Du bruit sous le silence

  1. Meurtre en ovalie

    Maurice Tamboréro, demi de mêlée du Racing Club de Toulouse, est abattu d’une balle alors qu’il se déplace à vélo. Deux policiers mènent l’enquête : Elie Verlande, ayant quitté Dunkerque depuis peu, et Benoît Terrancle, natif de la ville rose et ancien rugbyman. Qui pouvait en vouloir à un homme et un sportif aussi respecté que celui que l’on surnommait « Tambo » ?

    Pascal Dessaint, à qui l’on doit, entre autres, de grands succès comme Le Bal des frelons, Tu ne verras plus ou Un homme doit mourir, s’intéressait dans cet ouvrage, sorti en 1999, au milieu du rugby, avec le talent qu’on lui connaît. Sa plume est riche, admirable, offrant une immense profondeur à ses personnages et s’illustrant également dans des dialogues qui claquent et sonnent avec justesse. Deux protagonistes s’illustrent : Elie Verlande, fraîchement débarqué de son Nord natal, accompagné de sa vieille mère alcoolique et acariâtre, et en butte aux critiques acides de son frère. Il y a également Benoît Terrancle, un pur produit local, ancien rugbyman aux élans sportifs brisés, capables de sacrés coups de sang, et poursuivi par les ardeurs de la jeune Mathilde. L’enquête, de prime abord, semble passer au second plan, car c’est l’amour de Pascal Dessaint pour Toulouse et pour le ballon ovale qui transparaît. Un monde de dureté et d’engagement, où se mêlent également de puissantes valeurs humaines et des exigences morales inégalées. Même les lecteurs béotiens en la matière en comprendront assez rapidement les règles et leurs grandes lignes, notamment grâce au neuvième chapitre où Terrancle explique les lois du rugby à Verlande, notamment grâce à un dessin. On trouve également de savoureuses scènes, comme celles avec les deux policiers Gautran et Blondeau qui ne peuvent s’exprimer qu’en enchevêtrant leurs phrases. A mesure que les pages, prenantes, défilent, l’intrigue gagne en force, et quand elle en vient à se résoudre, elle s’avère à la fois plausible et surprenante. Et le final va bien au-delà de ce que l’on était en droit d’attendre : un épilogue muni de plusieurs tiroirs, sombres et marquants, dont aucun de nos deux limiers ne sortira indemne.

    Une véritable réussite littéraire, charpentée et originale, lauréate en 2000 d’un bien mérité Grand Prix de littérature policière dans la catégorie des romans français.

    /5