El Marco Modérateur

3404 votes

  • Black-Box tome 3

    Tsutomu Takahashi

    8/10 Ryoga est hanté par l’idée qu’il a tué quelqu’un tandis qu’il continue à se préparer, au moins psychologiquement (cf. la scène de la séquestration volontaire dans le noir). Il apparaît voûté et affaibli lors de la conférence de presse d’avant match avec Shidoh mais sa dernière répartie laisse entendre qu’il est déterminé et prêt à combattre. De beaux moments de tension juste avant l’affrontement (avec Nozomi, la compagne de Shidoh, dont Ryoga arrache les vêtements) et un combat qui commence comme une boucherie où Ryoga se fait littéralement massacrer, mais on se doute qu’il a un plan en tête. Une esthétique toujours aussi sublime, toute en fureur, en nuances et en puissance, qui s’illustre jusqu’à la fin de ce troisième tome, inachevé, où les boxeurs finissent par s’envoyer… des crachats.

    07/12/2022 à 18:58 1

  • Sarah

    David Munoz, Tirso

    7/10 Tchécoslovaquie, 1949. La Fondation Broemel vient de recueillir Sarah dont, dixit l’une des médecins, les parents ont été tués par un virus créé et propagé par les nazis, mais les mystères s’enchaînent dans cette demeure aux allures de tombeau géant… Une BD à l’esthétique très particulière, presque bon enfant (tant dans les traits que les coloris), mais l’ambiance demeure lourde et anxiogène, ménageant quelques pistes et rebondissements plutôt bienvenus (la présence des autres enfants, les transformations en monstres, la voix entendue par la gamine, etc.). Même si, à ce stade de la série, je n’ai rien trouvé de très novateur, ça demeure sacrément agréable à suivre, d’autant que le final doit (j’imagine) permettre de basculer sur le tome suivant avec aisance.

    07/12/2022 à 16:31 3

  • Prison School 006

    Akira Hiramoto

    2/10 André se rue sur la vice-présidente au point d’en arracher les barbelés qui les séparent, ce que la dominatrice prend pour une tentative d’évasion : ça n’était rien de moins qu’un piège. Là, on a basculé définitivement dans le porno soft, avec poitrine qui se gonfle et sexe féminin apparent histoire d’appâter ce bon gros nigaud dans le traquenard. Le reste est à l’avenant : on est carrément dans le libidineux et je ne trouve toujours aucun intérêt à cette série, malgré un graphisme qui est tout sauf mauvais, bien au contraire. Arrêt probablement définitif en ce qui me concerne.

    05/12/2022 à 18:23

  • Chez les espions

    Tristan Pichard

    6/10 Vous incarnez l’agent spécial Vert dans cet escape game, et un certain nombre de missions s’offrent à vous : retrouver La Jonconde, battre des robots, parcourir la jungle, la banquise, le laboratoire d’un savant fou, l’Île de Tarantula, un labyrinthe, et démasquer une taupe. Des exercices de pure observation, assez simples puisque destinés à de jeunes lecteurs, avec quelques codes à décrypter, des détails à découvrir dans le décor, des mots à compléter, des erreurs à repérer, des dessins à reconstituer, etc. De gentilles petites touches d’humour tout au long de ces épreuves certes de facture classique mais agréables à résoudre, à conseiller évidemment en priorité aux enfants en raison de leur accessibilité et de la facilité à les démêler. Un livre d’énigmes sympathique, pas mémorable néanmoins.

