El Marco Modérateur

3227 votes

  • La Bête de Troufignac

    Varoujan Alexanian

    8/10 Le résumé de la quatrième de couverture paraissait certes amusant, mais je ne m’attendais pas à un tel bidonnage ! On passera rapidement sur l’intrigue, certes sympathique et suffisamment solide pour maintenir l’attention, mais le plus intéressant demeure le style et l’allégresse de la plume d’Alex Varoux. De magnifiques tranches de rigolade, avec un duo improbable d’enquêteurs quelque part entre Gaston Lagaffe, des personnages à la Audiard et les Pieds nickelés. Des scènes mémorables, comme lorsque les écoliers sont emmenés au bordel histoire de leur faire découvrir la vie, ou la découverte de l’identité de la soi-disant bête. Pour conclure, rien de vraiment très nouveau sous le soleil de la littérature noire en termes de scénario, mais un tel talent dans le comique qu’on en redemande !

    18/08/2016 à 08:50 5

  • La Rage du dragon

    Alfred, Guillaume Guéraud

    7/10 … ou comment un jardinier massacré par un tyran local et ses trois sbires prend sa revanche grâce à une vieille dame qui lui enseigne le kung-fu. Un petit régal d’humour et d’ixième degré, ponctué de blagues potaches (comment faire pipi quand on a des serpes greffées aux mains, ou la mauvaise haleine de Leung à force de se laver les dents avec les pieds), qui se lit très facilement, avec des illustrations d’Alfred dynamiques et explosives. Une série B littéraire totalement assumée, particulièrement rapide à lire et jouissive.

    09/04/2017 à 08:32

  • Ne la quitte pas du regard

    Claire Allan

    7/10 Eliana Hughes, la trentaine, est infirmière dans un service de soins palliatifs. Elle est également enceinte de sept mois. Sa grossesse, déjà troublée par les maux physiques, est encore compliquée par une série d’événements inquiétants : des messages anonymes mettant en cause la fidélité de son mari Martin, des cailloux jetés à son domicile, des intrusions également. Pourquoi lui en veut-on autant ? Et qui est cette mystérieuse Louise, qui a perdu son enfant, et qui semble pourchasser Eli comme une proie ?

    Claire Allan signe ici un roman à suspense réussi. Se présentant sous la forme d’un récit choral, l’auteure nous livre les points de vue d’Eli, de cette énigmatique Louise qui a vécu une grossesse tragique en perdant son bébé ainsi que son utérus, puis celui d’Angela, la mère d’Eli. Avec une langue simple mais qui agrippe aussitôt le lecteur, Claire Allan pose calmement le décor de son intrigue, avec une belle économie de mots et de moyens, rendant l’ensemble d’autant plus crédible, et de fait inquiétant. Louise va-t-elle chercher à enlever Eli ? Seulement son enfant à venir ? Nuire à son couple ? Chercher à la rendre folle ? Autant de questions qui ne trouveront leurs réponses que dans le dernier tiers de l’ouvrage, et ce dénouement s’avèrera aussi plausible et élémentaire que ne l’aura été l’ensemble du livre. Trop, peut-être : certains pourront éventuellement reprocher à l’auteure de ne pas les avoir gratifiés d’un rebondissement supplémentaire, une sorte de bouquet final venant clore le terrible chemin de croix de la protagoniste. Car si la résolution remplit amplement les attentes, il en va de la littérature comme de la gastronomie : après une telle entrée en matière et un suspense aussi tendu, nous n’aurions rien eu contre une portion plus solide de tension ou un twist supplémentaire.

    Un bon domestic suspense, adroit et vraisemblable d’un bout à l’autre, efficace et prenant.

