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Éléonora
7/10 … ou les amours enfiévrées du narrateur avec sa cousine, Eléonora, jusqu’à ce que cette dernière, ayant ébloui tout l’univers de son amant ainsi que le décor de leur maison, ne vienne à mourir. Au comble du désespoir, avant qu’elle ne meure, il lui fait la promesse de lui rester fidèle… jusqu’à ce qu’il tombe amoureux d’Ermengarde. Une bien belle nouvelle, magnifiquement écrite, mais dont la fin m’a, au départ, un peu déçu : je ne savais pas qu’en dire, peut-être m’attendais-je à autre chose, éventuellement plus fidèle à l’esprit noir d’Edgar Allan Poe. Mais à la réflexion, la conclusion est probablement la meilleure qui soit au vu du texte, de son écriture et de son alignement littéraire.
07/06/2020 à 17:55 1
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Le Chat noir
9/10 Une nouvelle où un homme, le narrateur, en vient à énucléer son chat puis à le tuer, avant que le meurtre de son épouse, de colère, ne vienne à lui faire commettre une erreur supplémentaire, et fatale. Un récit brillantissime, de ceux qui s’imposent naturellement comme des jalons de la littérature noire (l’aspect fantastique me paraît un peu en retrait malgré quelques éléments concernant le félidé), avec une chute implacable, qui marque durablement les esprits et a inspiré moult récits. Une madeleine de Proust pour moi tout autant qu’une borne sur les chemins de la littérature.
07/06/2020 à 17:53 2
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Le Défenseur
8/10 William Benson n’est pas un avocat comme les autres. Après avoir purgé une peine de prison pour meurtre, il dirige à présent son propre cabinet à Londres. Détesté de tous en raison de ce passif judiciaire, son cas est même suivi de près par le Ministre de la Justice. Secondé par Tess de Vere, il doit défendre Brent Stainsby, accusé d’avoir pendu son ex-compagne, Diane, que l’on a retrouvée avec une orange sanguine dans la bouche. Stainsby a tellement accumulé les mensonges qu’il en est presque condamné d’avance. Mais il se pourrait que l’affaire soit bien plus complexe…
Après Reconnu coupable, voici le deuxième opus de la série consacrée à Benson et de Vere. Poursuivant son exhumation du passé de Benson, John Fairfax nous livre dans le même temps un roman policier de très haute tenue. Ancien avocat lui-même, l’auteur maîtrise parfaitement les rouages du système judiciaire anglais, les protocoles des procès, les techniques employés par les magistrats, et tous ces petits éléments qui, accolés, concourent à bâtir un ensemble cohérent et diablement crédible. On se plaît ainsi à (re)découvrir William Benson, hanté par la mort de Paul Harbeton, suivi par un psychiatre, ayant un frère handicapé, vivant dans une péniche, et luttant du point de vue financier pour ne pas perdre à la fois son cabinet et la péniche où il vit. Parallèlement, l’affaire dite de « l’orange sanguine » est très prenante, puisqu’au-delà des apparences, tout y est bien plus nuancé et dédaléen que prévu. La personnalité de Benson et celle de la victime offriront de nombreux rebondissements, tandis que de leurs passés respectifs jailliront tantôt des incertitudes, tantôt des vérités inattendues. Il y sera question d’amours éconduites, de personnalités fragiles et brisées, de trafics humains… et d’un enfant capable de faire rebattre les cartes d’un procès. Un opus dense et riche de bout en bout, se concluant sur une future affaire dite de « Limehouse »
Un ouvrage très bien documenté et construit, et doublé d’une intrigue de premier ordre. On a d’ailleurs hâte que le troisième opus de cette série, Forced Confessions, soit traduit en français.25/05/2020 à 17:50 1
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Lazy Bird
9/10 Bob Richard, animateur de radio, solitaire et albinos, accepte, presque sur un coup de tête, de déménager à Solitary Mountain, dans le Vermont, pour tenir une émission sur WZCZ. Il devient rapidement la proie d’une mystérieuse voix de femme qui se fait de plus en plus envahissante. Qui est-elle et que veut-elle ? Un oppressant sentiment de paranoïa envahit progressivement Bob, à mesure que les menaces se font de plus en plus inquiétantes.
