El Marco Modérateur

3249 votes

  • Le Marié perd la tête

    John Dickson Carr

    7/10 Je suis un fan de cet auteur, et ce fut un réel régal que découvrir et me plonger dans son premier roman, datant de 1930. Si j’ai dévoré l’histoire, prenante, et été enchanté par l’écriture nécessairement surannée, j’ai été un peu moins séduit par la résolution de l’intrigue. Elle est certes intéressante et ensorcelante, mais je n’y ai pas trouvé de véritable éclat de génie comme dans « Trois cercueils se refermeront » ou « La Chambre adente ». C’est donc très efficace et toujours aussi habile et intelligent, mais ça n’est pas mon ouvrage préféré de John Dickson Carr.

    11/08/2016 à 23:19 2

  • Mort sur le Net

    Christian Grenier

    8/10 François Malan est retrouvé mort dans son appartement, mais le crime est pour le moins énigmatique : le domicile était fermé de l’intérieur, il a été transpercé par une épée qui semble avoir bondi hors de son armoire vitrée avant de disparaître, et le message Par le fer par le feu par le net est découvert sur l’écran de l’ordinateur. Chargée de l’affaire, Logicielle n’est pas au bout de ses surprises quand un autre crime, tout aussi étrange, intervient. L’épée, ayant appartenu à Jeanne d’Arc, serait-elle maudite ?

    Ouvrage issu de la série consacrée à Logicielle, ce Mort sur le net régale de bout en bout. En plus d’organiser des retrouvailles intéressantes avec l’enquêtrice principale, Grenier+Christian exploite au mieux une intrigue de prime abord ténébreuse dont l’opacité va lentement se lever. Mélangeant habilement l’arcane historique de cette lame qu’aurait utilisé Jeanne d’Arc à deux meurtres commis en chambre close, l’auteur ménage avec adresse un suspense solide. Ponctué de quelques références à de précédents opus de la série (dont L’Ordinatueur ou @ssassins.net), ce livre s’achève sur une note ésotérique inattendue, ultime rebondissement d’un roman épatant.

    Empiétant à de nombreuses reprises sur les terres de la littérature policière pour adultes, cet ouvrage de Grenier+Christian se montre aussi efficace que passionnant. Une preuve supplémentaire, s’il en était encore besoin, que cette saga fait partie des incontournables du genre.

    11/08/2016 à 23:17 1

  • Les 400 Coups du Kronprinz

    Jacques Thelen

    7/10 En 1907, au Crotoy, une femme découvre la tête tranchée de son cuisinier d’époux déposée dans une glacière et préparée comme un mets. Ce sont deux autres restaurateurs qui subissent le même sort. Pour des raisons politiques, Georges Clemenceau s’inquiète de cette vague de crimes et envoie sur place le commissaire Jean-Baptiste Lemercier afin de tirer cette affaire au clair. Dans le même temps, le Kronprinz, fils de Guillaume II d’Allemagne, entend venir profiter de la côte picarde, de ses paysages de chasse et de ses jolies dames. Mais il se pourrait qu’un complot s’y trame contre lui.

    Après Le Trésor de la Baie de Somme, voici le deuxième ouvrage de Jacques Thelen. C’est un véritable plaisir que de se promener en sa compagnie durant la Belle Epoque dans la contrée picarde. Les personnages y sont attachants, notamment Lemecier et Fiory, les deux principaux enquêteurs. Là où le roman de Jacques Thelen séduit également, c’est parce qu’il met en scène des personnages ayant réellement existé, et qu’ils prennent une part importante dans le récit : Guillaume de Prusse, Guillaume II d’Allemagne, Georges Clemenceau, mais également Anatole Deibler, authentique « Exécuteur en chef des arrêts criminels », autrement dit bourreau. A ses côtés, on en apprend beaucoup sur le fonctionnement de l’échafaud, avec à la fois beaucoup de technicité sans verser dans les détails de mauvais aloi. L’intrigue est en soi réussie et très agréable à lire, même si l’on regrette peut-être que les motifs expliquant la route sanguinaire du tueur soient un peu simplistes ou expédiés à la va-vite. C’est en fait la concision du roman tout entier qui déçoit un peu : on aurait tant aimé que Jacques Thelen creuse davantage les personnages et qu’Anatole Deibler soit plus présent encore dans l’enquête, tant ils constituaient d’indéniables promesses de bonheur littéraire. Mais il est impossible de bouder son plaisir devant ce livre : c’est court, instruit, original, et très divertissant. Un opus alléchant après lequel vous ne regarderez probablement plus jamais un crabe de la même manière. Il est à noter qu’il s’agit aussi du quatrième ouvrage de la collection Belle Epoque, et qu’une telle lecture ne peut que donner envie de poursuivre le voyage temporel.

