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Higanjima tome 6
6/10 Comme c’était un peu attendu, la scène finale du tome précédent a finalement ici rebondi. Les bagarres continuent de plus belle, même sous la surface de l’eau. Dommage que le résumé officiel soit si bavard et dévoile des éléments de ce tome (qui, en plus, n’apparaissent qu’assez tard), car les créatures effectivement lancées par le maître sont dantesques, à faire passer des mégalodons pour des tilapias anorexiques. Encore beaucoup d’action pour cet opus – presque que ça, d’ailleurs, au point que l’auteur ne s’enquiquine même plus à essayer de proposer autre chose.
03/08/2021 à 17:45 2
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Dragon Head tome 9
7/10 Un tract découvert par hasard par Teru dans un Tokyo anéanti lui fait comprendre l’étendue des dégâts dans le pays. Il descend dans le métro et s’aperçoit, via une radio, qu’il y a des survivants à la série de cataclysmes, et que les parois sont parcourues de symboles ésotériques. Les raisons de tout ce grand chambardement nous sont enfin offertes, et, même si c’est un peu bavard, c’est assez bien trouvé. Après des opus un peu mous, ou surtout trop éloignés des situations initiales, je reprends goût à cette série et j’ai envie de lire le dernier tome.
02/08/2021 à 23:31 1
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L'Ombre de Wewelsburg
8/10 L’étrange dalle noire récupérée en Antarctique est convoyée dans un sous-marin nazi réagit aux attaques coordonnées d’un destroyer et d’un avion alliés avec l’entremise du Visiteur, pourtant géographiquement très distant. La note extraterrestre apparaît encore davantage avec ce Visiteur (qui semble sacrément de mèche avec Himmler à travers cette réflexion quant à la prothèse d’Hitler, hum hum…). Cette BD se termine sur le début d’un processus paranormal où il est question d’un voyage dans le temps… tandis qu’Hitler commence à disparaître physiquement. Encore du très bon, original et addictif !
31/07/2021 à 23:27 1
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La Gardienne des clés
Grzegorz Rosinski, Jean Van Hamme
6/10 Volsung de Nichor vient d’être sauvé par une créature qui a pris l’apparence de la maîtresse des clefs, et cette femme lui confie une mission en modifiant son apparence pour qu’il ressemble à Thorgal. Une intrigue (une relecture du thème du sosie et de l’usurpation d’identité, en fait) qui est tout sauf désagréable et plutôt bien rythmée, et des références assez nombreuses à des opus antérieurs, mais l’ensemble ne m’a que moyennement emballé : des moments assez attendus, quelques dialogues superflus, et un dernier quart où l’on bascule dans un registre très différent (le décor glaciaire, les insectes géants, le serpent Nidhogg, les nains, etc.), presque trop différent, qui me laisse l’impression d’un récit déstructuré.
30/07/2021 à 23:47 2
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La Ronde des géants
Jean-Luc Istin, Jacques Lamontagne
7/10 Le raz-de-marée s’abat sur la ville alors que la Lance de Lug a trouvé un nouveau maître. Après ce carnage, nos protagonistes ne doivent leur survie face à des pirates que grâce à l’intervention d’archers bretons. C’est ensuite vers Stonehenge (on une construction similaire) qu’ils se dirigent. Encore une bonne BD pour cette très bonne série, avec quelques scènes de sexe et un suspense, encore une fois, habilement maintenu sur le final avec une noyade.
30/07/2021 à 08:20 1
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Les Monstres de là-bas
8/10 Nelson, dix ans, quitte sa ville de Meckneb afin de passer deux jours chez sa correspondante étrangère, Fubalys, à Brick-City, de l’autre côté de l’estuaire. Mais Nelson repère vite une incongruité anatomique chez la jeune fille, sa mère et son père : ils ont douze doigts. Et il n’est pas au bout de ses surprises…
Un texte très réussi où Hubert Ben Kemoun joue très habilement sur les ressorts de la surprise, du handicap, de la différence – ici physique – pour mieux nous surprendre et nous sensibiliser, de façon originale, adroite et efficace, sur l’altérité. Même si le final peut être deviné – ce qui a été mon cas, mais ça doit être lié à mon âge, le récit est atypique, presque mémorable à sa façon, fort et, au-delà de la bouffonnerie de surface, réserve une belle leçon quand on réfléchit davantage au message du roman, à l’acceptation d’autrui et au regard que l’on doit poser sur lui… ainsi que sur nous-mêmes.29/07/2021 à 08:19 1
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La Nuit des Armes Miracles
8/10 Froissés par les Alliés qui ont fabriqué et utilisé des avions capables d’en découdre avec leurs Wunderwaffen, les nazis veulent employer un U-Boot Mistel type XXX, et sa première cible va être un porte-avion au large de l’Australie. Une belle débauche de nouveaux engins, depuis cette navette jusqu’au train blindé en passant par les Panzers VIII. La rencontre tripartite entre le Visiteur, Hitler et Himmler vient clore cet opus où action et progression générale de l’intrigue sont à l’équilibre. Encore un très bon opus à mes yeux.
