727 votes
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Chien 51
8/10 J'aime ces histoires quand la fiction fréquente d'un peu trop près l'actualité, devançant de manière presque subliminale les tourments du monde...
Laurent Gaudé se sert des artifices du polar et de la dystopie pour placer ses personnages au coeur d'enjeux très contemporains, et l'intrigue, relativement minimaliste, souligne en creux les dérives d'une société privatisée et catégorisée, à quelques pas de la nôtre, si les défis qui nous attendent ne sont pas relevés...
Le final, très désenchanté, s'accorde parfaitement au sujet, selon moi, et participe au plaisir de lecture...25/04/2023 à 20:41 8
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L'Illusion du mal
6/10 Sur un sujet pourtant alléchant, je n'ai pas réussi à m'enthousiasmer pour cette nouvelle aventure des inspectrices Rais et Croce...
Et je ne saurai vraiment expliquer pourquoi...
L'auteur n'a pas su passer la seconde après les débuts prometteurs du roman précédent, que les particularismes locaux rendaient différents...
L'intrigue est plutôt bien menée, et rebondit même de façon assez remarquable à mi-chemin, malgré ça, l'ensemble reste trop convenu, trop lisse à mon goût...
J'aurais aimé que l'auteur pousse plus loin son idée de " justice participative ", que l'action, qui le méritait, devienne plus sauvage...
Je me suis aussi assez vite lassé des multiples renvois en bas de page des traductions des expressions locales, en plus assez édulcorées...
16/04/2023 à 22:01 4
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Billy Summers
7/10 Parce que c'est Stephen King, et parce que le talent ne se perd pas, j'ai fait l'effort d'aller au bout d'une histoire qui gagne en intérêt au fil des pages, sans pour autant s'approcher du niveau de ses meilleures intrigues...
Mais parce que c'est Stephen King, je me dois d'être honnête, et de dire que si un auteur lambda avait été à l'origine de ce roman, j'aurais sans doute abandonner en cours de route cette histoire qui aurait pu tenir en moitié moins de pages, et qui aurait fait une formidable nouvelle...
Et pourtant, parce que c'est Stephen King, je referme le livre le sourire aux lèvres et les larmes aux yeux, la faute à cette foutue humanité qui traverse ses personnages, même les moins mémorables, à son improbable duo beaucoup mieux assorti qu'on aurait pu l'imaginer au départ, à ces dernières pages dans lesquelles l'auteur se livre presque trop, sur le pouvoir de l'écrit et de l'écrivain...
Et de me dire : " Vivement le prochain..."02/04/2023 à 18:34 7
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Je suis ta nuit
7/10 Le problème avec ce type de sujet, c'est qu'il nous ramène fatalement au magnum opus du genre : Ça...
Et que pour espérer tutoyer la barre où l'a placé Stephen King, il faut envoyer du bois, ou s'en démarquer fortement, avec le risque de déplaire...
Ici, un récit inégal, qui coche bien sûr toutes les cases en la matière, mais copie aussi un peu trop bien le cahier des charges de l'œuvre de Stephen King...
Le final émouvant témoigne néanmoins de la réussite de Loic Le Borgne d'avoir rendu ses personnages attachants et authentiques, même si je trouve dommage, voire contre-productif, la justification très terre-à-terre des évènements relatés par le narrateur...29/03/2023 à 20:25 2
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Paris se lève
6/10 Paris se lève, mais pas forcément son lecteur...
Une enquête à rallonge, au rythme laborieux, durant laquelle l'auteur prend le parti de tricoter son intrigue avec ( un peu trop de ) patience, une maille à la fois...
Pour ce qui est de narrer par le menu le quotidien d'un groupe de flics, leurs problématiques, leurs coups de blues, leurs coups de feu, leurs coups tordus, sûr qu'Armand Delpierre choisit le bon angle de vue...
Pour ceux qui ont un peu de bouteille, ou l'habitude de lire ce genre de romans, le souvenir ne sera pas impérissable...
La fin, très ouverte, m'incite néanmoins à surveiller sa prochaine sortie...04/03/2023 à 12:25 2
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Hidden Pictures
6/10 C'est un peu un roman à la Jean-Claude Dusse : il promettait beaucoup, mais au moment de conclure, patatras, finalement, on passe son tour, pour se retrouver face à quelque chose de franchement moins révolutionnaire que voulait bien nous le faire croire la quatrième de couverture...
