El Marco Modérateur

3405 votes

  • And Back

    François Boucq, Alexandro Jodorowsky

    9/10 … où l’on retrouve Bouncer dans une prison au beau milieu du désert, le tout dans une ambiance sinistre (cf. les premières images avec les cadavres empalés et becquetés par les corbeaux). Un enfer sur terre où l’on adjuge aux enchères des jeunes femmes nues aux prisonniers. Où une dame lubrique règne en prêtresse. Où les moines, encapuchonnés vus dans le tome précédent, peuvent librement torturer les captifs. Où le train du ravitaillement constitue le seul moyen d’évasion dans ces terres stériles et esseulées. Un western aussi réussi que les précédents, c’est-à-dire excellent, âpre, violent et sombre, le tout parcouru de sang, de fusillades, de mutilations et de péripéties. Remarquable, tout simplement.

    14/11/2023 à 20:06 1

  • Nos vies en flammes

    David Joy

    9/10 Ray Mathis, géant barbu, a pris sa retraite de l’office des forêts et mène une vie paisible jusqu’à ce qu’il reçoive un coup de téléphone : son fils, Ricky, junkie, lui indique qu’on va le tuer. Il doit dix-mille dollars à de sordides individus. Si Ray s’acquitte de la somme indiquée, le drame survient : Ricky meurt d’une overdose. Il n’y a pas plus redoutable qu’une bête blessée, et le vieil ours décide de régler lui-même ses comptes avec une société gangrénée par les drogues. Si les montagnes aux alentours sont ravagées par un monstrueux incendie, ce qu’a préparé Ray pourrait être encore plus féroce.

    Après Là où les lumières meurent, Le Poids du monde et Ce Lien entre nous, David Joy nous est revenu avec cet ouvrage singulièrement noir. Si le pitch laisse augurer la vendetta d’un père psychologiquement mutilé par le décès de son fils unique, avec une croisade sanglante et force péripéties façon vigilante movies, il n’en est rien. Même s’il fera effectivement preuve de violences et secouera sacrément ces narcotrafiquants qu’il estime être responsables de la mort de son enfant, Ray n’est pas le personnage central du livre, car il s’agit plutôt de la société américaine. Une population livrée de son plein gré aux affres de l’addiction, des corps saturés de drogues aussi variées que tortionnaires et létales, des maux si répandus qu’ils paraissent incurables, sans compter d’abjects individus se repaissant de cette déchéance collective. De nombreux rôles apparaissent, de la nièce de Ray, travaillant pour la DEA, à certains drogués essayant de trouver la rédemption en passant par un policier infiltré. David Joy maîtrise autant la narration – âpre, amère, remarquable de densité – que le sujet, ajoutant en fin d’ouvrage un article brillant qu’il a lui-même signé sur la crise des opioïdes. La plume de l’auteur est extraordinaire, sombre, prenante, parfois haletante, avec des dialogues au cordeau et des scènes plus légères (comme le coup de cet homme si moche qu’il était capable de tuer des écureuils rien qu’en leur faisant des grimaces). Et c’est essoufflé que l’on achève la lecture de ce roman aussi brutal que concis, faisant se côtoyer les ténèbres d’un peuple qui se meurt dans le plus assourdissant des silences et l’espérance d’un avenir éclairci.

    Un livre puissant et mémorable, à l’intrigue et à l’écriture remarquables.

    14/11/2023 à 06:41 6

  • Avalon

    Kevin Hérault, Jean-David Morvan

    6/10 Près de cinquante ans après la déclaration d’indépendance d’Avalon, un vaisseau de l’Axe amerrit et, si l’ambiance est globalement à l’euphorie, un groupe de jeunes gens ne l’entend clairement pas de cette oreille…
    Un traitement esthétique impeccable quoique l’ensemble paraît un peu aseptisé, quelques incursions d’humour (comme ce graffiti : « Déjà des réformes, l’Axe hâtif ? Ça va chier ! ») et, même si je n’ai pas vraiment été transporté plus que ça par l’histoire ou le récit, je me suis néanmoins laissé gentiment prendre. Habituellement, ce type de BD n’est pas trop ma tasse de thé, mais là, je dois avouer que j’ai facilement bu cette plaisante boisson.