    30/10/2023 à 08:11 3

  • Prenez garde aux petites filles

    Michael Allegretto

    7/10 … ou comment le détective privé Jacob Lomax doit enquêter sur l’accident de voiture survenu à Phillip Townsend et au cours duquel il a perdu la vie. Rapidement, Lomax va être confronté à de nombreux personnages : la veuve, le gestionnaire, une escort-girl, un professeur de cinématographie, des maîtres-chanteurs, etc. Une investigation qui va rapidement devenir très épineuse quand il découvre une vidéocassette le mettant en scène en train de violer une gamine. Sur le fond, Michael Allegretto ne révolutionne pas les codes : un limier prompt à distribuer des coups de poing, des individus tous aussi suspects les uns que les autres, et un chantage assez simple. Mais dans la forme, c’est un véritable régal. Beaucoup d’humour, des descriptions croustillantes, des réparties qui font mouche. L’intrigue en soi n’est pas inoubliable : pas de réels rebondissements, mais plutôt une mécanique très bien huilée, habile et efficace, qui mène le lecteur de la première à la dernière page sans le moindre temps mort, et avec de nombreuses crampes aux zygomatiques. Un délicieux roman noir, humble et prenant, qui donne envie de lire d’autres opus de Michael Allegretto.

    18/04/2018 à 17:25 4

  • Olena

    Christophe Alliel, Aurélien Ducoudray

    7/10 Une BD qui a un cadre et un sujet originaux, voilà de quoi me plaire. Un graphisme agréable et un traitement intéressant avec quelques scènes inattendues (la séquestration chez le néonazi et sa famille), pour un « héros », Bogdan, qui va prendre une envergure toute particulière, et bien à son corps défendant, lors de ces émeutes. Un opus qui s’achève en pleine action et qui donne vraiment envie d’en connaître la suite.

    30/04/2020 à 16:02 1

  • L'instinct de la meute

    Doug Allyn

    9/10 Doug Allyn est un écrivain de premier ordre. Avec ses histoires brillantes, ses protagonistes si denses et son sens inouï pour magnifier l’espèce canine, il se singularise avec une élégance et un panache ahurissants. Ayant écrit peu de livres, les occasions de pénétrer son univers si original sont si rares qu’elles ne peuvent être manquées.

    22/09/2013 à 18:24 1

  • Sombres créatures

    Doug Allyn

    9/10 Un labrador torturé et marqué au fer rouge d’une croix gammée. Un chat reconstitué et ayant l’apparence de la créature de Frankenstein. Un chien écrasé aux abords d’une route où semblent se dérouler d’étranges commerces. Au total, huit courts récits où il est question d’animaux, avec comme personnage central le docteur David Westbrook, vétérinaire dans le comté d’Algoma, Michigan.

    Avec ce recueil de nouvelles, Doug Allyn a obtenu de nombreux prix. Ces histoires, très variées, sont emplies d’une profonde poésie et d’une grande richesse littéraire. Les chiens constituent le fil rouge de ces récits, à part celui intitulé « Les Plages du Paraguay ». Proies, victimes de la barbarie des hommes, monstres éduqués pour combattre leurs congénères, ces animaux remplissent également une fonction métaphorique, puisqu’ils sont souvent bien moins féroces que leurs maîtres. Avec comme protagoniste David Westbrook, ancien détenu et homme de cœur, Doug Allyn a créé un univers bien à lui, à la fois extrêmement lyrique et très cruel, peuplé de personnages retors, où se déclinent des complots épouvantables et des sentiments nauséabonds. Et par-delà ces qualités scénaristiques, où le lecteur avale avec entrain ces nouvelles, l’auteur multiplie les morales, de manière juste mais jamais naïves ou trop démonstratives, où l’animal devient souvent le miroir de nos propres errements.

    Brillant et atypique, ce recueil est un ouvrage d’une immense sensibilité en plus d’être singulier. On a hâte de retrouver ces qualités dans le roman L’Instinct de la meute.