28/07/2021 à 17:57 1
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Louve
Grzegorz Rosinski, Jean Van Hamme
7/10 Un opus qui commence de manière très brutale : des fermes brûlées, des propriétaires brutalisés, un malheureux dont la main est tranchée… Thorgal, Aaricia (alors enceinte) et Jolan croisent la route d’un autre bateau et le ton monte. Le reste de la BD se montre assez violent et n’est guère avare en scènes d’action, et le final, en plusieurs temps, me fait notamment penser à certains épilogues de films (« Il était une fois dans l’ouest » par exemple) au niveau de la symbolique. Un tome plein de bruit et de fureur, peut-être même le plus sauvage et dynamique jusqu’à présent selon moi.
27/07/2021 à 22:58 2
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Meurtres à Moulinserre
8/10 Pour célébrer son anniversaire, la Castraflore, célèbre cantatrice née sous la plume du créateur de bandes dessinées Hervé, invite ses amis au château de Moulinserre. Tous les personnages sont alors réunis pour cet événement. Fallait-il voir en la mort naturelle de l’arboriste Emile Van Hot puis dans des lettres anonymes de menace de mauvais présages ? Toujours est-il que la chanteuse est retrouvée décédée dans sa salle de bains. Le verdict tombe rapidement : on l’a assassinée. Martin, le détective ainsi que la policière Satisfaction Cantono mènent l’enquête.
Renaud Nattiez est un « tintinophile », c’est-à-dire un spécialiste de l’œuvre d’Hergé, ayant signé plusieurs ouvrages à ce sujet, et c’est avec appétit que l’on entame ce roman policier, intrigué par ce que l’auteur a pu concocter. Avec une écriture habile, une plume délicieuse et beaucoup d’esprit, il nous prend par la main et nous fait rencontrer des personnages alternatifs, avatars des protagonistes que presque tout le monde a connus en dévorant les aventures de Tintin. Le capitaine Paddock, la Castraflore, le chien Pilou, les Durandt, etc. : une pléthore d’individus que Renaud Nattiez ressuscite avec humanité, respect et intelligence, en conservant leurs caractéristiques et leurs phrasés. Une parodie ? Non : ils ne sont réinterprétés sur un mode bouffon et décalé comme a pu le faire Gordon Zola pour des pastiches endiablés et cocasses. On découvre ainsi l’envers du décor, avec ce côté exquis et joliment ironique de voir ces protagonistes s’ébattre au gré des pages tout en étant conscients qu’ils sont des êtres d’encre, enfantés par Hergé – pardon, Hervé. L’intrigue est très bien conçue, proche des whodunits anglais, et les références à des auteurs comme Agatha Christie, Georges Simenon, Umberto Eco ou encore Fred Vargas ne sont pas innocentes. Le rebondissement final quant à l’identité des assassins, à propos du second meurtre, est très intéressant et bien amené, achevant de faire de cet opus un pur régal.