Andrée A. Michaud, à qui l’on doit également Bondrée et Rivière tremblante, revenait en 2009 avec ce pur bijou de noirceur. Le pitch est largement inspiré du film de et avec Clint Eastwood, Un Frisson dans la nuit, et ce n’est d’ailleurs pas le seul des clins d’œil que se permet l’écrivaine. De nombreuses références cinématographiques, littéraires et musicales ponctuent ce roman, et c’est un régal de les découvrir au gré du récit. Le texte, écrit en grande partie à la première personne, permet une incursion remarquable dans la psyché de Bob Richard, et l’on plonge dans son esprit torturé, dépressif et errant. L’écriture est absolument remarquable, poétique et magnifiquement tournée, au point que l’on en vient, à de multiples reprises, à relire certains passages tant la langue – empruntant parfois d’agréables québécismes – est admirable. Certains moments sont d’ailleurs de purs moments de grâce, comme les descriptions des animaux albinos qui ont accompagné l’enfance de Bob, le sort tragique de ses deux parents, ses amitiés si profondes et particulières avec Lucy-Ann qu’il a surnommée « Lazy Bird » ou avec Charlie, qu’il qualifie de « The Wild » et dont le sort ne pourra qu’émouvoir. Dans le même temps, l’intrigue est dense et riche, tandis que les cercles concentriques de cette impénétrable auditrice de la nuit autour de notre animateur sont de plus en plus rapprochés : des messages, un frigo qu’elle remplit, un chien qu’elle s’en va écraser, jusqu’aux premiers cadavres. Un scénario brillant et pénétrant de noirceur, que certaines longueurs ne viennent pourtant pas affadir. Puis arrive le dernier chapitre, intitulé Play Misty for Me, qui est un modèle du genre : la révélation ultime, forte et assourdissante, que certains auront peut-être vu venir, et qui rebat intégralement les cartes de ce roman noir si brillamment construit.
Une ode à la littérature noire, aussi désespérée qu’exceptionnellement humaine, et qui se montre exemplaire, à plus d’un titre. Indéniablement, férocement, intrinsèquement, une pépite.25/05/2020 à 17:42 5
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La Danseuse du Gai-Moulin
8/10 … ou comment deux jeunes adultes un peu désœuvrés, Chabot et Delfosse, en viennent à se laisser enfermer dans une boîte de nuit liégeoise, le « Gai-Moulin », afin de pouvoir en subtiliser la caisse en toute discrétion, mais tombent sur un os, en la personne – froide – du cadavre d’un dénommé Ephraïm Graphopoulos. Un roman de la série consacrée au commissaire Maigret et datant de 1931, mais qui n’a strictement rien perdu de son charme. En effet, L’immense Georges Simenon continue avec sa plume sèche – qui n’empêche nullement un large éventail de subtilités et de vitriol – et met en scène notre limier parisien. Cependant, il y a plusieurs éléments qui marqueront ici les fans de la série, notamment le fait que notre excellent commissaire n’apparaît « officiellement » qu’à la page 108 d’un ouvrage qui n’en compte que 188, c’est-à-dire bien tard. Un bel exemple de la malice dont il est capable. Ses capacités de déduction s’illustrent également dans les septième et neuvième chapitres, avec une remarquable série de réflexions de sa part, mettant nettement en avant la qualité de ses « petites cellules grises », sans compter pas mal d’autres initiatives de sa part, plus exactement des manigances dont une incursion inattendue en prison et un coup de pistolet surprenant. Et même si quelques éléments de la résolution finale me semblent un peu tirés par les cheveux – c’est surtout leur superposition qui paraît un peu invraisemblable –, cet opus est vraiment très bon, offrant notamment à voir des éléments originaux dans la manière d’opérer chez Maigret. Un roman presque nonagénaire de très grande qualité.