    06/04/2013 à 17:48

  • Meg : En Eaux Troubles

    Steve Alten

    7/10 … ou comment le paléontologue Jonas Taylor (étonnant détail : sur la quatrième de couverture du livre de poche que j’ai, chez Pocket, il est appelé Jonas Scripps) en vient à combattre la plus impitoyable machine animale à tuer jamais créée, le Megalodon, le requin venant tout droit de la préhistoire. Définitivement, comme l’a écrit Fredo, une passerelle entre les œuvres de Peter Benchley et du duo Preston/Child. Un sens de l’écriture dynamique, un style visuel qui préserve néanmoins juste ce qu’il faut de psychologie pour rendre les personnages suffisamment entiers et denses pour ne pas être de simples caricatures (même si l’approfondissement de l’âme humaine n’est pas l’apanage de ce type de littérature), des chapitres courts, parfois même séparés entre les divers points de vue des protagonistes, pour un roman efficace. Pas étonnant qu’il ait fait l’objet d’une adaptation cinématographique, même longtemps après sa sortie en librairie. L’ensemble est étudié, charpenté, prenant appui sur de réelles notions zoologiques, techniques et autres, et n’est donc pas un prétexte pour agiter ce prédateur monstrueux sans offrir au lecteur ce qu’il faut de renseignements scientifiques. J’ai beaucoup aimé certains passages, efficients, comme la boucherie avec le baleinier japonais, l’attaque des surfeurs, ou des détails, mais qui m’ont marqué par leur intelligence, comme la façon dont la femelle Megalodon parvient à franchir les eaux froides et remonter vers des flots plus fournis en chair humaine (oui, vraiment un détail, mais je suis presque persuadé que je vais me souvenir longtemps de cette astuce scénaristique qui, à mes humbles oreilles d’individu lambda qui n’y connaît strictement rien à la plongée, m’a paru plausible tout en étant futée). J’ai moins apprécié quelques clichés à propos de certains personnages (notamment chez les journalistes, avides de sensations fortes à offrir à leurs téléspectateurs, au point de se jeter dans la gueule du loup… pardon, du requin. Et si je reconnais bien volontiers l’originalité des dernières scènes entre Jonas et le Megalodon, cinématographique et originale, je l’ai trouvée trop tirée par les cheveux, au point de perdre en crédibilité, et de trop s’arcbouter sur un symbolisme appuyé (Jonas et l’épisode de la baleine, cela paraissait tellement gros que c’est finalement arrivé, sa claustrophobie poussée à son paroxysme, etc.). Bref, même s’il y a des clichés et les écueils presque inhérents à ce type de récits, je ne vais pas mentir et renier le plaisir que j’ai ressenti à la lecture de cet ouvrage, lu il y a trop longtemps pour pouvoir en parler, et relu dernièrement. Les Dents de la mer, à côté, c’est une sardine se débattant dans un lavabo, tant du point de vue de l’échelle des bestioles respectives que des diverses victimes, de l’ampleur de ce roman, de l’action décrite, ou des sentiments que j’ai éprouvés. Typiquement de la littérature de gare dans ce que cette expression a, à mes yeux, toujours eu de positif et non de bêtement dévalorisant : un bon moment de décontraction, du temps passé sans m’en être rendu compte, avec à la clef des infos intéressantes sur le milieu marin et les requins en général.

    19/05/2019 à 17:47 2

  • Tu n'as jamais été vraiment là

    Jonathan Ames

    9/10 Joe est une armoire à glace. On pourrait même dire avec plusieurs glaces tant il a su galvaniser sa carrure par des exercices physiques quotidiens. Ancien Marine, ex-agent du FBI, il travaille désormais pour McCleary, autrefois policier, pour des coups de force. Récemment, c’est le sénateur Votto qui vient de lui demander de retrouver sa jeune fille, retenue prisonnière par des hommes qui abusent d’elle. Sur le papier, rien d’impossible pour Joe. Mais dans les faits, il arrive que l’imprévisible se produise…

    Quatre-vingt-trois pages, pas une de plus. Une nouvelle ? Pas vraiment. Plutôt un très court ouvrage. Trop court ? Non. Parce qu’en si peu de mots, Jonathan Ames rend son récit encore plus électrique. Un roman de prime abord assez simpliste : le malabar au passé trouble, la mission périlleuse qui exige en priorité ses muscles, la trahison et le carnage final. Mais l’auteur se joue avec maestria de ces codes. Joe est un personnage bien plus complexe. Il a vécu dans le cauchemar d’un père violent et alcoolique. Il vit désormais avec sa mère qu’il vénère et dont il sait qu’elle ne va pas tarder à sombrer dans une sénilité grandissante. Il a quitté les rangs du FBI après avoir ouvert les portes d’un camion où sont mortes étouffées une trentaine de travailleuses chinoises. Cette expérience traumatisante a même remodelé son rapport aux femmes. Il est désormais un remarquable outil de violence, particulièrement malin et sagace, aussi solitaire que capable de ressentir de puissantes amitiés. Ce livre est également un extraordinaire moment d’action, acéré comme il n’est guère permis, où résonne le fracas des armes contondantes (avec une prédilection pour le marteau) et des corps que l’on abat. Se côtoient dans cet opus des politiciens véreux, des mafieux et des policiers corrompus – qui poussent le vice jusqu’à commettre leurs méfaits habillés de leurs uniformes. Ultime coup de massue : les deux dernières pages, où Joe reconstitue l’historique de cette affaire, avec une haute teneur en abjection.

