El Marco Modérateur

3321 votes

  • Chien jaune

    Hubert, Etienne Le Roux

    8/10 Pékin, été 1943. Le second lieutenant Matthew Hayward sauve un chien de ses bourreaux contre 150 yuans, et il le surnomme aussitôt Lemon. Mais une émeute immense va venir semer le chaos dans la ville, et l’occupant japonais va démontrer toute l’étendue de sa cruauté, ce qui va bouleverser Hayward avant de faire de lui l’une des victimes de ces soldats barbares. Un opus bien plus sombre et marquant que les précédents à mes yeux, où Hayward va être rabaissé au rang de chien – beau parallèle avec Lemon, avec des scènes de « dressage » sacrément fortes et mémorables, et d’une violence exacerbée, ce qui n’empêche nullement une certaine forme de poésie. Dans la série, ma BD préférée, même s’il me reste encore la dernière à lire.

    12/08/2021 à 23:19 1

  • La Pierre de destinée

    Jean-Luc Istin, Jacques Lamontagne

    7/10 Taran est sauvé par des créatures féériques. Des moines perdus dans la brume, une apparition d’une fausse Vierge Marie, les encagoulés qui échangent des messages via des morceaux de bois laissés au gré d’une rivière, des Vikings, etc. Même si l’intrigue aurait peut-être mérité d’être resserrée au lieu de s’allonger sur les neuf volumes que compte la série (cet opus est le cinquième), la dynamique demeure bonne, avec son lot d’informations distillées et de rebondissements, et se conclut sur la révélation de l’identité de l’un des moines cagoulés.

    11/08/2021 à 23:27 1

  • On a volé les millions de la Loterie Nationale

    Marcel Priollet

    5/10 16 mars 1936. Le capitaine Michel Delpereaux est un vétéran, amputé du bras droit et le bassin broyé, et il n’a dû son salut qu’à des chirurgiens fort habiles. Mais voilà, le soldat émérite, homme loyal et au-dessus de tout soupçon, vient de disparaître avec l’argent de la Loterie nationale destiné aux Combattants internationaux : cinq millions de francs. L’inspecteur Pessart et ses collègues vont mener l’enquête et tâcher de savoir s’il est un odieux détourneur de fonds ou la victime d’un enlèvement.
    Une nouvelle distractive qui m’a permis de faire la connaissance de l’inspecteur Pessart, sagace et sachant tirer parti de ses collègues et de leur travail plutôt que de mener sa traque intégralement seul. Au programme : des lettres anonymes, une liaison inattendue avec la vedette Grace Thorne, et… bah, dans le fond, c’est à peu près tout. Le ton est agréable, l’histoire bien servie par une écriture efficace, mais l’intrigue n’est guère palpitante : trop peu de pistes et, quand on en vient au dénouement, on se dit « Ah… Ouais… Soit… ». En fait, cette fiction est plaisante, l’histoire part sur des bases intéressantes, mais après, c’est plutôt apathique : aucun rebondissement majeur, un protagoniste modérément marquant, et une chute faible et sentant le réchauffé. Bref, rien d’extraordinaire ni de catastrophique. Tiédasse, quoi.

    10/08/2021 à 23:19 1

  • Trois carrés rouges sur fond noir

    Tonino Benacquista

    8/10 Antoine travaille dans une galerie parisienne spécialisée en art contemporain. Il accroche les œuvres, se fait parfois gardien, mais sa véritable passion, c’est le billard. Quand un cambrioleur vient voler Essai 30, la dernière toile réalisée par un dénommé Etienne Morand, la vie atone d’Antoine tourne au cauchemar : une bagarre s’ensuit et il va perdre sa main droite, tranchée par une sculpture qui lui tombe sur le bras. Adieu le billard. Mais le voleur tenait-il tant à cette peinture ?

