Dodger

516 votes

  • L'Homme qui a vu l'homme

    Marin Ledun

    10/10 Sans chercher à prendre parti pour quelque cause que ce soit, "L’homme qui a vu l’homme" plonge dans un maelström inextricable de mensonges, de trahisons, de tortures et de secrets honteux. Inspirée d’un fait divers bien réel, l’affaire Jon Anza, l’intrigue du roman se permet avec sobriété les artifices du thriller pour mieux nous immerger dans les problématiques contemporaines du Pays Basque. Si cette région à cheval sur deux pays, poudrière politique depuis des décennies, fait moins parler d’elle dans les médias nationaux depuis quelque temps, elle n’en a pas terminé avec ses vieux démons.

    Passionnant sans être démonstratif, le polar fonctionne aussi et avant tout parce qu’il est formidablement écrit : plus acéré et nerveux que jamais, le style de Marin taille dans la chair du verbe pour saisir au mieux les mots de la colère, approcher au plus près la folie, exprimer au plus juste la violence. A la fois puissant, précis, rageur et d’une sincérité admirable, il est au service d’un récit au rythme haletant, preuve que le romancier plie aujourd’hui mieux que jamais la forme addictive du polar à la densité et à l’intelligence de son sujet.

    Bref, gros coup de coeur pour ce qui est pour moi, sans doute, le meilleur roman à ce jour de Marin Ledun. Immanquable !!!

    20/01/2014 à 11:24 6

  • Un long moment de silence

    Paul Colize

    8/10 Il n'y a pas à dire, un roman construit sur deux histoires racontées en parallèle et apparemment sans rapport, quand c'est bien fait, ça fonctionne à fond. Paul Colize emballe sa double intrigue à un rythme d'enfer qui ne se dément jamais, grâce à des chapitres courts et un style enlevé et précis à la fois. J'ai été particulièrement sensible à la quête de Nathan, dont les choix et les enjeux présentent une complexité passionnante ; l'enquête de Stanislas est également passionnante, mais l'élaboration du personnage souffre d'excès, notamment sa misogynie, certes crédible (il y a des hélas des hommes qui considèrent les femmes comme des servantes soumises ou des bouts de viande) mais qui prend trop de place dans sa caractérisation - cf. les scènes de sexe qui n'apportent rien à l'histoire : répétitives, elles semblent plutôt relever d'un petit plaisir voyeur de l'auteur que d'autre chose...
    C'est surtout pour cela que je m'en tiens à un 8 - qui signifie tout de même "très bon", et c'est finalement ce que je pense de ce roman qui m'a captivé, et dont la fin m'a touché. Du bon boulot, pour un polar intelligent, qui joue joliment avec l'Histoire.

    12/01/2014 à 21:57 4

  • 22/11/63

    Stephen King

    9/10 Comme plusieurs lecteurs, je ne mets "que" 9 en raison de petites longueurs occasionnelles. Mais sinon, c'est un très très grand King, une superbe variation, à la fois modeste dans la mise en place et vertigineuse dans son déroulement, sur le voyage dans le temps, ainsi qu'une ambitieuse réflexion historique, morale et métaphysique, où le romancier se fait plaisir en revisitant des années 50 et 60 pour lesquelles on sent toute son affection. Et j'ai adoré qu'il nous ramène aussi sur les terres de son propre passé, Derry, Ca... Non, le King n'est pas mort, au contraire il règne toujours avec autorité sur le fantastique d'aujourd'hui, et même au-delà. Magistral !

    12/01/2014 à 21:08 3

  • Mauvaise étoile

    R. J. Ellory

    10/10 Immense roman sur la fatalité mais aussi sur la rédemption, brillante analyse de l’exercice du mal, "Mauvaise étoile" est une démonstration sidérante du talent décidément sans limite de R.J. Ellory, qui livre ici un pur thriller, sombre et tendu, reprenant une nouvelle figure incontournable de la culture américaine : le road movie. Le romancier britannique en profite pour développer une réflexion magistrale sur les mécanismes de la violence et de la folie criminelle, au fil de 535 pages habitées de dizaines de personnages inoubliables. Époustouflant !