    Un thriller d’une rare densité, noir comme les ténèbres qui hantent autant l’esprit de Joe que celui du commanditaire de l’affaire. Un verre minuscule contenant un alcool d’une exceptionnelle virulence et dont on sent la morsure à chaque étape de son passage, du palais aux tripes.

    05/12/2015 à 11:28 2

  • La Lune d'Omaha

    Jean Amila

    9/10 6 juin 1944. Les forces alliées débarquent en Normandie, et nombre de soldats périssent sur les plages. Dix-neuf ans plus tard, le sergent Reilly, survivant de cette boucherie, est l'un des responsables du cimetière américain. Il doit s'assurer du bon entretien des lieux afin que tous les honneurs soient rendus à ses compatriotes sacrifiés. Dans le même temps, un paysan, Delouis, décède, laissant à son fils un héritage conséquent. Mais un couple se présente, et l'homme dit être également le fils du défunt.

    Écrit en 1964, ce roman brille par sa noirceur et sa concision. Jean Amila, qui rédigera presque vingt ans plus tard Le boucher des Hurlus, manifeste déjà son esprit antimilitariste. Les premières pages, relatant le débarquement du « D-Day », sont particulièrement poignantes, montrant de simples hommes menés à l'abattoir, terrorisés, voyant leurs camarades tomber les uns après les autres. Par la suite, l'intrigue se divise en deux parties distinctes : le sergent Reilly d'un côté, et l'héritage Delouis de l'autre. Le lecteur, dans un premier temps décontenancé car ne voyant pas le rapport entre les deux, verra progressivement un lien apparaître, et les fantômes du passé ressurgir. Car ce roman d'ébène est une réussite : émouvant, crédible, offrant la perspective de simples individus dépassés par les événements auxquels ils ont participé – ou auxquels ils ont été forcés de participer. On découvre dans ce livre, pêle-mêle, des trafics écœurants, de sombres histoires de famille, des rancœurs que l'on croyait éteintes, l'ingratitude des populations sauvées, et au final, d'émouvants fragments de vies déchirées.

    Dans cette œuvre forte, au titre et au final profondément métaphoriques, il y est question de rédemption, de souvenirs, de délivrance. Des sentiments et désirs qui sont parfaitement peints par Jean Amila, s'inspirant de l'Histoire pour créer son histoire. La perpétuelle lutte des minuscules contre les majuscules, à l'image de ce récit, tout aussi marquant que troublant.

    11/10/2010 à 20:14 1

  • Le Boucher des Hurlus

    Jean Amila

    9/10 Ils sont quatre. Quatre enfants privés de leur père respectif, tous fusillés pour l'exemple en 1917 parce que mutins. Quatre enfants honnis par la société, dont les géniteurs font porter sur leurs frêles épaules, depuis leurs tombes, le poids d'un péché originel, celui d'avoir refusé une mort aussi cruelle qu'inutile. Réunis dans une institution où l'on accueille les pauvres bougres de leur genre, ils mettent au point un plan : se faire la belle de leur pension et aller tuer celui que l'on surnomme « le Boucher des Hurlus », à savoir le général responsable du secteur de Perthes-les-Hurlus où ont été exécutés leurs pères. Et quand on a avec soi l'innocence et la fougue de la jeunesse, rien ne semble impossible.

