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Le jardin des derniers plaisirs
8/10 Les jardins de Cremorne constituent un lieu de divertissement très prisé dans le Londres de 1875, où l'on trouve des fêtes et des représentations burlesques ainsi que des danses et des joies débridées. Cependant, beaucoup de fervents religieux y voient une nouvelle enclave du vice et de la décadence, et leur voix est portée par l'homme d'église Featherstone. Aussi, lorsqu'un individu se met à semer la panique dans ce parc en agressant des jeunes femmes puis tue une des domestiques de Featherstone en la faisant brûler, le conflit entre partisans de l'amusement et pourfendeurs de la débauche s'embrase. Il faudra tout le flegme de l'inspecteur de Scotland Yard Decimus Webb et de son fidèle sergent Bartleby pour tirer au clair une affaire bien plus complexe qu'il n'y paraît.
Deuxième opus consacré à Decimus Webb après Le cadavre du métropolitain, ce jardin des derniers plaisirs poursuit cette série d'enquêtes criminelles prenant pied dans le Londres du dix-neuvième siècle. On retrouve avec plaisir la plume si élégante et raffinée de Lee Jackson pour décrire les lieux, habitudes et ambiances d'une métropole que l'auteur connaît sur le bout des doigts. L'énigme a été habilement conçue et il faut attendre l'avant-dernier chapitre pour la voir se résoudre, après de nombreux rebondissements et fausses pistes. A cet égard, le personnage central qu'est Decimus Webb gagne en profondeur dans cet ouvrage : tenace et intuitif, parfois très cassant avec Bartleby même si tous les deux s'apprécient beaucoup, il va à l'encontre des stéréotypes du policier parfait dénouant rapidement les fils de son investigation. Il tâtonne, se trompe, maudit ses propres errements, mais fait preuve d'une grande pugnacité jusqu'à ce que toutes les pièces du puzzle s'imbriquent. L'intrigue mettra à jour des secrets assez inavouables, comme dans Le cadavre du métropolitain, tout en offrant une peinture particulièrement fidèle et saisissante de la capitale britannique, entre ombres et lumières.
Le jardin des derniers plaisirs est donc un roman d'une très grande classe, racé et instructif, qui a le mérite d'allier une histoire policière de qualité à un tableau tout en nuances du Londres de la période victorienne.25/08/2010 à 11:53
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Le réseau Flandres
8/10 Le policier Nicolas Dantès s'est tué d'une balle dans la tête à son domicile. Les preuves sont là, indéniables. Pour son ancien collègue et ami Olivier Béjot, ça ne colle pas. Pourquoi ce flic hors du commun aurait-il sans raison dirigé le canon de son arme contre lui et appuyé sur la queue de détente ? Face à l'incompréhension, Béjot va remonter le fil des dernières enquêtes de Dantès et faire apparaître un immonde réseau de pédophilie dont les ramifications pourraient bien s'étendre jusque dans les rangs de la police.
Deuxième ouvrage de la série consacrée à Olivier Béjot après L'écorcheur des Flandres, Le réseau Flandres fait basculer le lecteur dans l'univers glauque et irrespirable de la pédophilie. La plume de Philippe Declerck a très nettement gagné en noirceur et en efficacité, au point de livrer un thriller qui n'a strictement rien à envier aux élites de ce genre littéraire. Le style est sec et nerveux, fonctionnant par ellipses, sans la moindre fioriture ni temps mort. C'est avec plaisir que l'on retrouve les personnages du précédent opus et que l'on voit de quelle manière ils ont évolué. L'ambiance est particulièrement lourde sans jamais tomber dans le voyeurisme malsain. Les parties consacrées à la vie privée d'Olivier Béjot sont d'ailleurs les bienvenues, apportant un peu d'air frais dans ce monde ignoble et méphitique, et le noir de ces atmosphères est encore plus saisissant quand il s'écrit sur le blanc de l'existence des protagonistes, dépeints avec tendresse et humanité. Le suspense est travaillé et le dernier paragraphe livre l'ultime clef pour comprendre le suicide du policier.