Pour tous les fans de Tintin, ce roman est un bonbon. Pour les autres, il constituera un ouvrage atypique et ensorcelant, où Renaud Nattiez s’est servi de sa connaissance parfaite de l’univers d’Hergé pour composer un roman singulier et mémorable, ramenant à la vie les individus qui ont bercé l’enfance de nombre d’entre eux. Et ce sont également près de trois cents pages ponctuées de touches d’humour, de dialogues amusants et de mots d’auteurs, animées d’un bel esprit où l’auteur ne cesse de nous interroger sur des thèmes que sont la créativité littéraire et le positionnement de ces protagonistes dans une histoire où le réel se mêle à l’imaginaire, à moins que ça ne soit l’inverse.27/07/2021 à 08:18 1
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Reikiller
8/10 Un gliome infiltrant du tronc cérébral : voilà de quoi souffre Luna, la fille de cinq ans de Jenny et de Didier. Le couple ne parvient pas à surmonter la douleur de cette maladie qui va, à court terme, mettre fin aux jours de leur enfant. Jenny travaille dans la troupe du Satyre Rieur, un cabaret périgourdin, tandis que Didier est gendarme à la brigade de recherches de Sarlat. Des femmes, allemandes, sont enlevées, et l’on découvre ensuite leurs scalps puis leurs cadavres. Un tueur en série semble être à l’œuvre dans les parages. Dans le même temps, Virginie, la patronne du cabaret, propose à Jenny un pacte insensé : sauver Luna d’une mort certaine grâce au reiki, une méthode de soin controversée venue du Japon. Et si tout était lié ?
Laurent Philipparie, avec ce seulement troisième roman, nous régale. Commandant de police à Bordeaux, sa reconversion littéraire est une véritable réussite. Grâce à des chapitres courts, une écriture soignée et des personnages enlevés, il n’a aucun mal à saisir l’attention du lecteur, du début à la fin de son histoire. De nombreux éléments viennent se souder à cette intrigue : la Seconde Guerre mondiale et la Résistance, Joséphine Baker, la psychogénéalogie, les vies antérieures, les spectres du passé, le lébérou – créature folklorique du Périgord, ou encore le rapport si particulier de l’Occident à la spiritualité. Les scènes de danse et de spectacle au Satyre Rieur, où l’on peut observer tant la majesté des représentations que l’envers du décor, même si elles ne sont pas de prime abord nécessaires, constituent en soi de pures prodiges artistiques. Le côté policier est très réussi, venant brasser pléthore d’ingrédients pour un résultat final solide alors qu’il aurait pu avoir la saveur ratée des mets composés de trop d’aliments. Un suspense d’une excellente tenue parcouru de scènes très émouvantes, comme celles où apparaît Luna.
Pas le moindre temps mort dans cet impeccable thriller de Laurent Philipparie. Croisons d’ores et déjà les doigts pour que les opus suivants soient au moins aussi réussis.26/07/2021 à 08:20 4
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Le Maître des montagnes
Grzegorz Rosinski, Jean Van Hamme
7/10 Thorgal découvre un inconnu dans la montagne qui joue de la trompette, au point de le tuer à cause des avalanches provoquées. Recueilli par Torric, ils se retrouvent tous les deux le lendemain matin comme téléportés en un lien très différent, dans une ferme où vit une jeune femme fort accorte, Vlana. Des voyages spatio-temporels, de la magie, et une intrigue qui diffère radicalement de celles que l’on trouve dans les autres opus (pour le moment) dans la série, pour une lecture très distrayante et efficace.
25/07/2021 à 08:26 2
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The Killer Inside tome 2
6/10 Eiji Urashima, le fils du terrible tueur en série « LL », doit prouver son innocence aux yeux – plutôt aux crocs – du chien du gang des Skall, et c’est à sa plus grande surprise que c’est à d’autres bijoux de famille que les siens que le molosse s’en prend. Je regrette que le côté schizophrénique du premier opus soit un peu délayé dans celui-ci, au profit des relations entre Eiji et les Skall, avec les chantages photographiques perpétrés, jusqu’à ce que l’histoire se recentre sur ce noyau, avec cette piste concernant Shoto Shirabishi, le « sugar daddy » et père d’une des victimes de LL. Un poil en-dessous du précédent à mes yeux, même si le chantage final (miam, du rat puis du chat frit…), l’explication du mot « Skall » et le fait que j’ai appris le terme « hybristophilie » relancent mon intérêt.
23/07/2021 à 22:58 1
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De Sable et de sang
7/10 L’Empereur Claude vient de mourir, et son successeur est déjà connu : Néron, 17 ans. Ce dernier une passion dévorante et absolue pour Acté, une prostituée qu’il arrache des griffes de son maître, tandis que sa mère, Agrippine, tisse en toute discrétion les fils du pouvoir. Sexe, politique, machination, combats de gladiateurs, violence, la mort de Britannicus : une lecture dynamique et très sombre de l’histoire antique de Rome, avec beaucoup de talent tant esthétique que scénaristique. Pas certain que je me souviendrai longtemps de cet opus, mais il n’en demeure pas moins fort réussi.