    13/11/2023 à 20:22 2

  • La Mort du géant

    Edouard Aidans

    6/10 Un étrange casque découvert dans la montagne battue par de terribles rafales de vent, des hallucinations provoquées par du poison, une curieuse tribu composée d’individus simiesques, un chamane délivrant un message abscons, une créature vêtue comme un cosmonaute, etc. Une touche de SF (avec vaisseau spatial, technologies d’avant-garde et autres gadgets bien loin de la Préhistoire comme de notre époque) pour cet opus qui tranche radicalement avec les précédents.

    12/11/2023 à 20:24 1

  • SOIL tome 1

    Atsushi Kaneko

    6/10 La famille Suzushiro (le père, la mère et la fille) ont étrangement disparu de leur domicile, et l’on découvre une immense stalagmite de cristaux dans la chambre de la gamine. Les policiers chargés de l’enquête ne sont pas au bout de leurs surprises, entre black-out, mystérieuses étoiles filantes, pendaisons de chats, automutilations et autres joyeusetés.
    Un ton sacrément burlesque et décalé, oscillant entre l’humour noir, à froid et la loufoquerie la plus totale. Mais l’esthétique très (trop ?) particulière et la juxtaposition de scènes saugrenues plutôt que l’avancée réelle de l’histoire, même si je ne regrette pas ma lecture, m’ont un peu lassé, et je ne serai probablement pas au rendez-vous des tomes suivants.

    11/11/2023 à 18:22 2

  • Aveuglément

    Laurence Voïta

    6/10 Marco Morard est de retour. Sept ans auparavant, il était allé nager dans le lac avant de disparaître en simulant une noyade, mais ce lundi 8 novembre, il regagne par le train la ville qui l’a vu s’éclipser. Pourquoi avoir ainsi fui pour aujourd’hui réapparaître ? Que cherche-t-il ?

    Cet ouvrage de Laurence Voïta saisit dès les premiers chapitres. La langue de l’écrivaine est tout bonnement exquise : chaque phrase est travaillée, chaque mort ciselé, chaque individu joliment dépeint. Il faut dire que, dans ce roman, les personnages sont nombreux. Marco, bien évidemment, rentrant chez lui pour on ne sait quelle raison ; son ex-femme Claire ; Bruno Schneider, ancien policier, et son épouse Carla ; Sophie, l’ancienne collègue de Bruno ; les enfants de l’école locale, avec le fils de Marco et le petit-fils de Bruno ; Mathilde, une vieille dame qui a forgé une solide amitié avec José, devenu aveugle après une subite neuropathie optique de Leber ; Serge, le beau-père du disparu. Graduellement, à l’arrivée de cet homme que l’on pensait mort, les langues se délient, les brouillards sont fendus et la vérité émerge sous les diverses faces d’un même prisme. Laurence Voïta maîtrise indubitablement sa prose et nous offre un bel éventail de caractères au gré de ce récit choral. Dans le même temps, il est particulièrement dommage, voire dommageable, que la maison d’édition ait choisi d’inscrire « thriller » en lettres capitales sur la première de couverture car, sans le moindre doute, ce livre n’en est pas un : on navigue plutôt sur les eaux de la littérature blanche vaguement colorée de noirceur, certes réussie et plaisante, mais dont le contenu ne correspond pas du tout à l’étiquette punaisée sur l’ouvrage. On en viendrait presque à parler d’indication trompeuse. Ici, nul véritable frisson, pas de réel suspense, aucune montée en tension, et jamais l’intrigue ne viendra remuer les sangs comme c’était pourtant certifié. Au-delà de cette classification pour le moins douteuse, reste un texte court et assez efficace, d’où poignent de subtils portraits psychologiques, mais sans l’adrénaline promise.

    Un livre agréable et habilement écrit, sans véritable fausse note, mais qui risque de faire déchanter les lecteurs qui s’attendaient à un tout autre récital, plus sombre ou dynamique.

    10/11/2023 à 06:48 3

  • Denjin N tome 3

    Kazu Inabe, Yuu Kuraishi

    9/10 Ce qui devait arriver arriva : Nasu n’a pas été véritablement mis d’état de nuire, et c’est sous la forme d’une poupée mécanisée qu’il personnalise rapidement qu’il réapparaît. Encore une fois, un graphisme remarquable, un scénario en béton, un suspense haletant et des images fortes (comme ce carnage provoqué par Nasu pour que sa bien-aimée se montre enfin) tandis que le monstre semble avoir définitivement perdu toute bienveillance. Vivement le quatrième et dernier tome de cette série au top !

