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Sommeil de cendres
9/10 Janvier 1974. Le corps d’un jeune homme est découvert sur l’échangeur de la porte de Bagnolet. L’inspecteur Eperlan est chargé de l’affaire et va lentement remonter vers deux personnages équivoques : Alexia Zorn en train de fuir Paris pour rejoindre au plus vite l’Ardèche, et Müll, homme de main du Service d’Action Civique – le SAC. Leur rencontre promet d’être à la fois sauvage et révélatrice de sinistres trafics.
Xavier Boissel livre ici un roman noir de premier ordre. Son ouvrage se présente dans un premier temps de manière chorale, chacun des chapitres présentant le point de vue de l’un des trois protagonistes. Eperlan, en fumeur invétéré de cigarillos, en partie désabusé et dont le couple a explosé en pleine vol, homme droit et attaché à la lutte contre le communisme depuis ses combats de la guerre de Corée, va lentement comprendre qui était la victime : Ghislain Breil-Martel, un fils de bonne famille, rattrapé par la mouvance maoïste, prostitué et amateur de jeux de cartes. Parallèlement, Alexia tâche de s’éjecter loin de la capitale, elle qui a longtemps consommé de la drogue et s’est formée au krav-maga : les prédateurs qui sont à ses trousses sont prêts à tout pour planter leurs crocs en elle. Et il y a Müll, à l’estomac douloureux, membre de la pègre et très actif dans le domaine de la drogue, avec toujours quelques arrière-pensées politiques dans le viseur. L’auteur signe un récit concis mais très sombre, où nos trois héros vont méchamment se percuter, qu’ils soient cognés par des balles, des inclinations amoureuses ou d’incroyables désillusions. La mécanique policière est tout bonnement impeccable, imprenable, les engrenages parfaitement huilés amenant les personnages à une inévitable confrontation, lapidaire mais retentissante, où l’on sent même l’influence littéraire de Jean-Patrick Manchette. Ce cadre des années 1970 est également très intéressant en raison des courants politiques à l’œuvre à cette époque, post Mai 68 et agités par bien des tractations et des contradictions. Ce roman propose également une fine analyse des pratiques de la police scientifique de cette ère. Xavier Boissel nous gratifie aussi de belles citations qui viennent agrémenter son histoire qui vient se mêler à celle qui s’écrit avec une lettre majuscule, ainsi que d’un final poignant.
Remercions très chaudement Xavier Boissel pour ce roman efficace et atypique, servi par une plume laconique et percutante. « Une petite immersion dans la France du pompidolisme agonisant », a-t-il si gentiment écrit en guise de dédicace à un certain chroniqueur littéraire : voilà une immersion plus que marquante.11/06/2024 à 07:00 4
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Qui complote au pied du volcan ?
7/10 « Il a été modifié ! Impossible de l’envoyer ! C’est foutu. Foutu ! ». A peine la jeune Hypatie Wallace a-t-elle rejoint son volcanologue de père que ce dernier se rend compte que son article a été saboté. Même s’il se rend vite compte qu’il peut rattraper le coup à l’aide de ses notes manuscrites, il va se laisser convaincre par sa roublarde de fille qu’il est possible de coincer le coupable.
Un opus très court, évidemment destiné à la jeunesse, qui permettra au lectorat de type écolier ou jeune collégien de se familiariser avec le monde des volcans tout en suivant une intrigue policière agréable mais sans plus, qui s’achève sur une scène digne d’un traditionnel whodunit. Rien de bien transcendant, mais pour des gamins – cette remarque n’a évidemment rien de péjoratif –, ça sera certainement bien agréable.10/06/2024 à 18:13 3
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Pumpkin Night tome 4
Masaya Hokazono, Taniguchi Seima
7/10 La policière explique pourquoi elle en veut tant à l’actuel maire tandis que la paranoïa augmente chez Arata, l’un des assassins, d’autant qu’Halloween approche à très grands pas, et la scène suivante dans l’ascenseur ne va faire que confirmer ses (pires) craintes. Des scènes toujours bien gores mais assez classiques (entre les coups de couteau à travers la porte ou le découpage du corps), ce qui n’empêche pas ce quatrième tome d’être divertissant.
