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Après minuit
8/10 Gillian McAllister renouvelle avec brio la mécanique du roman "replay" ou "memento", qui fait remonter la protagoniste dans le temps en lui laissant la conscience de ce qu'elle a déjà vécu, L’intrigue concoctée par la romancière, les rebondissements qui nous saisissent aux moments les plus inattendus, la manière dont tous les personnages avancent masqués, tout cela concourt à balader le lecteur et à le surprendre plus souvent qu’à son tour, d’une manière parfois assez jouissive (façon mâchoire qui se décroche).
Mais ce qui fait surtout la force de ce roman, c’est la profondeur de ses personnages. Leur réalité, leur complexité, leurs fragilités, leurs mensonges comme leur sincérité dans tout ce qu’ils entreprennent. En un mot, leur authenticité, à laquelle Gillian McAllister accorde toute sa finesse et sa précision. C’est en privilégiant l’aspect humain de son histoire qu’elle fait mouche, et qu’Après minuit s’avère aussi fort, aussi marquant, et au final aussi bouleversant.18/09/2025 à 15:55 2
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Le Mystère du lac
10/10 Lu dans sa nouvelle édition chez Monsieur Toussaint Louverture sous le titre "Zephyr, Alabama" (traduction inchangée, me semble-t-il).
Grand roman de l’Amérique du vingtième siècle, très attachante chronique d’une enfance qui s’apprête à passer la main, splendide histoire d’amitié, suspense hanté d’ombres maléfiques, relation juste et fidèle d’une petite ville du sud, mais aussi réflexion sur l’inspiration, la création artistique, la puissance salvatrice de la littérature : n'en jetez plus, j'ai tout ce qu'il me faut, et même un peu plus. Pour moi, c'est la perfection - et comme c'est rare, je suis d'autant plus heureux de le dire !18/09/2025 à 15:48 1
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Féminicide
7/10 Sans complaisance, et sans ménager son lecteur non plus, Pascal Engman nous plonge dans la tête des "incels" (pour "involuntary celibates"), nous confrontant directement à leur violence, à leur misère affective et sexuelle, mais aussi à leur malheur – car, pour perdre pied au point de passer à l’acte et d’agresser des femmes, ils n’en sont pas moins des êtres humains dont il est intéressant d’analyser les origines du drame qui les rend fous. Pas pour les excuser (l'auteur nous fait parfaitement saisir qu’il n’y a pas de quoi), mais pour tenter de les comprendre.
Engman réussit cet exercice d'équilibriste ô combien périlleux dans un polar peuplé en contrepartie de personnages féminins très solides (un grand oui à Céline !!!), et mené avec un savoir-faire remarquable, en dépit de premiers chapitres très rapides qui laissent craindre de se perdre dans l'intrigue. Une belle découverte.18/09/2025 à 15:36
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Le Mangeur d'âmes
5/10 Pour être honnête, je ne suis plus vraiment client de ce genre de thriller, bien qu'il m'arrive d'y retourner (la preuve) en espérant une bonne surprise (ça arrive !) En plus de ne pas avoir un grand intérêt stylistique, celui-ci aligne les attendus comme un TGV les kilomètres : un cadre montagnard inquiétant, des protagonistes bien fracassés, une intrigue fumeuse qui progresse à grands coups de dialogues et de théories qui s'annulent à tour de rôle (oui parce que l'enquête et la collecte d'indices, c'est soooooooo XXème siècle), des meurtres sanglants et toujours plus épouvantables... Prévisible - sauf la fin, qui apporte une surprise bienvenue et sauve un peu le reste.
Et puis le tout quand même suffisamment bien emballé pour donner envie d'aller au bout le plus vite possible, preuve que la mécanique est efficace. Mais je n'en garderai rien - pas même le livre dans ma bibliothèque !18/09/2025 à 15:07 1
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Tribulations d'un précaire
8/10 Un livre excellent, qui réussit l'exploit d'être hilarant sur l'absurdité et la violence du monde du travail aux États-Unis. Si ce n'était pas Levison qui tenait la plume, ce serait à pleurer... Formidable !
18/09/2025 à 14:57
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Pour services rendus
8/10 L’humour sarcastique qui est souvent la signature du romancier est moins présent ici, au profit d’un récit maîtrisé dans ses moindres rouages, au service de personnages ambigus, complexés, et d’une analyse sans concession des dessous de la vie politique aux États-Unis.
Énergique, provocateur, salvateur aussi dans ses conclusions, Pour services rendus est un roman puissant qui consacre l’art de Iain Levison à passer au crible les dérives et travers d’un pays qui n’est pas vraiment le sien (il est né en Écosse) mais qu’il connaît par cœur. Une superbe réussite.18/09/2025 à 14:52
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Un Voisin trop discret
8/10 Le titre original, Parallax, renvoie à une notion d’astronomie qui, pour le dire très vite et très simplement, qualifie un déplacement de l’observateur occasionnant une variation de point de vue sur un seul et même objet étudié. C’est exactement ce que fait Levison pour densifier son propos : tout en faisant avancer l’intrigue, il change de point de vue sur les mêmes faits en les faisant considérer à tour de rôle par des personnages différents. Une solution narrative remarquable pour réussir un roman brillant et profond en à peine 200 pages.
