Dodger

471 votes

  • Gramercy Park

    Christian Cailleaux, Timothée De Fombelle

    7/10 Si je ne suis pas très fan des dessins de Christian Cailleaux, le scénario de Timothée de Fombelle (qui est, hors cette B.D., mon chouchou absolu de tous les temps) m'a séduit, par son apparente nonchalance, son texte dépouillé, sa manière de se plier aux codes du genre pour mieux filer vers une fin aussi surprenante qu'implacable. Fombelle fait d'une histoire de vengeance familière une quête profonde et intime, balançant jusqu'au bout entre cruauté et rédemption. Pour une première tentative en bande dessinée, c'est un joli coup d'essai.

    16/09/2020 à 08:38 3

  • Hével

    Patrick Pécherot

    8/10 Pécherot, c'est un style - imagé, gouailleur, plein d'une verve qui évoque Audiard et Léo Malet. Mais c'est aussi un art du suspense à hauteur d'homme, qui tire d'une poignée d'éléments - le Jura en hiver, un vieux camion déglingué, des hommes sombres et leurs secrets - la puissance exemplaire de la tragédie.
    Définitivement, un grand !

    26/11/2018 à 08:18 6

  • Ils savent tout de vous

    Iain Levison

    8/10 Quel régal ! Maître conteur, Levison emballe son histoire du début à la fin, sans temps mort ni fioriture. Levison pointille le suspense d’un humour subtil, et surtout le met au service d’une intrigue qui mitraille allègrement notre société de tout-surveillance, où Internet et les téléphones portables sont devenus les premiers réseaux d’espionnage mondial. Intelligent, malin, un polar solide, enlevé et amusant, comptant sur ses personnages et son rythme d’enfer pour vous hypnotiser.

    30/10/2015 à 11:20 6

  • Ils sont votre épouvante et vous êtes leur crainte

    Thierry Jonquet

    9/10 Sur un sujet aussi sensible, Jonquet courait le risque de se planter au moindre mot mal placé. Mais comme à son habitude, il maîtrise totalement son sujet. Résultat : non pas un polar mais un roman noir, très noir, pessimiste et sans concession, qui a l'intelligence de ne pas prendre parti pour mieux établir un état des lieux, celui des banlieues françaises aujourd'hui. Intense et passionnant.

    04/03/2007 à 12:40 6

  • Jake

    Bryan Reardon

    9/10 Attention, comme mes camarades ayant précédemment voté, énorme coup de cœur !
    Tenant l’ensemble du roman sur un fil fragile, Bryan Reardon creuse le sillon du doute et de la culpabilité d’une manière intime, profonde, avec d’autant plus d’empathie et d’humanité que nous suivons l’histoire du point de vue de Simon, père de Jake et narrateur du drame. Les hésitations, les coups de colère, les atermoiements de Simon sont les nôtres, jusqu’à ce que la vérité soit enfin dévoilée, après plus de 300 pages d’horrible incertitude.
    Alors l’émotion explose enfin, et c’est le regard très flou que j’ai lu les vingt ou trente dernières pages de Jake, profondément bouleversé par la sincérité des sentiments qui irradie de ce final d’une force incroyable.
    Dans la lignée d’un Thomas H. Cook (on pense bien sûr aux Feuilles mortes, dont le sujet est très proche), Bryan Reardon nous offre avec Jake un roman noir extraordinairement juste, sensible et touchant, un condensé d’humanité qui laisse les larmes aux yeux et le cœur un peu plus ouvert. Une sacrée découverte.

    25/11/2018 à 19:39 6

  • L'Homme posthume

    Jake Hinkson

    7/10 En dépit d’un départ canon, et d’un rythme soutenu qui entraîne rapidement le lecteur vers la conclusion du livre, cet Homme posthume n’est ni aussi convaincant, ni aussi enthousiasmant que "L'Enfer de Church Street". L’intrigue ne tient qu’à un fil, tandis que les motivations et la construction des personnages manquent d’épaisseur. Néanmoins Hinkson assume la noirceur de son histoire et de ses personnages, et prouve qu'il a un beau talent et une belle énergie de conteur. Toujours à suivre, en espérant plus fort la prochaine fois.

