Mephisto

193 votes

  • Le Bal des ardentes

    Ghislain Gilberti

    7/10 Pour ce troisième roman publié (Le Festin du Serpent, Le Bal des Ténèbres...), Ghislain Gilberti modifie de nouveau de braquet et opte pour un récit assez clinique, presque chirurgical, dans lequel le rythme, la cadence est donné par les personnages. De façon quasi inexorable. Alors que ce polar, toujours aussi étonnamment documenté (on se demande comment l'auteur arrive à ingurgiter et restituer de façon digeste autant de données spécifiques comme celles sur la fabrication des bombes), change de localisation, et bascule de Marseille à la banlieue parisienne, il prend une dimension cauchemardesque, évoquant une atmosphère délétère entre Los Angeles 1997 ou à la série Walking Dead, et arrive à rendre crédible un incroyable assaut des forces de l'ordre en plein milieu des cités, morceau de bravoure de ce "Bal des Ardentes."

    27/06/2015 à 01:34 4

  • Ainsi vint la nuit

    Estelle Surbranche

    6/10 On plonge très vite dans cette histoire où la drogue (son abus, surtout) va révéler rapidement les caractères des uns et des autres, ce dont les gens ordinaires sont capables par… Amour ou dépit. L’auteur(e), journaliste et ancien DJ, décrit avec talent et méticulosité la descente aux enfers de ses deux "héros", Matthieu et Romain, et s’attache à raconter le pays Basque, son ambiance en bord de mer, les petits trafics… Une première partie très efficace, et prometteuse. L’intrigue se délite un peu après que les personnages ont migré sur Paris, et que « l’affrontement » entre Gabrielle et Nathalie se dessine. Mais pas d’inquiétude, l’histoire se tient. On referme ce néo-polar qui évoque parfois l’univers du français Marin Ledun (Au Fer Rouge, L’Homme qui a vu l’Homme…), ou celui des américains Kem Nunn (Surf City, La Reine de Pomona…) et Don Winslow (La Patrouille de l’Aube…), en se disant que l’on retrouvera avec plaisir une partie des personnages (les survivants) dans la suite de ce que la prolixe Estelle Surbranche a déjà pensé comme une trilogie.

    23/06/2015 à 18:56 1

  • Pandemia

    Franck Thilliez

    8/10 L'auteur a su ménager un coup de théâtre qui pourrait vous donner envie de l'étrangler (les amateurs de la série d'heroïc-fantasy Game of Thrones comprendront). Nul n'est irremplaçable, nul n'est indispensable ! Infecté, j'ai plongé dans l'histoire qui prolonge efficacement Angor (pour lequel j'ai un faible) mais j'avoue que j'ai un peu décroché - mithridatisé peut-être - lorsque l'intrigue se resserre dans le dernier tiers sur le Deus ex Machina de ce complot géant, L'Homme en Noir. Un "méchant" qui lorsqu'il commence à s'incarner en chair et en os m'a paru un peut trop théâtral, poseur, dans sa manière d'agir et de s'exprimer. Au final, un thriller touffu, ponctué de scènes et d'images qui vous hantent longtemps (notamment un charnier d'animaux en Pologne), qui mélange habilement la réalité scientifique (cf la grippe aviaire, la crise de la vache folle, la dissémination d'Ebola en Afrique...) avec la (presque) fiction. Et si tout cela nous arrivait. Et si tout cela était déjà arrivé ?

    22/06/2015 à 21:43 5

  • Pukhtu Primo

    DOA

    9/10 Un maelstrom dans lequel on s'enfonce, on s'empêtre, on s'englue peut-être aussi... Mais surtout un récit passionnant où chaque personnage a sa chance. Aucun manichéisme. L'auteur, le mystérieux DOA (un pseudo un peu grandiloquent, "Death On Arrival", derrière lequel se dissimulerait ou s'effacerait un ancien militaire...), dose ses effets et arrive à appâter, entraîner son lecteur dans une sorte de pendant moderne de L'Iliade (sans l'Odyssée). Un thriller qui évoque aussi par de nombreux côtés l'immense et très dense Griffe du Chien de Don Winslow. Passionnant, incroyablement bien documenté (en tous cas, du point de vue d'un néophyte que je suis sur l'Afghanistan)... Totalement recommandé, à la seule condition d'accepter de plonger dedans tête la première en acceptant de ne pas tout comprendre sur le moment (acronymes, pseudos...). Pour moi, un gros gros coup de coeur. En attendant le second tome...