    05/12/2022 à 18:22

  • En manque

    Jacques Expert

    2/10 La confession d’un tueur en série confiné chez lui en pleine période de coronavirus. Pour passer le temps, il nous fait visiter son petit appartement en ayant une attention toute particulière pour les chiffres et les nombres. Dix-neuf victimes à son actif et il aurait bien voulu pouvoir continuer encore un peu…
    Une nouvelle particulièrement courte mais à laquelle je n’ai pas du tout accroché. De l’humour, mais à mes yeux, ni drôle ni de bon goût. Ça m’a fait mal au cœur de voir un auteur si réputé s’embourber dans des blagues aussi mauvaises, basses du front et plates comme une table. Aucune originalité dans le portrait de cet égorgeur en série, ni du point de vue psychologique ni dans celui du modus operandi. J’en finis même par me demander quel pouvait bien être l’objectif de Jacques Expert. Nous divertir ? En ce qui me concerne, c’est raté. Nous faire rire ? Raté. Nous faire réfléchir ? Raté. Être atypique ? Raté. Nous surprendre ? Le final est si téléphoné que ça en devient gênant. Nous impressionner, nous émouvoir, nous procurer des sensations fortes, même a minima en raison de la concision du texte ? Raté. Alors, comment est cette nouvelle ? Tout bonnement ratée.

    04/12/2022 à 18:14 6

  • La Dame en rouge 2/2

    Jenny, Patricia Lyfoung

    6/10 Les soupçons pèsent à présent sur Camille, la duchesse, que l’on vient de retrouver au-dessus de Marine qui a deux trous rouges au cou, mais la probable criminelle parvient à s’enfuir. Au programme : vindicte populaire, tentative de lynchage, humour et romance ainsi qu’une lecture très scolaire et attendue du mythe des suceurs de sang, mais à défaut d’être mémorable ou de se jouer des codes attendus, ça reste tout à fait correct à lire.

    30/11/2022 à 13:26

  • La Dame en rouge 1/2

    Jenny, Patricia Lyfoung

    7/10 Maud et Guilhem sont invités au mariage d’une amie d’enfance de la jeune femme. Sur place, quelque chose terrorise les habitants en s’en prenant aux animaux qu’elle vide de leur sang : un vampire aux yeux rouges. Un mélange toujours aussi agréable d’aventure, de mystère, d’humour et de fantastique (ici avec cette créature laissant des dépouilles animales exsangues dans son sillage, avec deux trous rouges au cou, sauf à la dernière planche où c’est un être humain qui est sa victime). Ce n’est pas particulièrement original mais c’est efficace et entraînant.

    30/11/2022 à 13:24

  • Où es-tu ?

    Patricia Lyfoung

    5/10 Comme l’indique explicitement le tome de ce huitième tome, Maud se demande où est passé Guilhem qui l’a abandonnée au pied de l’autel pour leur mariage. On retrouve le disparu aux côtés de Natalia, l’avatar customisé de Maud (habillée un peu comme elle, façon superhéros) en train de bastonner des moines. Un final en Pologne auprès des représentants de l’Ordre teutonique dans un château, avec infiltration, incendie et autres péripéties attendues (et convenues). Une série qui se met à ronronner, je trouve. Je vais faire une pause en espérant que les tomes suivants seront davantage inspirés.

    30/11/2022 à 13:23

  • Sakamoto Days tome 1

    Yuto Suzuki

    7/10 Taro Sakamoto était considéré comme le meilleur et le plus redouté des tueurs à gages, sauf qu’un jour… patatras ! Amour, retraite, mariage, enfant et surpoids ! La béchamel infernale. Il tient désormais une épicerie mais il est repéré par Shin, un jeune tueur à gages, capable de lire dans les pensées, qui doit le supprimer. Un ton volontairement décalé (Taro parvient tout de même à détourner une balle avec un Ricola !) pour un héros également loufoque même s’il n’a rien perdu de ses aptitudes au combat. Vraiment plaisante, cette découverte.

    30/11/2022 à 13:20

  • Le Radium du professeur Allan Gordon

    José Moselli

    6/10 Lors d’une conférence, l’éminent professeur Allan Gordon doit livrer le fruit de ses dernières recherches quant au radium. Il vient avec 6 grammes de cet élément (ce qui représente cent cinquante mille dollars tout de même) qu’une assistance couve alors avec appétit, mais la précieuse marchandise disparaît. Sauf l’enjeu de ce vol diverge peut-être du simple mobile de la convoitise…
    Une nouvelle sympathique et bien menée, sans temps mort, avec une piste inattendue quant à cette morsure de serpent et de chantage. Plaisant, avec un petit tour de passe-passe autour de l’emplacement du fameux radium. Pas inoubliable non plus, mais agréable.