24/05/2020 à 18:08 3
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L'étrange mort de M. Bertin
Lincoln Child, Douglas Preston
8/10 Une très agréable nouvelle (en plus d’être gratuite, merci aux Editions de l’Archipel !). Quelques dizaines de pages joliment tournées, permettant de renouer avec l’univers des sieurs Preston et Child. Pas mal de mystères, depuis la découverte de ce faire-part jusqu’aux souterrains de La Nouvelle-Orléans, en passant par une plongée dans le passé des Pendergast et, bien évidemment, le plaisir de retrouver notre agent si spécial du FBI (la scène, pourtant courte, dans le funérarium, est exquise). La chute pourra peut-être sembler un peu « facile », mais pour les fans de la série, c’est un pur bonbon. Vite, vivement la parution de « Rivière maudite » !
24/05/2020 à 18:05 3
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Ushijima, l'usurier de l'ombre tome 2
6/10 L’opus commence avec trois ados qui « empruntent » un scooter avant de se rendre compte qu’il appartient à quelqu’un de peu fréquentable. Pour rembourser un service rendu par Ushijima, ils vont se mettre à travailler pour lui. Ils mettent alors le doigt dans un engrenage bien dégueulasse, comme lorsque l’un d’entre eux est sommé de prendre des photos d’une femme nue… qui n’est autre que sa propre mère. D’habiles jeux de pouvoir, de manigances et d’allégeances trahies pour un univers toujours aussi sordide. Même si j’ai aimé retrouver cette série, j’ai trouvé que l’intrigue patinait un peu, ou alors est-ce parce qu’une partie de l’effet de surprise s’est évaporé.
24/05/2020 à 18:05 1
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Yama
Sylviane Corgiat, Laura Zuccheri
7/10 Comme tombée du soleil à la façon d’un astéroïde, une épée s’abat près d’un village et fend une roche blanche qualifiée de sacrée. Sous la coupe d’un seigneur appelé Orland, Yama, une petite fille, voit sa mère offerte à ce suzerain et, de colère, s’enfuit dans la forêt… et tombe sur une bête étrange, premier jalon d’une série de péripéties. Une bande dessinée aux traits particulièrement agréables et clairs, pour une histoire tout aussi réussie, qui panache des concepts déjà anciens (l’épée sacrée façon Excalibur, une quête en fusionnant les messages des diverses armes, la lutte contre un despote, etc.), mais de manière fort plaisante et graphiquement soignée, débouchant sur une planche qui constitue assurément une charnière vers l’opus suivant.
24/05/2020 à 18:04 1
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La Tour fantôme tome 1
7/10 Le 23 juin 1952, une femme est assassinée par sa fille adoptive sur les aiguilles d’une immense horloge. Kobe, 1954. Amano Taïchi n’a rien pour remplir sa blafarde existence, jusqu’à ce qu’il vienne croiser la route de Tetsuo Sawamura, et la rumeur voulant que cette horloge maudite soit en réalité un coffre-fort, gardant le trésor d’Ihei Echigoya. Un scénario intéressant et original, des dessins estimables (notamment lors de la visite de Magumi dans la tour et sa rencontre anxiogène), quelques éléments inattendus, et suffisamment de suspense pour se laisser emporter d’un bout à l’autre de ce manga. J’ai vraiment bien aimé.
24/05/2020 à 18:03 1
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Le Portrait ovale
9/10 Un homme, mal en point, et son domestique Pedro forcent un château situé dans les Apennins. L’homme tombe en pâmoison pour le portrait d’une jeune femme et finit par comprendre, dans un ouvrage, la folie de cet ouvrage ainsi que celle du peintre qui l’a exécuté. Une nouvelle excellente, remarquablement écrite, où la démence, la vie, l’ardeur du travail et la mort en viennent à se chevaucher, jusqu’à la chute, très symbolique, et qui rappellera un autre célèbre roman écrit environ cinquante ans plus tard.