    Le Boucher des Hurlus constitue l'une des œuvres les plus connues de Jean Amila, de son vrai nom Jean Meckert, écrivain dont le propre père fut fusillé suite aux mutineries. Il s'agit d'un roman densément noir, aussi profond que les réflexions engagées par cette histoire qui invoque les démons de l'Histoire. Le lecteur ne pourra que prendre en compassion ce quatuor de gamins aussi émouvants que débrouillards, meurtris par un monde se pliant à une lecture imposée des drames et vomissant ces êtres humains qui ont refusé le carnage stérile. La langue de l'auteur est remarquable, alternant les réflexions mordantes quant à l'humanité et les pensées parfois tonitruantes des mômes dont le discernement et la maturité sont exemplaires. Leurs pérégrinations forcent l'admiration, et leur chasse frôle la quête initiatique, s'ouvrant sur un monde froid et décalé, dans la pleine anomie de l'après-guerre.

    Le Boucher des Hurlus est donc un ouvrage d'une rare acidité, à la fois empreint d'inconvenance et de sagesse, féroce avec l'esprit obtus des adultes et tendre avec l'ingénuité des enfants, brisant les sceaux d'une guerre dite héroïque. Un livre choc qui souligne les incohérences d'une ère qui se voulait débarrassée des horreurs de la guerre tout en vouant aux gémonies ses propres fils. Un opus pour mémoire, en somme.

    17/02/2010 à 14:06 6

  • Noces de soufre

    Jean Amila

    7/10 … ou comment la jeune Annette, jeune mère de famille et épouse d’un simple employé de banque, apprend brutalement que ce dernier est mort dans un accident de voiture après avoir dérobé plus de cent millions de francs anciens. Elle en vient cependant à se demander s’il n’y a pas une autre magouille sous cette apparence si simple et commode d’accident, d’autant que la plupart des billets n’ont pas fini en cendres lors de l’incendie du véhicule. Une manipulation, peut-être ? Et si ce tour de passe-passe était en plus orchestré par la police ? De Jean Amila, j’ai déjà lu « Le Boucher des Hurlus » ainsi que « La Lune d’Omaha », qui m’avaient tous deux ravis. Ici, il s’agit d’un autre ouvrage noir, à l’ancienne, nécessairement daté (il remonte à 1964), notamment dans ses dialogues et dans le vocabulaire employé. Je me suis immédiatement laissé saisir par l’intrigue (il faut dire qu’il n’y a pas le moindre temps mort, et que l’intrigue s’amorce vraiment dès la première page). Un scénario serré, assez classique par certains aspects, avec des personnages croquignolets (notamment chez les policiers, avec un Lentraille plus complexe que de prime abord, à la fois sauvage quand il s’agit de faire succomber les dames, parfois atone) et des dialogues souvent croustillants (il y a notamment un passage où deux expressions issues directement du film « Les Tontons flingueurs », sorti l’année précédente). Pas mal de rebondissements, une manipulation qui s’avère au final presque familière et classique (même si elle n’apparaît que dans l’ultime partie de l’ouvrage), pour un opus qui laisse surtout la part belle aux peintures psychologiques des uns et des autres, avec cependant un épilogue surprenant, d’autant plus percutant qu’il intervient factuellement dans les vingt dernières lignes avant le tomber de rideau. Peut-être rien d’exceptionnel ni de définitivement mémorable, mais un bon moment de lecture, délassant et prenant, ce qui est déjà amplement suffisant.

    12/10/2020 à 17:44 3

  • Survivor's Club tome 1

    Anajiro, Aoisei

    8/10 Collège Shiroiwa : les sept survivants de l’explosion d’une bombe se réunissent trois ans après la tragédie. L’œuvre d’un terroriste ? Non : la vengeance d’un élève constamment harcelé, Hijiri Nakagoshi, qui s’est fait sauter en plein cours. Vingt-sept morts, des amputés, des blessés. Et si l’un des survivants avait aidé Hijiri en lui fournissant la bombe ? Dans le même temps, la dénommée Serizawa prend sa classe en otage, essayant ainsi de faire le procès de ses harceleurs.
    Une esthétique classique mais très efficace, un ton sacrément dur (les scènes de l’empilement des prothèses sur la table et du carnage après la déflagration sont mémorables), où l’enquête sur l’acte passé et l’actuel, en cours, s’entremêlent à merveille, avec une évidente dénonciation du harcèlement et de ses conséquences. C’est brut, fort et intelligent.