Philippe Declerck s'est bonifié dans ce roman. Tension, rebondissements, originalité : il a su exploiter toutes les facettes du thriller, le tout servi par un style impeccable. Il n'y a plus qu'à espérer d'autres investigations menées par son policier fétiche.23/08/2010 à 11:26
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La Danse des obèses
4/10 Une très grande déception, en ce qui me concerne. Une idée de départ alléchante, et les premiers chapitres m'ont rapidement intrigué. Cependant, très rapidement, on bascule dans du déjà-vu. Une histoire d'amour à l'eau de rose trop envahissante, beaucoup de clichés – certains passages en deviennent presque parodiques selon moi, une ambiance qui tourne plus au grotesque qu'à l'effrayant, un net manque de densité chez des personnages bien ternes, et un tueur en série finalement ni original ni inquiétant. Un thriller qui ne m'a pas du tout fait trembler et qui m'a laissé... sur ma faim.
20/08/2010 à 10:10
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Wallflower
9/10 Alors qu'il est en vacances à Venise, Janek doit revenir précipitamment aux Etats-Unis. En effet, on vient de retrouver Jess, sa filleule, assassinée dans un parc. D'après les premières constatations, la jeune femme, escrimeuse, a été attaquée à coups de pic à glace alors qu'elle faisait son jogging. Janek reprend l'enquête de manière personnelle et découvre des indices troublants : Jess avait une sexualité extravertie, fréquentait des jeunes aux comportements presque sectaires, était suivie par une thérapeute... Et que dire du fait que son sexe a été « scellé » à la colle par son tueur... Pour appréhender le coupable, Janek va devoir, selon ses méthodes, plonger vers un esprit particulièrement retors et dangereux.
Paru il y a presque vingt ans, ce thriller n'a pas pris la moindre ride. Deuxième ouvrage de la série consacrée au lieutenant Janek, il exploite à merveille la personnalité de son héros. Scrupuleux, attentif aux détails, fondant son analyse sur la psychologie plus que sur les preuves scientifiques, capable pendant des jours de chercher un minuscule détail qui lui a échappé, Janek est l'archétype du policier pugnace et sagace. Cette fois-ci, il plonge bien malgré lui dans une affaire sordide où la mort d'un proche le brise avec d'autant plus de violence. William Bayer a bâti une histoire forte, avec notamment un tueur en série singulièrement monstrueux, à la fois détruit et destructeur. Les enchaînements sont habilement construits, les rebondissements prenants, et la longue introspection dans le cerveau du monstre aussi réussie que troublante. Sans scène d'action tonitruante, ce roman happe l'attention de la première à la dernière page grâce à la qualité de sa psychologie et l'intensité de son intrigue.
Méticuleux comme un Michael Connelly, vénéneux comme A cause de la nuit de James Ellroy, brûlant comme du Val McDermid, Wallflower est un véritable bijou. L'auteur des brillants Pèlerin et Tarot réussit l'exploit de synthétiser ce qui se fait de mieux dans le domaine tout en conservant son authenticité, son âme. C'est la marque des très grands dont fait indéniablement partie William Bayer.18/08/2010 à 18:30
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Le Couturier de la Mort
7/10 Dans une ville de la Côte d'Azur, un tueur en série poursuit inlassablement son œuvre immonde. Sa spécialité : il coud entre eux des morceaux de corps humains, d'où son surnom de « Couturier de la mort ». Ce qui semble lui plaire, ce sont les mélanges des genres, joignant hommes et femmes, frêles et obèses, et pourquoi pas humains et animaux. La police piétine, et il faudra attendre qu'un modeste flic, Marcel Blanc, s'approche de trop près du monstre pour avoir des chances de l'appréhender.