10/06/2024 à 18:12 2
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Le Début du commencement
7/10 Franck en est déjà à sa quatrième famille d’accueil mais il ne lâche pas l’idée que ses parents biologiques sont encore en vie. Son ami jardinier lui indique où il avait été trouvé pour la première fois. Pourchassé par un chien, au fond d’une grotte, il est aspiré par un syphon et bascule dans une faille spatiotemporelle qui l’expédie en pleine préhistoire.
Un premier tome cocasse et enlevé, très coloré et dynamique, et je ne suis pas surpris que cette série ait rencontré le succès auprès des jeunes.09/06/2024 à 07:47 2
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Gannibal tome 8
9/10 « On va faire un carnage », proclame l’un des tireurs : à croire qu’après celui qui a achevé le tome précédent, ils ont encore de l’appétit pour la mort… Daigo s’illustre au milieu du chaos par ses aptitudes au combat armé. Un début tonitruant pour ce huitième opus de la série qui continue de baigner allègrement dans l’excellence tant scénaristique que graphique, avec beaucoup de rebondissements et de révélations et autant de pures pépites artistiques. Palpitant.
09/06/2024 à 07:46 2
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La Forêt des silences
7/10 La jeune Naomi, documentaliste (elle est rémunérée pour dénicher des informations pour des écrivains, leur fournissant les informations nécessaires à leurs futurs ouvrages) est mandatée pour se rendre à Hag’s, un patelin où un auteur, Barney Lambster, a mystérieusement disparu. Il faut dire que ce village véhicule d’étranges histoires : un juge, Hooter, qui se plaisait à lyncher des condamnés, des rumeurs de sorcières, des « bucherons » qui continueraient de vivre dans les bois environnants, une communauté vivant recluse, avec des mœurs prudes et policées, une forêt saturée d’une flore toxique… Mais Naomi n’est pas au bout de ses surprises.
Que l’on soit clair : Serge Brussolo, j’adore. Je guette toujours les sorties de ses romans en piaffant comme un gamin et, même s’il m’a parfois un peu déçu, je demeure addict à son univers, son imagination, sa prose et également à sa prolixité. Ici, on est dans du classique (pour du Brussolo, s’entend) : une ambiance anxiogène, des personnages nombreux et bien barrés, une relecture du folklore et de la culture américaine, des histoires à tiroirs (dans un seul chapitre, il y a parfois matière à plusieurs autres livres), des faux-semblants et autres manipulations, et toujours cette dose de WTF que seul cet auteur pratique avec délectation et tant de second degré assumé. Le début est toujours aussi fort et surprenant, le deuxième tiers est fort, riche en moments prenants, puis vient le dernier tiers où, malheureusement, Serge Brussolo se laisse aller à une volubilité que je lui reproche (bien modestement) assez souvent : trop d’idées, trop d’action, et, pour celles et ceux découvrant l’œuvre de l’auteur avec cet opus, la très probable impression qu’il a subitement plongé le nez dans des substances illicites. Certes, ça devient un peu n’importe quoi sur les trente dernières pages, mais je reste un fan absolu de sa bibliographie, de son style et de sa façon si particulière de détricoter l’univers si typiquement américain pour le retricoter à sa sauce. Du pur page-turner hollywoodien, mais l’inventivité et l’âme en plus.08/06/2024 à 07:42 3
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Toi
7/10 Un thriller étonnant qui commence par des strangulations en série en Allemagne : sur l’A4, une nuit de novembre 1995 où 1178 personnes sont bloquées dans un embouteillage monstre, un tueur en série dénommé « Le Voyageur » asphyxie à la main vingt-six personnes. Le récit, relaté à la deuxième personne du singulier, nous donne ensuite à voir un groupe d’adolescentes (Nessi, Stinke, Schnappi, Rute et Taja) ainsi que des hommes (Ragnar, Darian, Oskar et Mirko) peu recommandables et bien évidemment, ce serial killer nomade. Une histoire bien barrée qui se déroule le long des plus de 660 pages (édition de poche), qui surprend et fait frémir, même si j’ai trouvé qu’il y avait pas mal de longueurs. Moi qui avais bien aimé l’autre ouvrage de Zoran Drvenkar, « Sorry », j’ai passé un agréable moment au gré de ce roman (parfois un peu longuet au début) mais dont le rythme est assumé et tout sauf désagréable par la suite. Je crois que je retiendrai autant la forme (le type de narration) que le fond de cet imposant pavé.
