Dany33

535 votes

  • Cinq cartes brûlées

    Sophie Loubière

    9/10 Laurence est une victime. Sans doute son père a-t-il abusé d’elle alors qu’elle n’était qu’une petite fille. Sa mère complice la rend responsable de sa rupture conjugale. Son frère la tyrannise et l’humilie en raison de son embonpoint. Elle renaît grâce au sport de haut niveau et sombre de nouveau dans la victimisation. Une solution chirurgicale lui donne alors un nouveau souffle. Tout en ambigüité cette quête du bonheur qu’entreprend Laurence est cependant bien dangereuse.
    Vous avez là la face visible de cet iceberg qui pourrait bien n’être que le leurre d’une plus grande complexité. Le lecteur se doute que le personnage n’est pas aussi lisse qu’il n’y paraît. L’auteure nous entraîne dans le noir, dans ce roman psychologique sensible et plein d’émotions, loin, très loin du « feel good » qu’il nous plairait à imaginer pour cette jeune femme en souffrance. Et si tout ça n’était causé que par les ondes électromagnétiques du poste EDF installé près de la maison familiale ?
    Sophie Loubière s’éloigne de l’Amérique et ses routes mythiques en adoptant le déroulé de cette action de façon originale, en mêlant notamment les réflexions puériles de la petite Laurence, des réactions de son frère, qui précisent la psychologie des protagonistes. Ses personnages sont attachants ou haïssables, parfois les deux successivement. Une belle histoire bien noire, un très bon moment de lecture et la confirmation du talent de l’auteure à mettre en scène des faits troublants sous un titre qui revêt plusieurs significations au fil des pages.

    22/01/2020 à 17:40 5

  • Code 93

    Olivier Norek

    9/10 Depuis le temps que j’entends qu’il faut lire Olivier Norek … il fallait y aller avant la sortie de troisième tome des aventures de Victor Coste, le 31 mars 2016. Alors je me suis lancée sur le « code 93 » et là un vrai choc. D’une part pour le style de la narration, la fluidité du récit, les personnages, mais d’autre part surtout sur le fond de l’enquête à surprendre tout petit bobo qui se respecte. Oui il y a les clichés sur les banlieues, ces zones de non-droit etc, puis il y a la réalité qui transparaît dans ce roman car l’auteur y parle de ce qu’il connait, même si on peut penser que la fiction touche les personnages et les situations et en prime, il y a le fil rouge de la quête de Lucas Soultier dont on saisira toute l’ambigüité à la fin de livre (360 pages en format de poche) … il n’y a pas de fumée sans feu.
    Une mention particulière pour le nom d’un des protagonistes devenu célèbre (le nom) mais vérification faite sur les dates … inconnu au moment de l’écriture ! ouf ! à moins que …
    Quant au phénomène d’autocombustion, il me rappelle « un parfum de soufre » de Sylvain Forge mais ici point de rites indous.
    Victor Coste est semble-t-il de nouveau en service dans le second tome (Territoires) que je me suis empressée d’ouvrir dans la foulée. Oui il est là !

    07/02/2016 à 14:24 11

  • Couleurs de l'incendie

    Pierre Lemaitre

    9/10 Une suite de « au revoir là-haut » qui peut se lire sans connaître le premier opus.
    Dans une ambiance pesante, nous suivons la descente sociale de Madeleine, fille de banquier et épouse d’un ancien militaire condamné à la prison ferme. Elle n’était pas destinée à succéder à son père et fait l’objet de malversations aux fins de s’accaparer sa fortune. Elle ne peut faire confiance à personne et ses alliances improbables feront des miracles.
    A noter de très bons personnages de second rang, au titre desquels je relève la fantastique « castafiore ».
    Pas un polar mais une intrigue noire, réglée comme un mécanisme d’horlogerie, prenante tout au long de ces 540 pages sans aucune longueur superflue. Bien loin de la trilogie Verhoeven mais tout aussi riche et efficace.