    Tonino Benacquista livre ici le deuxième volume de sa quadrilogie consacrée à Antoine Andrieux. Après le milieu ferroviaire dans La Maldonne des sleepings, nous voici dans le monde a priori feutré de l’art contemporain, mais il n’en demeure pas moins que l’on y tue et se venge aussi bien que sur les rails. Avec le ton mordant qu’on lui connaît, l’auteur se fait véritablement plaisir – et réjouit ses lecteurs – avec sa gouaille si particulière, son ironie piquante, et sa verve auréolée d’un humour remarquable. Il tire à boulets rouges sur une certaine forme d’art, ses manipulations, ses escroqueries, ses ambitions démesurées, et son ego disproportionné. Ce sont également tous les individus qui gravitent autour de la peinture moderne qui en prennent pour leur grade, depuis les galeristes jusqu’aux artistes eux-mêmes, en passant par les clients dont la plupart y voient davantage un placement qu’une acquisition coup de cœur. L’intrigue est également très intéressante, et notre Antoine, désormais estropié, va mener sa propre enquête pour comprendre ce que cet Essai 30 peut revêtir de si important, et qui étaient les Objectivistes, ces créateurs du milieu des années 1960 dont le mouvement a semble-t-il explosé en plein vol. Le roman ne compte qu’environ cent-cinquante pages, et aucune n’est de trop. Un véritable régal scénaristique, allègre (les jeux de mots sont attendus mais tordants), et le fait que le protagoniste soit un individu lambda très attachant nous change des traditionnels héros incassables, sans la moindre faille morale, et dont l’issue victorieuse de leur enquête ne fait aucun doute dès l’entame du livre.

    De cette quadrilogie, probablement l’un des meilleurs tomes, entraînant et jouissif d’un bout à l’autre.

    09/08/2021 à 08:17 2

  • Les Pièges du temps

    Maza, Richard D. Nolane

    7/10 Le Visiteur est en train de déchaîner sa puissance, engendrant alors de curieuses répercussions, notamment des phénomènes inexpliqués aux mains de nombreuses personnes, ou l’apparition du spectre de l’officier qui a comploté l’attentat qui a défiguré Hitler. L’extraterrestre parvient à faire bondir sa boule d’énergie deux ans auparavant, enrayant le Débarquement en Normandie (cf. un épisode précédent). Pas mal d’événements issus de tomes antérieurs trouvent une explication, et la série continue à son rythme et son efficacité habituels, à savoir bons.

    08/08/2021 à 08:39

  • La Forteresse invisible

    Grzegorz Rosinski, Jean Van Hamme

    6/10 Toujours en compagnie de Kriss de Valnor, Thorgal se retrouve privé de son cheval et rencontre une vieille femme, Alayin, qui lui raconte une histoire selon laquelle son nom figurerait sur une pierre et il n’y aurait plus qu’à l’effacer pour que les dieux l’oublient. Pas mal d’action, mais surtout l’occasion pour les auteurs de faire basculer notre héros dans un univers parallèle dans lequel il va se rejouer de nombreuses scènes des opus précédents. Mis à part le coup des lettres gravées dans la main à la fin, ça demeure très plaisant sans pour autant apporter quoi que ce soit au fil de la série.

    07/08/2021 à 08:27 2

  • Pour le pire

    Elizabeth Keenan, Greg Wands

    9/10 Paul et Rebecca Campbell. De prime abord, ils forment un couple épanoui et comblé. Cependant, quand deux policiers viennent sonner à leur porte, c’est le début d’un véritable cauchemar, dû à la fois à leurs agissements, mais également parce qu’ils vont être les victimes d’une incroyable machination.

    Sous le pseudonyme d’E. G. Scott, se cachent les auteurs Elizabeth Keenan et Greg Wands, et c’est donc à quatre mains qu’ils ont signé en 2019 ce domestic suspense. Les chapitres alternent les divers points de vue, comme ceux de Paul et de Rebecca, mais également ceux des deux enquêteurs que sont Silvestri et Wolcott, les écrivains poussant le refus de la linéarité jusqu’à préciser par des Avant et Après des scènes se déroulant de part et d’autre de certains événements. De prime abord, le récit est classique : le couple dissimulant certains secrets, dont quelques-uns vont brutalement remonter à la surface. Paul, en époux travaillant dans l’immobilier et à la réputation de coureur de jupons, ainsi que Rebecca, visiteuse médicale ponctionnant régulièrement des échantillons d’opiacés pour sa consommation personnelle, ont mis de côté leur envie d’avoir un enfant au profit de leur grand projet commun qui est d’acquérir leur belle et opulente maison. Mais les couches de vernis vont se fissurer et les drames survenir. Car E. G. Scott a mijoté pas mal de rebondissements et autres twists bienvenus. Des coups du sort, des actions malheureuses certes, mais aussi quelques événements inattendus, brisant le côté téléphoné et si attendu que l’on avait cru percevoir à l’entame de ce roman. Sans rien divulguer, il faut bien avoir à l’esprit que certains passages sont très bien imaginés tandis que le style des auteurs est très intéressant, avec une vraisemblance qui rend d’autant plus efficaces les surprises disséminées principalement dans la seconde partie du livre. D’ailleurs, l’épilogue, pluriel, est en soi un bel exemple de l’imagination des auteurs, qui jamais ne se départissent de leur souci de crédibilité.