    29/10/2013 à 21:59 4

  • Ecrit en lettres de sang

    Sharon Bolton

    8/10 Sans chercher à apporter une énième solution au mystère des meurtres de Jack l'Eventreur, Sharon Bolton fait référence avec intelligence à ces crimes pour nourrir et orienter une intrigue contemporaine plus retorse et inattendue qu'on pouvait le penser de prime abord. Un bon thriller anglais, qui laisse la place et le temps d'exister à ses personnages, remarquablement développés et souvent surprenants.

    29/10/2013 à 21:49 1

  • Psycho Killer

    Anonyme

    7/10 Sans doute l'effet de surprise ne joue-t-il plus aussi fort qu'au moment où nous avons découvert "Le Livre sans nom", mais ce nouveau roman du plus célèbre des auteurs anonymes m'a paru moins fort, moins percutant, moins original aussi que la tétralogie du Bourbon Kid. Cela dit, cet hommage au cinéma de série B est un slasher hyper efficace, assez drôle, souvent cradingue, sanguinolent et graveleux, qui se dévore en deux temps trois mouvements, sourire aux lèvres et sans prise de tête.

    29/10/2013 à 21:44 3

  • La Vérité sur l'affaire Harry Quebert

    Joël Dicker

    9/10 Un an après avoir dévoré cet énorme roman, surprise de la rentrée 2012 et des prix littéraires, les souvenirs que j'en ai sont toujours aussi vivaces et agréables. Joël Dicker est une vraie révélation, un extraordinaire raconteur d'histoire, même si son style n'est pas toujours à la hauteur - sans être honteux non plus, loin s'en faut. Un art remarquable de l'atmosphère, des personnages - notamment les secondaires, qui souvent sont les plus importants, par la richesse et la diversité qu'ils donnent à l'histoire -, une manière incroyable de saisir l'ambiance si particulière des Etats-Unis, une intrigue foisonnante qui dégringole de révélations en rebondissements (il y en a presque trop !) dans les 150 dernières pages... Bref, un roman de pur plaisir, qui parle au coeur, aux sentiments et à l'instinct avant tout. Un grand moment de lecture !

    29/10/2013 à 21:39 5

  • L'Homme qui souriait

    Henning Mankell

    7/10 Comme l'ont mentionné d'autres commentateurs, la scène d'ouverture est inoubliable. La suite du livre l'est un peu moins tout en restant intéressante, mais la série monte en puissance avec ce roman, porte d'entrée aux quatre grands polars qui suivent et constituent le cœur explosif du cycle Wallander.

    28/10/2013 à 22:18 3

  • La Lionne Blanche

    Henning Mankell

    7/10 A la limite du roman d'espionnage, la troisième enquête de Wallander nous plonge dans l'Afrique du Sud alors en pleine libération de l'Apartheid, avec toute la violence et la complexité que cela implique. Cela rend ce polar encore plus lent que la plupart des autres, mais très intéressant.

    28/10/2013 à 22:08 2

  • Avant le Gel

    Henning Mankell

    6/10 L'un des épisodes les plus laborieux de la série. Le passage de Linda Wallander comme personnage principal ne fonctionne pas très bien, alors que la fille de Kurt était un personnage très intéressant lorsqu'elle n'était qu'un second rôle. L'intrigue, pourtant prometteuse sur le papier, y est aussi pour beaucoup, étirée par des longueurs et un manque de rythme flagrant. Vraiment pas indispensable.

    28/10/2013 à 21:59 1

  • Yeruldelgger

    Ian Manook

    7/10 S'il reste intéressant et d'une lecture facile et prenante, ce roman est trop : trop long, trop plein de rebondissements (dont certains sont forcément téléphonés, à force), trop énervé, trop schématique, trop naïf - les dialogues, bon sang !, et la caractérisation des personnages, qui finissent par manquer de crédibilité à force de les pousser systématiquement au-delà de leurs limites.
    J'avais parfois l'impression de lire un manga, de revoir les Chevaliers du Zodiaque de mon enfance, avec les provocations verbales, les attitudes (trop) héroïques...

