Féroce

  1. Des ossements sans tête sont retrouvés au zoo de Vincennes, dans l’enclos des lions. Il s’agit d’enfants. Alix de Clavery, criminologue, ainsi que toute l’équipe de l’OCRVP, pense aussitôt à Swan Blixen, enlevée six années plus tôt. Dans le même temps, le policier Zénard est retrouvé dans l’habitacle de son véhicule, les mains en sang et amnésique, et une brigadière vient de disparaître. Et c’est ensuite une autre gamine qui est enlevée.

    Ce roman de Danielle Thiéry, extrait de la série consacrée à la commissaire Edwige Marion, percute d’entrée de jeu. Forte de son expérience au sein de la police – l’écrivaine a d’ailleurs été la première femme commissaire divisionnaire de l’histoire de la police française, le lecteur est rapidement frappé par la qualité des détails fournis quant aux techniques d’investigation, leur précision, et tout ce qui constitue le vécu de ces hommes et femmes de terrain. Dans le même temps, c’est aussi cette réalité qui va heurter, dans la mesure où ils sont confrontés à un sujet particulièrement sordide : la pédopornographie. Des images lourdes de perversité, mais que Danielle Thiéry ne lâche jamais qu’avec une forme de retenue, sans voyeurisme. L’enquête proposée dans ce tome est assez complexe et dédaléenne, d’autant qu’elle est multiple, et c’est avec plaisir que l’on retrouve les divers enquêteurs de l’Office, avec ici Alix de Clavery en première ligne, et qui va devoir approcher de près l’étrange famille de la Perrière, les propriétaires du zoo. Edwige Marion est encore sous le coup du traumatisme crânien qui lui laisse de sévères séquelles, et c’est peut-être l’une des raisons pour lesquelles Danielle Thiéry la laisse ici en arrière-plan, pour la ménager ou alors préparer un passage de témoin à d’autres limiers. L’intrigue est très réussie, dense et intelligemment bâtie, même si l’on pourra reprocher certaines longueurs ou passages inutiles, comme cette histoire autour de Zénard : elle se montre en effet bien moins percutante que la principale, même si elle contribue à nourrir l’univers des personnages créées par l’auteur. Et il y a des moments forts et marquants, comme ceux où apparaissent de dangereuses fourmis magnans, ou encore les toutes dernières lignes du roman, où les paroles d’une enfant claquent avec dureté et invitent à réfléchir sur leur sens réel, très inquiétant.

    Un roman policier très réussi, même s’il aurait probablement gagné à être raccourci et condensé. Où des êtres humains peuvent se montrer encore plus dangereux et brutaux que des animaux. Même si cette leçon est connue, il est parfois nécessaire de la relire pour se la remémorer.

    /5