    21/01/2018 à 14:15 10

  • Crotales

    Jean-Luc Bizien

    9/10 D’abord il y a les Daltons … pas vraiment racistes mais accros à la violence gratuite, juste pour l’adrénaline, alors pourquoi pas contre les latinos aux prises avec leur cerveau reptilien ?
    Puis il y a les narcos et leurs clans, leurs trafics, l’exploitation de la pauvreté des villageois qui habitent le long de la frontière métallique entre les US et le Mexique et la domination en en faisant leurs mules et leurs esclaves.
    Vient ensuite la CIA, toujours prête à se fourvoyer dans des plans douteux pour atteindre ce qu’elle présente comme des objectifs glorieux.
    Et puis, et puis … il y a Païk Dong-Soo, plus mal en point que jamais mais encore plus attachant aussi.
    Enfin le talent de l’auteur qui vous entraine dans l’exotisme mexicain, avec toute la cruauté primaire, à l’approche l’élection présidentielle à laquelle se présente un certain Donald Trump. Une intrigue forte, sans doute encore en-deçà de la réalité. Une narration sur plusieurs plans qui se rejoignent on s’en doute, bien habilement. Quatrième volet de la vie de l’agent très spécial Coréen, laissé presque mort à la fin du « berceau des ténèbres », à la hauteur de ce qui ne devait être qu’une trilogie, pour notre plus grand plaisir de lecteur.
    Notez que pour faire connaissance avec Païk, il n’est pas absolument nécessaire de connaître la trilogie mais je suis sure qu’après cette lecture vous irez vite vous la procurer !

    25/12/2017 à 14:09 5

  • Cyanure

    Laurent Loison

    9/10 Un deuxième roman après le succès de Charade : on l’attendait avec son auteur … pari gagné !
    Un prologue glauque à souhait qui nous hante tout au long du roman et nous questionne chaque fois que l’on pense avoir la solution … Le lecteur retrouve avec plaisir le duo de surdoués aux commandes de la résolution d’une énigme au ton enlevé et à l’intrigue originale, mêlant la politique à la mafia, des mamies sans histoire à des truands d’envergure. Une paternité tardive venant ajouter du sel à l’histoire dans l’histoire et un final en apothéose… et au-delà de ces aspects, une réflexion sur l’adoption, la fraternité, l’amitié et les valeurs humanistes et bien d’autres thèmes encore.
    Recommandation : lisez les deux derniers chapitres à proximité d’une connexion internet faute de quoi vous ferez comme moi, vous haïrez l’auteur (momentanément bien sur).
    Essai transformé pour Laurent Loison !

    02/10/2017 à 14:48 4

  • Dans la brume écarlate

    Nicolas Lebel

    9/10 Cette fois Nicolas Lebel nous propose une narration chronologique, sans retours arrière comme c’était le cas dans De cauchemar et de feu et avec ce qui ressemble à deux intrigues parallèles et dont le lecteur se demande si elles ont un rapport entre elles. Une résurgence du mythe des vampires côtoie en plein Paris, le bien cruel problème des immigrés en provenance de la Syrie, confrontés au rejet de l’extrême droite.
    Mehrlicht fume toujours autant, Dossantos interpelle le lecteur car il est impossible de le détester et pourtant …, Sophie n’en finit pas d’attendre les papiers de Djibril !
    Côté détente on apprécie que Daniel se mette à la magie, qu’il n’abandonne pas « questions pour un champion » et surtout et toujours ses sonneries de téléphone.
    L’auteur confirme s’il était besoin, son grand talent de conteur, son don du suspense, sa qualité d’écriture et l’attachement particulier à ses personnages.
    Mais ne nous trompons pas, au-delà de cette histoire qui a su me captiver, retenir toute mon attention au cours de ses 320 pages, de nombreux thèmes sociétaux actuels sont abordés : l’immigration et la théorie fumeuse du « grand remplacement », les violences conjugales, la dure réalité des services qui ont pour mission d’assurer notre sécurité au quotidien. Un bien beau bouillon de culture dans la tête de Nicolas Lebel, pour notre plus grand plaisir …
    Tous mes vœux de bonne santé à Mehrlicht !
    Au fait, Nicolas Lebel n’aurait-il pas une affection particulière au Père Lachaise … ?

