Karl

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  • 8/10 Dans le 9-4 (traduisez Val-de-Marne), Karl, Mo et Tony sont des amis inséparables. Suite à un fait de délinquance, ils font la rencontre, au commissariat, de Ronan, enfant de policier, puis de Layla, fille d’un couple bourgeois ayant réussi dans le milieu de l’art. Mais on n’échappe pas comme ça à la loi de la banlieue. Pour des motifs variés et conjugués, ces cinq adolescents vont connaître quatre-vingt-cinq heures de cauchemar.

    Premier roman du triptyque intitulé Trilogie noire écrit par Martial Caroff, cet ouvrage est une pure réussite. Destiné à un public plutôt lycéen sans que les adultes ne soient pour autant écartés du lectorat potentiel, le livre saisit rapidement par la justesse de son ton. Aussi lointain des clichés d’une certaine enfance complètement barbare comme de ceux décrivant ces quartiers avec un angélisme béat, l’auteur parvient à faire évoluer ses personnages avec intelligence. On y croise des ados brisés par la vie, soumis au doute et à la volonté de rédemption, ainsi que d’autres devenus des criminels en puissance, pervertis par l’appât du gain facile et la volonté de copier des jeunes ayant réussi grâce à des commerces peu avouables. C’est en quelque sorte, sans moralisation ni dénigrement systématiques, un portrait fidèle d’une jeunesse ordinaire de banlieue.
    Dans ce cadre, les cinq personnages principaux vont subir une série d’événements imprévisibles, et devenir les jouets d’un destin violent et sanglant. Trafics, appétits de vengeance, amitiés passées sous silence pour parvenir à se faire un nom, etc. Selon une mécanique adroite et efficace, tels les rouages d’une machine infernale, les individus vont devoir faire des choix : s’aider ou se détruire. Les barres de métal, couteaux et armes à feu vont jaillir. Parce que l’on menace l’intégrité physique de Layla. Parce que l’on soupçonne Mo d’avoir fait disparaître l’argent d’un vol. Parce que l’organisation criminelle de la cité a décidé de se débarrasser des gêneurs. Et quand éclate la violence, Martial Caroff rompt avec le langage habituel des ouvrages destinés à la jeunesse : c’est réel, sauvage, barbare.

    Avec cette entrée en matière, voilà une trilogie qui s’annonce sous les meilleurs auspices. Le deuxième tome est annoncé pour l’automne, et l’extrait présent en fin de roman fait déjà saliver. Il ne faut pas se fier au dessin de la couverture que certains pourraient juger un peu trop sage, ou du moins en décalage avec la teneur de l’opus : Martial Caroff concilie la dureté du roman noir à une photographie sans concession d’une cité actuelle.

    17/04/2012 à 18:58 El Marco (3180 votes, 7.2/10 de moyenne)