    09/11/2023 à 18:52 1

  • I am a Hero tome 4

    Kengo Hanazawa

    7/10 On retrouve Hideo Suzuki là où on l’avait laissé à la fin du précédent opus, à savoir dans la forêt auprès d’Hiromi Hayakari, avec un zombie pendu qui menace à tout instant de se libérer de la corde. Toujours ce graphisme très réussi, cette ambiance anxiogène et ces morts-vivants au physique souvent déstructuré. Malgré encore bien des bavardages, c’est une chouette idée de proposer un héros qui n’en est pas un et davantage de tension que de la pure castagne.

    08/11/2023 à 18:28 2

  • Higanjima tome 8

    Koji Matsumoto

    5/10 On poursuit avec cette série et des éléments attendus pour le genre : créatures en dents effilées, contaminations par morsures, un immense pieu utilisé comme arme, etc. L’ensemble n’est pas du tout déplaisant mais il accumule à mon goût un peu trop de poncifs, en plus de manquer de concision (je trouve que la série patine méchamment). Pas palpitant, mais relativement divertissant.

    07/11/2023 à 19:36 3

  • Les Incandescentes

    C. J. Tudor

    9/10 Jacqueline – surnommée Jack – Brooks accepte un poste de révérend par intérim dans la bourgade de Chapel Croft après un drame professionnel. Accompagnée de son adolescente de fille Flo, elle ignore encore que ce village est durablement marqué par la figure des « Incandescentes », huit personnes brûlées durant les années 1550, également appelées les « Martyrs du Sussex », dont on reproduit le calvaire avec de petites figurines faites de brindilles. Y a-t-il un lien avec la disparition inexpliquée de deux ados, Merry et Joy, en mai 1990 ?

    C. J. Tudor nous avait déjà régalés avec ses excellents thrillers qu’étaient L'Homme craie, La Disparition d'Annie Thorne et L'Ombre des autres, et c’est avec une joie indicible que nous avons entamé ces Incandescentes, et le moins que l’on puisse dire, c’est que le bonheur a de nouveau été au rendez-vous. On y retrouve la plume si caractéristique de l’écrivaine, jubilatoire, ciselée, agrémentée de nombreux traits d’humour, notamment lors de réparties croustillantes. S’appuyant sur un pitch alléchant, elle multiplie les personnages dans cette campagne anglaise où de multiples drames sont survenus et affleurent encore : de jeunes filles évaporées, un révérend également disparu dans le même temps, le prédécesseur de Jack retrouvé pendu, le mari de notre héroïne assassiné, d’étranges apparitions surnaturelles, des cercueils retrouvés par hasard, un jeune type handicapé par sa dystonie, etc. Les fausses pistes s’enchaînent et les révélations se font particulièrement nombreuses, notamment dans les cinquante dernières pages. C. J. Tudor tisse une ambiance si spécifique aux traditionnels whodunits et introduit alors son inénarrable talent de conteuse pour nous gratifier de rebondissements très réussis, sans jamais verser dans le sordide.

    Un pur délice littéraire, d’un bout à l’autre et sans le moindre temps mort, confirmant sans peine l’immense habileté de C. J. Tudor à confectionner des intrigues solides et des récits d’une rare efficacité. Entre ses doigts, le lecteur devient à son tour une marionnette, et cette soumission est un régal.

    07/11/2023 à 06:54 6

  • Eiko

    Jean-François Di Giorgio, Vax

    7/10 « La boîte est vide » : un manuscrit portant sur une légende portant sur l’origine de la création même du Japon a été volé. Takeo va bien évidemment se mettre à sa recherche, mais pas sans avoir de nouveau croisé la route d’Eïko, l’adolescente qu’il aime en secret. Mais voilà qu’elle est subitement frappée par une malédiction après avoir été touchée par une plume de cygne : elle mourra dans les deux jours. Créatures, monde parallèle, combats : un opus encore très efficace, et j’ai été assez touché par la fin, certes triste mais particulièrement poétique.