    12/05/2019 à 18:40 6

  • De Cauchemar et de feu

    Nicolas Lebel

    9/10 « Une enquête chaotique dans un monde chaotique à la poursuite d’un esprit de la nuit resurgissant d’une guerre qu’on croyait éteinte mais qui menaçait comme un volcan. » c’est ce que fait dire Nicolas Lebel à Mehrtlicht page 354 et on ne peut rêver meilleure formule pour résumer ce thriller. Dans ce tome 4, c’est donc tout au long d’une traque que nous côtoyons ce capitaine qui ne veut pas devenir commandant pour ne pas ressembler à Coustaud … mais au-delà de cette intrigue complexe et dense, c’est une réflexion sur les intégrismes et les extrémismes à laquelle nous convie l’auteur. Ici ce sont les épilogues douloureux de la guerre civile en Irlande, ses enjeux ambigus et je pense que toute ressemblance avec une actualité plus méridionale n’est absolument pas fortuite. Une enquête aussi documentée que les trois précédents épisodes de la série, avec le même humour décalé, le regard aiguisé sur notre actualité et encore une sonnerie de téléphone improbable qui détend l’atmosphère au bon moment. L’ambiance très noire de ce thriller permet en outre d’approfondir notre connaissance sur les coéquipiers (permanents ou stagiaire sont au rendez-vous) de l’homme à tête de grenouille, un peu comme au Département V de Jussi Olsen . Un très bon cru … de Guinness !

    12/06/2017 à 16:26 7

  • De force

    Karine Giebel

    9/10 Dans ce nouveau roman, l’auteure abandonne le huis clos pour une situation certes peu commune mais dans un environnement plus vaste et une certaine variation sur le thème de la lutte des classes. Le prologue ambigu incite le lecteur à le garder en mémoire pour le cas où un indice lui révèlerait la solution. Espoir vain car ce serait sans compter sur l’art de Giébel de leurrer son lecteur, de le prendre en flagrant délit de légitime élucidation … Un énorme secret de famille va avoir des difficultés à émerger et il faudra aller jusqu’à l’ultime page (522) pour connaître le dénouement. Difficile d’en dire plus sans spolier cependant plus fort à mon sens que « Satan était un ange » un vrai tour « de force » de l’une de mes auteures préférées. Une note d’optimisme en toute dernière page …

    11/03/2016 à 16:12 5

  • Démons

    Marc Laine

    9/10 Parce que c’est un coup de cœur de Franck Thilliez, je me suis penchée sur le cas de ces démons. Un premier roman pour ce gendarme attaché à la sécurité d’une ambassade en Afrique. Là nous sommes immergés dans le Vaucluse, Avignon et ses environs psychiatriques … les scènes de crimes sont assez atypiques et que dire des crimes eux-mêmes et de leur modes opératoires : des « chefs d’œuvre d’atrocité ! Alors Maxime, parce que son chef sait à quel point il est habité de ses démons, va lui flanquer une jeune partenaire et lui confier l’enquête. Tueur en série ou vengeance. Il faut accompagner les enquêteurs pour appréhender la noirceur de l’âme humaine, les petites et les grandes déviances dans ce microcosme. Le récit est rythmé, touchant et chaotique et l’on voit quels sont les références de cet auteur très prometteur.
    Prix du polar VSD 2016 : récompense bien méritée !

