explosif et ne laisse guère aucun temps de répit au lecteur. De nombreuses histoires s’entremêlent dans ce récit : religion, éventuelle présence extraterrestre, nouvelles technologies, manœuvres militaires, enjeux géopolitiques, espionnage, manipulations à l’échelle mondiale et tout autant de rebondissements bienvenus. Louise Vernay compose une protagoniste détonante : à quarante-deux ans, grande amatrice de joints et d’alcool, elle a un franc-parler qui décoiffe et n’est pas sans rappeler le capitaine Marleau, un zeste de féminité en plus. Il lui faudra toute sa détermination pour percer à jour un incroyable complot, mais cela ne pourra pas se faire sans l’appui hautement efficace de son binôme de fortune, Ethan Miller, astronaute également et qui dispose de forts revenus pour le moins douteux. Journaliste scientifique, Fabrice Papillon maîtrise indéniablement son sujet, tous les tenants et aboutissants de son œuvre, et c’est un régal de suivre le périple qu’il impose à ses personnages, de la France aux Etats-Unis en passant par le Mexique et le Vatican, avec une décontraction qui n’empêche nullement une belle démonstration de son savoir presque livresque. Parallèlement, il cède parfois aux sirènes de quelques clichés et autres facilités scénaristiques, faisant par exemple de Miller un personnage photoshopé, indestructible et trop parfait pour être crédible. Néanmoins, son roman regorge de coups de théâtre, et les cinq cents pages de cet ouvrage défilent à toute allure, mettant à nu une cabale originale qu’il est impossible d’évoquer sans rien gâcher mais où il est question de la toxoplasmose. Et ne soyez pas surpris de voir le Président Joe Biden ou encore Elon Musk eux-mêmes intervenir, dans des initiatives qui peuvent sans difficulté être qualifiées de calomnieuses : au royaume de la fiction, tout semble permis !

    S’il ne ralliera pas nécessairement les suffrages des lecteurs allergiques aux histoires de conspirations, de technologies innovantes et d’extraterrestres, Fabrice Papillon démontre la fougue de son imagination via ce thriller haletant et hautement inflammable à défaut d’être complètement plausible, aussi distractif qu’érudit.

    10/05/2022 à 06:56 5

  • Le Puits des abîmes

    Christophe Bec, Xavier Dorison

    7/10 On retrouve nos soldats qui ont gagné l’air libre dans le sanctuaire et sont victimes d’hallucinations sordides, sortes de phobies (notamment avec des araignées), et un lien s’opère avec un passé remontant à la Seconde Guerre mondiale. Des maladies terribles s’abattent sur les hommes (peste, leishmaniose et autres) et l’ambiance globale de ce tome devient indéniablement plus inquiétante, féroce voire gore. Mon intérêt reprend donc pour cette série jusqu’à cette scène clôturant cet opus, à savoir la salle des sacrifices. On est bien d’accord, ça n’a rien de bien inédit, mais c’est bien fait et prenant à lire.

    09/05/2022 à 18:40 1

  • Kah-Aniel

    Grzegorz Rosinski, Yves Sente

    7/10 Aniel est toujours loin des siens, et son père, Thorgal, cherche à le retrouver : on lui parle de la confrérie des magiciens et de la ville de Bag Dadh. Une belle esthétique rendant hommage à l’univers des « Mille et une nuits » et autres contes du genre, avec sables mouvants, tempête de sable, caravanes dans le désert, même si la forme – magnifique – prend le pas sur une histoire un peu délayée, malgré le final où Aniel semble prendre une autonomie inattendue par rapport à son paternel.

    07/05/2022 à 08:09 3

  • Dead Tube tome 15

    Touta Kitakawa, Mikoto Yamaguchi

    7/10 Retour au « Dead Tube Neo », la nouvelle version de cette perversion informatique et partagée sur les réseaux sociaux, et ces terribles et mystérieux « évangélistes du bonheur ». Avertissement néanmoins aux âmes sensibles (mes commentaires sur les précédents tomes ont déjà dû les informer) : ça commence par une scène de masturbation puis d’amour (lesbien). Eno tombe graduellement dans le piège de la pornographie soft et de la violence tout en conservant ses scrupules qui l’empêchent d’aller plus loin, mais résistera-t-elle encore longtemps à ce dilemme, par exemple lorsqu’on lui propose de filmer la mutilation d’un SDF bien vivant ? Un opus bien sombre et dérangeant, à mille lieues des délires mangas et de superhéros comme on a pu en croiser antérieurement.

