Vaste comme la nuit

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  • 9/10 "Le bonheur en soi n'existe pas, il n'est pas un graal à conquérir. Encore moins une étoile tombée du ciel. Non, ça vient de l'intérieur et de loin, ça monte par des chemins de longue haleine et ça finit par éclore en formant comme des fleurs de sel qui renvoient des touches de lumière à la surface du quotidien."

    Je suis rentrée directement dans le livre. Il a cela d'évident qu'il n'est pas trop attaché à Comme de longs échos, si ce n'est par le titre issu du même poême des Correspondances de Baudelaire. Le roman est parcouru d'un fil rouge très inspirant, un dialogue entre Mathilde et Albert, parsemé tout au long des pages. Peu présent, Albert est néanmoins le déclencheur de l'envol de Mathilde, et rester avec cet homme disparu procure une clé de voute à l'ensemble de l'histoire, tant sa disparition en mer est pleine de métaphores. La mer reprend, pour mieux donner à Mathilde qui s'épanouira dans la tempête, contre son gré. Qu'est ce que j'aime ce type, avec ses parfums et sa personnalité !

    L'énigme est tissée parfaitement et je trouve que le petit organigramme généalogique de début de roman est assez aidant pour rester au clair dans les dates, les années, et dans le croisement des générations. J'ai ainsi pu profiter de la sensualité de l'écriture en suivant l'enquête. La beauté de l'histoire d'Edern et Simon m'a laissée sans voix et touchée plus que tout. Une des forces de l'auteur réside dans le fait qu'on arrive à avoir de l'empathie pour tous les personnages, fussent-ils petit garçon enfermé dans un corps de géant. Pour ceux qui liront le livre, le chapitre 72 constitue une apothéose à partir de laquelle on a forcément les sens au bout de la peau, en alerte, sur la courbe ascendante.

    "Son esprit se fait la malle, happé par un foisonnement de détails. Le bleu violacé des jacinthes des bois, le vol d'une libellule, le babillage des oisillons, l'appel aigu d'un pic mar et l'opéra capiteux des fragrances, comme si la nature livrait son âme et chantait le bonheur de renaître. "

    Vaste comme la petitesse des hommes, vaste comme l'amour ... Elena Piacentini est une fée !

    04/09/2019 à 08:02 clemence (339 votes, 7.7/10 de moyenne) 6

  • 8/10 Après Comme de longs échos publié en 2017, Vaste comme la nuit disponible ce 22 aout dans toutes les librairies, est la seconde enquête de la capitaine Mathilde Sénéchal écrite par Elena Piacentini.

    Ce n'est pas un hasard si Elena Piacentini a trouvé l'inspiration pour les deux titres de ses romans dans ce sonnet de Charles Baudelaire :

    La Nature est un temple où de vivants piliers
    Laissent parfois sortir de confuses paroles;
    L'homme y passe à travers des forêts de symboles
    Qui l'observent avec des regards familiers.

    Comme de longs échos qui de loin se confondent
    Dans une ténébreuse et profonde unité,
    Vaste comme la nuit et comme la clarté,
    Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.

    Il est des parfums frais comme des chairs d'enfants,
    Doux comme les hautbois, verts comme les prairies,
    — Et d'autres, corrompus, riches et triomphants,

    Ayant l'expansion des choses infinies,
    Comme l'ambre, le musc, le benjoin et l'encens,
    Qui chantent les transports de l'esprit et des sens.

    — Charles Baudelaire

    Un sonnet qui trouve écho dans la prose de la romancière. Comme dans son précédent roman, elle parvient à nouveau à transporter son lecteur dans une histoire riche en saveurs et en parfums.

    Complètement atypique dans sa forme et dans son fond, Elena Piacentini prend le temps de faire respirer ses personnages. Elle fait aussi l'étonnant choix de nous révéler dès le second tome les origines du traumatisme de son héroïne. Enfin, étonnant dans le cadre d'une série, mais parfaitement logique dans le cas d'un diptyque (si c'en est un !).

    Philippe Pollet Villard a dit : "Dans un voyage ce n'est pas la destination qui compte mais toujours le chemin parcouru, et les détours surtout. "

    Vaste comme la nuit est belle expérience de lecture et une nouvelle invitation d'Elena Piacentini à prendre les chemins de traverses.

    22/08/2019 à 19:50 Fredo (1183 votes, 7.9/10 de moyenne) 4