06/06/2024 à 18:46 4
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Diamante
5/10 Paris, 1766. Diamante enterre sa sœur Olympe qui a été la victime d’un psychopathe de la pire espèce muni d’un masque digne de la commedia dell'arte. Diamante n’a rien de la jeune femme aux mœurs légères dont la rumeur affuble la réputation de sa défunte sœur, et elle va basculer dans un univers libertin auquel elle n’est guère préparée, et il se pourrait que le prédateur soit le marquis de Sade en personne.
Un dernier tome au scénario appétissant mais que j’ai trouvé plutôt décevant : une confrontation avec le tueur – stéréotypé, soit dit au passage – trop rapide, la psychologie uniquement survolée, des poncifs à tire-larigot dans cette traque, et un final abrupt. Dommage que la série s’achève ainsi sur une telle désillusion.06/06/2024 à 18:42 2
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Santiag
7/10 Santiag meurt dans l’explosion de son véhicule alors qu’il venait tout juste de livrer un dossier visiblement sulfureux à ses commanditaires. Deux années plus tard, on découvre des cadavres dans une mine désaffectée : visiblement, Santiag, que tout le monde croit mort, a clairement décidé de se venger.
Un premier tome agréable, riche en bestioles (serpents et scorpions), qui met classiquement en scène cette vendetta minutieusement préparée et où flotte encore un peu de fantastique. Vraiment réussi.06/06/2024 à 18:41 2
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Soeurs
8/10 Deux sœurs, Ambre et Alice, qui entretenaient une relation ambivalente avec le célèbre écrivain Sándor Lang, sont retrouvées mortes, ligotées à des troncs d’arbre et habillées de vêtements de communiante. Martin Servaz, alors policier débutant, et ses collègues enquêtent sur l’affaire mais doivent relâcher l’auteur. Vingt-cinq ans plus tard, la femme de Lang, Amalia, est retrouvée décédée au domicile de l’écrivain, tuée par les venins des divers serpents entretenus dans l’habitation.
Je me suis replongé avec plaisir dans l’œuvre de Bernard Minier et même si celui-ci ne figurera probablement pas parmi mes préférés, je lui reconnais d’évidentes qualités : un rythme soutenu (les quelque 500 pages de ma version de poche sont passées rapidement), une belle architecture scénaristique, des personnages solides et une histoire prenante. Les rebondissements affluent à belle vitesse lors de la garde à vue et il s’en dégage une très intéressante lecture psychologique, entre toxicité assourdissante et vengeance étonnante. Néanmoins, les tout derniers chapitres, avec l’ultime twist et la confrontation, m’ont laissé assez froid même si l’image de l’incendie est marquante. Bref, un très bon thriller malgré ce final un peu superflu voire contreproductif.05/06/2024 à 19:35 5
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Sabre sur la Corée
Jean-Michel Arroyo, Frédéric Zumbiehl
6/10 Les avions qui viennent de s’illustrer dans le désert de Mojave rejoignent la Corée pour lutter contre la horde communiste (entendez par là la Corée du Nord alliée à l’URSS), mais Staline ne l’entend pas ainsi : il souhaite « botter le train de ces maudits Yankees ». Ambiance de guerre froide, espions de tout poil, combats aériens, sabotages et héros américains intrépides et photogéniques : c’est plutôt délassant et agréable à suivre, mais ça n’en demeure pas moins caricatural et stéréotypé.
05/06/2024 à 19:26 2
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Zone fantôme
8/10 Quatre histoires dans ce recueil : « Le Coteau aux pleureuses », « Maudite madone », « La rivière spectrale d’Aokigahara » et « Léthargie ». Une pleureuse aux sanglots qui contaminent une jeune femme et une légende japonaise à ce sujet, des cours d’une folle religion dans un pensionnat pour jeunes filles et d’étranges écoulements de sel, une rivière d’âmes, Takuya Terada qui pense être ce tueur en série nocturne qui lange ses victimes comme des bébés. Des nouvelles au graphisme assez particulier mais au final réussi, et des récits très divers même s’ils voguent tous sur les vagues de l’occulte. J’ai adoré les deux premières, un peu moins les deux suivantes, mais l’ensemble n’en demeure pas moins très réussi, original et prenant.