    05/05/2022 à 18:58 1

  • Point de non-retour

    M. J. Arlidge

    7/10 Jodie Haynes, quinze ans, arrive dans son nouveau foyer, le troisième. Elle a perdu ses parents, malveillants et violents, assassinés par sa sœur Marianne qui purge une lourde peine de prison. Elle a du mal à trouver sa place autant dans la société que dans ce centre où sont domiciliées des adolescentes de son âge déjà bien fracassées par la vie, certaines se montrant même agressives et dangereuses. Mais la disparition de l’une des pensionnaires va mener celle qui s’appellera par la suite Helen Grace vers d’autres démons.

    M. J. Arlidge offre, avec cette nouvelle, un véritable cadeau à ses fans, avec une histoire prenant place bien avant qu’Helen Grace n’officie en tant que policière. Ecrit à la première personne, cette cinquantaine de pages nous dévoile un personnage déjà martyrisé par son passé, encline à la suspicion et exposé à la toxicité du monde des adultes. On connaissait déjà l’auteur pour ses romans forts, aux intrigues marquantes et articulés autour de chapitres courts et enlevés, et on en reconnaît ici la patte dès l’entame. Un récit haletant, tout en bruit et en fureur, et, même s’il se déploie autour d’une intrigue assez classique, cette histoire n’en demeure pas moins efficace et réussie. Certes, elle se destine en priorité aux aficionados de la série consacrée à Helen Grace, mais indéniablement, voilà amplement de quoi alimenter leur attachement à cette policière si particulière, au caractère déjà bien trempé.

    05/05/2022 à 06:59 4

  • Les Mains homicides

    Thomas Burke

    7/10 Une nouvelle écoutée (format audio : une vingtaine de minutes). Un couple étranglé à Londres, puis une jeune fille, puis un policier, et ainsi de suite, jusqu’à cinq en tout. L’aspect psychologique autour de la paranoïa (et du racisme qui en découle) est intéressant, de même que l’idée que le journaliste pense à la résolution grâce à un simple sandwich. Un final intéressant, avec une pointe salvatrice d’analyse psychique, pour une nouvelle fort agréable.

    04/05/2022 à 19:35 1

  • Le Mystère des dunes

    Richard Austin Freeman

    6/10 Des empreintes de pas trouvées sur le sable par un duo de personnages et quelques déductions qui rappellent (un peu, parce qu’elles ne sont pas si brillantes que ça, dans le fond) Sherlock Holmes, avec par la suite d’autres observations plus fines de notre duo d’enquêteurs pour cette nouvelle d’environ 25 minutes (écoutée et non lue). Un texte agréable autour de la recherche de cet inconnu, probablement noyé, plutôt bien charpenté, mais qui risque de ne pas me laisser un souvenir durable en raison du manque d’originalité du fond.

    04/05/2022 à 17:37 1

  • L'Etranger dans le grenier

    Benoît Séverac

    7/10 En raison de la crise de la covid et du confinement, les parents de Cécilia, Martin et Océane préfèrent les envoyer chez leur grand-mère à Toulouse. Sauf que Cécilia entend de curieux bruits venant du grenier. Sur place, les enfants découvrent Diané, migrant venant de Guinée-Conakry, dont la sœur Kourouma est prise en otage chez leur oncle, un odieux esclavagiste. Les trois enfants n’hésitent pas à venir porter secours à ces sans-papiers.

    Voici Benoît Séverac qui entre dans la collection « Flash Fiction » avec ce roman panachant intrigue policière et littérature blanche. Rappelons que les ouvrages parus dans cette série ont été testés et relus par une orthophoniste, avec, entre autres, une mise en page aérée, une police d’imprimerie spécifiquement travaillée pour faciliter la reconnaissance des lettres et un vocabulaire adapté. Ici, en raison de la concision du récit, on est aussitôt happé par l’histoire, brève et sans le moindre temps mort, aux côtés de ces trois gamins prêts à tout, même à risquer leur vie, pour aider ces deux enfants tombés sous l’emprise d’un individu sans scrupule. Un roman au cordeau, sans effet de manche ni péripétie superflue, où la tension du suspense vient se mêler à des questions intemporelles sur l’assistance à autrui, la fraternité ou le sens du sacrifice. Dans le même temps, Benoît Séverac dépeint des personnages très crédibles, de leurs attitudes à leurs dialogues, et même s’il manque peut-être quelques rebondissements ou alors un axe scénaristique plus original, l’auteur préserve avec talent l’attention de son lectorat du début à la fin.

    Un ouvrage de belle tenue, intelligent et humain, qui conviendra à tous les lecteurs, quel que soit leur niveau et leur âge.