    Un très bon roman, prenant et plausible, et qui n’est finalement desservi que par un titre français assez banal et un résumé qui a dû être écrit par quelqu’un qui n’a pas lu l’ouvrage. Un opus très réussi qui distrait tout en posant de justes questions sur la fragilité d’un couple, les sinistres accidents qui peuvent intervenir, le manque de confiance dans l’être aimé, ou encore jusqu’où peut-on avoir foi en lui lorsque les apparences se montrent si néfastes.

    06/08/2021 à 08:17 3

  • Echappe-toi du cimetière

    Fabien Clavel

    8/10 Tu incarnes Alex et tu formes les Escape Geeks aux côtés de Bérénice, Karim, Romain et Yun. Tous les cinq, vous aviez déjà en tête de passer quelque temps au cimetière du Père-Lachaise, mais le Cercle des Fées vous a envoyé un message vous demandant de vous rendre sur place afin de lutter contre la secte Odal. Sur place, une aventure passionnante vous attend.

    De Fabien Clavel, on connaissait déjà les très bons Décollage immédiat et Métro Z entre autres, et voilà qu’il nous revient avec ce livre-jeu basé sur le célèbre jeu Unlock !. Vous y incarnez Alex, et avec les quatre camarades précités, vous vous apprêtez à pénétrer dans un cimetière où il va vous falloir faire preuve de perspicacité et d’observation afin de venir à bout des énigmes proposées. L’auteur a construit son escape game avec beaucoup de talent et d’intelligence, et les nerfs des jeunes lecteurs seront mis à rude épreuve. Il y aura des problèmes mathématiques, d’attention, de logique, etc. Un très agréable cocktail où les spécificités des protagonistes auront leur importance, ainsi que les caractéristiques des objets que vous possédez ou dont vous prendrez possession. Par exemple, il vous sera proposé des interactions entre les personnages et certains outils, mais également la possibilité d’agir prudemment ou rapidement, ce qui aura des incidences sur la suite des événements. Fabien Clavel propose même des moments de pure détente où le lecteur, également acteur, pourra choisir certains comportements particulièrement insolites, et ces derniers donneront lieu à des actions pour le moins absurdes… et cocasses.

    Un très bon livre-jeu, comptant un peu plus de deux-cent-cinquante pages, où il fait bon se perdre, réfléchir et s’amuser. La structure de cet opus est d’ailleurs en soi un régal : on ne sait si on est proche ou pas de la fin, le temps passe sans que l’on s’en rende compte puisque l’on voyage d’une page à une autre parfois fort lointaine, à la manière des casinos où les horloges sont proscrites. Bref, une réussite littéraire et distractive qui donnera envie de se ruer sur l’autre opus de cette collection, Echappe-toi des catacombes.

    05/08/2021 à 08:04

  • L'Épée-soleil

    Grzegorz Rosinski, Jean Van Hamme

    7/10 Délaissant volontairement sa famille, Thorgal erre jusqu’à parvenir sur les terres du seigneur Orgoff que l’on dit invincible grâce à une arme qu’il est allé chercher dans le Soleil. Capturé, réduit en esclavage, il va se confronter à ce guerrier et l’emporter avant de prendre la fuite avant de retrouver une ancienne connaissance… L’action de Shenko, le fils du prisonnier qui a livré Thorgal à ses geôliers, sera décisive dans ce dix-huitième tome classique mais fort efficace. En revanche, je ne comprends toujours pas le titre, ni le fait que l’on mentionne au début de la BD cette fameuse « épée » qui donne son nom à l’ouvrage, dans la mesure où jamais elle n’apparaît, seulement le gant magique d’Orgoff puis l’espèce de pistolet laser qu’il y dissimule.