    02/09/2016 à 15:07 5

  • Dérivations

    Fredrik T. Olsson

    9/10 Avertissement : à trop vouloir combattre les terroristes, on peut le devenir soi-même !
    Pour son deuxième roman, l’auteur nous livre un récit actuel, que l’on espère être une fiction plutôt que de l’anticipation. Big Brother version 2.0 va entraîner plusieurs innocents et les amener à devoir se disculper, en occasionnant de nombreux et douloureux dommages collatéraux, entre théorie du complot et manipulation.
    Ce long roman de près de 600 pages ne laisse aucun répit et ses multiples rebondissements surprennent par leur caractère parfois improbable. Mais le lecteur le sait : on ne lui dit pas tout dans la fiction comme dans la vraie vie ! L’auteur suédois nous livre une intrigue qui surfe entre l’espionnage et le polar, en plus d’être une réflexion sur notre mode de communication actuel, les limites de l’usage abusif de la haute technologie et la hiérarchisation de nos valeurs.
    Il est très difficile d’en dire d’avantage sur les aventures de William, cryptologue récemment placardisé, qui va au-devant du danger pour « rendre service » à une vielle connaissance pas si sympathique en fait. Il va devoir s’opposer à son ancienne hiérarchie et demander de l’aide à son ex-épouse tout en faisant le deuil de leur fille.
    Quand on sait que le premier roman de cet auteur est en cours d’adaptation cinématographique, compte tenu de l’intensité et du rythme de celui-ci, on peut aisément penser qu’il en sera de même … c’est tout le mal qu’on lui souhaite ! L’une des scènes finales n’est pas sans filiation avec « 2001 Odyssée de l’espace » …

    05/06/2017 à 09:59 1

  • Diamants sur macchabées

    Michael Fenris

    9/10 Il fallait vraiment oser, en 2018, écrire un roman en noir et blanc, un vrai polar de la fin des années 50, en Amérique dans « la ville » dont le nom symbolique apparaît en fin de roman … sans ADN, avec une seule caméra de surveillance même pas exploitée, une balistique balbutiante. En prime une ambiance bien glauque, qui sent la sueur de flic négligé, le tout dans une atmosphère enfumée, alcoolisée. Une plongée dans l’univers de Chandler et Léo Malet, avec la palette classique du détective privé intègre et au cœur presque grand, que n’aurait pas renié Petre Cheyney (le père de Lemmy Caution), du flic pourri, des mauvais garçons chatouilleux de la gâchette, de la bourgeoise couverte de fourrure (animale, oui à cette époque les auteurs osaient encore …), la petite droguée à peine pubère, des belles voitures …
    Tout ce petit monde se trouve embarqué dans une intrigue somme toute classique mais bien menée, aux multiples rebondissements et au final digne d’un film de Tarentino. N’oublions pas non plus « la bande son » jazzy car en fait ce roman agit sur le lecteur comme un vrai film de gangsters, servi par la précision du style de cet auteur que je lis pour la première fois, dans lequel le narrateur, son héros nous fait immanquablement penser à Philip Marlowe. On ne s’y ennuie pas une seule seconde !

    17/03/2018 à 11:21 5

  • Djihad à Paris

    Marc de Borcheim

    9/10 Il est rare que le titre et la 4ème de couverture soient aussi pertinents. L’auteur nous entraîne dans une traque au contexte on ne peut plus actuel. Nous découvrons la complexité des enjeux qui plombent les relations avec le Moyen-Orient, les moyens au service de la lutte anti-terroriste et surtout le déroulement d’une enquête. Une traque qui perturbe la collaboration affichée entre les Etats occidentaux, englués qu’ils sont par les reliquats de la guerre froide et notamment les cellules « stay behind » véritable révélation pour moi. Je le sais on ne nous dit pas tout certes, et c’est bien heureux car il y a vraiment de quoi frémir au cours de ces 446 pages.
    Sur le devant de la scène, un militaire, Aymar, au passé incertain, va se questionner, nous questionner sur l’éthique dans ce type de situation : dilemme existentiel … il va mener cette enquête d’un nouveau type en côtoyant voire en s’immergeant au cœur de milieux glauques et interlopes et en se confrontant aux rivalités des différents services de renseignements.
    Espionnage, polar, thriller … en fait tout à la fois avec brio pour cet auteur issu du sérail qui nous offre un témoignage très explicite et tout autant inquiétant.
    Une révélation !

