La République des faibles

9 votes

  • 7/10 Quel plaisir de plonger et de découvrir le Lyon de fin de XIXème siècle dans ces quartiers crasseux de prolétaires et miséreux, dans ce monde underground bien pourri à travers ce polar !
    Mais, il y a des « mais »…
    Je m’étonne qu’il n’y ait aucune allusion aux Canuts, les révoltés qui ont marqué l’histoire sociale de la capitale des Gaules. Pourtant, dans la trame, la lutte des classes, le conflit social sont bien là. Le contexte historique est bien présent et l’ambiance comme le décor sont bien plantés : la défaite de Sedan, la Commune, l’affaire Dreyfus… bien profondément installées dans la tête des Français. En même temps, c’est dans les manuels (en tout cas, les pas si anciens).
    Et puis, j’aurais aimé que l’auteur creuse un peu plus sur les méthodes d’investigation de l’époque, on est dans la ville où enseignait Alexandre Lacassagne. On est dans les balbutiements de la police scientifique. Plus de détails sur la criminologie n’auraient pas gâché.
    Enfin, j’aurais aimé une fin plus aboutie, moins bâclée. On laisse tous ces flics en plan. D’ailleurs, je les ai bien aimés, pas tous, bien sûr. J’ai bien apprécié leurs méthodes d’interrogatoire. J’espère ne choquer personne… Est-que certains ont pensé à Valentin Verne dans sa cage ?
    Autre point mais ça, c’est pour l’éditeur : qu’est-ce que c’est que cette première de couverture ? On n’est pas à Lyon mais à Birmingham avec les Shelby brothers et leur casquette post 14-18.
    Vous allez me dire : «Mais pourquoi est-ce qu’elle a mis 7/10 ? » Tout simplement parce que j’ai vraiment pris plaisir à lire ce polar très noir, parce que l’histoire m’a plu, parce que le style est fluide, parce que j’aimerais retrouver cette brigade dans d’autres aventures mais ce n’est pas ce que l’auteur a en perspective à moins que je me trompe.

    14/08/2023 à 11:18 Coco Lamartre (139 votes, 7.9/10 de moyenne) 6

  • 8/10 La République des faibles, c’est le terme qualifiant cette IIIème République qui avait pour fondement la protection des plus miséreux. Expression surtout utilisée par les nantis qui voyaient ce régime remettre en cause leurs privilèges de bourgeois.

    C’est dans le Lyon de la fin du XIXème, où les réunions politiques des multiples courants de pensées (anarchistes, révolutionnaires,…) pullulent, où l’antisémitisme prend de l’ampleur (l’Affaire Dreyfus défraie les chroniques) et où l’anti-germanisme est à son paroxysme, qu’est découvert dans une décharge de la Croix Rousse le corps sans tête d’un jeune enfant. Les policiers tentent de mener un semblant d’enquête quand une autre affaire va éclater : l’assassinat d’un de leur collègue.

    Un roman très noir avec un contexte historique très prégnant que Gwenaël Bulteau a écrit comme premier livre. Puissamment documenté, j’ai vraiment apprécié cette immersion historique et la puissance de cette intrigue qui, par moment, malheureusement, constitue un vrai sac de nœuds

    23/01/2023 à 14:35 JohnSteed (624 votes, 7.7/10 de moyenne) 11

  • 9/10 Lyon, 1898. Un chiffonnier découvre le corps d’un enfant. La victime a eu les vertèbres cervicales tranchées et sa tête a disparu. Les premières constatations montrent que le garçon, Maurice Allègre, avait subi des sévices sexuels répétés et qu’il portait une robe de petite fille. Le commissaire Jules Soubielle est chargé de l’enquête avec ses auxiliaires. Ce sera probablement l’investigation la plus éprouvante de toute sa carrière.

    Gwenaël Bulteau signe ici son premier roman après sa nouvelle Encore une victoire de la police moderne !, et c’est un pur coup de maître. D’entrée de jeu, on est littéralement saisi par l’ambiance, lourde, noire, glacée. Chacun des mots de l’auteur semble avoir été aiguisé pour être le plus létal possible. Il y est question d’enfants enlevés, séquestrés, drogués, martyrisés, violés, traités comme de la viande. Dans le même temps, Gwenaël Bulteau nous restitue avec maestria le Lyon de la fin du dix-neuvième siècle sans jamais que cela ne tourne à la leçon pesante. Les divers personnages qui animent – voire hantent – ce récit sont tous réussis. Jules Soubielle et son épouse sont enfin parvenus à ce que cette dernière soit enceinte après de multiples tentatives. Les autres policiers sont tout aussi forts, de Caron, toujours prompt à cogner, même sévèrement, à Grimbert, parfois d’une rare goujaterie avec son épouse et encore brisé par une répression à laquelle il a participé à Fourmies, en passant par Silent, candidat à la future députation, antisémite et ayant mené une double vie. L’intrigue est redoutable, acérée, mettant en lumière de bien sombres déviances. Elle réserve de multiples rebondissements, allant de l’existence de l’un des collègues de Soubielle jusqu’à la famille habitant à côté du commissaire, les Génor, dont le père de famille, pharmacien, est alcoolique et particulièrement à cheval sur la rigueur hygiéniste.