23/07/2021 à 08:30 1
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Les Naufragés de la discorde
8/10 En 1797, le Sydney Cove, un bateau transportant de belles quantités de marchandises, s’échoue après quatre-vingt-onze jours de déplacement. Les naufragés vont parcourir des centaines de kilomètres dans des paysages australiens hostiles et peuplés d’autochtones pas nécessairement amicaux, et, des dix-sept membres de l’équipage, seuls trois seront finalement sauvés. Le problème, c’est que rapidement, les versions des rescapés présentent des divergences, voire des anomalies. Le lieutenant Joshua Grayling doit interroger ces hommes et comprendre ce que l’on cherche à lui dissimuler.
Ce roman de Jock Serong est un petit bijou. Avec un style élégant et une langue collant avec merveille à l’époque des faits, l’auteur effectue, avec beaucoup de tact et d’intelligence, une relecture de cet authentique naufrage. C’est ainsi que, à travers les yeux de Joshua Grayling, on découvre le journal de bord de Clark, l’un des survivants, et ainsi le déroulé du périple marin, l’épisode en chaloupe et la longue traversée des terres hostiles, avec les efforts inouïs pour survivre, les tensions, les rencontres fâcheuses et heureuses, avec le sauvetage par un bateau de pêche. Néanmoins, quand les premières zones d’ombre, voire contradictions, naissent en comparant ces propos à ceux de Figge, marchand de thé, et Srinivas, lascar bengali, notre enquêteur comprend que la version officielle n’est pas la bonne. Le suspense est habilement mené, et Jock Serong, qui s’est solidement documenté sur ce fait divers ainsi que sur l’histoire de l’Australie et le monde de la navigation commerciale, maîtrise son sujet sans jamais rendre sa science pesante. L’écrivain mêle d’ailleurs plusieurs thématiques, du polar pur au récit d’aventures, en passant par des passages proches de la littérature blanche. Les personnages sont également très réussis, depuis Grayling en limier tenace et qui sera férocement affecté par cette histoire, jusqu’à son épouse Charlotte, sérieusement malade au début du roman (avec des meurtrissures étranges sur le corps, un énorme bubon dans le cou et une paralysie des jambes qui va en s’aggravant) avant que son salut n’arrive grâce à Figge lui-même. D’ailleurs, ce dernier, monstre retors et machiavélique, à l’identité douteuse et capable des pires atrocités, n’est pas sans rappeler Henry Drax, l’ignoble protagoniste de Dans les eaux du Grand Nord, d’Ian McGuire. Et au final, il n’y a peut-être qu’un seul point que l’on peut regretter : le fait de connaître si tôt le côté diabolique – donc criminel – de Figge, ce qui amenuise en partie le suspense.
Un récit fort et palpitant, panachant les pires violences et de belles touches d’humanité. Rien que l’épilogue, en plusieurs temps, est un régal : sombre, inattendu et ouvert. En un seul roman, Jock Serong s’impose comme un nom à suivre de très près.22/07/2021 à 08:27 4
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La Lance de Lug
Jean-Luc Istin, Jacques Lamontagne
8/10 L’assassin cagoulé du dernier moine, frère Thomas, parvient à échapper à Gwenc’hlan, et l’on débouche sur une sorte de chasse au trésor, après la « Lance de Lug », un objet surpuissant aux pouvoirs phénoménaux. Un étrange arbre de vie dessiné, des mercenaires saxons, un monastère ravagé sous les ruines duquel se trouve la bibliothèque des druides… Encore pas mal de clins d’œil au « Nom de la rose » (la bibliothèque secrète, les boutons cachés sur lesquels appuyer pour débloquer des passages secrets). Une chouette fusion du roman à suspense et de fantastique, qui se conclut sur un tsunami dantesque, préservant un fort suspense.