Auteure reconnue de romans noirs et de thrillers, Brigitte Aubert signait en 2000 cet ouvrage détonnant. On y retrouve avec plaisir son humour corrosif, son goût pour les personnages loin d'être exemplaires, les situations cocasses et les dialogues jouissifs. En à peine plus de deux cents pages, Brigitte Aubert peint sans fard une intrigue prenante, sans le moindre mot de trop, allant à l'essentiel. Si l'ensemble est d'une redoutable efficacité, il n'en demeure pas moins que l'histoire, au-delà de la particularité du tueur en série dans la mise en scène des corps, est assez classique, et les protagonistes parfois trop rapidement brossés. Par ailleurs, la manière d'écrire pourra rebuter quelques lecteurs ; en effet, là où l'on pouvait s'attendre à du glauque, du terrifiant, Brigitte Aubert s'ingénie à chercher le trait humoristique, le réjouissant. Certaines scènes, qui auraient pu être de purs instants glacés, sombrent dans la gaudriole et le comique. Cette spécificité est certes pleinement assumée par l'écrivain, mais ce ton débonnaire pourra surprendre voire exaspérer.
Le couturier de la mort porte donc parfaitement son titre. Brigitte Aubert rallie dans ce court roman gore et fantaisie, tragique et comique, comme on raccommode entre eux deux styles a priori bien distincts. Si le roman ne souffre pas de manière indubitable de ce mélange des genres, il n'empêche que certains y trouveront à redire, voyant dans cette cuisine liant le salé et le sucré une recette qui n'est pas pour eux.16/08/2010 à 11:32 1
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Couverture dangereuse
6/10 Un ouvrage que j'ai trouvé très proche de « Pour adultes seulement » , tant par la forme que par le fond. Des dialogues bien ciselés, des personnages et des situations que l'on pourrait retrouver dans un film de Tarantino, des chapitres courts et visuels. On lit ce bouquin comme on regarderait un film d'action américain.
Malgré ces points positifs, j'ai toujours un peu de mal avec le style de Philip Le Roy, justement trop américanisé à mon humble avis. Par ailleurs, malgré de très bonnes idées, je trouve que le récit tombe souvent dans la surenchère de scènes d'actions un peu inutiles voire caricaturales, au point que j'ai fini par ne plus croire à l'histoire, et j'ai eu le sentiment que le livre n'en finissait pas de finir.
Un assez bon moment de lecture, je le reconnais, mais qui ne me marquera certainement pas.11/08/2010 à 18:40
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Eternalis
7/10 Italie du dix-huitième siècle : un homme étrange est poursuivi car il serait le détenteur d'un important secret. Irak, de nos jours : une escouade américaine découvre un laboratoire secret où des cobayes ont été torturés et soumis à des expérimentations atroces. Sur les murs de cette geôle clandestine, un Ouroboros, serpent mythique se mordant la queue et formant un cercle. Beyrouth : Mia assiste, impuissante, à l'enlèvement de sa mère, une archéologue qui cherchait à obtenir un mystérieux codex. Quel peut bien être le lien entre ces diverses histoires ?
Auteur à succès, Raymond Khoury signait ce livre après Le dernier templier. En technicien confirmé, l'écrivain a su bâtir une intrigue mêlant aventure, religion, ésotérisme, science et espionnage, pour un ouvrage parfaitement calibré. On retrouve des complots à l'échelle internationale, des membres des services secrets particulièrement retors, un médecin aux essais cliniques dignes des pires sauvageries de Mengele, des héroïnes attachantes et fortes dans les épreuves, et un arcane qui pourrait modifier le monde. Raymond Khoury est un excellent conteur d'histoire, multipliant les rebondissements et les fins de chapitres donnant envie de se ruer sur le suivant – ce que l'on appelle des « cliffhangers ». Néanmoins, malgré l'imposante documentation et le savoir-faire de l'auteur, certains écueils viennent ternir la qualité de l'œuvre : beaucoup de poncifs – tant psychologiques qu'événementiels – émaillent le récit, et certaines ficelles de l'intrigue sont de la taille de cordes à nœuds.
