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Adieu demain
9/10 Vingt années ont passé depuis que l’Éventreur du Yorkshire a été arrêté. Et le sang coule de nouveau. Des victimes, féminines, perforées par des carreaux d’arbalète. Deux flics vont se lancer aux trousses du tueur : Mark Burstyn, superintendant encore tourmenté par sa précédente enquête, et l’inspecteur Clarence Cooper, passionné de plongée sous-marine et expert en infiltration. Cette traque leur coûtera, à tous deux, extrêmement cher.
Après Sale temps pour le pays, Michaël Mention poursuit sa trilogie anglaise. Rythme enfiévré, termes assassins, jeux avec les mots ainsi qu’avec la construction des phrases : on retrouve immédiatement le style si typique de l’écrivain. Saturé de références musicales, sociales et historiques, le lecteur plonge autant dans cette affaire criminelle que dans l’Angleterre de la fin des années 1960 au début du troisième millénaire. Ce qui frappe également, c’est la profondeur des personnages : depuis Burstyn, obnubilé par une voix enregistrée sur magnétophone et dont il n’a toujours pas découvert l’identité du propriétaire, à Cooper, remarquable caméléon dont l’immersion dans un groupe de parole dédié aux phobies va provoquer la chute morale. Tout y sonne juste et cruel, avec une large part faite à la psychologie de la peur, ou plus exactement, des peurs, tant elles sont nombreuses et protéiformes. Incandescente réflexion sur les anxiétés et la pusillanimité de l’humanité doublée d’une chasse policière de premier ordre, tortueuse, torturée, qui éclaboussera de sa boue méphitique le duo d’enquêteurs.
On savait Michaël Mention doué, et l’on pouvait attendre avec une certaine appréhension ce nouveau volet, de crainte d’être déçu tant le précédent était réussi. Nous voilà rassurés. Son dernier-né, monstre littéraire aux chélicères inquiétantes et agressives, est certainement à ce jour son ouvrage le plus accompli. Un exceptionnel festin de mots et de maux.22/09/2014 à 18:49 5
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Togo or not Togo
3/10 Un Poulpe bien mou du genou et insipide. Entre le prologue et l’épilogue, de longs passages où Gabriel voyage, rencontre des gens plus ou moins recommandables, et… rien. Pas l’acidité des autres opus, très peu d’action, de l’humour bien moyen. Une histoire certes originale car se déroulant presque intégralement en Afrique, mais le contenu est sincèrement très faible.
07/09/2014 à 18:34 3
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Dernier été
3/10 Une écriture absolument remarquable et un style très original, voire déconcertant (long monologue). Si la fin est surprenante, on finit par se demander si tout ce qui l’a précédée, c’est-à-dire la quasi-totalité du texte, ou plus exactement l’éventuel lien avec ce tableau de Frédéric Bazille, n’était pas un prétexte, une diversion trop grosse.
Et je suis encore plus circonspect quant à l’épilogue, où la victime aurait prononcé certaines paroles peu intelligibles, alors que les sources officielles n’ont jamais fait état de cela. Du coup, ça me donne une sorte de sale goût dans la bouche, dû au fait qu’un écrivain, non pas se fait l’interprète d’une piste tout à fait probable, mais profane tout simplement la réalité historique pour qu’elle s’intègre à son récit, lui fasse écho, ou s’accommode de sa vision conspirationniste. Et ça, j’avoue, ça a beaucoup de mal à passer avec moi.07/09/2014 à 18:32
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Les potes de la perception
7/10 Quand le Poulpe s’engage sur le chemin de la guerre au nom de l’éternel rock’n’roll, ça n’est décidément pas triste. Un opus fort sympathique et bien mené, avec un spécialiste de la scène musicale aux baguettes, et une histoire qui, sans être totalement mémorable, est suffisante pour permettre un agréable moment de lecture. Je retiendrai en revanche la secte foutraque à laquelle Gabriel se frotte, groupuscule déjanté et occasion de moments cocasses.