    04/05/2023 à 20:01 1

  • Survivor's club tome 2

    Anajiro, Aoisei

    8/10 Serizawa continue son procès du harcèlement autant que le petit jeu de carnage entre les otages tandis que les survivants du drame ayant eu lieu trois ans auparavant poursuivent leur enquête. Pas le moindre temps mort, une tension constante, des images puissantes des mutilations post-explosion comme autant de marque-pages mémorables, et une véritable intelligence dans le scénario. Je vais tâcher de me procurer le troisième et dernier tome de cette très bonne série.

    09/08/2023 à 18:01 1

  • Survivor's club tome 3

    Anajiro, Aoisei

    8/10 … ou comment un simple vol à l’étalage peut prendre d’énormes propensions, autant le début d’un harcèlement scolaire pour celui qui l’a commis qu’une amitié durable avec sa dénonciatrice. Une entame intelligente et maîtrisée pour ce troisième et dernier tome de la série. Un opus dont la – relative – violence fait intelligemment écho aux drames voire aux tragédies vécues par les proies des intimidateurs qui « s’amusent » à pressurer et brutaliser les faibles ainsi que les individus différents. Les réponses sont toutes présentes, l’aspect policier n’est pas négligé, et quelques ressorts scénaristiques sont habilement trouvés. Globalement, un très bon tome autant qu’une très bonne série.

    28/01/2024 à 17:58 2

  • Les pendus de la forêt de Mormal

    Mylène André

    8/10 Un cadavre découvert dans un relais de chasse par un enfant, et c'est tout un univers qui implose. Rancœurs, coupables trop évidents, sanctions judiciaires injustifiées, criminels en fuite... Il faudra au commissaire Lesauvage déployer des trésors de sagacité pour découvrir l'épicentre du drame.

    Premier roman de Mylène André, Les pendus de la forêt de Mormal constitue une remarquable entrée de la part de son auteur dans les jardins de la littérature policière. L'intrigue est prenante, et les rebondissements s'enchaînent sur la fin à une vitesse soutenue. Les chapitres courts alternent avec bonheur, offrant de multiples points de vue sur l'enquête, et l'on découvre une intéressante palette de protagonistes. Le commissaire Lesauvage est, à cet égard, un personnage attachant que l'on aimerait recroiser dans d'autres ouvrages de Mylène André : séducteur en diable grâce à un physique irrésistible, grand fumeur de joints, il détonne dans un domaine où beaucoup d'écrivains se plaisent à imaginer des personnages parfaits et lisses jusqu'à l'écœurement. Les lieux sont intelligemment décrits, et la plume de l'auteur rend honneur à la région de son enfance. D'ailleurs, s'il y a bien une qualité, parmi tant d'autres, qui mérite d'être célébrée, c'est la langue de Mylène André. Les dialogues sont assez rares, et ce fait est admirablement compensé par des descriptions géographiques et psychologiques de grande qualité. À chaque paragraphe, le lecteur gourmand de belles lettres découvrira des formules pertinentes, des expressions qui font mouche et des mots touchants.

    Les pendus de la forêt de Mormal est donc une réussite indéniable qui doit tout autant à l'histoire qu'au verbe qui la porte. Il n'y a plus qu'à espérer d'autres livres de cette tenue de la part de Mylène André.

    15/06/2011 à 17:42

  • L'Objet

    Andreas

    5/10 Un dirigeable complètement vide qui s’abat sur New York, une bibliothèque qui s’embrase, des visages de SDF verdis par une matière inconnue : bien d’étranges phénomènes qui accompagnent l’arrivée à New York de Capricorne. J’ai trouvé l’ensemble un peu confus, le graphisme pas spécialement affriolant, et certains éléments de l’intrigue (le dirigeable qui s’effondre dans une ville immense sans que ça n’alerte personne, les anciens tunnels creusés par les Indiens, la base souterraine secrète, etc.) beaucoup trop tirés par les cheveux. Peut-être que les tomes suivants viendront apporter du liant à tout cela, mais en plus d’avoir trouvé le héros Capricorne sans aura ni charisme particuliers (et le fait qu’il est astrologue n’apporte rien à l’intrigue), je ne suis pas spécialement pressé de passer à la suite.