21/07/2021 à 17:22 1
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Is la blanche
Jean-Luc Istin, Jacques Lamontagne
7/10 Suite aux meurtres des moines, la population réclame vengeance, avec des violences à la clef, pendant que l’on remonte dans le passé, vers un groupuscule chargé autrefois de se débarrasser des chrétiens s’écartant de la parole du Saint-Siège, l’Imperium Dei. Même si l’effet de surprise s’est nécessairement dissipé, je reste très attiré par cette série. Cet opus est un peu plus bavard que le précédent, mais il permet à nos deux protagonistes de se rapprocher de la vérité, d’autant que la scène finale, sur un toit, ménage un intéressant suspense.
20/07/2021 à 23:43 1
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L'Affaire Saint-Fiacre
9/10 « Je vous annonce qu’un crime sera commis à l’église de Saint-Fiacre pendant la première messe du Jour des Mors » : c’est ce papier anonyme dont prend connaissance Maigret – parce qu’en réalité, il ne le découvre qu’un peu par hasard au Quai des Orfèvres après « avoir traîné pendant plusieurs jours ». Son sang ne fait qu’un tour. Moulins ! Saint-Fiacre ! Le territoire de son enfance, où son père était régisseur. Le roman débute dans cette église où la messe a lieu, et au terme de laquelle la comtesse décède, de prime abord de mort naturelle, sauf que notre commissaire se rend vite compte qu’il s’agit d’un meurtre.
Ce roman, je ne le découvre que maintenant, moi qui avais adoré les deux adaptations, avec Jean Gabin puis Bruno Cremer, ce qui constitue une sorte de madeleine de Proust. Moi qui adore Georges Simenon et son œuvre, je me suis littéralement régalé avec ce livre. La plume sèche, rongé jusqu’à l’os de l’auteur, les ambiances qu’il dépeint en quelques traits, l’acidité avec laquelle il décrit les milieux où il promène son enquêteur fétiche, l’intelligence des relations humaines, l’inventivité de l’intrigue, tout est là. Ce qui est impressionnant à mes yeux, encore une fois après avoir vu et revu ces deux adaptations, cinématographique et télévisée, c’est la concision, le côté compact de l’histoire, délayé, rallongé, brodé pour le passage sur grand et petit écran. J’ai adoré essayer de retrouver, comme dans le jeu des sept erreurs, les divergences entre le livre et les adaptations, tout en dévorant chacun des mots – et maux – de l’écrivain. Parce que cet opus est sacrément sombre, dur, poisseux, notamment lorsque l’on repense aux rôles de Jean, le secrétaire particulier de la comtesse, le curé et ses contradictions, Emile, fils de l’actuel régisseur et employé de banque. C’est aussi une immense palette de sentiments humains que déploie Georges Simenon, de l’avarice à la concupiscence, de la dégradation des passions quand l’âge progresse aux relations complexes mère – fils, ou encore la forme de rédemption à laquelle va accéder Maurice, le fils de la comtesse, constamment désargenté et engagé dans une perpétuelle course à l’échalote pour récupérer des subsides afin de subvenir à son train de vie dispendieux et peu décent. Le final, où Maigret est très en retrait, est un pur bijou de littérature policière. Onze chapitres au-dessus desquels plane l’ombre de la nostalgie pour Maigret, presque un spleen, et qui constituent assurément l’ossature de l’un de mes ouvrages préférés du maître belge.19/07/2021 à 10:33 1
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Piégé à Arkham
Gilles Saint-Martin, Nicolas Trenti
8/10 Encore une fois, j’ai passé un très agréable moment en me mettant dans la place du héros, ayant atterri après une série de malchances dans cette demeure où l’on m’a drogué avec un café empoisonné. Au programme des réjouissances, une secte d’adorateurs de Cthulhu parés à me sacrifier, d’autant que ça ne semble pas être la première fois qu’ils commettent ce genre d’abominations. Les atmosphères des quatre salles (la cave, le temple, le vestiaire et le garage) sont très bien rendues, et les énigmes vraiment prenantes. Bon, honnêtement, je ne me suis pas chronométré contrairement à ce que j’avais fait dans « Dédale temporel » et « Dans les griffes de la mafia », histoire de vraiment prendre mon temps, savourer les lieux et les énigmes, et exploiter au maximum le potentiel autant de ce livre que du concept. Evidemment, j’ai pas mal rigolé avec certaines actions réalisées intentionnellement en me doutant du résultat absurde (et d’abord, oui, si je veux planter une dague dans une bibliothèque, effectivement, ça me défoule !, ou encore, si j’ai vraiment envie de me promener avec du vinaigre, ça me regarde !). Certains problèmes m’ont un peu donné du fil à retordre, notamment celui concernant la boîte de vitesses de la moto. Bref, une fois de plus, un très bon moment de divertissement, d’autant que les petites cellules grises sont sévèrement mises à contribution, pour une conception du livre-jeu enjouée, efficace et addictive dont je ne me lasse toujours pas !