S'il ne révolutionne pas le genre, Eternalis reste un agréable ouvrage, quelque part entre ceux de Steve Berry, Dan Brown et les péripéties d'Indiana Jones. En fait, s'il fallait n'émettre qu'un seul reproche majeur à ce roman, ce serait son titre : en effet, il dévoile beaucoup trop – et surtout beaucoup trop vite – la teneur du secret si ardemment poursuivi par les divers protagonistes de l'histoire.09/08/2010 à 19:03
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L'Irlandais de Brighton
7/10 Un style qui s'affirme et des références à Stephen King pleinement assumées : un bien bon ouvrage, tantôt poignant, tantôt déstabilisant, qui laissera un très agréable souvenir.
02/08/2010 à 11:22
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Sarko et Vanzetti
8/10 Gabriel Lecouvreur, alias le Poulpe, apprend que l'un de ses plus vieux amis, Vanzetti, leader anarcho-syndicaliste dans une usine d'armement, vient d'être arrêté pour le meurtre d'un vigile. N'écoutant que son cœur, Gabriel se rend sur place et découvre l'envers du décor : pendant que les métallos sont sur le point d'être virés de l'entreprise, il semble que de sombres accords sont passés chez les dirigeants. Des arnaques, des trafics en tous genres : le Poulpe ne sait plus où donner du tentacule. Une seule chose est certaine : il ira jusqu'au bout pour prouver l'innocence de son camarade, quitte à employer la méthode forte... voire très forte.
Deux-cent-soixante-septième aventure du Poulpe, ce Sarko et Vanzetti est cette fois-ci écrit par Sergueï Dounovetz. On y retrouve avec un plaisir non dissimulé le goût de Gabriel pour lutter contre les injustices, sans jamais oublier de se rincer régulièrement le gosier à la bière. Le verbe est haut, les réparties jubilatoires, et les personnages bien croqués. L'accent social est, comme toujours, de mise, avec une plongée dans le monde ouvrier, les luttes intestines entre syndicats et partis politiques, le milieu des trafiquants, et les sphères politiques opaques. D'ailleurs, Sergueï Dounovetz a choisi de mettre en avant les descriptions des grèves et leurs conséquences sociales, parfois au détriment d'une intrigue qui apparaît parfois secondaire ; cela pourra décontenancer voire décevoir des lecteurs qui auraient voulu une trame policière plus épaisse. Néanmoins, l'auteur assume pleinement ce choix, s'en délecte même, et offre des réflexions qui, à défaut d'être toujours partagées par le lecteur, n'en demeurent pas moins bien amenées et constitutives de l'esprit libertaire du Poulpe.
La série du Poulpe se porte donc très bien. Un auteur, un épisode, et l'on passe à la suite. Le prochain à animer le céphalopode sera Antoine Chainas avec 2010, l'odyssée de la poisse. Le roman de Sergueï Dounovetz se conclut sur un départ de Gabriel à Lille : Antoine Chainas y installera-t-il l'intrigue de son livre ? Suspense. La réponse en septembre prochain.29/07/2010 à 10:02 1
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Le dolmen des dieux
8/10 Gabriel Lacouvreur, alias le Poulpe, vient de fêter son demi-siècle. Pour se changer les idées, il file en Bretagne, mais les faits divers, encore une fois, attirent son attention. On a retrouvé deux gardes d'une réserve ornithologique au bas des falaises. Double suicide ? C'est ce que semblent prouver les premiers rapports d'autopsie. Mais Gabriel est quelqu'un de tenace, et il ne va pas en rester à ces apparences de vérité. Car, à n'en pas douter, il y a des gros poissons qui se gargarisent de cette version des faits, pourvu que leur bien-être soit préservé...