03/06/2024 à 18:22 2
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Le Batman qui rit
8/10 Batman attaque des déménageurs de maison avant de découvrir sa propre dépouille dans un cercueil. Un épisode particulièrement dense, sombre, dynamique et sanglant des très nombreuses séries consacrées au chevalier noir, entre folie, univers parallèles, un double particulièrement énervé de Batman, etc. Je ne maîtrise vraiment pas assez l’univers de Batman pour en apprécier les détails, les références et l’historique, mais à mes yeux d’humble béotien, c’est de la pure dynamite hallucinée, d’autant que le graphisme épouse parfaitement l’énergie de ce tome.
03/06/2024 à 18:21 2
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Sous l'emprise des ombres
8/10 Parce qu’il était son ami et qu’il est désormais mort après s’être pendu, le détective privé Charlie Parker va tâcher de retrouver la fille de Jude, un SDF. Aux dernières nouvelles, la jeune femme aurait été vue du côté de Prosperous, un village isolé du Maine. Ce que Parker ignore encore, c’est que la disparue vient d’être assassinée. Il faut dire que Prosperous n’est pas un patelin comme les autres, et Parker va payer cher de s’être trop approché de ses habitants et de ses coutumes. Très cher…
Il fut un temps, relativement lointain, où John Connolly faisait partie de mes auteurs fétiches. Les années ont passé, j’avais un peu fini par l’oublier, et voilà que je viens de me prendre trois de ses ouvrages en poche, histoire de rattraper mon honteux retard. Et quel régal de retrouver son écriture, ses histoires à nulles autres égales, et son univers si torturé. Ici, Charlie Parker va donc se rendre à Prosperous, un bled inquiétant, dont on découvre les strates d’étrangeté à mesure que l’on fait défiler les chapitres : une communauté repliée sur elle-même, lovée sur sa richesse et ses éventuels risques de consanguinité, et tassée autour de son église, elle aussi très bizarre, vouant un culte à une déité difficilement qualifiable, entre paganisme et chrétienté. John Connolly, c’est un rythme, parfois lent, qui permet de tisser des ambiances mortifères et intrigantes, avec de magnifiques passages, parfois lyriques, mais aussi très drôles, au gré notamment de réparties ou de métaphores tordantes, d’autant plus cocasses que cet humour se manifeste au beau milieu de sacrées ténèbres. Ce sont également des personnages, aux prénoms et noms peux banals, et d’une rare force de percussion : entre Morland, le policier ambigu, Conyer, la dame patronnesse et bien machiavélique de Prosperous, le Collectionneur, le pasteur Warraner, les divers tueurs patibulaires et – mon chouchou du livre – Cambion, ce terrible personnage frappé par la lèpre, il y a amplement de quoi faire ! Une intrigue forte et typique des autres livres de l’écrivain, puissante et obsédante, même si je regrette – à la marge – peut-être la profusion de personnages assassins et surtout le fait que cette fameuse religion altérée ne nous soit pas davantage explicitée. Néanmoins, ça reste du très bon Connolly, un opus saturé de noirceur où Charlie Parker va passer un sale quart d’heure (dans le dernier tiers de l’ouvrage), laissant de l’amplitude à ses fidèles Louis et Angel pour donner, une fois de plus, toute la mesure de leur efficacité. Je renoue donc avec bonheur avec la bibliographie de John Connolly !03/06/2024 à 07:50 6
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La Dame blanche
6/10 Ils sont quatre : Johnny, le Rital, le Chauve, le Tunisien. Ils ont été engagés pour enlever une jeune femme, Elise de la Salle, dans un manoir de l’Yonne. Sauf que le kidnapping tourne mal : leur véhicule a un accident alors que la mystérieuse Elise venait de prédire un accident, et leur proie s’échappe. Là où elle atterrit, c’est un village du Tarn, Puech Begoù, où les événements ne vont guère aller en s’améliorant.