On retrouve également la minutie avec laquelle il élabore, mine de rien, des mécanismes narratifs implacables, poussant protagonistes et antagonistes vers des destins aussi inéluctables que parfaitement justifiés. Avec, en prime, son habituel humour distancié, et un final particulièrement réjouissant.
18/09/2025 à 14:37 1
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Les stripteaseuses ont toujours besoin de conseils juridiques
8/10 La grande force de Iain Levison, dans ce roman comme dans les précédents, est de s’emparer de son sujet sans manichéisme ni démagogie. Sa démonstration passe par la fiction, l’intrigue, les personnages, et surtout par son humour, son sens délicat de l’ironie et de l’autodérision, qui font passer le message sans tomber dans la démonstration lourdingue.
Il emballe ici le tout dans une belle ambiance de roman noir, avec ses malfrats mal dégrossis, ses motels et ses zones industrielles glauques, son bar à striptease (avec un titre pareil, c’était inévitable) dont les cachotteries en coulisses sont inversement proportionnelles au dénudement des filles qui arpentent la scène…
Son style est fluide, son propos ramassé en un peu plus de 200 pages, comme d’habitude, et tout est en place pour passer un excellent moment de lecture, vif et intelligent, tout aussi capable de divertir que d’éclairer.18/09/2025 à 14:30
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Le cinquième diamant
6/10 Ça commence comme un roman policier teinté d’espionnage, dans une atmosphère surannée, un peu hors du temps, entre John Le Carré et Agatha Christie, hormis que le style garde une certaine modernité. Puis on bascule dans une ambiance X-Files, avec bases secrètes chargées de missiles létaux, sécurité hyper renforcée, paranoïa à tous les niveaux, et de drôles de lumière dans le ciel qui viennent tout dérégler sans qu’on comprenne pourquoi ni comment. Avant, un peu plus tard, d’ouvrir la porte des mystères de l’espace infini, façon Contact de Carl Sagan, dans une intrigue scientifique mêlée à une histoire de couple.
Un roman qui commence fort bien, instaure un charme étonnant et stimule la curiosité, mais perd un peu en route son point de vue et finit par ne plus trop savoir ce qu’il voulait raconter, au milieu de ses lignes de réflexion finalement peut-être trop nombreuses pour convaincre toutes ensemble, surtout dans la troisième partie. Mais qui donnent, tout de même, un véritable intérêt et une ambition salutaire à ce texte qui assume son originalité et son goût pour la fiction, le suspense et l’aventure.18/09/2025 à 14:28
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Panorama
7/10 En recourant à la métaphore de la Transparence comme mode de vie et comme programme politique, Lilia Hassaine s’attaque à la dictature de l’instant et de l’émotion, au potentiel tyrannique des réseaux sociaux, à tout ce qui constitue une nouvelle forme d’hypocrisie : se donner le beau rôle en se mettant en scène dans les meilleures conditions, tout en fustigeant ses concurrents ou ses adversaires jugés coupables de se comporter de manière exactement inverse. Des tribunaux populaires qui ne disent pas leur nom, s’appuient sur des appareils d’une puissance considérable (une chaîne de télévision, par exemple) et font des dégâts terrifiants.
C’est bien vu, très malin, et ultra-efficace, la romancière ayant fait le choix de traiter son intrigue sous la forme d’un pseudo-polar qui propulse l’histoire droit devant elle, sans temps mort ni digression. Seul bémol : l'écriture est sans attrait, et le suspense assez fragile sur la longueur. Mais la réflexion offerte par ce roman suffit à le rendre intéressant.18/09/2025 à 14:24
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Henua
8/10 Profondément humain, prenant le temps de s’emparer de son cadre si singulier et de lui rendre justice, loin des clichés de carte postale exotique qui en dissimulent la beauté, la profondeur et la richesse, Henua est autant une déclaration d’amour littéraire aux Marquises qu’un polar parfaitement mené, sinuant entre les faux semblants jusqu’à faire tomber tous les masques, au terme d’une montée en tension parfaitement tenue et d’un final spectaculaire.
18/09/2025 à 14:01 1
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Mon ennemi intérieur
9/10 D’une écriture limpide, avec humilité et élégance, Marin Ledun élabore une réflexion brillante, stimulante, qui donne envie de lire ou de relire plein d’auteurs, et met des mots d’une évidence salutaire sur ce que tous les lecteurs de roman noir ont sans aucun doute, tôt ou tard, ressenti en se plongeant dans leur littérature de prédilection.
Si vous en êtes, si vous aimez à l’occasion réfléchir sur la littérature ou prendre du recul sur ce que vous lisez, ce petit texte est un grand incontournable.18/09/2025 à 13:54
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Les Naufragés du Wager
8/10 Le récit relaté dans ce livre, qui est sans ambiguïté un essai et non une fiction, pourrait être la trame d’un grand roman d’aventure maritime historique – et, de fait, Les Naufragés du Wager peut se lire de cette manière, parce qu’il en a la puissance, l’originalité et la précision. Sauf qu’on est chez David Grann, et que donc tout est véridique (dans la limite, sans doute, de ce qu’un chercheur peut accomplir dans la reconstitution d’événements historiques vieux de bientôt trois siècles).