    30/11/2022 à 13:18 1

  • Tu seras toujours à moi

    Patricia Lyfoung

    4/10 Préparatifs du mariage et actions justicières pour nos deux héros masqués. Badinages, bavardages et autres « Je t’aime, moi non plus » jusqu’à la quarantième planche environ, ce qui fait que le temps m’a paru extrêmement long. Seul le final, où Maud est seule au pied de l’autel, pourra éventuellement me marquer, mais à mes yeux, c’est un tome très mou et sans grande inspiration où l’auteure/dessinatrice semble s’essouffler.

    28/11/2022 à 16:54

  • L'Ermite de Skellingar

    Fred Vignaux, Yann

    8/10 Quelqu’un essaie de poignarder Thorgal durant la nuit, et notre héros se rend compte qu’il s’agit d’une belle femme qu’il avait vue précédemment sur le port. Elle cherchait à se venger de Thorgal du temps où il était devenu le terrible Shaïgan. Thorgal retourne alors à Skellingar afin de sceller son passé. Expédition, visions d’une pythie, naufrage d’un bateau, ascension d’une falaise, oiseaux agressifs, expérience chamanique : un opus sacrément dense et à l’esthétique toujours aussi délicieuse. Un régal.

    26/11/2022 à 09:29

  • Les Lamentations du coyote

    Gabino Iglesias

    9/10 La frontera, entre le Mexique et les Etats-Unis. Une sorte no man’s land où rôdent des individus oscillant entre l’espoir de rejoindre le territoire américain et celui de survivre aux monstres qui y vivent. Les sirènes d’un avenir enfin meilleur, mais avant cela, il va falloir franchir cette frontière qui ressemble davantage au Styx qu’au Rubicon.

    Si Gabino Iglesias nous avait déçus avec son Santa Muerte, il n’en est rien avec ces Lamentations du coyote qui est indéniablement un pur bijou de noirceur. Un roman choral où alternent les points de vue sur cette démarcation purement administrative entre les deux pays. Pedrito, un gamin qui a assisté à l’assassinat de son père et qui est fermement décidé à se venger des patrouilleurs. Le coyote, un mercenaire chargé de faire passer des gamins de l’autre côté de la délimitation mexicaine en les esquintant juste ce qu’il faut pour qu’on les prenne en compassion et qu’on leur octroie leur part d’espérance yankee. Alma, une artiste résolue à donner le meilleur d’elle-même, quitte à commettre le pire, pour que l’on se souvienne à jamais de son message de solidarité avec les migrants. Une femme aux prises avec un bébé démoniaque qu’elle porte en elle. Jaime, un repris de justice, qui n’est même pas certain de pouvoir rester longtemps insensible aux appels obsédants de la criminalité. Vous vous imaginiez recevoir des cartes postales signées Gabino Iglesias ? C’est un peu le cas, sauf qu’elles ne proviennent pas d’Acapulco mais de Ciudad Juárez. Vous vous figuriez peut-être des mariachis, des couleurs pastel, des clichés touristiques ? Erreur : tout y est sombre, violent, désespéré, porté par une fièvre qui glace et brûle à la fois. Tous les protagonistes subissent la violence latente, les circonstances terribles, les espoirs déçus, les désirs éconduits. Même les personnages secondaires sont mémorables et féroces, comme ce « Cuisinier de l’enfer », chargé par les mafias locales de faire disparaître les cadavres de leurs victimes et qui va trouver en Pedrito son successeur le plus fervent. Un kaléidoscope saignant et désenchanté, faisant écho aux souffrances et déchirements de ces malheureux qui ne cherchent que leur modique part de bonheur au pays de l’Oncle Sam.