    19/03/2016 à 08:44 6

  • L'Homme qui a vu l'homme

    Marin Ledun

    10/10 Sans chercher à prendre parti pour quelque cause que ce soit, "L’homme qui a vu l’homme" plonge dans un maelström inextricable de mensonges, de trahisons, de tortures et de secrets honteux. Inspirée d’un fait divers bien réel, l’affaire Jon Anza, l’intrigue du roman se permet avec sobriété les artifices du thriller pour mieux nous immerger dans les problématiques contemporaines du Pays Basque. Si cette région à cheval sur deux pays, poudrière politique depuis des décennies, fait moins parler d’elle dans les médias nationaux depuis quelque temps, elle n’en a pas terminé avec ses vieux démons.

    Passionnant sans être démonstratif, le polar fonctionne aussi et avant tout parce qu’il est formidablement écrit : plus acéré et nerveux que jamais, le style de Marin taille dans la chair du verbe pour saisir au mieux les mots de la colère, approcher au plus près la folie, exprimer au plus juste la violence. A la fois puissant, précis, rageur et d’une sincérité admirable, il est au service d’un récit au rythme haletant, preuve que le romancier plie aujourd’hui mieux que jamais la forme addictive du polar à la densité et à l’intelligence de son sujet.

    Bref, gros coup de coeur pour ce qui est pour moi, sans doute, le meilleur roman à ce jour de Marin Ledun. Immanquable !!!

    20/01/2014 à 11:24 6

  • La Disparition d'Annie Thorne

    C. J. Tudor

    7/10 En lisant les avis précédents, je suis assez surpris de voir plusieurs références à Simetierre, de Stephen King. Avec le recul, je peux comprendre pourquoi ; mais sur le coup, pendant la lecture, je n'y ai pas pensé. Il est vrai que depuis L'Homme-Craie, la référence à King est déjà devenu un passage obligé lorsque l'on parle de C.J. Tudor (à tort ou à raison), mais pour le coup, elle est loin de m'avoir sauté aux yeux à la lecture de La Disparition d'Annie Thorne.
    Certes, la jeune romancière anglaise se régale à instaurer des atmosphères inquiétantes, nimbées de mystère qui titillent les frontières du surnaturel pour mieux, au final, parler des ombres de l'âme. Elle reprend le principe ici pour scruter les sombres secrets des petites villes anglaises, mais avec un peu moins d'intensité et de fluidité à mon goût, en dépit d'un narrateur formidable et d'une intrigue bien élaborée, quoique plus classique.
    Un deuxième roman solide sans être épatant, qui réclame une légitime patience pour une auteure qui construit peu à peu son style et son univers. À suivre, donc.

    04/06/2021 à 11:06 6

  • La Petite Gauloise

    Jérôme Leroy

    9/10 En plus de désigner le personnage le plus énigmatique de ce roman, "La Petite Gauloise" porte bien son titre à double fond, puisque Leroy y jette un regard sans concession sur la France d'aujourd'hui - petite, mesquine, bas du front, égoïste. Oui, le tableau est effroyable. Mais Jérôme Leroy a le talent et le bon goût d'épargner le lecteur en relevant le tout d'un humour piquant, d'une ironie réjouissante qui mord, égratigne, mais arrache des sourires salutaires là où il ne devrait y avoir que dégoût et grincements de dents. Un tour de force que la brièveté du texte rend encore plus percutant. Remarquable !

    26/11/2018 à 10:16 6

  • La Voix secrète

    Michaël Mention

    8/10 Faire de Lacenaire, figure naturellement haute en couleurs, l’un des personnages principaux de la Voix secrète, est également une belle idée, dont Mention exploite la verve, la culture et l’élégance, sans dissimuler sa folie criminelle pour autant. Les autres acteurs du roman, qu’ils soient réels ou fictifs, sont à la hauteur de cette démesure.
    Pour le reste, Michaël Mention mène son récit tambour battant, s’amuse à l’occasion avec la forme du texte (voir l’enchaînement choc entre la fin du prologue et le premier chapitre !), restitue parfaitement l’atmosphère du Paris d’alors, et tient bon la barre du suspense sans jamais faillir. Petit bonus mais non des moindres, il tisse régulièrement quelques liens discrets avec notre époque, un art de la mise en perspective qui donne toujours une intelligence et une profondeur bienvenues aux romans historiques.
    Comme quoi, il est possible, dans ce genre codifié et toujours menacé de paraître poussiéreux ou empesé, d'être furieusement moderne.