    17/06/2015 à 06:59 6

  • Une putain d'histoire

    Bernard Minier

    9/10 J'ai mis un bon mois avant d'ouvrir "Putain d'histoire", comme si je redoutais d'être déçu. Ou alors, pas très motivé au départ pour une histoire où les héros seraient des ados. Mais.... Mais... Mais... Il y a toujours un mais. Aussitôt ouvert, aussitôt capté, happé, avalé par l'intrigue. Dans ce 4ème roman, bye-bye la France, les Pyrénées, etc, Bernard Minier trace sa route, direct sur la côte ouest des Etats-Unis. La région autour de Seattle, où ont été tourné... X-Files, The Killing version US. Il élabore un jeu de pistes machiavélique et très cinématographique (entre Usual Supect, Stand by Me et Shutter Island). Comme un courant impétueux, on se retrouve littéralement aspiré sans pouvoir résister dans ce suspens sinueux dont l’issue est un vrai tour de force. Une fin qui pourrait dérouter certains, en forme de conte moral, mais que pour ma part, je n'ai pas absolument pas vu venir. Et ça fait toujours plaisir d'être "attrapé" par l'auteur. Lecture ultra ultra ultra recommandé pour cet été, mais aussi pour cet automne, et cet hiver, et l'année prochaine.

    12/06/2015 à 18:53 9

  • Mausolée

    Antoine Tracqui

    8/10 Imaginez que Jules Verne ait décidé d'avoir un enfant avec Tom Clancy (je sais, ce n'est pas évident à se représenter ! ), et vous aurez une petite (mais vraiment toute petite) idée de ce qu'est ce Mausolée. On y croise des androïdes aux incroyables capacités (plus humain que les humains), on y assiste en quasi direct à des catastrophes dignes d'un blockbuster à Hollywood (au choix... 2012, Le Jour où la Terre s'arrêta, En Pleine Tempête, tous les Die Hard), on y suffoque sous des tonnes d'eaux, on file dans les airs dans d'improbables engins volants... Plus de 900 pages sans aucun répit. Une performance, d'autant que Mausolée diffère complètement de son prédécesseur, l'excellent Point Zéro qui se déroulait dans l'hémisphère sud.

    23/03/2015 à 21:50 5

  • Missing : New York

    Don Winslow

    6/10 Sûrement pas le meilleur livre de Don Winslow (on est loin de l’ambition de La Griffe du Chien ou de la perfection de La Patrouille de l’aube…), mais un honnête polar de série B avec son lot de surprises (la direction inattendue que prend l’enquête en s’intéressant à la vie des très riches), d’incohérences (le héros « lonesome cowboy » mi John Wayne, mi Steve McQueen qui règle tous ses problèmes à coups de poing virils). Un roman page-turner pas désagréable mais sans grand enjeu, un peu lâche dans le sens de « loose » (dans lequel on se demande (un peu, beaucoup) où est passé la « griffe » acérée de Don Winslow. On referme Missing : New York avec une légère frustration, en se disant : « A quand un nouveau Savages ?

    13/03/2015 à 09:51 3

  • Satan était un ange

    Karine Giebel

    7/10 lus sobre, plus ramassé, ce 8ème roman détonne (un peu) dans le parcours de cette adepte du récit long (cf les 988 pages de son roman culte "Meurtres pour Rédemption"). Comme un pas de côté. Cela fait longtemps que je l'ai lu, mais "Satan était un ange" m'a fait penser à un très bon livre de Sébastien Japrisot, "La Dame dans l'Auto avec des Lunettes et un Fusil." Mon avis : pas le plus surprenant des romans de Karine Giébel (je recommande "Le Purgatoire des Innocents"), mais un solide thriller qui se lit sans trop se poser de questions. Efficace.