Deux-cent-soixante-huitième aventure du Poulpe signée par Chrysostome Gourio, Le dolmen des Dieux est, une fois de plus, un ouvrage bien mené et acide. Les sphères politiques, économiques et policières sont sacrément mises à mal par l'auteur, soulignant des relations pour le moins écœurantes. On retrouve le fort appétit de Gabriel Lecouvreur pour briser les injustices, en enquêteur libertaire opiniâtre. D'ailleurs, Chrysostome Gourio fait le lien avec d'autres opus de la série, comme Babel Ouest d'Gérard Alle, Certains l'aiment clos de Laurent Martin ou Arrêtez le carrelage de Patrick Raynal. L'intrigue est très bien menée, et sa résolution prend un écho significatif avec une récente actualité mettant en cause de hautes instances de l'État. Le lecteur aura donc le plaisir de voir Chrysostome Gourio renouer avec l'action et l'humour des précédents ouvrages, tout en offrant une passerelle inattendue avec Denis Bretin et Laurent Bonzon, en reprenant des personnages apparus dans Eden et Sentinelle.
Pour conclure, Le dolmen des dieux est un roman piquant et rythmé, poursuivant la série du Poulpe avec beaucoup de brio. Les aficionados se régaleront, et ceux qui ne connaissent pas ce feuilleton littéraire y verront un excellent moyen d'entrer dans la danse.29/07/2010 à 09:47 1
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La grande évasion en pantoufles
8/10 Il fallait du cran et du talent pour faire passer cette histoire de tueur, tout en rendant le personnage sympathique. Serge Scotto ne manque assurément ni de l'un ni de l'autre, et le résultat est très original ainsi que prenant. Chapeau !
29/07/2010 à 09:41
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Sable noir Tome 2 : Vampyres
Ouvrage collectif
7/10 Soyez les bienvenus à Sable Noir. Il s'agit d'un petit village perdu, ne figurant sur aucune carte. D'apparence paisible. En apparence seulement. Car quand tombe la nuit, sa physionomie se modifie. La quiétude devient terreur. Les bêtes se réveillent. Et elles ont faim. Faim de chair humaine. Soif de sang. Ce sont des vampires. Le détour vous intéresse-t-il toujours ? Oui ? Tant pis. Vous aurez été prévenus.
Après Sable noir auquel avaient participé Denis Bretin, Jean-Bernard Pouy, Maud Tabachnik, Andrea H. Japp et Xavier Mauméjean, voici la nouvelle cuvée. L'idée de base reste la même : un lieu isolé livré à de terribles événements, distillés en nouvelles, sous la plume d'écrivains reconnus. Ici, le fil rouge est la présence de vampires. Comme la plupart des ouvrages de ce genre, l'ensemble est soumis, bien évidemment, à l'imagination et au genre originel de chaque auteur. La nouvelle de Caryl Férey est somme toute classique, mais elle constitue une sorte de prologue intéressant en plongeant le lecteur dans l'ambiance des suceurs d'hémoglobine. Avec Brigitte Aubert, on bascule définitivement dans une ambiance glauque, très prenante. L'écrit de Thierry Jonquet fait à nouveau des merveilles, avec un habile suspense et une intrigue plus nuancée qui ne livre l'ultime pièce du puzzle que dans les dernières pages. La nouvelle d'Ann Scott est plus maléfique, revisitant le thème de la maison hantée et des apparitions, avec de nombreuses situations qui raviront les amateurs du genre mais qui s'éloigne du thème des vampires. Le récit de Colin Thibert est typique de l'auteur, avec de l'humour et des dialogues qui font mouche, et malgré un classicisme assumé, on passe un bon moment avec ces deux cambrioleurs qui ne sont pas au bout de leurs surprises. Quant à Pierre Pelot, ultime contributeur, il sait créer une histoire alternant passé et présent avec un final dont les dernières lignes sont marquantes.