    11/08/2016 à 23:14 1

  • De fric et de sang

    Alain Stucker

    7/10 Othman, un enfant, disparaît à l’observatoire de Lille alors que l’on y retrouve une tête tranchée dans la lunette d’un télescope. C’est, pour le commandant de police Constant Kepler, le début d’une longue descente aux enfers, car deux êtres, brisés par la vie et les hommes, ont décidé d’unir leur haine pour des représailles sans précédent.

    Pour son premier ouvrage à paraître chez Ravet-Anceau, Alain Stucker fait assez fort. Dans ce récit ramassé et sombre à l’envi, le lecteur se régale de bout en bout. L’histoire est forte, acérée, parfois dérangeante, et les quelque deux-cents pages défilent à toute vitesse. Grâce à une plume très forte et déjà experte, qui n’a finalement rien à jalouser aux pointures de la littérature policière, l’écrivain tisse une conjuration efficace et cruelle, où se percute un duo de victimes devenues bourreaux : Solange, vétérinaire violée par une bande de voyous dont on ne connait que plus tard les réelles intentions, et Guillaume, une proie dont la haine s’est commuée en folie meurtrière. De nombreux passages pénètrent l’âme, le cœur et les tripes du lecteur, et l’on achève ce livre serré avec une fin mémorable concernant Kepler et ce qu’il est advenue de sa fille. Et c’est également pour toutes ces excellentes raisons, comme autant de circonstances atténuantes, que l’on pardonne volontiers à Alain Stucker cette propension, pleine de bonnes intentions, à vouloir toujours en rajouter. La dimension qu’il offre à Guillaume, avec cette idée redoutable des cages à oiseaux, aurait pu se suffire à elle-même. Egalement, les errances du commandant au bar, ses clients – certes colorés et croustillants, et apportant un agréable touche d’humour et d’humanité – n’étaient pas nécessaires à l’intrigue.

    Voilà un roman intensément sombre et mordant, intelligent et prometteur, qui suscite d’ores et déjà de grandes attentes quant aux prochains opus de l’auteur.

    11/08/2016 à 23:10 1

  • L'homme de la banquise

    Serge Brussolo

    9/10 Un mot pour caractériser Serge Brussolo et son œuvre ? L’ivresse. Des idées folles qui jaillissent de partout et de nulle part. Une imagination débordante, celle d’un homme à l’appétit sans bornes, qui veut autant enivrer ses lecteurs que lui-même, jusqu’au vertige. Même des passages qui ne nécessitaient aucune application particulière (comme les premières pages sur Peggy Meetchum allant rechercher un cadavre en pleine montagne) sont ponctuées de dizaines de fantaisies littéraires par chapitre. Le scénario et le récit peuvent rebuter les esprits les plus cartésiens (le coup des nanotechnologies si puissantes qu’elles en viennent à transformer leur hôte en animal, pour ne citer que cet exemple…), mais l’ensemble m’a fait penser aux très grandes heures de l’écrivain, où la maestria de son écriture se conjuguait à l’excellence et l’inventivité de ses histoires. Assurément le genre d’objet littéraire qui me donne envie de me replonger dans la bibliographie du monsieur !

    26/07/2016 à 08:40 3

  • Le Maître du haut château

    Philip K. Dick

    7/10 Je ne découvre que maintenant cette œuvre de Philip K. Dick. Si l’histoire est très originale, avec cette uchronie concernant la Seconde Guerre mondiale, l’usage du Yi-King et autres trouvailles de l’auteur, je reste plus sceptique quant aux parties du récit relatives aux trafics d’objet d’art, ainsi que les rapports entre nazis et Japonais. J’aurais préféré une histoire plus resserrée autour du voyage et de la rencontre avec Hawthorne Abendsen par Juliana, ou encore autour des rivalités entre les deux blocs ayant gagné le conflit. Néanmoins, malgré son demi-siècle et une approche parfois baroque du sujet, il n’en demeure pas moins que ce roman détonnant conserve encore à mes humbles yeux une puissance littéraire doublée d’un formidable objet d’interrogations.