    06/11/2023 à 18:43 1

  • La Pierre du matin blanc

    André Benn

    7/10 1907 (peut-être 1908) : un couple se dispute dans la neige du Yukon à propos d’une concession qui pourrait leur apporter la fortune, ils ont fait le voyage avec leur fille Valentine, mais un accident idiot tue le père puis la mère. Au mépris du danger et de la nature hostile, Valentine va poursuivre l’aventure seule avant de tomber sur des Inuits.
    Un chouette graphisme, un réel souffle, et même si cela n’apporte pas grand-chose au genre, ça reste plaisant à lire, avec quelques touches de sexe et d’humour.

    05/11/2023 à 20:27 1

  • Cadeau empoisonné

    Valentin Auwercx

    6/10 Etrange noël 2019 pour le policier Ross Vinci : on l’appelle pour lui signaler une affaire juste à côté de chez lui et en rapport avec le plus grand casse de l’histoire. Sur place, il s’entretient avec Math Winter qui va lui faire part d’un cadeau bien inattendu qui, depuis des années, empoisonne son existence… et détruit celle de ses proches.
    Une nouvelle sympathique avec un pitch intéressant et original. Le style n’est pas à proprement parler remarquable – on compte aussi un peu trop de coquilles pour un texte aussi court – mais l’idée est plutôt ingénieuse, jouant avec les codes attendus de la malédiction, de la destinée et du sort qui s’acharne sur un individu ainsi que les personnes qui l’entourent. Le rebondissement final à propos de ce qui est écrit sur les lingots est assez habile sans pour autant renouveler totalement le genre. Bref, une lecture plaisante.

    05/11/2023 à 16:49

  • Les Carottes sont cuites

    Tibet

    5/10 Bourre-pifs, Indiens (les Rabajoas), blagues potaches et humour gentillet, séance de rodéo, attaque de la diligence, des coffres pleins d’or : un deuxième tome qui joue autant sur les codes du western que sur les poncifs de celui-ci. C’est plaisant, mais vraiment à destination en priorité d’un lectorat jeune.

    05/11/2023 à 08:21

  • Présentation alpha

    Eric Loutte, Frédéric Zumbiehl

    6/10 Salon aéronautique de Jakarta. Alors que le Rafale doit être la vedette de l’événement un sabotage survient, mettant à mal la première démonstration de l’avion. C’est ensuite une tentative d’assassinat en pleine rue : décidément, on semble en vouloir à l’entreprise Dassault. Tant du point de vue graphique que scénaristique, c’est assez réussi, et ce premier tome de la série offre son lot de distractions même si certaines d’entre elles sont vraiment trop grosses (héros indestructibles, épisode du combat contre l’hélico, etc.). Plus gênant : le fait que Dassault figure dès les premières planches parmi les « partenaires officiels » de cette BD. Une jolie carte postale envoyée par l’entreprise, un produit de placement plutôt réussi même si cette « connivence » me pose un peu problème…

    02/11/2023 à 08:36 1

  • Chick Bill contre l'invisible

    Tibet

    5/10 Une BD sympathique qui brasse tous les ingrédients du western (Indiens, prison, aventure) en ajoutant des éléments bienvenus, notamment l’humour, même si certains sont un peu éculés (cf. le pistolet qui crache de l’eau). Le graphisme a vieilli (la BD date de 1954) mais l’ensemble, gentillet, se laisse lire. Avec nos yeux de lecteurs du vingt-et-unième siècle, voilà une série plaisante qui s’adresse désormais en priorité aux jeunes lecteurs, mais qui propose néanmoins une lecture distrayante et gentillette, sans plus.

    01/11/2023 à 23:19 2

  • Soul Keeper tome 1

    Tsutomu Takahashi

    8/10 Riyon, fantôme d’une jeune femme morte à 18 ans et attendant désormais au royaume des morts, se voit confier une tâche inattendue : elle est rétrogradée au rang d’ange gardien et choisit de veiller sur la destinée de Kasuga Souichirou à qui il ne reste que 518 jours à vivre. Et ça n’est qu’en arrivant sur Terre que Riyon découvre que l’intéressé n’est autre que le premier ministre du Japon, déprimé, alcoolique et au plus bas dans les sondages.
    Découvert un peu par hasard après avoir dévoré la série « Neun » du même mangaka, j’ai beaucoup aimé le premier tome de cette série, avec un style graphique très proche de la précitée. Une œuvre intelligente, esthétiquement très travaillée et avec de belles trouvailles scénaristiques (joli, le coup des boules noires gluantes qui appesantissent l’âme du politicien). Un tome vraiment surprenant et déroutant avec une histoire originale et un style envoûtant. Je vais tâcher de me trouver les tomes suivants.