24/05/2020 à 18:02 2
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Le soleil se couche parfois à Montpellier
5/10 … ou quelqu’un volontairement dénommé « Monsieur Z », soixantenaire, déambule dans une ville de Montpellier torréfiée par la canicule de l’été. M. Z n’est plus tueur à gages (aux ordres d’un obscur service politique) depuis novembre 1979, où il a décidé de rendre son tablier après une ultime mission menée avec Anna, son acolyte. Il a alors rejoint Solange et fondé une famille. Mais, près de quarante ans plus tard, il tombe sur Anna. Est-il seulement là pour superviser le remplacement d’un arbre ? Une histoire assez étrange, volontairement saccadée à son départ, et où s’entremêlent ensuite amour, nostalgie, engagements politiques, militantismes passés et poids des ans. Une nouvelle joliment servie par les mots d’Antoine Chainas et les dessins d’Anthony Pastor, mais à laquelle il manque, selon moi d’une véritable colonne vertébrale : on s’égare dans les descriptions de la ville et dans le passé (diverses époques), et au final, l’intrigue se révèle assez rachitique et ne me marquera probablement pas longtemps.
24/05/2020 à 18:01 1
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Panique au zoo
Frédéric Bagères, Marie Voyelle
5/10 Dans un immense zoo, des graffitis se mettent à être tagués tandis que des hybridations étranges se produisent depuis plusieurs mois sur les animaux. Les pensionnaires du zoo, doués de la parole (et parlant la même langue), finissent par engager deux détectives privés (de l’agence « Lux Fuit), Poulpe et Castor Burma. Des dessins très colorés, pas mal d’humour (notamment dans les dialogues et les bestiaux hybridés, ce qui donne des cocktails détonants, même si certaines blagues deviennent lourdingues à force d’être scatologiques), des clins d’œil (« Le Livre de la jungle », « Fight Club »), et un dénouement intéressant, mais l’ensemble m’a paru beaucoup trop long et délayé pour une BD (quand même 190 pages). Bref, selon moi, ça aurait mérité d’être resserré et plus tendu.
24/05/2020 à 18:00 1
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Sâti
6/10 Londres, en mai 1887. Basil et Victoria, deux jeunes orphelins, survivent tant bien que mal en vendant des rats attrapés grâce à leur chien, Cromwell. Lorsqu’ils découvrent une petite fille hindoue sous les docks, ils ignorent encore qu’ils vont ainsi faire la connaissance du docteur Watson. Une BD agréable à lire, mettant surtout en exergue la pauvreté des milieux populaires londoniens du XIXe siècle, les emplois confiés aux gamins de l’époque, et, sans trop rien dévoiler, la condition féminine dans un autre pays. En revanche, je ne suis pas fan du graphisme (parfois un peu « grossier » à mes yeux) et, un détail, de la police d’écriture des phylactères, très particulière et parfois peu lisible.
24/05/2020 à 17:59 1
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Lionnerie
6/10 Une bien curieuse histoire que celle de cet enfant qui, né muni d’un grand nez, décide d’en faire à la fois sa fierté et sa force. Il ira jusqu’à rallier à lui d’autres personnes des hautes sphères, mais son ardeur et sa véhémence finiront par lui retomber sur le nez. De l’humour, c’est certain, mais pas mal de répétitions (plus exactement, des paroles redondantes, notamment lors du festin), mais l’épilogue, presque une morale, rachète un peu à mes yeux l’ensemble.
24/05/2020 à 17:58 1
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Baptism - Tome 02
9/10 … où l’on retrouve cette improbable fusion entre le cerveau de la mère et le corps de sa fille chez le professeur Tanikawa et son épouse, Kazuyo. Le plan de Sakura pour prendre la main sur le foyer est machiavélique, faisant de son mieux pour que Kazuyo passe pour une démente. L’auteur a très bien réussi à se renouveler dans ce deuxième tome, tournant habilement la page du premier opus pour repartir sur celui-ci, fort réussi. Nakajima continue d’avoir des doutes quant à l’identité réelle de sa camarade, et cette dernière poursuit ses manœuvres de séduction (certaines scènes peuvent d’ailleurs choquer, esthétiquement parlant, avec des rapprochements corporels entre un adulte et une gamine de dix ans, alors qu’en vérité, c’est une dame d’âge mûr). Une immense réussite, d’autant que ce manga date de 1974 et était donc très en avance, du point de vue scénaristique, sur pas mal de romans et de films.