07/09/2014 à 18:29 1
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La Promesse des Ténèbres
7/10 Une plongée brutale dans le porno, avec ses dérives, déviances et barbaries. Dans le même temps, une immersion dans les souterrains new-yorkais et sa faune pas toujours recommandable. On retrouve la patte de Maxime Chattam et ses envolées quant à la société et ses perversions, ce qui n’a jamais été ce qui m’a le plus intéressé dans ses discours. La fin est intéressante et l’ensemble se lit finalement à grande vitesse malgré l’épaisseur de l’ouvrage car l’écrivain a un réel talent pour bâtir une histoire et faire en sorte que le lecteur soit happé. Ça doit être tout simplement le talent.
07/09/2014 à 18:26 2
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Le Temps égaré
8/10 Une admirable nouvelle sur le thème sans cesse exploité et réinventé des amours malheureuses, du triangle d’amants et de la tragédie à venir. Une plume piquante, douée d’une rare humanité, que Sylvie Granotier a également trempée dans l’érotisme. Finalement, peu importe la chute, puisqu’elle est annoncée d’entrée de jeu, et même si les dernières lignes viennent encore souligner la dramaturgie de cette passion mortelle : c’est l’entrelacs des deux points de vue, celui de Michel et de Marianne, qui porte bien haut ce récit aux accents si crédibles. Une bien belle réussite littéraire, à mon avis.
07/09/2014 à 18:25 2
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La Cavale de Lina
6/10 Une nouvelle sympathique, avec un non moins sympathique journaliste et enquêteur, aussi têtu qu’ardent amateur de tabac, d’alcool et de belles femmes. L’intrigue est rondement menée, ne déçoit jamais, mais sans jamais vraiment surprendre. Un bon moment de lecture, cependant.
26/08/2014 à 19:17 1
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Le manuscrit de la mémère morte
Louis Bellanti, Frédérique Vacher
6/10 Un petit Poulpe bien sympathique. Rien d’extraordinaire, ni dans l’histoire, son déroulement ou les personnages, mais on passe un agréable moment en compagnie de Gabriel et de Cheryl à remonter à un drame ayant eu lieu lors de l’Occupation.
26/08/2014 à 19:16 2
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Le Carnaval de Denise
7/10 Un épisode du Poulpe réussi, où l’humour brille par sa quasi-absence. Le drame du fait divers se conjugue avec la dénonciation de trafics qui s’établissent sur les pauvres épaules de gamins handicapés, ainsi qu’une critique de mouvements nationalistes d’obédience extrémiste. En plus d’être sombre, c’est l’un des rares opus de la saga à voir Gabriel se commuer sciemment en justicier, arme à la main, pour venger la mort d’un proche.
26/08/2014 à 19:15 2
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La Brie ne fait pas le moine
7/10 Un bon petit Poulpe, très en phase avec la série. De l’humour et de l’action au sein d’une galerie de personnages sulfureux ou croustillants. Le seul petit bémol que j’émets concerne justement le nombre un peu important de protagonistes et l’intrigue qui navigue selon trop de pistes à mon goût.
20/08/2014 à 15:35 1
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Tout commence mal...
7/10 Une histoire et des personnages fort sympathiques, et je comprends avec ce premier opus de la série qu’il y ait eu un tel engouement autour de cette saga. Même si l’intrigue est un peu faiblarde à mes yeux, elle permet de poser des protagonistes, un univers et un style réjouissants.
20/08/2014 à 15:30 2
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Le Jour de la citrouille
Jean-Michel Darlot, Johan Pilet
7/10 Une BD très agréable à lire, mêlant suspense, ambiance ténébreuse et un léger humour. L’intrigue tient la route et les dessins sont fort sympathiques. Un léger bémol en ce qui me concerne : les personnages agissant au sein du cirque ne sont pas assez développés, alors qu’il y a nettement de la matière. Mais ça sera peut-être le cas dans les prochains opus.