    Un ouvrage puissant et brillamment écrit, aussi concis que mémorable. Muy caliente !

    24/11/2022 à 07:11 6

  • Le Spectre de la Bastille 2/2

    Jenny, Patricia Lyfoung

    6/10 Nos deux héros parviennent à capturer l’un de ces faux spectres kidnappeurs mais ce dernier meurt aussitôt après avoir ingurgité un simple verre d’eau. Et voilà que les fantômes viennent enlever M. Alexandre et Adèle. Pierre, en version remaniée de Q des James Bond, leur fournit des gadgets qui s’avèreront fort utiles. Une version rajeunie, affinée, retravaillée, et pour tout dire, améliorée, de la précédente série « La Rose écarlate », pour ce tome qui s’achève avec une infiltration dans la prison de la Bastille avec la révélation (certes classique mais efficace) de la teneur du complot. Plutôt sympa.

    21/11/2022 à 18:36

  • Le Spectre de la Bastille 1/2

    Jenny, Patricia Lyfoung

    6/10 Un vieil homme embastillé promet qu’il va s’évader. Soixante-quinze ans plus tard, un spectre fond sur une jeune femme et enlève sa victime. Evidemment, Guilhem/Le Renard et Maud/La Rose écarlate vont enquêter sur cette histoire. Une sorte de seconde saison, intéressante, de la série « La Rose écarlate » où le dessin de Jenny est légèrement meilleur que celui de Patricia Lyfoung selon moi (plus précis, plus coloré, et avec quelques incursions modernes à la limite du manga) et le format en deux parties permet de creuser davantage l’histoire et les personnages secondaires. Pour le moment, avec cette histoire de faux spectres en quête de jeunes femmes, laissant une curieuse poudre blanche dans leur sillage et fanatiques de Côme Ruggieri, je suis plutôt enthousiaste.

    19/11/2022 à 17:54

  • Sur des Breizh ardentes

    Stanislas Petrosky

    8/10 « Les joyeux macareux », un EHPAD breton où il se passe des histoires pas claires. Récemment, c’est le dénommé Laurent Gérard qui a passé l’arme à gauche. Pour le coup, qu’une personne âgée en vienne à mourir dans une maison de retraite, il n’y a pas de quoi être plus surpris que ça, mais quand l’Eglise apprend que cet homme avait fait de l’Eglise son unique légataire avant de changer d’avis au dernier moment, comme par hasard, ça pose question. Alors on délègue sur place Estéban Lehydeux, alias Requiem, le curé de choc afin de comprendre ce qui s’y passe. Parce que, si la vieillesse est un naufrage, ça n’est pas une raison pour couler volontairement ces navires, seulement pour récupérer l’oseille planquée dans les cales…

    Ce sixième opus de la série consacrée à Requiem commence sur les chapeaux de roues, et ce prologue, pour celles et ceux qui ne connaîtraient pas Requiem et son univers pas piqué des hannetons, va vite les mettre à la page : on va naviguer dans la sacrée gaudriole. Calembours, jeux de mots, réparties bien senties, personnages aussi croustillants que de biscottes, scènes du même acabit : voilà amplement de quoi dérider les plus austères des lecteurs. Avec sa plume caustique, Stanislas Petrosky joue à fond la carte de l’humour débridé, sans le moindre filtre, avec les potards tournés au maximum, et c’est avec plaisir que l’on progresse dans cette intrigue policière plutôt bien troussée qui fait écho à la sombre actualité des EHPAD dirigés notamment par Orpea. Agrémentant son ton particulièrement décomplexé par des notes de bas de pages cocasses et autres passages où Requiem, voire Stanislas Petrosky himself interpelle le lecteur, ce roman est d’autant plus un bonbon que l’auteur ne s’interdit presque rien. Rappelant pêle-mêle Frédéric Dard, Michel Audiard, la série du Poulpe, ou encore celle consacrée à l’Embaumeur, l’écrivain s’en donne à cœur joie, allant même jusqu’à placer dans ce mouroir, où le sinistre le dispute au pétulant, certains de ses amis également auteurs comme Jacques Saussey, Olivier Norek, Claire Favan, Gaëlle Perrin-Guillet ou encore Armelle Carbonel.