    04/05/2020 à 16:34 1

  • La Chasse à l'ogre

    Michael Angelella

    9/10 Une implacable traque dans les années 1920-1930. D’un côté, Albert Fish, tueur en série particulièrement dément. Pédophile, coprophage, adepte du sadomasochisme, coprophile, s’automutilant (il s’est placé des tampons imbibés d’essence dans le fondement avant d’y mettre feu, ainsi que des aiguilles dans le bassin détérioré par une enfance douloureuse et une relation douteuse avec la religion. De l’autre, Will King, policier sagace et pugnace, prêt à tous les engagements dangereux, quitte à mentir sur son âge à plusieurs reprises pour s’enrôler dans l’armée au nom de sa preuse vision de la justice. Une intrigue qui se dévore plus qu’elle ne se lit, sans scène choc, fusillade, course poursuite ou autre pyrotechnie purement littéraire. Juste une chasse à l’homme crédible, s’appuyant sur la quête des bons indices, des témoignages, des recoupements. Un roman noir à la fois vertigineux et désarçonnant, aussi brutal dans les descriptions objectives des travers du monstre qu’habile et intelligent dans l’écriture employée. Et le plus innommable dans tout cela, c’est qu’Albert Fish a réellement existé, et que Robert Angelella n’a fait « que » retranscrire son histoire. J’en referme à l’instant l’ultime page, mais les frissons et la fièvre d’une telle lecture dérangeante ne sont pas prêts de me quitter. Je ne peux que vous conseiller d’aller lire sur le web ou ailleurs la biographie de Fish, parce que les croquemitaines de la réalité sont bien plus cruels, incroyables et barbares que ceux de la littérature. Un coup de cœur intégral pour ce livre inouï !

    23/05/2017 à 18:45 6

  • Le Livre sans nom

    Anonyme

    8/10 Une histoire complètement barrée, de bout en bout, et un véritable festin ! Je ne me suis pas ennuyé un seul instant, et j’ai adoré cet enfilement de références cinématographiques, comme d’autres adorent enfiler des perles. De l’humour, de la violence, du surnaturel, et surtout, un auteur qui plane très haut dans la stratosphère. Un récit décomplexé, déjanté comme ça n’est guère permis, et qui distrait sacrément !

    25/06/2016 à 12:28 1

  • Escape book - Le Piège de Moriarty

    Stéphane Anquetil

    5/10 Le principe des escape books, je ne les connaissais que de nom, et ce premier ouvrage constitue donc une première. D’entrée de jeu, j’ai été partant pour me lancer dans l’aventure, résoudre toutes les énigmes posées, progresser dans l’antre de Moriarty, en plus d’avoir donc en toile de fond l’univers de Sherlock Holmes. Des problèmes sympathiques et très variés, des ambiances habilement posées, des illustrations efficaces et séduisantes. Pourtant, à l’arrivée, je suis dubitatif, pour ne pas dire déçu. Car ce qui m’a beaucoup gêné, c’est la quasi absence d’arborescence, de pistes et autres zigzags qui me semblaient nécessaires à ce type de livre-jeu. Ici, tout m’a semblé fort linéaire, unilatéral, avec des obstacles posés que l’on n’a même pas besoin de démêler pour progresser. Pas de renvois à d’ultérieurs numéros de page en fonction des résultats de vos calculs et réflexions, pas de réelle avancée rendue personnelle par nos propres déductions. Mis à part quelques renvois vers la fin de l’opus pour des renseignements complémentaires, je me suis senti sacrément floué de n’avoir été que le quasi spectateur de cette quête et non l’acteur, malgré les indications présentes à partir de la page 172. Jamais je ne me suis vraiment approprié le concept et les enquêtes. Probablement est-ce de ma faute, j’en porte nécessairement une part de culpabilité, peut-être m’attendais-je trop à un jeu du style « Le livre dont vous êtes le héros », mais je trouve que la conception de ce livre n’est pas suffisamment réfléchie et « ouverte », au point d’avoir atteint l’épilogue sans jamais en avoir été, à un seul instant, le réel protagoniste.

    10/09/2018 à 17:26 3