    27/02/2015 à 19:39

  • Le Mal par le mal

    Jérôme Camut, Nathalie Hug

    9/10 Dantesque ! Gargantuesque ! On n'en prend plein les mirettes comme si l'on se faisait canarder à la Kalachnikov ou pilonner au mortier tout au long de ces 810 pages. Pas un instant de répit. Les chapitres sont très courts. Les personnages nombreux : agaçant autant qu'attachants. Les morts tombent à la pelle (et n'ont pas toujours le temps d'être enterré). L'action change de direction à tout bout de champ, la géographie des lieux aussi, et pourtant on n'est jamais vraiment perdu

    16/02/2015 à 21:00 1

  • Kobra

    Deon Meyer

    7/10 Sans doute moins ambitieux que le colossal "A la trace" (sorti en 2012) mais plutôt réussi, ce nouveau Deon Meyer mélange une enquête policière et une affaire d'espionnage (les méchants sont Français ! Cocorico !). La seconde n'est pas très passionnante en elle-même (une histoire tarabiscoté d'algorithme "magique"), par contre la virée que nous propose l'auteur à travers Le Cap, ses banlieues et ses habitants vaut vraiment le détour. On retrouve avec plaisir le côté ours mal léché de l'inspecteur Benny Griessel apriori sorti de ses crises d'alcoolisme pour des crises existentielles plus prosaïques liées à ses performances sexuelles.

    29/01/2015 à 18:59 1

  • Que ta volonté soit faite

    Maxime Chattam

    7/10 Le retournement final ne m'a pas complétement convaincu, malgré son côté astucieux. Trop peut-être... Comme s'il fallait être de nouveau efficace arrivé à ce stade et scotcher le lecteur. Il m'a manqué un peu d'émotion alors que tout le récit me semblait converger en ce sens. Pas mon Maxime Chattam préféré (toujours un faible pour "La Trilogie du Mal") même s'il faut vraiment saluer l'ambition de l'auteur à ne pas se cantonner dans un seul registre, et à aller explorer de nouveaux territoires.

    19/01/2015 à 21:24 1

  • Au fer rouge

    Marin Ledun

    8/10 Dense, nerveuse, documenté, l'écriture de Marin Ledun suscite d'emblée des images, comme une tragédie à la Michael Mann qui se déroulerait au fil des pages. Bien, Mal... Peu importe ! On s'attache à ces personnages sans manichéisme - héros ou zéros ordinaires - que traversent, transpercent des conflits qui les dépassent.

    14/01/2015 à 19:51 8

  • Le Baptême des ténèbres

    Ghislain Gilberti

    8/10 Un thriller d'une densité extrême, percutant. Une incroyable chasse à l'homme qui multiplie les coups de théâtre, plonge le lecteur dans l'univers trouble, ambigu de Lewis Carrol (auteur des "Aventures d'Alice au Pays des Merveilles"). La violence est extrême, incessante, réaliste mais quasi clinique.

    23/10/2014 à 19:22 1

  • Angor

    Franck Thilliez

    9/10 Comme à son habitude, l’auteur s’empare d’un sujet scientifique (les greffes d’organes et de tissus vivants) pour imaginer une enquête policière particulièrement mouvementée et troublante dans laquelle il est autant question d’ADN, que des sales réminiscences de l’Espagne franquiste. Pas de temps mort. Tout avance à un train d’enfer. On sent que l’auteur s’est amusé comme un petit fou à concocter cette histoire, tout en ayant bossé tant ses références historiques et scientifiques

    06/10/2014 à 16:37 1

  • Trois

    Sarah Lotz

    3/10 Suffisamment allumé comme point de départ pour que l'on se fasse happer par le récit construit sous forme d'une enquête plus ou moins journalistique nourrie de divers témoignages, d'extraits de journaux fictifs, de chats sur Internet entre geeks (...) Mais la conclusion s'avère une franche déception, au mieux confuse, au pire incompréhensible. D'où l'étonnement face à ce commentaire de Stephen King placé en bandeau "Un livre génial !" En refermant ce livre, j'ai plutôt eu l'impression que l'auteur avait abandonné ses personnages, comme si la forme avait peu à peu anéanti l'histoire.