Le début est assez réussi, dans le genre Poltergeist, avec un mystère et une tension qui s'installent progressivement...
L'idée des dessins permet une interaction assez originale pour le lecteur, qui peut, à son tour, mener l'enquête...
Mais l'intrigue bifurque soudain vers une résolution bien trop terre à terre, oblitérant
complètement l'aspect fantastique de l'histoire, ou se raccrochant aux branches par des biais nébuleux...
Dommage, le potentiel était bien là...21/02/2023 à 23:03 2
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Lucia
5/10 Une lecture en trompe-l'oeil...
🎶 Lucia, Lucia c'est moi, 🎶 je sais, il y a des " fois " comme ça...
Des fois pendant lesquels on est charmés durant une bonne partie de notre lecture, où il y a suffisamment de savoir-faire et de rebondissements pour passer outre le fait que l'intrigue n'a rien de très originale...
Mais les vingt dernières pages de l'histoire font basculer mon vote du côté obscur...
Le surréalisme et l'incohérence des coups de théâtre finaux plombent littéralement le roman ; on n'est plus chez Ovide, on est chez Dali !!
Dommage de la part d'un auteur comme Bernard Minier...09/02/2023 à 18:19 5
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Biotope
9/10 Lecture éprouvante, lecture dérangeante, j'ai ressenti, en parcourant les pages de ce Biotope, le même malaise qu'à la lecture du Vide de Patrick Sénécal, malaise d'autant plus saisissant qu'il suscite là aussi une vraie réflexion quant au sujet très clivant du roman...
Le sujet, qui rappelle le Fil rouge de Paola Barbato, ou les Sept jours du talion du même Sénécal, génère une impression d'inéluctabilité, liée à sa mécanique implacable, dont David Coulon nous donne, par petites touches, les clés, pour tenter d'appréhender l'ignoble et l'inconcevable...
L'approche psychologique finement menée, apporte une réelle plus-value à cette œuvre sans concessions...31/01/2023 à 21:57 8
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Dark Matter
8/10 Si Blake Crouch avait eu besoin d'un galop d'essai pour réaliser Récursion, alors ce serait Dark Matters...
Comme une légère altération de la réalité,
on en vient même à se demander si nous n'avons pas finalement poussé la porte du multivers, et ne tenons pas entre les mains une mouture différente, mais pas tant, d'une même œuvre...
Les réalités alternatives, tremplins vers tous les possibles, l'amour, comme moteur essentiel de l'investigation du héros, la quête d'identité, les deuxièmes, troisièmes, dixièmes chances...
C'est aussi une formidable métaphore du travail de romancier : cette boîte, point de départ du multivers, c'est l'imaginaire de l'auteur recelant des mondes et des mondes inexplorés...
Autant de composantes de l'œuvre de Crouch, qui auront percuté agréablement une fois encore mes neurones...
Qu'est ce qui différencie donc ce titre de Récursion alors ?
Peut-être l'aspect un peu moins globalisant de l'intrigue, l'attention focalisée sur LE personnage principal et son couple, et non pas sur des enjeux plus collectifs, une explication scientifique plus nébuleuse aussi pour le coup, et qui s'intègre moins facilement dans le récit....
Toujours est-il qu'une fois de plus, Blake Crouch nous embarque dans un voyage dont il a le secret et confirme tout le bien que je pensais de son talent après avoir lu Récursion...23/01/2023 à 21:43 8
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Et pour le pire
9/10 Voilà un roman dont le titre n'est pas galvaudé...
La loi du talion version Boudou se pratique sans délai, ni commisération, en réponse à l'abjection dont a été victime la femme de Vincent, le héros du roman...
L'auteur ne cherche en aucun cas à édulcorer le chemin de croix de son personnage, d'un point de vue physique comme émotionnel, et c'est comme ça qu'il nous le rend si bouleversant, si poignant...
Sa quête de justice, et son incapacité à pouvoir l'exercer par lui-même, le rendent même fondamentalement humain...
On pardonnera a l'auteur quelques petites incohérences, nullement préjudiciable au plaisir que l'on prend à la lecture de cet ouvrage...20/01/2023 à 21:04 7
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Le Chant du silence
8/10 Bien grincheux celui qui ne se laissera pas charmer par ce Chant du Silence...