    Cela reste une lecture plutôt sympa, avec des passages intéressants sur la Mongolie, son histoire et certaines de ses traditions, malheureusement un peu trop envahis par des lourdeurs et des longueurs de premier polar pas tout à fait maîtrisé.
    A surveiller pour la suite !

    28/10/2013 à 21:09 6

  • The Main

    Trevanian

    7/10 Loin de ses romans d'espionnage pleins d'humour, d'action et de panache ("La Sanction", "L'Expert"...), Trevanian signe ici la chronique froide et désabusée d'un quartier populaire de Montréal, à travers le personnage - plombant de tristesse mais très réussi, attachant finalement - d'un vieux flic qui connaît tout et tout le monde de son territoire, et fait la loi à sa manière, celle d'un shérif de Far-West plus de que policier respectueux de l'ordre établi. L'intrigue met du temps à démarrer et quelques longueurs ralentissent une histoire qui ne décolle vraiment que dans son dernier tiers, ce qui fait qu'il faut s'accrocher pour rentrer dans l'atmosphère particulière de The Main.
    Pas le meilleur Trevanian, loin de là ; mais il y a tout de même quelque chose au creux de ces pages, qui fait sortir ce roman de l'ordinaire et le rend intéressant au bout du compte.

    25/10/2013 à 09:27 1

  • Le Mystère Fulcanelli

    Henri Loevenbruck

    8/10 Sur le papier, réussir à passionner le lecteur de thriller avec le mystère Fulcanelli, une énigme n'intéressant que le tout petit monde des accros de l'alchimie, ce n'était pas gagné. Et pourtant c'est sans doute le meilleur des trois romans de Loevenbruck dédiés à Ari Mackenzie, à la fois thriller palpitant sur l'ésotérisme (la marque de fabrique de l'auteur), redoutable page-turner et enquête intellectuelle aboutie, menant à une hypothèse finale fort crédible. Un polar grand public de qualité et intelligent, que demander de plus ?

    25/10/2013 à 08:52 4

  • Reflex

    Maud Mayeras

    7/10 Dur, plein de souffrance, de cruauté et de désespoir, d'une noirceur étouffante jusqu'à la fin, Reflex est un roman physiquement éreintant à lire. Il est pourtant aussi prenant, d'une intensité qui ne se dément jamais, bien écrit et bien mené (même si l'on peut regretter que certaines personnages intéressants, comme celui de Ian Reisse, s'évaporent trop vite). Bref, si je ne peux m'enthousiasmer sans réserve pour ce deuxième opus de Maud Mayeras, c'est tout de même une œuvre intéressante parce qu'elle est sans concession, d'une honnêteté sans faille. A ne pas mettre entre toutes les mains néanmoins.

    09/10/2013 à 09:19 2

  • Puzzle

    Franck Thilliez

    5/10 Histoire prévisible, héros incapable de susciter l'empathie, petites longueurs et baisses occasionnelles de rythme, fin anticipée depuis le début : "Puzzle" est ma première grande déception dans l’œuvre de Thilliez. Cela reste un roman assez prenant, il y a quelques bons moments de suspense (notamment dans la première partie), mais vraiment rien d'original ni d'inoubliable.

    07/10/2013 à 11:53 1

  • Le Dernier Roi de Brighton

    Peter Guttridge

    9/10 Le deuxième tome de la Trilogie de Brighton s'ouvre sur un gigantesque flash-back de 230 pages qui nous ramène dans les années 60. L’immersion dans l’époque est totale.
    S’appuyant sur une bande-son d’enfer, des Beatles aux Who en passant par Pink Floyd et Simon & Garkunfel, Peter Guttridge réanime ces années comme si on y était et ressuscite, dans la grande tradition du roman noir et non sans fascination, l’époque des grands criminels, bandits d’honneur capables de tout mais toujours respectueux de certaines règles implicites.
    Passionnante en soi, cette première partie permet de créer un contraste frappant avec la criminalité moderne, à laquelle l’auteur confronte ensuite John Hathaway et ses autres héros dans une deuxième partie brutale et chaotique, suite directe du volume 1 de la série.
    Plus que jamais, vivement le tome 3, et la fin de cette trilogie remarquable !