De la fabrication des navires au XVIIIème siècle à l’organisation du quotidien sur les ponts, en passant par les méthodes de recrutement forcé pour constituer les équipages, les conditions de vie éprouvantes à bord et les immenses enjeux géopolitiques attachés à la maîtrise des océans, tout y passe, avec un luxe de détails qui n’est jamais excessif, au contraire.
Un récit fascinant au service d'une réflexion sur l'écriture de l'Histoire - plus d'actualité que jamais, surtout aux États-Unis...18/09/2025 à 13:53 2
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Les Aiguilles d'or
9/10 J'aurais presque pu écrire mot à mot l'avis de Fredo ci-dessous !!!
Un sens impressionnant de l’atmosphère, une fascination pour les intrigues familiales, une immense importance accordée au rôle des femmes dans l’intrigue et à leur présence dans la société, une curiosité pour la violence (plus ou moins) sourde qui peut dévorer une société de l’intérieur, des personnages hauts en couleur, des décors saisissants qui jouent un rôle de premier plan dans l’histoire : Michael McDowell déploie un impressionnant dispositif littéraire pour ouvrir le rideau d'un théâtre de furie, de violence et de passion absolument phénoménal.
Cousin de L'Aliéniste de Caleb Carr, ce texte trop longtemps méconnu est un très grand roman américain. Une véritable sensation !18/09/2025 à 13:45 4
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Désaccords imparfaits
7/10 Se revendiquant pleinement romancier, Jonathan Coe admet volontiers sa difficulté à faire court, et donc à écrire des nouvelles. Les trois textes collectés dans ce recueil montrent néanmoins qu'il est tout à fait capable de briller en peu de pages. On y retrouve tout ce qu'on aime dans son travail : un mélange subtil de mélancolie, d’ironie et de tendresse, des personnages en recherche de souvenirs ou de sentiments diffus, et de l’humour – anglais, forcément.
18/09/2025 à 12:38
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Expo 58
7/10 Une comédie d'espionnage "so british", pétillante et enlevée, où le romancier entremêle d'irrésistibles touches d'humour avec des considérations toujours subtiles sur la famille, l'amour ou la place de chacun dans l'existence.
Du Coe 100% pur scone, délicieusement drôle et intelligent !
18/09/2025 à 12:30
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Numéro 11
7/10 Certes, Jonathan Coe est plutôt un romancier « classique » d’un point de vue formel, mais il faut se méfier de l’eau qui dort. L’animal est capable de surprendre, voire de déconcerter – ce qui est le cas avec ce roman littéralement hanté par la figure du chiffre 11.
Composé de cinq parties qu’on dirait juxtaposées, tant elles traitent de sujets différents et jouent de registres changeants (chronique d'enfance, conte gothique, critique de la téléréalité et de la presse à sensation...), Numéro 11 déconcerte parfois, prend de court, semble hésiter sur ce qu'il veut dire, mais finit par appuyer là où ça fait mal juste comme il faut, en dépeignant une Angleterre du début du XXIème siècle dont la société se délite dangereusement.
Un roman fragile, qui ne plaît pas à tout le monde, mais assez fascinant par ses prises de risque et ses partis pris.18/09/2025 à 11:51
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La Vie très privée de Mr Sim
5/10 Sur une trame drolatique - un représentant de commerce tombe amoureux... de la voix suave de son GPS ! -, Coe scrute entre cynisme et mélancolie une Angleterre d'aujourd'hui essoufflée, entre banlieues endormies, autoroutes interminables et villages délaissés. L'idée de départ est très chouette, il y a comme toujours des beaux passages et des réflexions bien senties, mais le roman est longuet et ne tient hélas pas la route jusqu'au bout.
18/09/2025 à 10:48
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Le Cercle fermé
8/10 En retrouvant les héros de Bienvenue au club vingt ans après, Jonathan Coe passe les années 90 au crible de son impitoyable clairvoyance. Et quand le romancier satiriste sonne la charge contre la décennie Tony Blair, ça fait mal !
Toujours aussi fin et amusant, peut-être un peu plus désenchanté aussi, ce Cercle fermé boucle la boucle avec virtuosité (provisoirement, puisque ses protagonistes reviendront finalement vingt ans plus tard dans Le Coeur de l'Angleterre).
18/09/2025 à 10:44
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Le royaume désuni
8/10 Courant de la fin de la Seconde Guerre mondiale à nos jours, au fil de grands moments de l'histoire britannique sur ces 80 ans (la fin de la guerre, la victoire anglaise lors de la Coupe du Monde 1966, le mariage de Charles et Diana, la mort de Lady Di...), la nouvelle fresque anglo-familiale de Jonathan Coe nous régale de son art des portraits et de son sens de l'observation si piquant.
Réjouissant !!!18/09/2025 à 10:41