Mon premier ouvrage de Denis Zott. J’ai été agréablement pris par sa prose, simple et efficace, et le rythme cadencé des chapitres courts. Un voile de mystère enveloppe Elise, blanche comme la craie, jeune et belle, fardée comme une geisha, et dont on ne comprend la réelle « valeur » qu’une quarantaine de pages avant la fin (même s’il y a quelques indices disséminés dans l’ouvrage). L’auteur réserve un récit soutenu, avec pas mal de suspense, et l’ensemble se lit vraiment vite et facilement. Dans le même temps, puisqu’on parle de facilités, il y en a : j’ai eu du mal avec la famille Renard (la vieille mère Germaine, détestable, raciste, libidineuse, et ses enfants qui cumulent tant de défauts et de tares que c’en devient trop chargé). Elle exploite Césaire (bonne idée de la part de l’auteur d’associer des citations du poète au gré du découpage du livre), que chacun de ses membres appelle « chien », le contraignant à des corvées sous les vociférations, les coups et même les obligations de cuissage avec la vioque, le cou ceint d’un collier de molosse. Et puis, à trop chercher l’action, j’ai trouvé que Denis Zott se perdait un peu – et le lecteur par la même occasion – notamment avec cette histoire de trafic rural de drogue, d’intervention des gendarmes, etc., alors que le roman aurait gagné à mes yeux à rester concentré sur le personnage de cette Dame blanche. Bref, une bonne idée originale mais en grande partie gaspillée par des détours inutiles et des événements surnuméraires : ça revient à gâcher une viande prometteuse sous une sauce et des ingrédients superflus.31/05/2024 à 18:12 3
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Dernier soupir
3/10 Une vie de rêve : voilà ce que va bientôt vivre la jeune Kaylie Brooks. Elle emménage avec Brett, riche et séduisant, dans une magnifique propriété. Là-bas, la famille de Brett se montre un peu envahissante, au même titre que ses amis ou le voisinage. Pressée de terminer son mémoire en psychologie avant même de faire des enfants, Kaylie comprend rapidement qu’elle n’est qu’une pièce rapportée, sans grande importance, que son compagnon peut inviter des camarades dès qu’il le désire sans même lui en parler, et surtout, qu’elle doit rester à sa place. Mais quand une femme meurt dans ce qui ressemble à un accident, elle prend conscience du fait qu’il y a probablement un tueur dans les parages.
Voilà un roman à suspense très fadasse. La mise en place est très longuette, presque mollassonne, et je me suis rapidement lassé de cette succession de beuveries, de clichés sur cette élite fortunée qui passe son temps à picoler, d’autant que le style très pauvre n’engage guère à être clément, au point que j’en suis venu à espérer la venue rapide du crime. Mais même après, c’est la désillusion : l’identité du tueur en devient presque téléphonée, sans le moindre suspense dans le récit, et l’ouvrage ne gagne nullement la saveur voire le côté épicé que j’attendais tant. En vérité, tout est si insipide que l’on peut vraiment passer son tour. Un livre inconsistant, ennuyeux et terne.30/05/2024 à 19:08 3
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Danger dans la mine
8/10 Mine de l’Eldorado, 1851. Le prospecteur d’or que vous êtes se retrouve bloquée dans la mine suite à un séisme. Il va falloir vous en sortir en résolvant les diverses énigmes qui vont se présenter à vous. Un escape game très réussi et qui saisit rapidement par son esthétique, remarquable, ce qui concourt à son aspect distractif. Des épreuves variées et prenantes (retrouver le bon mélange explosif, retrouver le bon rouleau de mèche en fonction des divers temps qu’ils mettent à se consumer, l’escalade au milieu des minerais, le charriot dont il faut suivre les bons rails, etc.). En outre, quelques expériences bien inattendues et intelligentes, comme ces indications en braille ou cette illusion d’optique liée au tamis. Une très belle expérience de lecture et de réflexion, un ouvrage à l’esthétique particulièrement travaillée. Une indéniable réussite.
30/05/2024 à 19:06 2
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Le cabochon d'émeraude, précédé de L'homme à la peau de bique
8/10 Le Cabochon d’émeraude : La princesse Olga narre à ses amies comment elle a fait la rencontre du grand Arsène Lupin alors que Maxime Dervinol nourrissait pour elle un fort amour, le fils d’un banquier qui avait escroqué la princesse avant de se suicider en prison. C’est en présence de Maxime, dans le salon où elle se remémore ce passé, que son cabochon d’émeraude a disparu, d’une valeur de quatre-vingt mille francs. C’est Arsène Lupin, sous une fausse identité, qui va retrouver le bijou.
