Les Morsures de l'aube

  1. From Dusk Till Dawn

    Antoine Andrieux et son compère Bertrand Laurence font partie de ces « parasites professionnels » qui savent profiter des opportunités offertes par les nuits parisiennes. De boîtes de nuit en salons privés, de bars en colloques, ils savent s’incruster dans ces occasions où ils ne sont pourtant pas conviés, écumer buffets et alcools, avant de revenir à une vie presque normale quand vient l’aube. Sauf qu’une de ces soirées tourne mal pour notre duo d’oiseaux de nuit : Bertrand est séquestré tandis que l’on intime à Antoine l’ordre de retrouver un dénommé Jordan dans les quarante-huit heures, sinon… Et voilà Antoine qui part à la recherche de cet inconnu.

    Il s’agit du dernier opus de la quadrilogie consacrée à Antoine Andrieux, écrite par Tonino Benacquista. On y retrouve la truculence de l’auteur, toujours en verve, qui sait habilement décrire les nuits de la capitale, lâchant au passage de délicieux mots d’auteur et autres aphorismes croustillants. Ici, notre Antoine va devoir passer au tamis les boîtes parisiennes, faire jouer ses relations, contacter ses « indicateurs » et autres relations, pour retrouver ce dénommé Jordan. Mais la partie ne s’annonce pas gagnée d’avance, d’autant que cet énergumène semble aussi insaisissable qu’un courant d’air et laisse dans son sillage une étrange impression à celles et ceux qui l’ont rencontré. Un personnage d’autant plus énigmatique qu’il est couplé à une jeune fille diaphane, provocante et particulièrement libérée, Violaine, et que les langues commencent à se délier à propos de certains comportements vampiriques de leur part. Assurément, Tonino Benacquista maîtrise son sujet, notamment dans ces milieux interlopes des fêtes pour noctambules, errances de ces hétérocères humains, et autres tristes solitudes d’individus qui ne parviennent jamais à se greffer à la vie diurne. L’humour de l’auteur est également excellent : des dialogues qui claquent, des mots qui font mouche, des descriptions mémorables : un excellent moyen de passer un bon moment, les zygomatiques en action. L’intrigue se perd parfois dans quelques bavardages et autres temps morts, mais lorsqu’elle réapparaît, elle sait prendre des virages inattendus, comme avec la découverte de Jordan et de Violaine, si bien appariés, mettant à nu de sombres pans d’un passé commun et des secrets de famille empestés.

    Un roman noir qui n’engendre guère la mélancolie, mais qui sait aussi aborder des rivages plus sombres, sans jamais se départir d’une langue belle et jouissive.

    /5