    26/07/2016 à 08:39 3

  • Judge Tome 1

    Yoshiki Tonogai

    8/10 Une ambiance sacrément sombre et anxiogène, où l’on retrouve sans mal des références à des films magistraux comme Seven ou Saw. Beaucoup de tension au cours de ce premier tome, et tout autant de questions qui naissent de ce huis clos dense et prenant. J’essaierai d’être de la partie pour les épisodes suivants.

    26/07/2016 à 08:38

  • La Nuit des magiciens

    Agnès Laroche

    7/10 Malo et ses parents partent en vacances dans un camping non loin de leur domicile. Sur place, l’écolier a la surprise, plus que la joie, d’y retrouver Barnabé, un camarade, mythomane assidu. Mais ce qui est plus embêtant est que quelqu’un profite des spectacles d’un magicien, Matteo Matteoni, pour cambrioler tentes et caravanes.

    Agnès Laroche accroche d’entrée de jeu son lectorat – jeune, essentiellement – dès les premières pages de ce nouveau roman. Le ton y est enlevé, espiègle, et l’on s’attache avec jubilation aux divers personnages. Plus précisément, si Malo est un gamin malin et enjoué, c’est surtout son copain Barnabé qui retient l’attention. D’abord détestable par ses mensonges éhontés, il devient rapidement sympathique, voire le personnage le plus enthousiasmant de ce récit. Toujours avec humour, Agnès Laroche développe une histoire prenante autour de ce cas – certes classique mais efficace – de cambriolages à répétition que notre duo d’enquêteurs en culotte courte va démêler avec beaucoup de sang-froid et d’intelligence.

    Le Fantôme de Sarah Fisher et un esprit enquêtant sur son propre décès, Tu vas payer et la Résistance pendant la Seconde Guerre mondiale, Sauve-toi Nora ! et un gamin en proie à un phénomène extralucide… Rares sont les auteurs pour la jeunesse ayant su élargir à ce point le spectre des sujets abordés tout en marquant durablement l’esprit des lecteurs ; Agnès Laroche en fait indéniablement partie. Et ce nouvel opus, divertissant et séduisant, confirme ce qui semble s’apparenter à une routine concernant cette écrivaine, une accoutumance plus qu’une simple habitude, et nul ne s’en plaindra.

    26/07/2016 à 08:36

  • Piège mortel pour un prince / Deadly Trap for a Prince

    Philippe Barbeau, Roger Judenne

    7/10 Une histoire plaisante, certes classique, mais agréable et efficace, avec de jeunes camarades enthousiasmants et sympathiques, pas mal de situations amusantes, pour un roman que j’ai pris plaisir à lire.

    09/07/2016 à 08:46

  • Ne réveillez pas la Momie !

    R. L. Stine

    7/10 Une histoire intéressante, qui saura ravir les fans de l’auteur. Les ressorts sont un peu toujours les mêmes, et surnagent quelques incohérences et autres facilités. Cependant, contrairement à d’autres histoires, j’ai été agréablement surpris de ne pas assister à une surenchère stérile voire contreproductive de phénomènes occultes, puisque mis à part l’ultime événement, R. L. Stine a arrangé un récit – toutes proportions mises à part, bien évidemment – crédible, sans monstre ni extraterrestre. Une curiosité, donc, ou comment un écrivain peut enchanter son lectorat adoré tout en nuançant/renouvelant ses histoires. Et rien que pour cet essai, j’apprécie vraiment !

    09/07/2016 à 08:45

  • Green Blood Tome 1

    Masasumi Kakizaki

    7/10 Une histoire sans réelle innovation scénaristique, mis à part le cadre angoissant du New York de la fin du dix-neuvième siècle. Cependant, les dessins secs et angoissants, les personnages croustillants, et les rebondissements – auxquels on s’attend et que j’aurais presque été déçu de ne pas trouver – m’ont fait passer un très agréable moment. Je tâcherai d’être au rendez-vous des prochains épisodes.

    09/07/2016 à 08:44 2

  • Le Fantôme à la main rouge

    Hélène Montardre

    6/10 Une histoire de fantôme et de château hanté à laquelle se mêle un tournage de film. C’est intéressant mais peu marquant : seule la fin, ouverte, peut retenir l’attention.

    09/07/2016 à 08:43

  • La Rançon

    Chris Bradford

    7/10 Connor Reeves est un adolescent recruté par une agence experte dans l’art de protéger des personnalités. Après avoir défendu la fille du Président des Etats-Unis, il doit à présent assurer la sécurité des filles jumelles d'un magnat des médias à bord d’un yacht. Mais des pirates de la mer missionnés par un énigmatique commanditaire sont bien décidés à mettre la main sur la précieuse cargaison humaine.