    23/10/2016 à 14:22 6

  • Droit dans le mur

    Nick Gardel

    9/10 Chronique sur le blanchiment de bijoux sales et autres biens mal acquis … Dans ce thriller nous retrouvons la gouaille de « Fourbi étourdi » et une galerie de personnages incomparables. Nick Gardel m’a fait penser à René Fallet et ses « chroniques villageoises et beaujolaises » mais dans le cas présent, ça se passe en Alsace, sur ces terres ballottées entre l’Allemagne et la France au grès des guerres et petits arrangements qui s’en suivent. Les fidèles lecteurs retrouveront aussi Estéban et sa divine Renault 5 …
    Quelle vie de retraité pour le narrateur ! Il n’arrive pas à mener à bien la réfection de son volet, perturbé et interrompu par des meurtres de ses voisins et un gendarme qui lui en veut. Il mènera néanmoins l’enquête et une fois face au mur devra faire des choix cruciaux pour sa tranquillité et son volet ! Même avec un nombre de morts conséquent, le lecteur sort du roman avec le sourire … jubilatoire n’est-il pas ?
    L’auteur annonce pour les accros la RE-parution de Fourbi étourdi avec bonus …

    01/09/2016 à 14:30 4

  • Duelle

    Barbara Abel

    9/10 Première publication en 2006, réédité en 2017 … une pépite !
    Un bonheur de retrouver un thriller noir, très noir, bâti sur le même principe que « l’innocence des bourreaux » car oui, même les gens ordinaires ont leurs secrets … Une famille gangrenée comme le dit l’auteure : « une histoire de mensonges, de jalousie, de rivalité, de non-dits, d’hypocrisies et d’apparences trompeuses ». C’est aussi une histoire sur la gémellité et comme souvent chez Barbara Abel, sur fond d’instinct maternel. 413 pages à Bruxelles qui démarrent comme une téléréalité, menées tambour battant, pour terminer comme une saga familiale !

    26/07/2017 à 17:49 6

  • Dynamique du chaos

    Ghislain Gilberti

    9/10 Après une pause au milieu en raison de son extrême violence, j’ai terminé le premier roman de cet auteur au style incomparable de réalisme. Que dire … c’est une histoire d’amour … mais attention « fleurs bleues » s’abstenir sous peine de défaillir rapidement. Le rythme soutenu nous entraîne à la suite du narrateur, Gys, le très déstabilisant homonyme de l’auteur, à la poursuite de Séverine, son amour improbable. C’est aussi un plaidoyer contre la drogue, très documenté, puisque cette bande de teufeurs n’a de cesse de s’enfoncer dans les enfers de la dépendance et d’accélérer sa fuite vers les « paradis artificiels »de plus en plus risqués. Le seul lucide c’est Gys mais il ira au bout du bout, en toute conscience puisqu’une espèce de schizophrénie s’est emparée de lui mêlant les actes suicidaires ou salvateurs.
    A lire en l’absence de tout syndrome dépressif, de préférence le jour !!!

    13/06/2016 à 16:07 7

  • En douce

    Marin Ledun

    9/10 Bien loin des thrillers politiques précédents, un roman noir foncé …
    Emilie est victime de la double peine : elle a perdu une jambe suite à un accident de voiture et son boulot suite à la dépression post-traumatique et ses dommages « collatéraux ». Elle se sent humiliée, dévalorisée, bref en régression. Elle décide alors de retrouver Simon qui était dans l’autre voiture et aucunement responsable et de le faire payer. S’en suit une quête de vengeance assortie de violence extrême dont l’issue est improbable parce que la rédemption n’est pas a priori dans le schéma de pensée d’Emilie.
    Une fable sociologique sur la déchéance psychique, physique et matérielle, due à un fâcheux concours de circonstance qui n’aurait jamais du mettre en présence les deux protagonistes. On y retrouve l’analyse sociologique précise et le style affûté, dont a déjà fait preuve Marin Ledun dans ses précédents romans.
    On peut se dire « trop court ce roman » mais au bout du compte tout est dit pour notre plus grand plaisir de lecteur après avoir subi les frayeurs avec Simon.