18/07/2021 à 17:10 2
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Un grand bol d'air avant chaque repas
6/10 Le verdict tombe comme un couperet : « primo-infection ». Claudio Beycler doit absolument prendre du repos. Parce qu’elle n’a pas les moyens de l’envoyer dans un établissement spécialisé de soins, sa mère l’envoie à Saint-Muvran, dans le Jura, chez des cousins éloignés, Edmond et Jeannette Chevriaud.
Une sympathique – très courte – nouvelle qui s’adresse aux très jeunes voire mauvais lecteurs, et qui distille une émotion intéressante, même si je trouve que le récit s’équilibre de manière un peu bancale entre la partie parisienne et la jurassienne, faisant que l’on ne découvre que trop tard Edmond et Jeannette alors que ce choc des cultures, pourtant abordé dans l’ultime page, aurait, à mes yeux, mérité davantage de place dans cet opus.15/07/2021 à 23:17
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La Fille qui jouait avec le feu
8/10 Hannah vient de perdre sa mère, décédée d’un cancer du sein, et c’est à contrecœur qu’elle quitte Londres pour l’Islande afin de rejoindre son père. Ce dernier, journaliste, lui a trouvé un poste de stagiaire. Dans le même temps, Imogen Collins, dix-neuf ans, influenceuse très suivie sur les réseaux sociaux, travaille également pour une entreprise de marketing et vient de rejoindre Reykjavik. Mais elle n’a pas su se débarrasser d’un passé qui lui colle encore à la peau et à l’âme, avec la silhouette effrayante d’un individu qu’elle surnomme « Le Monstre ». Hannah et Imogen vont se rencontrer au hasard d’une interview, mais lorsque l’on découvre la dépouille du « Monstre », Hannah ne va pas pouvoir s’empêcher de penser qu’Imogen est innocente.
Ce livre de Sif Sigmarsdóttir s’adresse en priorité à la jeunesse, mais à sa lecture, il est étonnant de voir à quel point l’intrigue, l’écriture et l’ambiance peuvent sans le moindre mal intéresser des personnes bien plus âgées. Ce roman, assez copieux du point de vue de la taille, est un véritable festin. Choral, alternant les points de vue d’Imogen et d’Hannah, il séduit aussitôt avec une construction qui évite la linéarité et où s’emboîtent des extraits de messages Instagram rédigés par notre influenceuse. L’histoire est captivante, faisant graduellement remonter cet événement traumatisant pour Imogen – une tentative de viol, au point de faire de la jeune femme une suspecte idéale. S’y mêleront d’autres pistes comme celle de l’espionnage ou la compétition logistique à propos de techniques de marketing. Dans le même temps, les éléments de l’arrière-plan sont très intéressants, depuis les relations entre Hannah et sa famille aux méthodes – éhontées – employées par la firme qui l’emploie pour trouver des chalands, en passant par les descriptions bien senties et atypiques de l’Islande et les sentiments de doute accompagnant Imogen dans sa quête de notoriété, avec les désillusions psychologiques et autres leurres qui l’accompagnent. L’histoire a en outre le grand mérite de s’achever de manière inattendue, avec la révélation de l’identité de l’assassin qui n’intervient que dans les dernières pages.
Un opus particulièrement prenant et réussi, qui parviendra sans mal à rallier l’attention des jeunes et moins jeunes lecteurs. Au final, son seul véritable défaut pourrait être son titre français, trop éloigné de sa version originale, The Sharp Edge of a Snowflake, dont la signification, hautement symbolique, est explicitée dès le début. On peut penser que l’éditeur a voulu faire penser à La Fille qui rêvait d’un bidon d’essence et d’une allumette du regretté Stieg Larsson alors que cet ouvrage, d’une très grande qualité, n’avait pas besoin de ces ressorts purement mercantiles.15/07/2021 à 08:25 2