Santa Muerte

(Zero Saints )

  1. Santa Muerte, protégez Fernando

    Fernando, dit « Nando », est un dealer travaillant pour Guillermo. Mais un jour, il est enlevé par des inconnus qui le conduisent à un endroit où se trouve Nestor, un ami de Fernando. Nestor a déjà été férocement torturé, et c’est à son exécution, animale, auquel le kidnappé est obligé d’assister. Les bourreaux ont un message clair : que Guillermo cède sa place de leader local du trafic de drogue au profit de ces membres de la Salvatrucha. Fernando n’a rien d’un héros intrépide ni d’un vengeur au courage démesuré, aussi va-t-il hésiter à prendre les armes pour punir l’assassinat de son copain. Et si la Santa Muerte pouvait lui accorder une forme de salut en échange de quelques prières ?

    Premier ouvrage de Gabino Iglesias, ce court roman (environ cent quatre-vingts pages) saisit d’entrée de jeu par son ton : noir, brutal, mais non dénué de touches d’un humour à froid salvateur. Ecrit à la première personne, on découvre Fernando, petit intermédiaire qui assiste à la mise à mort d’un camarade avant de devoir se faire le porteur d’une menace à l’attention de son patron. Un pitch certes classique, mais qui s’oriente assez vite vers une intrigue folle où se mêle santeria, une touche de vaudou et des règlements de comptes musclés, sans compter la présence de nombreux personnages croustillants et épicés. On trouve ainsi un sicaire russe qui dissimule ses réelles activités derrière la couverture de simple pépiniériste, un autre assassin qui a tout de la diva et prend un réel plaisir à abattre ses cibles, sans compter Indio, le principal méchant du récit, d’où émanent de puissantes ondes méphistophéliques. Gabino Iglesias nous sert une recette sacrément relevée, passant au blender des individus très cinématographiques, au point que nombre de critiques ont noté le fait que ce roman pourrait être adapté par Quentin Tarantino. Cependant, au-delà de l’alignement de ces protagonistes typiquement badass, il y a quelques temps morts et autres passages pas nécessaires tandis que l’intrigue pure passe au second plan de ce chapelet de personnages tordus et marquants, sans compter un épilogue trop abrupt et, avec le recul, une sous-exploitation de cette idée de la Santa Muerte, pourtant alléchante et atypique.

    Un livre pimenté et distractif, original dans le propos et sanglant à souhait, dont on regrette pourtant le manque de chair et, finalement, son côté certes délassant mais guère mémorable.

    /5