L'Empereur blanc

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  • 4/10 Le roman contient deux parties.
    La première est la plus fiable et c’est assez préjudiciable car elle fait 200 pages (50% de l’ouvrage).
    Cette partie souffre d’une écriture trop empesée (avalanches d’adjectifs et d’adverbes) qui rallongent lourdement et surtout inutilement le phrasé. L’auteure a l’appétit des mots mais en fait beaucoup trop (notamment dans les comparaisons ce qui est dommage car certaines fonctionnent bien). Je comprends cette gourmandise mais bien souvent «more is less ».
    De façon générale, Armelle Carbonel gagnerait à faire plus simple, plus sec, elle en a les moyens techniques (et je sais, la volonté désormais). Ici, le soin méticuleux, l’envie de bien faire et la rigueur employée confinent trop souvent à une préciosité grandiloquente qui va à l’encontre de l’effet recherché. C’est frustrant.
    Armelle doit davantage (se) faire confiance.
    Les personnages, nombreux, sont trop figés, ils manquent de chair et de densité, peu aidés, il est vrai, par des dialogues excessivement verbeux et pardon de le dire assez puérils (parfois l’impression d’entendre des ados).
    Là encore, il aurait fallu asséner de sérieux coups de serpe pour rendre tout ceci plus âpre, plus vif et plus percutant. Le lecteur n’a nul besoin d’être autant téléguidé, il faut lui laisser du champ quitte à ce qu’il s’égare.
    Armelle est plus convaincante et sans doute plus à l’aise dans le non verbal. Son truc à elle, c’est plus l’extérieur que l’intérieur, les lieux, leur histoire, leur légende ; son plaisir littéraire s’exprime davantage dans le fait d’habiller les lieux que les protagonistes.
    Bref cette première partie (un clin d’œil aux slashers qu’on connaît tous avec un petit côté Agatha Christien des 10 petits n*****.) ne m’a pas convaincu.
    J’ai pensé qu’il aurait pu être intéressant pour pimenter cette première partie d’y mettre un peu de second degré ; le cadre, les héros et leur métier (auteurs de romans d’horreur) s’y prêtaient bien. Je reste persuadé qu’on peut mettre de l’humour sans pour autant ôter le caractère anxiogène d’une atmosphère ou d’une scène (le cinéma asiatique y parvient magnifiquement).
    Ceci dit j’ai poursuivi car, le suspens, mine de rien est maintenu.
    Armelle prend un virage assez inattendu dans la seconde partie et stylistiquement parlant la forme m’a semblé moins lourde. Les nouveaux personnages (Dudley) un peu mieux incarnés, mais ça manque encore de profondeur et d’originalité dans le traitement. Et moi quand les personnages ne sont pas creusés, je me fous un peu de ce qui peut leur arriver. J’avoue en outre que Marcy la femme du flic est un ajout saugrenu et un peu parachuté.
    Si cette seconde moitié rehausse formellement l’ensemble, elle souffre de sa prévisibilité même si quelques surprises demeurent à la fin.
    Sans rien dévoiler de l’intrigue, on pense au cinéma de shyamalan (un de ses derniers films) mais je trouve que c’est insuffisamment exploité.
    Pour finir sur une note plus encourageante, l’autre thématique ( le racisme) n’est jamais inutile a rappeler (les passages de 1965 sont pour moi les plus réussis) les petits coups de scalpels sur le monde littéraire sont appréciables et le travail de relecture est sérieux (très peu de répétitions dans les formulations, sur 400 pages c’est tout sauf simple)
    Armelle a les armes, l’imagination, la sensibilité pour faire beaucoup mieux.
    Et je ne pense pas forcément au thriller.
    Même si mon retour semble sévère, je suis confiant pour la suite.

    20/08/2023 à 14:12 schamak (112 votes, 6.2/10 de moyenne) 3