    25/08/2016 à 16:21 7

  • Entre deux mondes

    Olivier Norek

    9/10 Lorsque l’auteur a indiqué qu’il faisait une pause dans les aventures de Victor Coste, je me suis dit que le cru 2017 allait être beaucoup plus léger que les précédents. C’était sans compter sur la pudeur et l’humanité d’Olivier Norek, qui a mis tout son talent au service de ce qui est bien plus qu’un roman, une véritable enquête d’investigation dans cet « entre-deux » … pas vraiment la France et plus tout à fait de l’ailleurs d’où ils viennent ni de l’ailleurs où ils veulent aller, pour faire bref : l’enfer !
    Des personnages réalistes et convaincants vont nous faire toucher du doigt la réalité de cette micro société de la jungle, où les rivalités mondiales y sont transposées, où les maltraitances y sont reproduites avec toute la violence que l’on n’ose pas regarder en face, ainsi que les trafics et autres accommodations avec la règle. Et malgré tout ça de l’espoir grâce aux humanitaires, aux autochtones, aux flics …
    Problème majeur de notre société aujourd’hui car si nous ne sommes pas capables de fournir une réponse digne aux résidents de cet « entre-deux » que feront nous quand les désordres climatiques mettront sur les routes des familles par millions …
    Ce roman noir interpelle le lecteur au plus secret de son intimité, tout comme le très récent Islanova de Jérôme Camut et Nathalie Hug. Inoubliable et haletant car il s’agit aussi d’un roman à suspense réussi, vous n’en sortirez pas indemne.

    20/10/2017 à 16:59 11

  • Entre fauves

    Colin Niel

    9/10 L’action se déroule sur deux mois entre la Namibie et les Pyrénées. C’est dire que notre auteur, humaniste et défenseur de la planète, nous offre des horizons dignes du grand écran. Protecteur, je pense qu’il aimerait l’être mais c’est faire fi de l’ambivalence de tous prédateurs qui nous entourent et qui peuvent aussi devenir les proies au gré des circonstances.
    Dans ce thriller, la Namibie est menacée par une sècheresse atypique, comme les Pyrénées le sont par un retour du froid au printemps …un décor digne du grand écran que nous offre là l’auteur.
    Charles, notre lion solitaire... à titre individuel est victime de la sècheresse, résultat : il menace les troupeaux … dès lors les paysans souhaitent supprimer l’individu au détriment de l’espèce.
    Il va être traqué par Appoline et Kondjima pour des mobiles bien éloignés.
    Martin, garde du parc naturel régional des Pyrénées traque les chasseurs de trophées sur le net et pourquoi pas dans la vraie vie ?
    Quatre personnages vont ainsi se partager la narration à la première personne et déranger le lecteur en l’impliquant.
    J’ai éprouvé de l’empathie pour Martin, les paysans namibiens qui luttent pour leur survie, les espèces animales menacées. Je n’ai eu aucune sympathie pour les chasseurs de trophées même s’ils soutiennent l’économie des petits pays africains. Bref Colin Niel a réussi à m’entraîner dans cette aventure chaotique, très bien construite au demeurant puisque le chaos ébranle nos consciences au fil de ces 352 pages, denses, documentées, militantes et exotiques, mêlant modernisme et coutume.
    Après la série guyanaise, Colin Niel nous invite en Afrique puis dans les Pyrénées : autres ambiances, autres enjeux, autres trafics … pas de moralité sauf à dire qu’il est urgent de se réveiller !
    Un thriller cruel, édifiant, sombre mais bienveillant aussi, baigné de la lumière et de la poésie des paysages. Un excellent moment de lecture, d’évasion dans ces grands espaces à préserver.