Une nouvelle assez curieuse dont il est presque impossible de parler sans dévoiler le final, inattendu. Une écriture élégante, à peu près autant que ne l’est notre gentleman cambrioleur qui, non seulement va agir gratuitement mais va accepter de se montrer galant en ne volant pas cette fameuse émeraude. Quant à la résolution de l’énigme, m’attendant à un autre ressort ou à une ficelle déjà employée ailleurs, même si elle peut effectivement décevoir, paradoxalement, elle m’a d’autant plus plu qu’elle est innovante et inattendue, s’appuyant sur un déclic imprévu, et aussi sur un domaine fort peu fouillé en littérature policière, je pense. Bref, un moment savoureux en raison de ce final dont je me souviendrai fort longtemps.
L’homme à la peau de bique : A Saint-Nicolas, tout le monde voit un véhicule foncer dans le village avant de disparaître avec, à son bord, un conducteur « couvert d’une peau de bique, coiffé de fourrure, le visage masqué de grosses lunettes » ainsi qu’une passagère « dont la tête ensanglantée pendait au-dessus du capot » tandis que la malheureuse hurlait. La femme est retrouvée dans un virage impossible à négocier à vive allure, décédée, mais le chauffeur s’est volatilisé. L’affaire se complique encore par la suite au point qu’un journaliste écrit : « Tous les Sherlock Holmes du monde n’y verraient que du feu, et Arsène Lupin lui-même, passez-moi l’expression, donnerait sa langue au chat ». Sauf qu’Arsène Lupin en personne est piqué dans son amour-propre et résoudre à distance cette énigme… en s’appuyant sur un célèbre écrit d’Edgar Allan Poe.
Une histoire très prenante et où le tragique de la situation de départ – des morts et une femme à la tête écrasée par une grosse pierre, tout de même, contraste avec la légèreté de la démonstration faite par l’immense Arsène Lupin. Une solution finalement bête comme chou et d’autant plus prenante, primo, qu’elle se montre crédible et, deuxio, elle est le prétexte pour Maurice Leblanc d’incliner son chapeau à l’égard de Poe avec la formule suivante : « Vous voyez bien que ma lettre n’était pas absolument inutile, et que l’on peut se permettre de redire aux gens ce qu’ils n’ont appris que pour l’oublier ». Un très bon moment de lecture.29/05/2024 à 17:10 2
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L'Affaire Seznec
Gérard Berthelot, Julien Moca, Luc Révillon
7/10 Paris, novembre 1953 : on essaie de tuer Guillaume Seznec en l’écrasant. Il confie sa peur au journaliste Guillaume Cordier qui s’intéresse à la disparition de Quéméneur entre Morlaix et Paris en mai 1923.
Des faits réels relatés avec le souci du détail et de la véracité historique, même si la conclusion pourra toujours être sujette à caution (des éléments dans ce sens sont néanmoins apparus quelques années après la parution de cette BD). Bref, c’est solide, mais c’est vraiment dommage que les dessins soient aussi tartes.29/05/2024 à 17:08 2
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L'Affaire de l'auberge rouge
Stéphane De Caneva, Julien Moca, Didier Quella-Guyot
6/10 1808 : un dénommé Béraud, cherchant à échapper aux gendarmes, aboutit à une auberge. 1812 : un cavalier assoiffé est également recueilli. Autant d’histoires qui vont être évoquées dans le procès auquel on assiste en 1833 à Privas.
Une BD esthétiquement très agréable mais qui prend quelques libertés avec la vérité historique, mettant l’accent sur le poids des rumeurs, des jalousies locales et des faiblesses dans les accusations. Le côté pathos dans la dizaine de dernières planches (on parle tout de même d’exécutions à la guillotine, c’est certain) tend à émouvoir les lecteurs sans pour autant clairement apporter des éléments venant discriminer les condamnés. Les auteurs ont tout à fait le droit de prendre la défense des accusés – parce que non, ils ne sont pas « plutôt du côté de l'innocence du couple Martin », ils bataillent même carrément pour – mais probablement auraient-ils pu le faire avec plus de finesse. Un ouvrage cependant agréable.29/05/2024 à 17:07 1