Décidément, Jérôme Loubry aime jouer avec ses lecteurs, depuis la réussite des Refuges, et ce nouveau roman nous capte dans ses filets une fois encore...
Même si tout n'est pas parfait, une fois harponné, difficile de ne pas aller au bout...
J'ai été beaucoup plus touché par le traitement de la relation père-fils que par celui du triangle amoureux, cet éloignement forcé pour les mauvaises raisons, que l'auteur parvient à nous rendre sincèrement bouleversant...
Le style de Jérôme Loubry s'accorde, comme souvent, à l'histoire choisie, et on sent vraiment, ici, qu'il a ciselé certaines de ses phrases, au risque de parfois frôler l'emphase...
Mais la nature du récit ne souffre aucunement de cela, ni le suspense d'ailleurs, qui, durant les cinquante dernières pages, ne vous laissera aucun répit...18/01/2023 à 19:19 9
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Dehors les chiens
9/10 Si toutes mes lectures de 2023 sont du calibre de " Dehors les chiens", ça promet...
De calibre justement il en est question, quand Crimson Dyke, agent du Trésor US, se voit contraint de jouer du sien pour 1) remplir son quota d'arrestation de faux-monnayeurs, comme sa charge le lui impose ;
2) tenter de mettre hors d'état de nuire un mystérieux tueur en série qui éviscère sans ménagement des individus de sexe masculin du Grand Ouest Américain...
Comme souvent, chez Michael Mention, la petite et la grande histoire s'épousent, pour mieux nous imprégner d'un contexte fatalement trouble...
Si l'Union prête corps au récit, les personnages ne sont jamais à la noce, et les combats menés par l'auteur trouvent un écho certain, même dans l'immensité des plaines de l'Ouest ...
La place des femmes, notamment, permet de jolis portraits, tout comme le soin apporté aux personnages, auxquels il est difficile de ne pas s'attacher...
Un vrai western littéraire, une plongée comme si vous y étiez dans l'Amérique d'après la Sécession et d'avant la récession...02/01/2023 à 17:30 11
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Où reposent nos ombres
9/10 Qu'il fut bon de m'être immergé Où reposent nos ombres...
C'est ici que Sébastien Vidal disperse les cendres d'une enfance magnifiée et magnifique, portées par une prose aussi poétique que naturaliste...
En pleine nature corrézienne, il porte en terre l'innocence évanouie, entre confrontation musclée et expérience traumatisante, pour mieux commémorer ce sentiment aigu de camaraderie qui façonne les plus fortes amitiés...
On s'attache, et on s'entiche, de ces personnages qui nous ressemblent, qui nous rassemblent...
Alternance de tranches d'envies adolescentes, et de brusques éclairs de violence enfiévrée, son histoire culmine dans un final de tragédie grecque, qui laisse une drôle de mélancolie au fond des yeux...27/12/2022 à 22:26 8
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Du Fond des âges
7/10 Véritable course contre la montre, ce roman de René Manzor coche toutes les cases du parfait page-turner...
Cliffhanger en fin de chapitre, narration alternée passé/présent, rythme effréné et découpage quasi cinématographique du récit...
L'incursion dans le domaine du fantastique fournit à l'auteur l'occasion d'envisager des séquences particulièrement horrifiques, sans verser dans l'insoutenable...
Le bémol vient principalement du fait qu'une bonne partie de l'intrigue rappelle furieusement celle de The Thing de John Carpenter...
Le suspense reste néanmoins de mise jusque dans les dernières pages, et permet de passer un agréable moment...21/12/2022 à 21:33 7
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Jolies choses
8/10 Étonnante lecture que ce jeu de dupes, cette lutte d'égos et d'escrocs, dans laquelle se niche une critique des réseaux sociaux, quand l'amour du clic vous vaut de grandes claques...
L'écho renvoyé par son intrigue déroutante, dont on ne voit rien venir, à partir duquel les deux principales protagonistes vont subitement comprendre que la cause de leurs malheurs se substitue l'une à l'autre, résonne durablement, même une fois le livre refermé...
C'est nous finalement qui devenons les pigeons de l'auteur, qui renverse les rôles, et les torts de multiples fois, et qui fait comprendre, in fine, à ses deux héroïnes, que la plus grande arnaqueuse qu'elles n'aient jamais rencontré, c'est la vie...17/12/2022 à 19:43 5
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L'Île des âmes
8/10 Très belle surprise et prix PP 2021 amplement mérité pour ce thriller sarde, sorte de cousin méridional des histoires de Jussi Adler-Olsen...