    21/10/2020 à 10:24 10

  • Et les vivants autour

    Barbara Abel

    9/10 Deux générations, trois couples …
    Dans la famille Mercier, je demande les parents, catholiques convaincus : un mâle dominant chef d’entreprise irrespectueux et une épouse soumise, véritable réserve de vengeance en devenir.
    Je demande maintenant l’aînée, Charlotte tente avec son mari de maintenir une petite entreprise en perdition, à la recherche d’une solution financière. Elle a quelques frustrations à gérer.
    Enfin, dans le couple de la benjamine nous avons le malheur, la souffrance à laquelle il est proposé de mettre fin en abrégeant un coma … c’était sans compter sur l’ultime alternative à gérer, qui déchirera les restes d’une complicité familiale bien légère en fait !
    Nous avons toutes et tous des choix à faire tout au long de la vie … des petits choix sans trop de conséquences et d’autres beaucoup plus définitifs …

    Au fil de ce roman à très haut potentiel de suspense, si certains sont ignobles sans excuses possible, d’autres personnages méritent que l’on tienne compte de leurs circonstances atténuantes, car ils en ont. L’empathie du lecteur sera d’autant plus sollicitée que, comme dans tous ses romans, Barbara Abel met en scène des personnes « ordinaires », un peu moins ordinaires cette fois que dans ses précédents romans, avec cette question récurrente sous sa plume : qu’aurais-je fait à sa place ?, et son lot de surprises jusqu’à la toute dernière page !
    J’ai beaucoup aimé endosser les émotions que nous procure l’auteure, intimes s’il en est, dérangeantes souvent, pudiques toujours. Du grand art pour un pur moment de bonheur pour le lecteur … et non pas pour les personnages élégamment malmenés.

    30/03/2020 à 09:54 6

  • Et puis mourir

    Jean-Luc Bizien

    9/10 Découvrons un nouveau duo d’enquêteurs avec un Breton adepte de la gifle (ne pas confondre avec son homonyme avec deux « n » enfanté par Didier Fossey) et un Corse, orthodoxe de la règle pour s’épargner de sa propre violence. Un contexte bien présent dans notre mémoire collective pour l’ambiance insurrectionnelle et le rôle des médias dans la relation de la vérité. Notons le soin apporté à la chronique des manifestations parisiennes de 2018.
    Sous des allures de polar assez classique, Jean-Luc Bizien nous interpelle sur notre sentiment de justice. Que dire d’une victime qui n’a pu verbaliser à temps ses douleurs et dont l’affaire est ainsi effacée par la prescription ? Une double peine en fait ! Corolaire : quand la justice n’a pas abouti, est-il moralement admissible qu’une victime joue au justicier ?
    Un tueur en série que nous identifions très tôt certes mais que nous soupçonnons en outre d’être le troublant gardien d’une histoire sensible que nous découvrons au fil de pages, va être l’objet de la traque, cœur de ce thriller. Ses victimes ont-elles un point commun au-delà de leur aisance financière ?
    Tout le talent de l’auteur est au service de ce suspense au dénouement inattendu mais que j’ai trouvé cruel et élégant ainsi qu’une approche de la vieillesse et de la maladie d’Alzheimer pudique et sans voyeurisme.
    Excellent moment de lecture servi par un style toujours aussi affuté.
    Loin de la Corée du Sud et du Mexique de ses précédents romans, dans le contexte d’événements qui ont suspendu notre actualité, Jean-Luc Bizien nous conte là une histoire prenante et nous espérons très fort que Le Guen et Agostini aient une vie sur plusieurs tomes à venir …
    Enfin une dernière interrogation : quels rapports ont donc nos auteurs avec le cimetière du Père Lachaise ? … un beau sujet d’analyse …

    29/10/2020 à 15:32 4