    Un ouvrage dans la droite ligne des précédents opus, décontracté et distractif en diable, mobilisant davantage les zygomatiques que les neurones, ce qui est, en soi, un acte salvateur. On en redemande.

    17/11/2022 à 06:52 7

  • Les Aigles endormis

    Danü Danquigny

    9/10 L’Albanie a en partie grandi sous la férule d’Enver Hoxha, un dictateur communiste de la pire espèce. Un pays bridé, une économie asphyxiée, des libertés bafouées, des espoirs impossibles. C’est aussi dans ce pays martyr que grandit Arben avant que l’autocratie ne s’écroule, laissant place à un régime guère plus louable, avec les fléaux du libéralisme et ses inconvenances. Prêt à tout pour réussir et permettre à sa famille de se projeter dans un avenir favorable, probablement à l’étranger, Arben est résolu à jouer avec l’illégalité, sous toutes ses formes, quitte à y perdre son âme et ses proches.

    Ce premier ouvrage de Danü Danquigny séduit dès les premières pages. Une écriture simple qui n’empêche nullement de magnifiques passages, lyriques et puissants. Une histoire classique mais particulièrement prenante jusqu’au final. Des protagonistes formidables de crédibilité, empêtrés dans leurs hypocrisies, leurs propres tourments, leurs velléités de s’en sortir sans trop prendre attention aux moyens employés, leurs violences et autres férocités. On y découvre ce personnage d’Arben, comme tant d’Albanais si heureux de la chute du despote ayant érigé, comme hélas en d’autres endroits du globe, un régime dément et castrateur, édifié sur une doctrine monstrueuse et complètement dévoyée. Il apprendra que la destruction de cette tyrannie ne rimera pas nécessairement avec l’avènement d’une société plus égalitaire. Et c’est d’ailleurs sur ce point que Danü Danquigny est le plus marquant : il nous dépeint une Albanie d’abord sclérosée par l’hégémonie communiste puis meurtrie par un individualisme et un capitalisme presque aussi brutaux et pernicieux. Tout y est décrit avec une concision et une justesse remarquables : la prostitution, les montages financiers construits sur le principe de la pyramide de Ponzi, les trafics d’êtres humains, les escortes de migrants envoyés au casse-pipe, les ruines que se partagent les édiles et autres mafieux soudainement convertis au consumérisme féroce, les règlements de comptes sanglants où les pires engeances essaient de s’approprier les reliefs d’argent… Car sur les vestiges de cette contrée laminée, les aigles de l’Albanie, qui essaient de redresser la tête et se sortir les serres de la misère, vont côtoyer les pires charognards. C’est dans ce marais puant et sanglant qu’Arben, entre deux élans de sauvagerie et autres amnésies, va tenter de trouver, pour lui et les siens, un chemin de traverse les menant vers un semblant de bonheur, d’avenir, presque de survie, mais la bestialité le rattrapera avant qu’il n’ait atteint cette hypothétique félicité, quitte à ce qu’il soit contraint d’emprunter la voie de la vengeance.

    Un roman noir particulièrement réussi, concis et marquant, dont l’une des principales caractéristiques est de nous mener dans un pays en totale reconstruction mais dont la convalescence s’apparente pour ainsi dire à l’aggravation de la maladie. Edifiant et mémorable, presque nécessaire.