    Après un premier opus réussi, revoilà donc Connor pour le deuxième tome de la série Bodyguard. Chris Bradford continue de régaler ses fans avec les caractéristiques qui ont fait le succès du premier opus. Le jeune garde du corps est attachant en diable, rusé, vertueux et sachant user autant de ses capacités physiques qu’intellectuelles. Ce décor de bateau perdu en pleine mer est certes connu, mais l’auteur parvient à l’exploiter au mieux, en alternant scènes de tension et d’action, sans compter d’intelligentes touches d’humour disséminées au gré de l’histoire. De l’attaque de l’embarcation à la négociation avec les preneurs d’otages en passant par le court épisode de la « citadelle », pièce fortifiée du bateau, Chris Bradford exploite tous les passages que l’on attend d’un tel récit. Et si certains moments sont un peu téléphonés, il n’en demeure pas moins que le roman est assurément efficace et prenant.

    A l’instar de L’Otage, voici typiquement le genre d’ouvrage dense et captivant qui sait réconcilier les jeunes avec la lecture. Une histoire nerveuse avec des personnages immédiatement attrayants, aux côtés desquels les presque quatre-cents pages du livre passent à la vitesse d’un hors-bord.

    25/06/2016 à 12:46

  • Menace sur le réseau

    Laurent Queyssi

    8/10 Alors qu’il se trouve en Californie pour apporter son aide technique à la réalisation d’un film, Adam Verne, hacker en fauteuil roulant, est victime d’un chantage : contre la libération de son amie Emma, il doit améliorer un ver informatique. C’est le début d’une aventure saturée de machinations, ainsi que d’une cruelle plongée vers son propre passé.

    Après Infiltrés et Dans l'oeil de Lynx, Laurent Queyssi revient avec ce troisième tome, qui ravira sans mal ses fans. On retrouve avec bonheur Adam Verne, petit génie de l’informatique, intrépide et courageux, ayant perdu l’usage de ses jambes dans un accident qui a également coûté la vie à son père. Les rebondissements sont légion, et l’on navigue, au gré des pages, de manigances informatiques aux coups bas des services d’espionnage, en passant par une vengeance dont l’enjeu pourrait être l’annihilement de toute vie privée sur Internet. Laurent Queyssi sait faire vivre ses personnages, et pour en percevoir tout le sel ainsi que les évolutions, il est préférable de lire ses ouvrages dans leur ordre de parution. Au-delà de l’intrigue policière et du divertissement procuré, le lecteur sera alerté, avec intelligence, sur les méfaits de l’emprise d’une entreprise de fiction qui est une habile transposition de Google, ou encore les failles dans lesquelles peuvent pénétrer les pirates informatiques.

    Nerveux et adroit, engagé à sa façon, voilà un très bon ouvrage destiné à la jeunesse, où le suspense est enchâssé avec esprit et discernement dans une légitime critique de la toute-puissance de certaines entreprises informatiques.

    25/06/2016 à 12:33 1

  • Le Livre sans nom

    Anonyme

    8/10 Une histoire complètement barrée, de bout en bout, et un véritable festin ! Je ne me suis pas ennuyé un seul instant, et j’ai adoré cet enfilement de références cinématographiques, comme d’autres adorent enfiler des perles. De l’humour, de la violence, du surnaturel, et surtout, un auteur qui plane très haut dans la stratosphère. Un récit décomplexé, déjanté comme ça n’est guère permis, et qui distrait sacrément !

    25/06/2016 à 12:28 1

  • Au voyeur !

    Carter Brown

    7/10 Un roman typique de la collection Carré noir, gorgé de tous ces ingrédients que l’on se plaît à retrouver : un détective privé obstiné, toujours prompt à filer des mandales, et trouvant sur sa route des femmes magnifiques et peu farouches. Une intrigue qui n’a rien d’extraordinaire, mais ramassée, prenante et efficace, ou comment Rick Holman parvient à comprendre le vitriolage d’une jeune actrice lors d’une croisière sur un yacht privé. Une baignade où le noir le dispute au cabotinage et à la gaudriole, au cours d’un récit court et plus qu’agréable. J’avais déjà apprécié précédemment des ouvrages de Carter Brown, et celui-ci confirme sans le moindre doute que je me lancerai dans la lecture d’autres de ses livres.