20/08/2014 à 15:27
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La grande môme
4/10 Pas vraiment emballé. Des personnages trop caricaturaux à mon goût, entre une ancienne activiste terroriste qui ne s’exprime jamais et dont on n’a des infos que par l’avocat ou sa fille, et un policier tellement brutal et corrompu qu’il en devient grotesque. L’histoire d’amour entre les deux ados est trop superficielle et déjà lue. Je ne dis pas que ça n’intéressera jamais les jeunes lecteurs auxquels s’adresse l’auteur, mais ça ne m’a jamais touché. Une des rares fois où je n’ai pas pu substituer des yeux de collégiens ou de lycéens aux miens.
20/08/2014 à 15:24
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Bal de givre à New York
5/10 Un peu déçu par ce livre. Il est certes très bien écrit, avec une prose fort belle, sucrée à s’en gâter les dents, et une histoire semée de fantômes. Cependant, je n’ai jamais vraiment été embarqué par le récit. Trop d’éléments oniriques parsèment l’ouvrage, trop d’ingrédients volontairement improbables, ce qui fait que je n’y ai jamais cru et que le final peut se deviner.
20/08/2014 à 15:23
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Les Soeurs Lacroix
7/10 Quelque part entre le drame et le roman policier, un ouvrage puissant datant des 1938. Une ambiance lourde, moite, saturée de touffeur, où de vieux démons familiaux viennent hanter les habitants de la maison. Comme il est écrit page 45 : « C’était le ton de la maison : des voix dures, des regards sans indulgence et toujours des sous-entendus ». Même si le style a vieilli, la satire demeure acerbe et la manière qu’a Georges Simenon de dépeindre ses contemporains reste pénétrante.
11/08/2014 à 00:24 1
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Le Saint des seins
6/10 Un ton sombre et un style emporté pour une histoire qui défile rapidement entre les mains du lecteur. Si l’ensemble se lit avec plaisir, il faut néanmoins reconnaître que l’intrigue est assez simple, voire simpliste. Un Poulpe mineur à mes yeux, même si à aucun moment, et encore moins après-coup, je n’en ai regretté la lecture.
11/08/2014 à 00:23 3
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La ballade des perdus
6/10 Un ouvrage original dans la série puisque l’intrigue fait largement intervenir le surnaturel. Si l’ensemble est fort bien mené et que de nombreuses bonnes idées apparaissent, je regrette que la fin n’en soit pas vraiment une : trop courte, trop allusive, et finalement trop éludée pour être concluante.
11/08/2014 à 00:19 1
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Date limite
9/10 Mickey Wade est un homme qui conclut sa trentaine sur une vie sans fadeur. Installé dans un quartier malsain de Philadelphie, cet ancien journaliste n’a pas vraiment d’avenir. Son grand-père vit dans un état végétatif, son père a été assassiné dans un bar, ça n’est donc pas sa famille qui pourra lui accorder de l’aide. Et c’est un curieux hasard qui lui fait prendre des pilules dont il se méprend sur les effets : il peut à présent voyager dans le passé ! Après les doutes, il comprend qu’il peut en tirer avantage et cheminer dans l’histoire de sa famille. Mais on ne peut ainsi circuler dans les événements antérieurs sans chambouler le cours de l’histoire.
Après The Blonde et A toute allure, Duane Swierczynski s’essaie au roman fantastique tout en conservant une puissante fibre policière, et le résultat est détonnant. Il a remporté un Anthony Award pour cet ouvrage, et cette distinction est amplement méritée. Le sujet est archiconnu, rabâché au cinéma comme en littérature, et on voyait mal comment l’auteur allait pouvoir s’en sortir. Il y parvient largement grâce à une intrigue serrée, construite de manière diabolique, et une écriture excellente. Tous les personnages sont convaincants, les scènes se succèdent et en viennent à se superposer puisque, nécessairement, des interactions se produisent entre les deux époques. C’est alors un véritable régal que de suivre Mickey tenter de modifier le présent par ses actes effectués dans le passé, observer les répercussions, et essayer d’imaginer les incidences occasionnées par ses péripéties. On savoure alors cet enchevêtrement des cycles et la construction infernale du roman, car Duane Swierczynski a bâti une structure implacable où Mickey devient le propre jouet de ses agissements.