    04/06/2021 à 12:09 6

  • Lagos Lady

    Leye Adenle

    8/10 Attention, révélation ! Lagos Lady, c’est un peu sur le fond la trilogie Millenium revue et corrigée à la sauce nigériane, et survitaminée en mode tarantinesque. Violent, sensuel, très chaud (dans tous les sens du terme), ce premier roman nous plonge dans l’atmosphère bouillonnante de la plus grande ville africaine, pointant du doigt aussi bien la corruption des élites ou de la police, l’opulence suspecte de certains de ses habitants que la misère de la plupart, notamment d’innombrables jeunes femmes contraintes à la prostitution et exposées aux pires des sévices.
    Avec ce premier roman nerveux, rythmé, drôle parfois, Leye Adenle fait une entrée fracassante et place le Nigeria sur la carte du monde du polar. A découvrir !

    12/06/2016 à 10:28 6

  • Le Camp des Morts

    Craig Johnson

    9/10 C'est avec un plaisir intact que l'on retrouve le shérif Walt Longmire, ses acolytes et son Wyoming, dans une deuxième enquête où tous les ingrédients qui faisaient la réussite du premier opus sont à nouveau réunis : une écriture enlevée et poétique, de l'humour, beaucoup d'humanité et de chaleur (et ce, malgré les températures glaciales qui pétrifient nos héros), une nature et un environnement formidablement décrits et, bien entendu, des personnages si bien campés qu'on n'a aucun mal à leur donner trait et vie en imagination.
    S'ajoute à tout ceci, cette fois, une intrigue un peu plus élaborée que celle, assez classique, de "Little Bird", avec une plongée dans une sombre histoire de famille assaisonnée à la sauce basque - les membres de cette communauté, assez représentée au Wyoming, étant au coeur du roman. L'occasion pour Craig Johnson d'élargir le propos et de livrer une réflexion juste et émouvante sur le temps qui passe, l'amitié, l'amour... sans jamais se montrer lourdement démonstratif ni larmoyant. "Le Camp des morts" confirme le talent d'un auteur attachant et pertinent, dont on peut se réjouir d'attendre au moins quatre nouveaux romans, à paraître dans les prochaines années.

    03/04/2010 à 17:37 6

  • Le Fleuve des brumes

    Valerio Varesi

    8/10 Héritier déclaré de Simenon, Valerio Varesi a tiré de son mentor un sens indéniable des atmosphères ouatés, des personnages solides, et une manière singulière d'enquêter pour son enquêteur, digne disciple de Maigret dont il épouse la capacité à écouter et faire parler témoins et suspects pour en tirer, tranquillement, lentement, la vérité. Dans les brumes échappées du Pô en crue, le commissaire Soneri traque les récits cachés qui remontent à un passé pas si lointain qu'on pourrait le croire, et débusque les vilains secrets tapis dans l'ombre des heures sombres de l'Histoire italienne. L'écriture est magnifique, poétique, et fait glisser l'intrigue comme coule le Pô, inexorablement... A découvrir !

    25/11/2018 à 21:14 6

  • Les Assassins

    R. J. Ellory

    9/10 J’ai beau connaître R.J. Ellory, savoir de quoi il est capable, il arrive encore à me cueillir, façon uppercut au menton et K.O. pour le compte. Autant dire d’emblée que ses "Assassins" m’ont envoyé au tapis direct. Aussi puissant que "Seul le silence" ou "Mauvaise étoile" (le haut du panier elloryen pour moi), ce roman réussit l'exploit d'investir un thème hyper rebattu du polar, celui des tueurs en série, en jouant avec les références du genre tout en imposant un autre regard sur l'exercice. Un regard plein d'intelligence, de finesse et d'humanité, qui mêle à une histoire trippante, parfois flippante, des esquisses d'amitié ou d'amour très touchantes. Une nouvelle fois indispensable.

    12/09/2015 à 08:51 6

  • Les Brouillards de la Butte

    Patrick Pécherot

    8/10 Compliments de rigueur pour ce premier polar historico-parisien de Pécherot. Son style gouailleur fait merveille, animé d'un argot employé toujours à bon escient, et vous embarque à deux cents à l'heure dans une histoire rocambolesque, qui nous plonge comme si on y était dans l'ambiance du Paris des années 20. C'est drôle, enlevé, impossible à lâcher. Du très bon roman noir à la française (ce n'est pas péjoratif) pour un pur plaisir de lecture !

