Plus fort que la police

  1. La course d’Antoine

    Le jeune Antoine semble né sous une mauvaise étoile. Son père est en prison et voilà qu’il découvre, en rentrant chez lui, sa mère encadrée par des policiers qui l’embarquent. Il pourrait suivre ces hommes, essayer de comprendre les raisons de l’arrestation, ou rejoindre son copain Simon. Mais non, Antoine a une idée bien différente : il va se cacher, même s’il n’a strictement rien à se reprocher.

    Rémi Stefani a déjà écrit deux romans chez Rageot, 29 février et Cinq cent mille euros d’argent de poche, tous les deux de très bonne qualité. Ce livre est également prenant. L’écriture est excellente, et l’auteur sait rendre vivant son personnage, avec des réflexions et attitudes crédibles et sensées. Mais là où l’écrivain surprend, c’est au niveau de l’histoire en elle-même. Il n’est, pour une fois, nullement question de meurtre à empêcher ou à dénouer, de voleur à démasquer ou autre intrigue déjà lue des milliers de fois. Ici, le lecteur assiste à la fuite et la planque du jeune garçon. Il va se jouer des policiers, se dissimuler dans sa propre maison à la barbe des agents devant la surveiller, faire tourner en bourrique l’officier qui essaie de le retrouver, et, lentement, en simulant le comportement d’un malheureux gamin emporté par le désespoir et l’anomie, faire croire au commissaire que seule la libération de sa mère pourra éventuellement le ramener à la raison. C’est un pari particulièrement osé de la part de Rémi Stefani : proposer une telle histoire, finalement sans confrontation avec des individus dangereux ni faisant crépiter les neurones et synapses du lecteur en quête de la résolution d’un mystère criminel. D’une certaine manière, cet ouvrage, assez fin et léger, s’ancre davantage dans une thématique sociale, avec la tentative d’un gamin de porter secours aux siens comme il le peut, avec les maigres moyens qui sont les siens, quand ses parents sont conduits, probablement à tort, à commettre un acte délictuel pour permettre à leur famille de se loger ou de se nourrir.

    Rémi Stefani signe ici un roman atypique dans sa construction, ce qui ne l’empêche nullement d’être efficace et parfaitement plausible. Une histoire simple et juste, avec un suspense opérant, et qui amène à se poser de légitimes questions quant à la culpabilité, la réhabilitation et l’amour filial.

    /5