Les Suppliciées du Rhône

  1. … ou les débuts de la police scientifique

    Lyon, 1897.
    Alexandre Lacassagne, professeur à la renommée grandissante, fait des progrès considérables dans le domaine de la médecine légale. Ses autopsies publiques attire une foule d'étudiants en médecine et de journalistes. Grâce à la température du corps et à la rigidité des tissus, il pense qu'il est possible de dater approximativement le décès d'une personne.
    Une jeune fille est retrouvée morte, vraisemblablement victime d'un avortement raté. Puis une deuxième. Quelqu'un essaierait-il de tuer des jeunes femmes enceintes ou n'ayant pas souhaité poursuivre leur grossesse ?
    Lacassagne, qui a réalisé avec ses étudiants l'autopsie de la première victime, confie à l'un de ses plus prometteurs disciples, Félicien Perrier, le soin de mener l'enquête. Le jeune homme s'entoure de son ami Bernard Lécuyer, étudiant en médecine comme lui, et d'Irina Bergovski, une jeune journaliste d'origine polonaise.

    Les suppliciées du Rhône est le premier roman de Coline Gatel, stéphanoise d’origine et qui semble bien connaître la cité des gones. Le point fort de cet opus est assurément son contexte, très solidement documenté. L’auteur mêle avec talent des personnages et des événements historiques et des inventions de son cru. Lacassagne, un des fondateurs de l'anthropologie criminelle, joue un rôle important dans l’histoire. Mais on croise aussi d’autres figures de l’époque, et ce de chaque côté de la loi, des théories de Cesare Lombroso sur le « criminel né » aux ignominies de Joseph Vacher, l'Éventreur du Sud-Est.
    Les conditions de vie, en particulier des canuts et autres petites gens de Lyon sont bien rendues, de même que la topographie (quelques notes de bas de pages nous renseignent sur les lieux qui ont depuis changé de nom). Un soin particulier est également porté par l’auteur au vocabulaire de l’époque. Ainsi, les infirmières ou les homosexuels, pour ne prendre que ces deux exemples, ne s’appelaient pas encore de cette façon.
    Les mœurs et les femmes sont d’une certaine manière au cœur de ce roman et quelques faits, qui paraissent aujourd’hui aberrants, sont bons à rappeler, comme ce « certificat de travestissement » dont devait se doter une femme pour avoir légalement le droit de porter un pantalon. Si l’intrigue passionne sans mal, certains développements sont un peu tirés par les cheveux et le final, hollywoodien, ne convaincra sans doute pas tous les lecteurs.

    Les suppliciées du Rhône, joliment documenté, est un polar historique passionnant sur les débuts de la police scientifique et ce que l'on a plus tard appelé « l'école lyonnaise ». Malgré des qualités certaines, l’intrigue peine à convaincre totalement, particulièrement dans le final.

    /5