    15/01/2009 à 20:39 6

  • Les Loups à leur porte

    Jérémy Fel

    8/10 Clairement, l’ombre de Stephen King plane sur ce premier roman impressionnant, signé par un jeune auteur hexagonal qui n’a vraiment pas froid aux yeux. Dès les premières pages, un long frisson nous vrille la nuque. Il suffit de quelques images faussement idylliques et d’un art de la suggestion magistral. Nous sommes en présence du mal, qui s’accrochera au livre jusqu’à ses dernières pages sans jamais lâcher prise - le mal, LE personnage principal du roman.
    Pour fragiliser son lecteur et ne lui laisser aucun répit, Jérémy Fel s’appuie sur une construction brillante. Son roman est un kaléidoscope d’histoires apparemment sans lien, qui multiplient personnages et lieux, dont les destins s'attachent grâce au style puissant et visuel de l'auteur.
    Des débuts littéraires implacables, qui laissent espérer le meilleur pour la suite. Fel, à suivre !

    18/07/2016 à 12:39 6

  • Little Bird

    Craig Johnson

    9/10 Pour leur première apparition, le shérif Walt Longmire, son meilleur ami l'Indien Henry Standing Bear et leurs acolytes - formant une longue et réjouissante galerie de doux dingues, fiers, rudes comme la terre où ils vivent, mais par-dessus tout attachants et campés avec un art consommé du portrait -, plongent dans une sombre histoire de vengeance impliquant la communauté indienne, sujet ô combien sensible par ces contrées...
    Au détour d'une intrigue parfaitement menée, Craig Johnson raconte son Wyoming comme seuls les auteurs américains savent le faire, rendant vibrante chaque feuille de chaque arbre, faisant scintiller chaque flocon de neige. Ajoutez une pincée d'absurde à la sauce Coen Brothers, des dialogues qui font mouche avec une précision de sniper, et vous obtenez un polar chaleureux, humain et souvent drôle, fermement ancré dans l'esprit "nature writing" cher à son éditeur, Oliver Gallmeister.

    23/05/2009 à 23:20 6

  • Ma ZAD

    Jean-Bernard Pouy

    8/10 Quel bonheur de retrouver Jean-Bernard Pouy dans une telle forme ! Le style virevolte, crochète volontiers par quelques blagues tellement pourries qu’elles font immanquablement rire, pique les autorités sans donner de signe de lassitude… quoique, si, les héros sont fatigués. Ça épuise, de conspuer les abuseurs de pouvoir et autres profiteurs des guéguerres économiques. On sent bien, à la mélancolie qui sourd parfois des réflexions de Camille, que l’engagement citoyen se teinte de désenchantement. Le moyen de faire autrement, vu le monde dans lequel on vit ?
    Quoi qu’il en soit, on se marre beaucoup en lisant Ma ZAD, on ne s’ennuie pas une seconde, on accompagne une brochette réjouissante de personnages pétillants, et on se prend à croire, l’espace de quelques pages, qu’on peut parfois renverser les empêcheurs de rêver en rond.

    25/11/2018 à 19:18 6

  • Mystic River

    Dennis Lehane

    10/10 Un classique instantané ! D'une profondeur bouleversante, superbemement écrit, "Mystic River" est la quintessence du roman noir contemporain. L'un des (déjà !!!) trois chefs d'oeuvre de Dennis Lehane, avec "Shutter Island" et "Un pays à l'aube".

    30/08/2009 à 10:24 6

  • Rivière tremblante

    Andrée A. Michaud

    9/10 Un roman noir magistral, somptueux opéra de colère, d'émotions et de douleur, profondément juste et poignant. Porté, soulevé, sublimé par le style incroyablement inventif d'Andrée A. Michaud. L'intrigue ? Elle existe mais on s'en fout un peu. Tout tient dans les personnages, leur cœur, ce qui vibre au plus profond d'eux. La tragédie qui les anime et, paradoxalement, les fait vivre. Tout tient, aussi, dans l'écriture extraordinaire de la romancière, dans sa clairvoyance et son humanité.
    Je n'avais pas été secoué comme cela par un roman noir depuis "Seul le silence" de R.J. Ellory. Sublime !

    26/11/2018 à 23:34 6