    29/07/2014 à 18:17 1

  • La Patience du Diable

    Maxime Chattam

    7/10 Très visuel. Depuis "L'Âme du mal", Maxime Chattam n'a pas son pareil en France pour scotcher son lecteur avec des scènes à la fois ultra-cinématographique et très très gore (vraiment !!!). Ce thriller, suite de "La Conjuration Primitive", est du même acabit, jouant avec les codes de la terreur, instillant un poil de folie avec un médecin pas très net et des expériences à la "Shutter Island" (une institution pour "fous" isolés). L'auteur reprend et développe une idée déjà très présente dans sa trilogie du mal, celle d'une société de consommation qui serait responsable de l'explosion de la violence dans nos civilisations en apparence si policées.

    06/06/2014 à 19:35 1

  • Les talons hauts rapprochent les filles du ciel

    Olivier Gay

    7/10 Sous couvert d'un roman policier, Olivier Gay se paye les nuits parisiennes, sa faune qui s'ennuie en groupe, ses jolies créatures aux jambes interminables qui rêvent d'une autre vie, ses has-been (ex rock stars) toujours en quête d'un shoot de gloire du passé. C'est à la fois pathétique et touchant, et Fitz développe au fil de l'intrigue avec ses maladresses, sa forfanterie et son hallucinante naïveté un vrai potentiel sympathie.

    18/02/2014 à 00:27

  • N'éteins pas la lumière

    Bernard Minier

    8/10 Comme un terrifiant Marabout... Bout de ficelle... Selle de cheval... Pour son troisième roman, Bernard Minier, grand admirateur de films de manipulation comme Le Locataire de Roman Polanski (lui-même adapté d'un livre, Le Locataire Chimérique de Roland Topo) précipite ses lecteurs dans un fascinant jeu de pistes psychologique qui ose même un étonnant et inattendu détour par l’espace.

    17/02/2014 à 01:05 3

  • Le Psychopompe

    Dominique Maisons

    7/10 Ferré comme un gardon, serré en étau comme par les anneaux d'un Python Constrictor... J'ai été à la fois bluffé, et mis très très mal à l'aise par la lecture de certaines scènes avec le Nécrophage (l'auteur a un talent pour rendre visible l'invisible, et dire l'indicible) . En fait, ce roman anciennement titré "Le Psychopompe" (dans la mythologie, c'est celui qui aide les âmes à trouver le chemin des enfers...) est une vraie singularité dans la production policière actuelle, un genre d'OVNI démentiel qui donne envie de s'y replonger bien après en avoir fini la lecture.

    04/02/2014 à 19:25

  • Apnée noire

    Claire Favan

    8/10 Ce thriller de près de 400 pages dans l'esprit de Thomas Harris ("Le Silence des Agneaux"...) ou plus proche de nous, de Karine Giebel ("Le Purgatoire des Innocents"...) s'avale à toute vitesse. Il m'a fallu moins de trois jours pour en venir à bout. Comme d'habitude chez Claire Favan, les protagonistes sont lourdement chargés (Le deuil et ses conséquences pour le lieutenant Sadino / Une étrange et morbide obsession pour l'agent Halliwelll). Les rapports entre ses personnages sont toujours aussi mouvants, comme dans un ballet ou plutôt un duel à fleuret moucheté qui va s'avérer particulièrement cruel pour l'un des deux héros. On ne sait jamais trop sur quel pied se balancer, et c'est ce qui amène beaucoup de nerf à ce thriller efficace, et plein de surprises. Une intrigue sadique particulièrement tortueuse mais dont la conclusion m'a paru finalement assez poétique.

    31/12/2013 à 01:33 1