    04/08/2021 à 17:54 2

  • Memento

    Mathieu Reynès

    7/10 Une jeune femme se retrouve dans ce qui ressemble à une cave, prise en charge par un colosse barbu appelé Nita. Amnésique et sujette à des maux de tête, incapable de comprendre pourquoi elle se trouve là, elle se découvre rapidement des dons de télépathie ainsi que des voix inconnues qui lui parlent. Un premier opus chatoyant, où le graphisme se trouve quelque part entre le cartoon et le particulièrement léché (les expressions faciales d’Harmony sont un régal), tandis que du côté du scénario, on oscille entre l’univers (en plus bienveillant) de Stephen King et des comics traditionnels. Sans renverser la table, voilà qui me donne envie de voir ce qu’il y a dans les tomes suivants.

    03/08/2021 à 23:34 1

  • Higanjima tome 6

    Koji Matsumoto

    6/10 Comme c’était un peu attendu, la scène finale du tome précédent a finalement ici rebondi. Les bagarres continuent de plus belle, même sous la surface de l’eau. Dommage que le résumé officiel soit si bavard et dévoile des éléments de ce tome (qui, en plus, n’apparaissent qu’assez tard), car les créatures effectivement lancées par le maître sont dantesques, à faire passer des mégalodons pour des tilapias anorexiques. Encore beaucoup d’action pour cet opus – presque que ça, d’ailleurs, au point que l’auteur ne s’enquiquine même plus à essayer de proposer autre chose.

    03/08/2021 à 17:45 2

  • Dragon Head tome 9

    Minetaro Mochizuki

    7/10 Un tract découvert par hasard par Teru dans un Tokyo anéanti lui fait comprendre l’étendue des dégâts dans le pays. Il descend dans le métro et s’aperçoit, via une radio, qu’il y a des survivants à la série de cataclysmes, et que les parois sont parcourues de symboles ésotériques. Les raisons de tout ce grand chambardement nous sont enfin offertes, et, même si c’est un peu bavard, c’est assez bien trouvé. Après des opus un peu mous, ou surtout trop éloignés des situations initiales, je reprends goût à cette série et j’ai envie de lire le dernier tome.

    02/08/2021 à 23:31 1

  • L'Ombre de Wewelsburg

    Maza, Richard D. Nolane

    8/10 L’étrange dalle noire récupérée en Antarctique est convoyée dans un sous-marin nazi réagit aux attaques coordonnées d’un destroyer et d’un avion alliés avec l’entremise du Visiteur, pourtant géographiquement très distant. La note extraterrestre apparaît encore davantage avec ce Visiteur (qui semble sacrément de mèche avec Himmler à travers cette réflexion quant à la prothèse d’Hitler, hum hum…). Cette BD se termine sur le début d’un processus paranormal où il est question d’un voyage dans le temps… tandis qu’Hitler commence à disparaître physiquement. Encore du très bon, original et addictif !

    31/07/2021 à 23:27 1

  • La Gardienne des clés

    Grzegorz Rosinski, Jean Van Hamme

    6/10 Volsung de Nichor vient d’être sauvé par une créature qui a pris l’apparence de la maîtresse des clefs, et cette femme lui confie une mission en modifiant son apparence pour qu’il ressemble à Thorgal. Une intrigue (une relecture du thème du sosie et de l’usurpation d’identité, en fait) qui est tout sauf désagréable et plutôt bien rythmée, et des références assez nombreuses à des opus antérieurs, mais l’ensemble ne m’a que moyennement emballé : des moments assez attendus, quelques dialogues superflus, et un dernier quart où l’on bascule dans un registre très différent (le décor glaciaire, les insectes géants, le serpent Nidhogg, les nains, etc.), presque trop différent, qui me laisse l’impression d’un récit déstructuré.