    03/05/2022 à 06:55 1

  • Ash House

    Angharad Walker

    8/10 Ash House : littéralement, « la maison de cendres ». C’est là où arrive un adolescent rapidement baptisé Sol par les autres pensionnaires. Un étrange manoir, inquiétant et drapé d’une sombre ambiance, où les matériaux traditionnels se mêlent à la végétation et aux cendres. En tout, une quinzaine d’enfants y vivent, sans la présence du moindre adulte. Il y a bien le Directeur, mais nul ne l’a vu depuis trois ans. Quant au Docteur, son aura sinistre en intimide plus d’un. Sol, d’abord surpris, constate aussitôt que des secrets sont enfouis en ces lieux : une clôture qu’il ne faut franchir à aucun prix, des créatures – les Shucks – qui rôdent, des drones déployés dans le ciel, des mots courants – « parent », « école », « film » – qu’aucun de ces adolescents ne connaît, une fillette qui a disparu et dont nul n’est autorisé à parler… Et Sol n’est pas au bout de ses surprises.

    Unique ouvrage de Angharad Walker, ce Ash House surprend aussitôt, en même temps qu’il ensorcelle. Une atmosphère pesante et menaçante, un manoir digne des textes d’Edgar Allan Poe, des orphelins soumis à un Directeur pourtant absent, des exigences morales sibyllines – les « Obligeances » et les « Désobligeances », le concept de maladie qui met en émoi les occupants des lieux… Il faudrait une longue liste pour répertorier tous ces éléments d’appréhension et de panique qui sont semés dans ce livre. Très habilement, Angharad Walker laisse croître les doutes du lectorat, ses effrois, ses interrogations, et le récit recèle de nombreux rebondissements et autres passages anxiogènes. Par exemple, la fuite de Dom et son combat contre les Shucks est un petit bijou de sensations fortes. Sol, miné par des douleurs vertébrales et expédié dans des conditions brumeuses dans ce foyer pour en guérir, ira de surprises en révélations, d’autant que le cortège des adolescents présents à ses côtés constituent autant d’alliés comme d’adversaires potentiels. Et puis, il y a cet amoncellement de secrets, de vérités cachées, de ouï-dire, de présomptions, de suspicions larvées. Sur trois cents pages, l’écrivaine nous propose une immersion haletante dans un univers sombre et décalé, à la lisière du roman à suspense et de l’irréel, qui secoue et oppresse. Et l’épilogue est à la hauteur du livre et de son enchevêtrement d’incertitudes : il est en quelque sorte très ouvert. Angharad Walker a-t-elle souhaité laisser chaque lecteur se forger sa propre opinion sur les maléfices de cette surprenante habitation ? A-t-elle songé à en rédiger une suite ? A ces questions, comme dans la conclusion de son ouvrage, aucune réponse certaine.

    Un roman poisseux et pénétrant, où se propagent autant d’ombres et de mystères que dans la tête du lecteur une fois l’opus terminé. A coup sûr, une histoire qui marque autant qu’elle interroge.

    02/05/2022 à 06:57 2

  • Destination Goulag

    Jean-Claude Bartoll, Renaud Garreta

    6/10 Où l’on retrouve Najah dans une colonie pénitentiaire pour femmes en Sibérie orientale, et elle s’y est déjà forgé de solides inimitiés. Quelques flashbacks et autres pérégrinations de par le monde. Comme le précédent tome, c’est davantage axé espionnage et manigances que pure baston comme au tout début de la série et ça ne me tire vraiment pas des larmes. Une bonne dose d’action navale sur le finish, mais on dirait vraiment que Najah en a fini avec le grand n’importe quoi hollywoodien et les scènes d’action rocambolesques.

    01/05/2022 à 20:14 2

  • O.P.A. sur le Kremlin

    Jean-Claude Bartoll, Renaud Garreta

    6/10 Nous sommes cette fois-ci à Moscou où notre héroïne veut lutter contre un homme qui risque d’être élu président… et est abattu sous ses yeux. Une ambiance nettement plus typée espionnage, ce que met d’ailleurs en valeur ces scènes d’infiltration au cours desquelles notre tueuse expérimentée… ne tue personne. Fini les bastons échevelées, les cascades, les courses-poursuites, les fusillades ? Les auteurs auraient-ils brusquement changé de genre et de braquet ? Même s’il y a de l’action à Moscou comme à Bogota, cela n’a strictement rien à voir avec les précédents tomes (bon, le final renoue avec les fondamentaux, avec course-poursuite en motoneige, lance-missile et hélicoptère) et, rien que pour ça, je vais continuer de me faire cette série.

    30/04/2022 à 19:55 2