24/05/2020 à 17:57 2
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Une Assemblée de chacals
9/10 1888, dans le Montana. Le dénommé Jim va se marier. Ce que tout le monde ignore, c’est qu’il a été, dans une vie antérieure, membre d’une bande de criminels appelés le « Gang du grand boxeur ». Les trois autres anciens acolytes sont d’ailleurs invités à participer à cette grande fête. Mais un télégramme a informé Jim qu’il va y avoir un autre invité à la célébration. Un spectre issu de leur passé commun. Et qui va les obliger à déterrer leurs armes et faire parler la poudre.
Voilà un western que l’on n’est pas près d’oublier. Craig S. Zahler livre un ouvrage d’une puissance et d’une férocité inégalées. Le prologue met d’ailleurs immédiatement dans l’ambiance, ou comment les jumeaux en viennent à avoir un échange pour le moins musclé avec un couple, avant que n’arrive la silhouette inquiétante de leur mentor. Car ce livre est saturé de démons devenus hommes. Nous avons bien entendu ces deux frères, dont l’un a perdu l’usage de la parole lors d’un événement atroce, mais également Quinlan, le chef de meute, victime d’Indiens et dont le physique est hallucinant et ce Français qui, sous ses atours agréables, dissimule un pervers de la mutilation. Dans le même temps, nos quatre cowboys (Jim, Oswell, Godfrey et Dick) sont remarquables, en anciens monstres ayant réussi à se débarrasser de leurs obsessions criminelles pour devenir d’honnêtes citoyens. Comme pour les personnages du film Impitoyable de Clint Eastwood, se posent de bien intéressantes et pertinentes questions quant à l’innocence et la culpabilité, la prescription et le rachat, la rédemption et la déchéance. Craig S. Zahler, avec son écriture fascinante, nous offre également des scènes d’anthologie, comme la séquestration de la population dans l’église, la scène de torture de Dicky, ou le sort de Quinlan lorsqu’il a été le jouet des Indiens Appanuqis.
Un rythme trépidant pour ce western magistral, remarquable d’humanité et de sauvagerie. Une vision à la fois brulante et glaçante du Far West, peuplée de personnages en proie aux pires contradictions. Avec de telles qualités émotionnelles et visuelles, on se demande même pourquoi ce livre n’a pas encore été adapté sur grand écran. En attendant, on ne pourra que se ruer sur les autres romans de l’auteur, à savoir Les Spectres de la terre brisée et Exécutions à Victory.18/05/2020 à 18:16 9
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La Maldonne des Sleepings
7/10 Train 223, voiture 96. Antoine y occupe le poste de couchettiste, et s’occupe des clients du train qui les mène à Venise. Un quotidien sans grand attrait, ponctué de situations maintes fois vues. Jusqu’à ce qu’une banale histoire de portefeuille volé l’amène à faire la rencontre de Jean-Charles Latour, un étrange personnage, fatigué et malade, que de nombreuses personnes semblent vouloir récupérer. Dès lors, difficile d’éviter la sortie de rails…
Il s’agit du premier opus de la quadrilogie consacrée à Antoine Andrieux, écrite par Tonino Benacquista. Un ouvrage court où le ton est donné dès les premières pages. L’auteur use d’une langue simple et courante, et s’autorise de nombreuses parenthèses quant au métier de son protagoniste : la routine (oserions-nous dire le train-train ?), bien loin des visions fantasmées et autres ors de l’Orient-Express, et parfois émaillé de quelques saynètes divertissantes, juste histoire de casser les automatismes d’un emploi sans panache. On découvre donc Antoine, qui est tout sauf un héros : un individu jeune, lambda, gentiment bigame, tout autant capable de beaux élans d’altruisme comme de vertes colères, d’où son surnom, « l’aboyeur ». Mais quand il va faire la rencontre de Jean-Charles Latour, un être piteux, constamment épuisé, et qui fait l’objet de voraces convoitises, tout va partir en sucette. Le ton de Tonino Benacquista est résolument comique et sarcastique, au point que le « Jean-Bernard » à qui il dédie ce roman ne saurait être autre que le mythique Jean-Bernard Pouy. On assiste alors à de savoureux échanges entre Antoine et les usagers ainsi qu’avec son ami Richard, et c’est un métier méconnu dont on découvre l’ordinaire. L’intrigue est intéressante, notamment lorsque l’on découvre la raison pour laquelle ce famélique Latour intéresse tant de personnes, et il est dommage qu’elle s’effiloche rapidement juste après : pas mal de digressions se succèdent, pas toujours en rapport avec le cœur du scénario, au point que l’histoire ressemble, notamment vers le dernier tiers du livre, à un train que l’on voit partir tandis que l’on est resté à quai.