    30/07/2021 à 23:47 2

  • La Ronde des géants

    Jean-Luc Istin, Jacques Lamontagne

    7/10 Le raz-de-marée s’abat sur la ville alors que la Lance de Lug a trouvé un nouveau maître. Après ce carnage, nos protagonistes ne doivent leur survie face à des pirates que grâce à l’intervention d’archers bretons. C’est ensuite vers Stonehenge (on une construction similaire) qu’ils se dirigent. Encore une bonne BD pour cette très bonne série, avec quelques scènes de sexe et un suspense, encore une fois, habilement maintenu sur le final avec une noyade.

    30/07/2021 à 08:20 1

  • Les Monstres de là-bas

    Hubert Ben Kemoun

    8/10 Nelson, dix ans, quitte sa ville de Meckneb afin de passer deux jours chez sa correspondante étrangère, Fubalys, à Brick-City, de l’autre côté de l’estuaire. Mais Nelson repère vite une incongruité anatomique chez la jeune fille, sa mère et son père : ils ont douze doigts. Et il n’est pas au bout de ses surprises…
    Un texte très réussi où Hubert Ben Kemoun joue très habilement sur les ressorts de la surprise, du handicap, de la différence – ici physique – pour mieux nous surprendre et nous sensibiliser, de façon originale, adroite et efficace, sur l’altérité. Même si le final peut être deviné – ce qui a été mon cas, mais ça doit être lié à mon âge, le récit est atypique, presque mémorable à sa façon, fort et, au-delà de la bouffonnerie de surface, réserve une belle leçon quand on réfléchit davantage au message du roman, à l’acceptation d’autrui et au regard que l’on doit poser sur lui… ainsi que sur nous-mêmes.

    29/07/2021 à 08:19 1

  • La Nuit des Armes Miracles

    Maza, Richard D. Nolane

    8/10 Froissés par les Alliés qui ont fabriqué et utilisé des avions capables d’en découdre avec leurs Wunderwaffen, les nazis veulent employer un U-Boot Mistel type XXX, et sa première cible va être un porte-avion au large de l’Australie. Une belle débauche de nouveaux engins, depuis cette navette jusqu’au train blindé en passant par les Panzers VIII. La rencontre tripartite entre le Visiteur, Hitler et Himmler vient clore cet opus où action et progression générale de l’intrigue sont à l’équilibre. Encore un très bon opus à mes yeux.

    28/07/2021 à 17:57 1

  • Louve

    Grzegorz Rosinski, Jean Van Hamme

    7/10 Un opus qui commence de manière très brutale : des fermes brûlées, des propriétaires brutalisés, un malheureux dont la main est tranchée… Thorgal, Aaricia (alors enceinte) et Jolan croisent la route d’un autre bateau et le ton monte. Le reste de la BD se montre assez violent et n’est guère avare en scènes d’action, et le final, en plusieurs temps, me fait notamment penser à certains épilogues de films (« Il était une fois dans l’ouest » par exemple) au niveau de la symbolique. Un tome plein de bruit et de fureur, peut-être même le plus sauvage et dynamique jusqu’à présent selon moi.

    27/07/2021 à 22:58 2

  • Meurtres à Moulinserre

    Renaud Nattiez

    8/10 Pour célébrer son anniversaire, la Castraflore, célèbre cantatrice née sous la plume du créateur de bandes dessinées Hervé, invite ses amis au château de Moulinserre. Tous les personnages sont alors réunis pour cet événement. Fallait-il voir en la mort naturelle de l’arboriste Emile Van Hot puis dans des lettres anonymes de menace de mauvais présages ? Toujours est-il que la chanteuse est retrouvée décédée dans sa salle de bains. Le verdict tombe rapidement : on l’a assassinée. Martin, le détective ainsi que la policière Satisfaction Cantono mènent l’enquête.