    Avec en toile de fond les premiers soubresauts de l’affaire Dreyfus et les fractures profondes dans la société française que cela va engendrer, Gwenaël Bulteau nous offre un roman noir à l’intrigue policière puissante et mémorable, presque une apnée littéraire dans la fange où pataugent les individus les plus fragiles de la société. Remarquable !

    23/12/2022 à 08:11 El Marco (3432 votes, 7.2/10 de moyenne) 13

  • 8/10 L'auteur nous entraine dans le Lyon populaire à l'aube du XXe siècle. Pauvreté, alcoolisme, violences politiques, conjugales, policières ... le panel est large pour décrire une époque pas si lointaine et une république pas encore très efficace contre la misère et vilipendée par un ordre social bourgeois. Sur fond d'affaire Dreyfus, de la défaite de 1870, d'antisémitisme et de germanophobie, des policiers aux méthodes musclées pourchassent des dépravés pédophiles. Les femmes non plus ne sont pas vraiment à la fête dans cette société très masculine. Les personnages très typés rendent l'histoire vivante, sans temps morts. Il est parfois délicat de ne pas se perdre parmi tous ces flics aux profils semblables. Si le contexte urbain est lourd, ça ne va guère mieux à la campagne ou le poids des notables écrase les rapports humains. C'est un très bon roman policier, historique et social.

    13/09/2022 à 14:16 Surcouf (400 votes, 7.3/10 de moyenne) 10

  • 8/10 J'ai bien aimé le contexte et l'intrigue de cette histoire tout comme les personnages. Un style fluide et agréable.

    17/07/2022 à 07:17 Grolandrouge (1580 votes, 6.6/10 de moyenne) 7

  • 8/10 Un très bon polar social et historique qui se déroule à une époque assez méconnue par le lecteur que je suis. J'ai aimé me plonger dans le Lyon à la fin des années 1890 à l'aube du XXème siècle. Un antisémitisme latent et présent dans la société, la place faite aux femmes à l'époque nous rappelle le chemin parcouru, et nous alerte sur la fragilité des acquis. Les personnages masculins, qui dominent forcément le récit sont tous un peu trop semblables, difficiles à distinguer, et l'intrigue a un goût de déjà vu, mais le rendu du contexte social est très prégnant.

    27/06/2022 à 10:11 Polarbear (873 votes, 7.7/10 de moyenne) 11

  • 9/10 Un polar social et historique dans la troisième république... L'antisémitisme, la pauvreté, des luttes de pouvoir au cœur de l'intrigue... Un rythme soutenu, des personnages complexes, une atmosphère pesante, des sujets encore d'actualité... Un excellent moment de lecture !

    16/06/2022 à 11:33 Franck 28 (720 votes, 7.7/10 de moyenne) 9

  • 7/10 J'attendais peut-être beaucoup de ce roman ayant déjà reçu le Prix Landerneau Polar et en lice pour le Prix du Roman Cézam. Le Lyon de la fin du XIXe siècle est bien décrit, c'est certain, mais j'ai trouvé l'intrigue policière un peu faible en elle-même. D'autre part, je n'ai pas réussi à accrocher aux personnages, notamment de policiers, tous plus ou moins horribles avec leur femme, leurs enfants... C'est sans doute tout à fait assumé par souci de réalisme par rapport aux mœurs de l'époque et au(x) rôle(s) attribué(s) à la femme, mais ça n'aide pas à s'identifier aux protagonistes. Le contexte historique de l'époque est lui aussi exécrable – montée de l'antisémitisme, affaire Dreyfus... – et bien intégré par Gwenaël Bulteau dans son histoire. Malgré une légère déception, j'ai trouvé ce roman très intéressant et je poursuivrai avec cet auteur si l'occasion se présente.

    17/01/2022 à 17:38 Hoel (1163 votes, 7.6/10 de moyenne) 13

  • 9/10 Avec ce polar historique ancré à Lyon, dont la géographie et la sociologie de l’époque sont rendues avec précision et acuité, Gwenaël Bulteau frappe un grand coup pour son premier roman. Son suspense, il l’installe dans une ville nerveuse, sombre, déchirée, à l’image de la France de l’époque, tiraillée de violentes contradictions politiques, sociales, économiques. Le décor est saisissant, et pourtant, jamais déployé avec ostentation. Le tableau est toujours juste, et a le bon goût de ne pas prendre toute la place.
    Bulteau s'appuie aussi sur des personnages remarquables. Flics, voyous, témoins, simples passants, bourgeois, tous jouent des partitions subtiles et complexes, dont les variations ne cessent de surprendre, suivant les tours et détours d’une intrigue remarquablement dense et tourmentée, de bout en bout. Les zones d’ombre sont légion, les bonnes volontés se heurtent à la nécessité de faire parler la force, la menace et la brutalité pour obtenir des résultats.
    Et puis il y a la langue. Le style. Pas d’approximation chez Gwenaël Bulteau, on sent dès ce premier roman qu’il possède une véritable voix, et qu’il en use avec une belle maîtrise. Il tient son rythme sans jamais flancher, joue des registres de langue en évitant les clichés ; et si son roman laisse autant de traces en mémoire, la puissance des images suggérées par son écriture y est pour beaucoup.
    Un coup d'essai extrêmement brillant, qui ouvre la porte à une série dont j'ai hâte de découvrir les prochains épisodes.

    04/06/2021 à 09:37 Dodger (471 votes, 7.7/10 de moyenne) 13