Mangez-le si vous voulez

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  • 9/10 Teulé a su nous raconter cette journée sans fin ... Sans jugement ni surenchère ... Très agréable (pour le lecteur !)

    11/09/2022 à 17:55 Elfe Falco (82 votes, 7.7/10 de moyenne)

  • 9/10 Un fait divers romancé comme un combat de boxe, c'est très court pour le lecteur-spectateur, c'est très long pour les combattants, surtout le perdant. C'est le récit d'une journée dominée par la chaleur et l'alcool, et tous les bas-instincts d'une foule qui se libèrent. Comme dans ses autres ouvrages du même type inspirés par l'histoire ou des personnages historiques, Teulé en rajoute, mais le contexte historique, politique et social est bien étudié. Il n'en reste pas moins que dans la réalire, cette affaire de Hautefaye se termine par la condamnation à mort et l'exécution de 4 des auteurs des supplices.

    10/04/2019 à 11:36 Surcouf (356 votes, 7.2/10 de moyenne) 7

  • 6/10 Pas toujours facile de romancer un fait divers historique, de tenter de reconstituer les mots des protagonistes (victime comprise). Jean Teulé s'est pour cela appuyé sur une bibliographie d'une douzaine d'ouvrages, dont ceux de Georges Marbeck (que je n'ai pas lus) et l'excellente étude de l'historien des sensibilités Alain Corbin, Le Village des "cannibales" (lu et relu après coup).

    Quelques remarques, en vrac : le format très court (une centaine de pages en poche) diminue un peu l'immersion dans le contexte au profit d'une description des actes de cruauté dont fut victime Alain de Monéys et sur lesquels je reviendrai plus tard.
    Le contexte justement : celui local, immédiat comme récent, avec une sécheresse persistante qui fait tant de mal aux cultivateurs, une chaleur étouffante ce 16 août 1870, le vin servi pendant cette frairie dédiée à Saint-Roch et qui fait tourner les têtes et chauffent les crânes... Cette fête qui rassemble des gens venus des communes alentours, jusqu'à 20 km de cette bourgade du nord-ouest de la Dordogne.
    Le contexte international, la guerre franco-prussienne, une guerre mal engagée, là où pourtant on annonçait des victoires rapides et où au contraire les défaites qui se succèdent effraient les gens d'Hautefaye. On craint l'invasion, on se méfie des "Prussiens de l'intérieur", dont on pense qu'ils se trouvent en masse chez les nobles. Certains enfants des protagonistes sont au front, certains remplaçant les plus riches grâce au système de rachat des "numéros"... Les Prussiens, les nobles, les riches... voilà les ennemis, voilà les destructeurs de l'Empire, l'Empire de Napoléon III qui jouit d'une si bonne réputation au sein des masses paysannes.
    Et Alain de Monéys est là, lui. De petite noblesse, un trentenaire avenant, généreux, proche des gens d'Hautefaye. Il a un cousin, Camille de Maillard, un légitimiste qui, par ses mots, met le feu aux poudres, embrasant la foule présente. Il s'enfuit. Alain de Monéys prend sa défense, maladroitement. La foule en colère va alors se déchaîner, pendant plusieurs heures sur ce malheureux, qu'ils brûleront finalement. Car c'est un noble donc un traître donc un Prussien...
    Fait divers tragique, surgissement de bestialité, déchaînement de violence inouïe, "dernier des massacres nés de la fureur paysanne" (Alain Corbin).

    Des reproches ? Quelques-uns. On peut toujours gloser sur des inexactitudes, des anachronismes (comme l'allusion à un isoloir qui n'existait pas encore). En revanche, difficile de comprendre pourquoi Alain Teulé en a rajouté dans l'horreur avec des scènes non prouvées, inventées. Quel besoin alors que le fait divers est suffisamment horrible ? Quant aux prétendus actes de cannibalisme, ils n'ont jamais été prouvés (noter les guillemets à "cannibales" dans le titre de l'ouvrage d'Alain Corbin).
    Autre reproche, l'absence de références au prétendu républicanisme de de Monéys, alors qu'Alain Corbin montre bien l'importance de cette accusation dans la psychologie des bourreaux qui agissent pour défendre avant tout Napoléon III. Alain de Monéys est noble, prétendument contre l'Empire, "Prussien" mais aussi "républicain" dans la tête des tortionnaires.

    Au final, un court roman (ou plutôt une novella) basé sur un fait réel, au style vif et agréable mais qui souffre à mes yeux de quelques défauts, au premier desquels l'ajout de violences nées de l'imagination de l'auteur là où l'horreur des faits réels se suffit à elle-même.

    03/03/2019 à 20:21 LeJugeW (1766 votes, 7.3/10 de moyenne) 6