    15/11/2022 à 07:04 6

  • Quai de l'oubli

    Philippe Huet

    8/10 Gustave Masurier, dit « Gus », est journaliste au Havre. Au cours d’une déambulation, un homme est abattu d’une balle en pleine tête à une quinzaine de mètres de lui. La victime, Roger Prioul, semble avoir été abattu par un professionnel. Pourtant, rien chez lui n’indique qu’il pouvait être la cible d’un tueur à gage : dessinateur industriel, il œuvrait également dans un club de football, et sa seule aspérité était la bigamie. Aidé par le commissaire Jouvenel, Gus va tenter de comprendre le mobile de l’assassin.

    Voici la réédition d’un livre publié pour la première fois en 1992, une bien belle occasion de se replonger dans la bibliographie de Philippe Huet. Assez court (environ deux cent soixante pages), ce roman nous plonge dans un Havre que l’auteur connaît parfaitement et, à travers les descriptions, on sent nettement la nostalgie qui s’exhale de la plume de l’auteur : la topographie bousculée, le lointain passé industriel, les commerces qui ferment. Dans le même temps, on nourrit rapidement de la sympathie pour Gus. Journaliste un brin désabusé, dans la quarantaine, il a perdu son épouse lors d’un accident de voiture avant de nouer une relation inattendue avec Vickie, une femme d’une vingtaine d’années sa cadette. Son métier est aussi en plein bouleversement, avec l’arrivée aux manettes de son journal d’un magnat qui ne lui inspire guère confiance, risquant de mettre à mal la déontologie du canard tout entier. L’enquête est très intéressante et bien menée, même si elle passe parfois au second plan, et sa résolution surprend : en quelques mots, grâce à la confession écrite du tueur, Philippe Huet nous désarçonne avec une motivation à la fois simple et étonnante, digne des plus terribles faits divers dont le journal de Gus aurait pu se faire l’écho. D’ailleurs, cette information viendra battre en brèche l’idée que l’on se faisait de cet assassin : il était aussi adroit et expérimenté qu’un commando, froid tel le pire des spadassins, mais ce rebondissement apporte un semblant de chaleur humaine à cet individu qui va néanmoins supprimer trois vies au cours du récit.

    Un roman noir d’une bien belle tenue, sombre et traversé d’un spleen communicatif, où Philippe Huet nous dévoile un Havre en pleine mutation, sur lequel s’abat lentement l’aurore d’un vingtième siècle moribond.

    14/11/2022 à 06:51 2

  • Crying Freeman tome 4

    Ryoichi Ikegami , Kazuo Koike

    7/10 Alors que notre tueur à gages passe du bon temps avec sa compagne, une femme, Kitché, apparaît : une tueuse à gages visiblement redoutable, belle, astucieuse, habile dans le maniement des armes comme dans le déguisement. Elle traque le CF et leur rencontre pourrait faire des étincelles. Une mercenaire qui occupe la première place dans ce quatrième tome de la série, où elle excelle dans l’ingéniosité (un corset qui la protège des armes blanches et qui délivre de l’électricité). Un manga à l’esthétique vieillie (normal : il est sorti en 1987), toujours teinté d’érotisme, de philosophie asiatique, et où l’action (principalement avec ces couteaux) se déroule aussi bien sur un sous-marin, dans un avion que l’on détourne, dans un bateau ou en Afrique. Toujours aussi agréable à lire autant que de se replonger dans cette série qui fut un des jalons du genre.

    12/11/2022 à 20:33 1

  • ABC contre Poirot

    Agatha Christie

    8/10 Faisons bref : moi qui n'ai pas lu beaucoup d'ouvrages d'Agatha Christie, en voilà clairement un qui me redonne envie de me plonger dans l'œuvre de la reine du crime. Une structure visiblement classique chez l'écrivaine et un récit fort bien mené, avec une résolution finale parfaitement orchestrée. De bien belles trouvailles, notamment dans la machination mise au point par le coupable et un dénouement largement à la hauteur de mes espérances. L'occasion de retrouver un Hercule Poirot aux petites cellules grises magnifiquement exploitées, en plus d'être un protagoniste assez roublard.

    09/11/2022 à 07:13 4