Vampyres est donc un recueil bien bâti et s'offrant une pléiade d'auteurs au talent certain. Si les nouvelles sont brodées sur un sujet commun, elles n'en conservent pas moins leur identité respective. Les contributeurs ont véritablement respecté le cahier des charges qui leur était imposé, et, à défaut de marquer les esprits de manière durable, proposent ainsi un florilège divertissant et... appétissant.27/07/2010 à 08:49
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La Faute à pas de chance
7/10 A l'est de Los Angeles, un hélicoptère jette par-dessus bord Calvin Franz avant de rentrer au bercail. Quelques temps plus tard, Jack Reacher, commando à la retraite, reçoit un message sibyllin via son compte courant : il a en effet reçu 1030 dollars. Passionné de chiffres et de mathématiques, il finit par comprendre la transmission : le 10-30 est un signal d'alerte que seul un des anciens membres de son unité d'élite a pu lui expédier. Pour savoir qui lui a envoyé ce SOS, il n'a plus à réfléchir : il doit sortir de sa retraite et passer à l'action.
En spécialiste du genre, Lee Child signe un nouvel opus à la hauteur des précédents. On retrouve les milieux interlopes du terrorisme et des services secrets, avec force complots, trafics et enjeux internationaux. L'auteur manie parfaitement les codes du thriller et du roman d'espionnage, n'ayant rien à envier aux plumes de Robert Ludlum ou Chris Ryan. Les personnages, depuis les camarades de combat de Jack Reacher jusqu'à leurs ennemis, sont bien campés et très intéressants malgré les clichés inhérents à ce type de littérature. Le lecteur aura le plaisir de retrouver des scènes d'action énergiques et visuelles, avec un goût consommé pour le suspense. Lee Child maîtrise l'histoire de bout en bout, avec un canevas certes classique mais néanmoins efficace, profitant de nombreux alinéas et autres phrases nominales pour donner du souffle à l'action. Par ailleurs, si certains romans comme Les caves de la maison blanche souffraient d'un trop-plein de péripéties et donc d'un certain manque de crédibilité, il semble que Lee Child a gagné en maturité, avec des protagonistes plus travaillés et davantage d'attention portée aux situations, plus plausibles.
La faute à pas de chance est donc un ouvrage palpitant et très bien mené, permettant des heures d'une lecture très enjouée et racée. Il ne révolutionne certes pas le genre mais assume pleinement son rôle distractif, pour le plus grand régal d'un lectorat féru des aventures de Jack Reacher.24/07/2010 à 10:16 1
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Le masque d'argile
8/10 Un très bon roman, comme souvent chez Maître Brussolo : imaginatif, original, instruit, avec des personnages sacrément travaillés. J'en redemande !
21/07/2010 à 09:02 1
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Obscura
8/10 Un très bon roman, prenant et bien construit, avec une documentation solide pour étayer son intrigue. J'ai beaucoup aimé la fin, vraiment poignante.
20/07/2010 à 09:09
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Le monstre d'Arras
8/10 Jean Maurtin a tout du criminel idéal. La petite Virginie Tirman a été retrouvée morte, et tous les doutes se sont portés sur cet homme assez marginal, obsédé par la photographie. Forts soupçons de la police, puis découverte de preuves irréfutables, et enfin des aveux après vingt-et-une heures de garde à vue. L'affaire semble bouclée. Sauf pour un avocat opiniâtre et son fidèle acolyte, pour qui les preuves sont presque trop évidentes pour être crédibles.