C'est son intrigue avec un crescendo assez virevoltant, et la façon qu'a l'auteur d'intégrer le particularisme de l'île, sa géographie, sa culture, ses rites, à son déroulement, qui donne le tempo à une lecture addictive, prenant de l'ampleur au fil des pages...
Les deux protagonistes, dont la propension à se clasher n'a d'égale que l'estime qu'elles finiront par avoir l'une pour l'autre, méritent qu'on s'attache à elles plutôt pour les failles et les blessures qu'elles portent en elles, que pour leur antagonisme un peu trop surjoué, et d'une récurrence légèrement irritante...
Dans tous les cas, Pulixi nous donne envie de nous plonger dans son deuxième ouvrage sorti dernièrement, ce que je ferai prochainement...04/12/2022 à 08:19 14
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Plus rien à perdre
7/10 Une variante du Justicier dans la ville, sans fioritures, ni temps mort...
Un premier roman qui ne renverse pas la table, mais qui à le mérite de ne pas se prendre pour autre chose que ce vers quoi il tend, nous divertir, une vendetta dévastatrice, avec du gros sang qui tâche, du deuxième degré, et des morts à la pelle...
Un premier roman qui, paradoxalement, et malgré l'éradication totale du casting, ne joue pas la carte de la surenchère, et plonge son personnage principal dans le questionnement, nous poussant à nous interroger sur la légitimité de ses actes...24/11/2022 à 17:57 4
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La Constance du prédateur
8/10 Je retrouve le Maxime Chattam de la première heure, quand lui retrouve son personnage de Ludivine Vancker...
On est bien loin des ratés du Signal, ou d'(Un)secte, quand se profile la jeune profileuse...
C'est structuré, tendu, anxiogène, et même l'écriture de l'auteur s'en trouve modifiée...
Plus de maîtrise, un réalisme glaçant, plus de sobriété aussi, qui colle parfaitement à l'investigation psychologique de son héroïne...
Il est dommage par contre que l'éditeur nous spoile la moitié du livre, puisque c'est aux alentours de la page 250 que nous est révélé ce qui, de mon point de vue, fait l'originalité de l'intrigue, mais dont on se doute après avoir lu la quatrième de couverture...
Je serai néanmoins au rendez vous de la prochaine enquête du DSC...15/11/2022 à 20:16 10
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Aux Quatre vents
7/10 Les cent premières pages, je n'ai cessé de penser au préambule du roman, qui nous apprend que l'idée directrice a été suggérée à Amélie Antoine par une tierce personne, et de m'interroger sur cette propension à ( trop) tourner autour du pot, au point de trouver le temps interminable...
Puis, dès l'instant où les enjeux ont véritablement été posés, le talent de conteuse de l'autrice a emporté ma réserve, même si le style légèrement désuet, et quelques aspects un peu trop cousus de fil de rose ont pu ternir le plaisir que j'avais totalement ressenti à la lecture de Raisons obscures...
Avoir situé l'action de son roman au cœur d'une des pages les plus sensibles de notre Histoire permet à Amélie Antoine de nous ouvrir les yeux, comme souvent avec elle, sur les choix délicats auxquels nous sommes plus qu'à notre tour confrontés, et éparpille, aux quatre vents, tout manichéisme, quant à la confrontation du lecteur avec ses personnages...05/11/2022 à 20:33 3
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Le Plan
8/10 On ne peut pas contester à Fabrice Rose l'efficacité de son Plan, d'autant plus qu'il use d'un argument imparable : son vécu...
Lui, ce n'est pas que gamin qu'il jouait aux gendarmes et aux voleurs, et ce passé lui permet de restituer toute l'authenticité et le grain de cette série d'instants-tannés, tannés par la violence des actes, par le souffle du vrai, par la fierté des paroles...
Une parole mesurée, quand les dialogues sont réduits à la portion congrue, pas le temps de s'émouvoir quand la machine est lancée, l'action prend toute la place, et le rythme, de ne jamais fléchir...
Un Plan longuement mûri, quand l'épilogue promet de retrouver les différents protagonistes dans d'autres aventures...30/10/2022 à 10:31 5