Un livre globalement réussi et très divertissant, mais qui s’égare parfois dans des à-côtés superflus. Néanmoins, par sa verve, Tonino Benacquista nous a donné l’envie de lire les autres ouvrages de cette série, à savoir Trois carrés rouges sur fond noir, La Commedia des ratés, et Les Morsures de l’aube.18/05/2020 à 18:13 2
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L'Appli vérité
8/10 Le jeune Jarli a créé une application pour téléphone portable capable de détecter les mensonges. Est-ce la raison pour laquelle on en veut à sa vie et à celle de son père ? Tous deux viennent à peine d’échapper à une tentative de meurtre, avec un vieil homme patibulaire ayant lancé son pick-up contre leur véhicule. Une seule chose est certaine : sa vie va être bouleversée.
De Jack Heath, on avait déjà adoré son extraordinaire et mordant Mange tes morts, et voilà que l’on découvre cette série littéraire dédiée à la jeunesse, Les Chroniques de Kelton. D’entrée de jeu, l’auteur séduit par son style, particulièrement efficace, et la cadence qu’il impose à son récit. Des scènes très détonantes, presque télévisuelles, qui alternent avec des moments plus apaisés. On se plaît à faire la connaissance de Jarli, un adolescent très attachant et sur qui la foudre va s’acharner à tomber bien souvent. Accidents de voiture, courses-poursuites, labyrinthe souterrain, incendie monstrueux, enlèvement : rien ne lui sera épargné. Dans le même temps, on fait la connaissance de deux de ses amies, Anya, une boxeuse d’origine russe, et Bess, au look de punk et qui sait se servir à la perfection de ses béquilles. L’intrigue est très inspirée et parfaitement calibrée, avec de nombreux rebondissements, et un final qui donnera fatalement envie de se ruer sur le tome suivant, à savoir Portés disparus.
Un ouvrage pour la jeunesse qui sort vraiment du lot, notamment en raison de son pitch original et du rythme qui l’anime. On en redemande.18/05/2020 à 18:06 1
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Les Voies d'Almagiel
Patrick Galliano, Cédric Peyravernay
6/10 Une BD esthétiquement magnifique, dont les décors et les costumes rappellent ceux de Star Wars et du Moyen Âge, où le système économique est basé sur l’exploitation d’une plante aquatique céréalière, la montbassie, exploitation rendue possible par un esclavage de masse. Un univers où se mélangent créatures dantesques, monde steampunk, vaisseaux spatiaux et prison cauchemardesque. Un cocktail détonnant, assurément, mais c’est moyennement ma tasse de thé. C’est un point de vue totalement subjectif, j’entends bien, d’autant que je reconnais de beaux passages plastiques et une intrigue qui donne envie d’être suivie.
14/05/2020 à 18:33 1
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Les Décastés d'Orion première partie
6/10 Victime d’une machination, Kolhen est accusé d’avoir violé une femme (en fait, elle a fait en sorte qu’il soit pris, à tort, pour un criminel). De guerrier, il devient un « décasté », privé de ses droits, et envoyé en prison, où il entend parler grâce à Tryana d’une histoire de vaisseau spatial et de son pilote, muni d’une arme aux effets très particuliers. Une bande dessinée qui mélange allègrement époque médiévale et éléments fantastiques, avec un choc des cultures et des époques agréables, d’ailleurs aussi agréables que le dessin. Pas mal de scènes et d’événements déjà lus ou vus ailleurs (de la prison infâme aux galères, en passant par le marché aux esclaves), mais ça reste prenant et relativement efficace. Parfait pour se détendre, en attendant.
14/05/2020 à 18:32 2