    25/06/2016 à 12:24 1

  • Un petit bout d'enfer

    Rachel Corenblit

    7/10 Un roman particulièrement noir, que ne renierait pas Guillaume Guéraud dans le même genre et un style proche, où les personnages sont parfois autant des victimes que des bourreaux. Une plume opaque, une construction parfois volontairement saccadée qui risque de rebuter et décourager les très jeunes lecteurs (surtout dans les premiers chapitres), mais un ouvrage qui s'apprécie dans sa globalité.

    10/06/2016 à 18:13 1

  • Meurtre au Majestic

    Marie Bertherat

    7/10 Une enquête fort sympathique, avec des personnages prenants et croustillants, où Marie Bertherat a bâti une intrigue propre à enchanter les jeunes lecteurs autour du thème de la vengeance.

    10/06/2016 à 18:10 1

  • Le Mort-Homme

    Denis Bretin

    9/10 Becky n’a pas le choix. Malgré ses seulement douze ans, il doit aller fouiner dans les tranchées sous la férule de son oncle pour en remporter des trophées facilement vendables. Mais une de ses nombreuses expéditions tourne mal lorsque Becky fait un malaise et devient en partie possédé par un spectre, le Mort-Homme.

    Avec cet ouvrage percutant et atypique, Denis Bretin marquera durablement les esprits. En fait, il est particulièrement difficile de résumer ce Mort-Homme. Sans cesse, l’auteur change de registre, brouille les pistes, oscille d’un genre à un autre. Si l’intrigue commence de manière très accessible, il s’ingénie par la suite à offrir d’autres angles d’approche, varier les lieux, alterner les points de vue, et même opérer des flashbacks. Ainsi, le lecteur va passer de l’existence captive de Becky à un passage au Blanc Balcon, un ancien asile psychiatrique où un docteur s’exerce à des traitements brutaux sur certains patients, des rédactions de Becky décrivant la vie d’un soldat de la Grande Guerre avec une justesse effrayante aux phénomènes inexpliqués secouant le jeune homme. De prime abord, ce kaléidoscope pourrait rebuter. Pourtant, il n’en est rien. Ce livre est particulièrement réussi, aussi instructif qu’élégant, montrant avec une intelligence rare la brutalité des combats de la Première Guerre mondiale. La familiarité des propos de Becky succèdent à la beauté ensorcelante des compositions du gamin qui vont, progressivement, faire apparaître un événement ancien, fondateur, une sorte de pacte faustien. Dans cette œuvre forte et ésotérique, Denis Bretin fait la démonstration de son talent ; ses mots sont corrosifs, toxiques, hachés, meurtriers. On ressort de cet opus autant déboussolés qu’essoufflés.

    Denis Bretin, tout en conservant ce scénario fort et brûlant, aurait pu faire le choix d’une structure plus facile, attendue ou consensuelle. Au contraire, il a opté pour le fractionné, l’âpre, le déconcertant. Une sinuosité et une rugosité qui ne plairont probablement pas à tous les lecteurs, mais, pour quiconque s’accommodera de cette exigence, le voyage sera inoubliable.

    10/06/2016 à 18:06 3

  • Trop de Plomb

    Enrico Pandiani

    7/10 Thérèse Garcia, journaliste, est tuée chez elle. Son assassin l’a massacrée à coups de poing et de pied. Une explosion de violence sur laquelle le commissaire Mordenti et son équipe, que l’on surnomme « Les Italiens », vont enquêter. Ce n’est que le début d’une série de crimes violents, dont l’origine remonterait jusqu’à un défilé de couture se déroulant en banlieue.

    Après Les Italiens, Enrico Pandiani nous revient avec ce deuxième ouvrage consacré au commissaire Mordenti. On y retrouve avec plaisir ce policier cocasse, drôle et tenace, qui va vivre ici une histoire d’amour brûlante avec une chroniqueuse de mode. C’est une intrigue solide que l’auteur nous propose, entre jalousies journalistiques et vengeance consommée à froid. Sans pour autant briller par son originalité, elle convainc aisément et emporte le lecteur du début à la fin de ce livre enlevé. Alternant avec talent les scènes de suspense, de traque policière et d’action, ce roman est un habile polar, parfois très drôle, où l’humour se glisse avec bonheur dans les dialogues.

    Un ouvrage intelligent et prenant, où la plume d’Enrico Pandiani enchante par son efficacité et sa malice salvatrice. Un délicieux roman qui, malgré la dureté de certains passages, offre un entracte bienfaisant.

    10/06/2016 à 18:01 2