    Renaud Nattiez est un « tintinophile », c’est-à-dire un spécialiste de l’œuvre d’Hergé, ayant signé plusieurs ouvrages à ce sujet, et c’est avec appétit que l’on entame ce roman policier, intrigué par ce que l’auteur a pu concocter. Avec une écriture habile, une plume délicieuse et beaucoup d’esprit, il nous prend par la main et nous fait rencontrer des personnages alternatifs, avatars des protagonistes que presque tout le monde a connus en dévorant les aventures de Tintin. Le capitaine Paddock, la Castraflore, le chien Pilou, les Durandt, etc. : une pléthore d’individus que Renaud Nattiez ressuscite avec humanité, respect et intelligence, en conservant leurs caractéristiques et leurs phrasés. Une parodie ? Non : ils ne sont réinterprétés sur un mode bouffon et décalé comme a pu le faire Gordon Zola pour des pastiches endiablés et cocasses. On découvre ainsi l’envers du décor, avec ce côté exquis et joliment ironique de voir ces protagonistes s’ébattre au gré des pages tout en étant conscients qu’ils sont des êtres d’encre, enfantés par Hergé – pardon, Hervé. L’intrigue est très bien conçue, proche des whodunits anglais, et les références à des auteurs comme Agatha Christie, Georges Simenon, Umberto Eco ou encore Fred Vargas ne sont pas innocentes. Le rebondissement final quant à l’identité des assassins, à propos du second meurtre, est très intéressant et bien amené, achevant de faire de cet opus un pur régal.

    Pour tous les fans de Tintin, ce roman est un bonbon. Pour les autres, il constituera un ouvrage atypique et ensorcelant, où Renaud Nattiez s’est servi de sa connaissance parfaite de l’univers d’Hergé pour composer un roman singulier et mémorable, ramenant à la vie les individus qui ont bercé l’enfance de nombre d’entre eux. Et ce sont également près de trois cents pages ponctuées de touches d’humour, de dialogues amusants et de mots d’auteurs, animées d’un bel esprit où l’auteur ne cesse de nous interroger sur des thèmes que sont la créativité littéraire et le positionnement de ces protagonistes dans une histoire où le réel se mêle à l’imaginaire, à moins que ça ne soit l’inverse.

    27/07/2021 à 08:18 1

  • Reikiller

    Laurent Philipparie

    8/10 Un gliome infiltrant du tronc cérébral : voilà de quoi souffre Luna, la fille de cinq ans de Jenny et de Didier. Le couple ne parvient pas à surmonter la douleur de cette maladie qui va, à court terme, mettre fin aux jours de leur enfant. Jenny travaille dans la troupe du Satyre Rieur, un cabaret périgourdin, tandis que Didier est gendarme à la brigade de recherches de Sarlat. Des femmes, allemandes, sont enlevées, et l’on découvre ensuite leurs scalps puis leurs cadavres. Un tueur en série semble être à l’œuvre dans les parages. Dans le même temps, Virginie, la patronne du cabaret, propose à Jenny un pacte insensé : sauver Luna d’une mort certaine grâce au reiki, une méthode de soin controversée venue du Japon. Et si tout était lié ?

    Laurent Philipparie, avec ce seulement troisième roman, nous régale. Commandant de police à Bordeaux, sa reconversion littéraire est une véritable réussite. Grâce à des chapitres courts, une écriture soignée et des personnages enlevés, il n’a aucun mal à saisir l’attention du lecteur, du début à la fin de son histoire. De nombreux éléments viennent se souder à cette intrigue : la Seconde Guerre mondiale et la Résistance, Joséphine Baker, la psychogénéalogie, les vies antérieures, les spectres du passé, le lébérou – créature folklorique du Périgord, ou encore le rapport si particulier de l’Occident à la spiritualité. Les scènes de danse et de spectacle au Satyre Rieur, où l’on peut observer tant la majesté des représentations que l’envers du décor, même si elles ne sont pas de prime abord nécessaires, constituent en soi de pures prodiges artistiques. Le côté policier est très réussi, venant brasser pléthore d’ingrédients pour un résultat final solide alors qu’il aurait pu avoir la saveur ratée des mets composés de trop d’aliments. Un suspense d’une excellente tenue parcouru de scènes très émouvantes, comme celles où apparaît Luna.

    Pas le moindre temps mort dans cet impeccable thriller de Laurent Philipparie. Croisons d’ores et déjà les doigts pour que les opus suivants soient au moins aussi réussis.

    26/07/2021 à 08:20 4