    01/11/2023 à 08:14 2

  • Denjin N tome 2

    Kazu Inabe, Yuu Kuraishi

    9/10 Après avoir pris le contrôle de tout ce qui est électrique et numérique, Nasu, devenu « électrhumain », continue son jeu de massacre. « Il se passe quelque chose de grave dans cette ville… », dit l’un des protagonistes : doux euphémisme à mesure que les corps tombent. Misaki Tanzaki demeure l’obsession de ce tueur en série d’un genre nouveau. Un graphisme excellent servant un scénario de tout premier ordre, avec beaucoup de scènes hautement cinématographiques et très réussies (cf. l’assaut de la police et la prise de contrôle meurtrière de leur hélicoptère ou la prise d’otage de la jeune chanteuse pour forcer le prédateur numérique à se montrer et dont plusieurs épisodes sont sacrément inattendus, par exemple). Une véritable réussite pour une série hautement addictive dont le souffle demeure pour le moment intact. Vivement la suite !

    30/10/2023 à 23:34 4

  • Demokratia tome 1

    Motoro Mase

    8/10 « Une application efficace du principe de majorité via un réseau » : ce qui ne devait être au départ qu’un programme pour, au mieux, un jeu, va prendre la forme d’une androïde, Mai Tokunaga, parfois appelée « Fuyu ». Sauf que Taku et Hisashi qui ont œuvré en secret pour qu’elle existe ne se rendent pas encore compte que leur créature – et le concept qu’elle matérialise – va complètement leur échapper. Une esthétique très léchée et réussie pour un scénario pertinent et intelligent, avec de bien belles réflexions sur le collectif, la portée du vote, l’intrusion des réseaux sociaux, etc. Le cliffhanger final avec la prise d’otage à l’aide d’un couteau, injecte un suspense inattendu. Je serai très probablement au rendez-vous des tomes suivants.

    30/10/2023 à 23:32 4

  • Ne la quitte pas du regard

    Claire Allan

    7/10 Eliana Hughes, la trentaine, est infirmière dans un service de soins palliatifs. Elle est également enceinte de sept mois. Sa grossesse, déjà troublée par les maux physiques, est encore compliquée par une série d’événements inquiétants : des messages anonymes mettant en cause la fidélité de son mari Martin, des cailloux jetés à son domicile, des intrusions également. Pourquoi lui en veut-on autant ? Et qui est cette mystérieuse Louise, qui a perdu son enfant, et qui semble pourchasser Eli comme une proie ?

    Claire Allan signe ici un roman à suspense réussi. Se présentant sous la forme d’un récit choral, l’auteure nous livre les points de vue d’Eli, de cette énigmatique Louise qui a vécu une grossesse tragique en perdant son bébé ainsi que son utérus, puis celui d’Angela, la mère d’Eli. Avec une langue simple mais qui agrippe aussitôt le lecteur, Claire Allan pose calmement le décor de son intrigue, avec une belle économie de mots et de moyens, rendant l’ensemble d’autant plus crédible, et de fait inquiétant. Louise va-t-elle chercher à enlever Eli ? Seulement son enfant à venir ? Nuire à son couple ? Chercher à la rendre folle ? Autant de questions qui ne trouveront leurs réponses que dans le dernier tiers de l’ouvrage, et ce dénouement s’avèrera aussi plausible et élémentaire que ne l’aura été l’ensemble du livre. Trop, peut-être : certains pourront éventuellement reprocher à l’auteure de ne pas les avoir gratifiés d’un rebondissement supplémentaire, une sorte de bouquet final venant clore le terrible chemin de croix de la protagoniste. Car si la résolution remplit amplement les attentes, il en va de la littérature comme de la gastronomie : après une telle entrée en matière et un suspense aussi tendu, nous n’aurions rien eu contre une portion plus solide de tension ou un twist supplémentaire.

    Un bon domestic suspense, adroit et vraisemblable d’un bout à l’autre, efficace et prenant.

    30/10/2023 à 08:11 3