Après Braquages à Fives, Le monstre d'Arras est le deuxième ouvrage de Pierre Willi – dont il a également peint le tableau figurant en couverture – à paraître aux éditions Ravet-Anceau. Ce roman, oscillant entre l'œuvre noire et le roman à suspense, est parfaitement mené. Les huit premiers chapitres sont absolument remarquables, décrivant avec une sobriété inouïe la lente descente aux enfers de Jean Maurtin, la mécanique implacable de la machine policière, le sentiment de culpabilité des proches du présumé coupable, jusqu'à la confession qui sonne comme un coup de tonnerre. Ensuite, on découvre avec plaisir deux personnages très intéressants, Gilles Démol, avocat atypique déterminé à défendre les pires individus devant la justice, et son comparse Émile Nource, enquêteur en marge. Ce duo de limiers est très attachant, et le lecteur progresse dans le récit au fur et à mesure de leurs impressions et découvertes, jusqu'à la vérité, inattendue. La plume de Pierre Willi est très plaisante, toute en retenue et teintée d'humour, et l'auteur restitue avec beaucoup de crédibilité et d'humanité les pensées de chacun de ses personnages.
Le monstre d'Arras est donc un livre de très haute volée, à la fois prenant et parfaitement plausible, décrivant avec justesse les douleurs des êtres broyés par les erreurs judiciaires. A n'en pas douter, cet écrivain a du talent, et l'on ne pourra que se ruer sur ses précédents ouvrages ainsi que ceux à venir.09/07/2010 à 11:57
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La Bête et la Belle
9/10 C'est une nouvelle enquête que doit résoudre le policier Gabelou. Face à lui, un vieux bonhomme rustre, Léon, aux manières indélicates. Il y est question de meurtres : une femme, autrefois fatale, un enfant, et bien d'autres encore. Visiblement, Léon protège un ami, le véritable criminel de l'histoire, qui est actuellement à l'hôpital. Une affaire somme toute classique, tragiquement banale. Sauf que Léon n'est pas prêt à livrer l'intégralité de la vérité. Non. Léon a beau être un sympathique péquenaud, il n'en a pas moins un sens aigu de la camaraderie. Il ne va pas dévoiler aussi vite le déroulement d'une existence qui l'a conduit à devenir le complice d'un assassin.
Thierry Jonquet, disparu le 9 août 2009, était l'une des figures majeures de la littérature noire française. Les lecteurs conserveront de lui le souvenir d'opus ténébreux et tragiques comme Mygale ou Le manoir des immortelles. Au sein de cette riche bibliographie, La Bête et la Belle est un ouvrage typique de l'auteur. Glauque, parfois désespéré, avec des portraits au vitriol. De prime abord, l'intrigue semble classique, voire convenue : un policier, un tueur, son acolyte. Mais c'est sans compter sur l'extraordinaire talent de conteur de Thierry Jonquet : le récit lapidaire – environ cent-cinquante pages – tient en haleine en raison de son aspect dédaléen. Les propos des divers protagonistes alternent pour composer un habile puzzle. A grands renforts de flashbacks et d'aveux voilés, la vérité se fait lentement, jusqu'à un épilogue sinistre faisant écho à la noirceur de l'histoire.
Vingt-quatre ans avant son trépas, Thierry Jonquet signait un ouvrage d'une incroyable puissance. Sobre, sans scène haletante ni action échevelée. Un roman qui remue les tripes, aussi humain qu'il est inhumain. Une pépite d'ébène.06/07/2010 à 18:27 3
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Et on dévora leur coeur
7/10 La situation de Samuel Johnson n'est guère reluisante. Après avoir volé cinquante mille dollars à un mafieux, Miguel Beaufort, il découvre son ami tué dans une chambre d'hôtel. Deux tueurs à gages aux trousses, il n'a plus d'autre choix que de s'enfuir vers les montagnes... avant de découvrir un nouveau cadavre près d'un village isolé. Murton Caves est un endroit étrange, où les hommes ne se déplacent qu'armés, les maisons entourées d'une clôture électrifiée, et où domine une curieuse loi du silence. Samuel Johnson va l'apprendre à ses dépens : certains passés ne doivent surtout pas être déterrés.