Livre remarquable tant dans son intrigue que dans son traitement, ce Date limite s’apparente à un délicieux millefeuille dont on se délecte de chacune des tranches et strates, car son agencement en fait fatalement une pièce pluridimensionnelle. Un petit joyau.04/08/2014 à 14:19 3
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La nuit de l'étrangleur
8/10 Romain a été obligé de déménager à Saint-Bajut avec sa famille, à cause de la promotion professionnelle de son père. Tout est à refaire pour lui : son entrée en cinquième, se refaire des amis, sa réputation… Un tueur en série sévit dans les parages. Sa méthode : étrangler ses victimes avec des ficelles rouges. Alors, en raison d’un geste mal interprété, Romain se croit obligé de dire qu’il connait l’identité de l’assassin. Pour se la jouer auprès de ses camarades. Pour devenir quelqu’un au sein de la bande. Mais jeter en pâture le nom d’un innocent n’est pas sans conséquences…
Traductrice de profession, Evelyne Jouve débarque dans la littérature policière pour la jeunesse, et cette arrivée se fait de bien belle manière. Un peu plus long que les autres ouvrages de la collection « Heure noire », ce roman interpelle par l’intelligence de ses propos autant que le suspense qu’il distille. Des sentiments changeants interviennent chez le lecteur au gré des pages : l’envie de découvrir Romain, de l’empathie à son égard, de la colère et de l’indignation lorsqu’il jette l’opprobre sur un malheureux concitoyen pour dominer ses amis, etc. C’est vraiment avec pertinence et esprit qu’Evelyne Jouve a signé cet opus.
La littérature jeunesse se particularise souvent par les messages qu’elle véhicule, à destination de son lectorat, et souvent d’ordre moral, social ou culturel. Sans que ces pensées deviennent pesantes ou scolaires, elles peuvent effectivement faire réfléchir, diriger ou susciter le débat. Ce livre est non seulement porteur d’une réflexion sur la portée de la parole donnée, mais constitue également un très agréable moment de suspense.04/08/2014 à 14:13
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Le malheur est dans le blé
5/10 Gabriel Lecouvreur, alias le Poulpe, entend parler d’une sale histoire financière à Grenoble, dans laquelle trempe Rosy, une femme magnifique, vedette des journaux people. Son sang de céphalopode ne fait qu’un tour, et il décide de se rendre sur place pour tirer ça au clair.
Deux-cent-quarantième enquête du Poulpe signée par Lucile Debaille, cet opus réunit les ingrédients qui plaisent aux fans de la série. Gabriel est toujours aussi attachant en fureteur décomplexé, prompt à démêler le vrai du faux à partir d’un simple fait divers, et perpétuellement en train de lutter contre les grandes injustices du monde. Le scénario est correct, plongeant cette fois notre détective dans les milieux obscurs de la finance, où nagent des personnages troubles. Certains passages, notamment lors des soirées sadomasochistes, sont assez croustillants. Cependant, on regrette que l’ensemble soit si convenu. Pas de grande envolée lyrique, de scène marquante, ni de réelle originalité dans le fond comme dans la forme. À part le rôle réel tenu par Rosy, toute l’histoire s’écoule, certes agréablement, mais sans réel émoi ni surprise.
On achève donc ce roman avec un goût d’inachevé dans le palais. L’ouvrage est très honnête, remplissant sans mal le cahier des charges imposé, mais Lucile Debaille n’a malheureusement jamais réussi à hisser cette enquête au-dessus d’une imaginaire ligne de flottaison qui correspondrait à l’attente moyenne des lecteurs. C’est dommage.04/08/2014 à 14:11 2