    29/09/2013 à 09:29 5

  • Pur

    Antoine Chainas

    8/10 Sans chercher à délivrer de message, Chainas accomplit ce que le roman noir peut faire de mieux : scruter à distance le monde pour en révéler les troubles et les dangers que nous créons. Le reflet que le romancier nous renvoie de la société, et donc un peu de nous-mêmes, n’est pourtant pas flatteur ; c’est là qu’il est le plus marquant, parce qu’il nous confronte au mal que nous faisons, à la peine que nous créons, avec un regard d’une acuité impitoyable.
    Épuré, lui, pour le coup, son style fait de chaque phrase un coup de couteau qui déchire le voile des conventions, tourne et retourne dans la plaie du mal. Il frappe d’autant plus fort qu’il est débarrassé des dérives inutiles qui encombraient ses précédents romans, allant droit au but, jusqu’à un final forcément terrible.
    Le grand retour de Chainas, donc, avec un polar glacé, d’une grande maîtrise, sans doute le plus accessible de son auteur, en dépit de sa dureté.

    29/09/2013 à 09:13 2

  • Homicides multiples dans un hôtel miteux des bords de Loire

    L.C. Tyler

    7/10 Une comédie policière extrêmement sympathique, à la fois hommage à Agatha Christie et joyeuse parodie du genre, le tout appuyé tout de même sur une histoire solide que Lady Agatha n’aurait sans doute pas reniée. La révélation du mystère est alambiquée mais crédible, et la double fin du roman, excellente… mais je n’en dis pas plus ! Pour les amateurs de personnages déjantés et d'humour anglais pince-sans-rire, un chouette moment de lecture.

    29/09/2013 à 09:06 1

  • Le Monde à l'endroit

    Ron Rash

    8/10 Débutant comme un roman initiatique, "Le Monde à l'endroit" évolue pourtant peu à peu vers quelque chose de plus complexe, révélant à nouveau l'immense talent littéraire de Ron Rash. A travers l'histoire de la Guerre de Sécession, qui hante le récit, l'auteur élargit ainsi le champ de ses réflexions sur ce dont est capable l’homme, ses engagements, ses possibles aveuglements – des préoccupations récurrentes chez lui. Sur un virage ultra-serré, il fait ensuite basculer le récit pour le conduire vers une conclusion sombre, au terme de cinquante dernières pages au rythme effréné et aussi implacable que le Destin au travail.

    Moins puissant et lyrique que le sublime "Serena", "Le Monde à l'endroit", écrit dans un style rugueux mais fluide, démontre néanmoins sans peine à nouveau quel écrivain fin, intelligent et inclassable est Rash. L'un des auteurs américains contemporains à ne pas rater, en tout cas.

    23/09/2013 à 11:09 4

  • No more Natalie

    Marin Ledun

    8/10 En livrant sans complexe sa version des faits concernant la mort de Natalie Wood, Marin Ledun s'intéresse surtout à l’envers du décor hollywoodien, sa violence, sa corruption – par la drogue, l’argent, les trafics et les mauvaises fréquentations ; ses jalousies également, et sa course effrénée à la gloire, quelle qu’en soit le prix.
    Un roman bref, triste et cruel, qui laisse un goût amer dans la bouche – car, une fois achevée sa lecture, on réalise à quel point l’humanité est fragile et prompte à la destruction ou à l’auto-destruction. Un authentique constat de roman noir, dressé avec brio par un Marin Ledun toujours aussi brillant.

    11/07/2013 à 11:30 3