Premier ouvrage de Sylvain Blanchot récompensé au Festival de Beaune, Et on dévora leur cœur est un thriller fantastique très prenant. L'auteur est également scénariste, et cela se sent sans peine à la lecture de son œuvre : les chapitres sont habilement menés, alternant les divers points de vue – la vie au village, Samuel, les criminels qui le pourchassent –, au point qu'il est très difficile d'en quitter la lecture. On retrouve avec plaisir des ambiances sombres et tourmentées à la Stephen King, avec son lot de phénomènes inexpliqués, la terreur des protagonistes, l'ambiance lourde de tourments. Par la suite, le roman s'ouvre sur des scènes d'action tonitruantes, très visuelles, avec force courses-poursuites, fusillades et explosions, au rythme échevelé, parfois même trop, ce qui nuit un peu à la crédibilité de l'ouvrage. Le lecteur aura également le plaisir de découvrir une intrigue habile, malgré quelques poncifs, l'emmenant sur les terres de la mythologie amérindienne, avec des accents à la Tony Hillerman ou Kirk Mitchell.
Et on dévora leur cœur est donc un premier roman de belle tenue, prenant et efficace, auquel on pardonne sans problème quelques modiques péchés de jeunesse. Indéniablement, la plume de Sylvain Blanchot est talentueuse, et on ne pourra que se ruer sur ses prochains romans.29/06/2010 à 17:58
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Croisière maudite
Lincoln Child, Douglas Preston
6/10 Alors qu'ils sont au Tibet, l'inspecteur Aloysius Pendergast et sa protégée Constance Greene découvrent qu'un bien mystérieux objet de culte, l'Agozyen, a disparu du temple. Le duo va rapidement découvrir que le voleur est probablement sur le paquebot Britannia, un immense navire de luxe. Une fois à bord, une série d'événements étranges survient : disparitions, suicides, meurtres sanglants... Pour leur plus grand malheur et celui des passagers, le voyage va prendre une tournure particulièrement terrifiante.
Huitième ouvrage de la série consacrée à Aloysius Pendergast, Croisière maudite constitue un thriller fantastique efficace, signé par Douglas Preston et Lincoln Child. On retrouve avec plaisir le si spécial agent du FBI, cette fois-ci aux prises avec un esprit particulièrement retors. Le style des deux auteurs est bien présent, mélangeant action et suspense, avec un héros toujours aussi atypique. Cependant, le niveau atteint par Le violon du diable ou Danse de mort n'est pas égalé. En effet, l'intrigue peine un peu à prendre forme, et même si l'on suit avec intérêt les pérégrinations de Pendergast dans ce paquebot, le lecteur se perd parfois dans des intrigues secondaires : la traque de tricheurs aux cartes, les divers personnages, etc. Par ailleurs, Douglas Preston et Lincoln Child amalgament divers genres – le whodunit, le récit catastrophe, le fantastique –, mais l'alchimie ne prend pas toujours et l'on a parfois l'impression tenace que l'histoire part dans plusieurs directions. Certains événements sont même aisément devinables, téléphonés, et même si la mécanique du thriller est impeccablement maîtrisée par les deux auteurs, ce livre laisse un petit goût de déception.
Au final, Croisière maudite est un opus qui ne parvient pas toujours à atteindre la qualité des précédents épisodes, rappelant en cela Les croassements de la nuit, qui marquait un peu le pas par rapport aux autres. Néanmoins, il se laisse lire avec plaisir, procure de belles heures de détente, et apporte un élément important dans les ultimes pages, élément qui laisse augurer des rebondissements intéressants pour la suite.22/06/2010 à 19:09 3
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La Chambre d'ambre
7/10 J'ai bien aimé cet opus. Bien ficelé, écrit avec talent, un début d'intrigue très prenant et un style qui happe littéralement. Mais je suis plus mitigé quant au final : s'il est bon, il ne m'a pas chamboulé, et je ne l'ai pas trouvé aussi magistral que l'ont trouvé d'autres lecteurs. Néanmoins, une très agréable lecture.
15/06/2010 à 18:43
