Dany33

535 votes

  • Cul-de-sac

    Douglas Kennedy

    10/10 Le premier Douglas Kennedy que j'ai lu sous le titre "cul de sac", sur un coup de coeur de libraire : un régal. Une histoire qui peut arriver au routard ordinaire et qui s'enchaîne de façon irrésistible. Une grande découverte qui s'est révélée une valeur sure par la suite, car les romans de Kennedy, sans être de purs polars, nous parlent toujours de nos angoisses existentielles avec humour et/ou détachement. Ne pas bouder ses récits de voyages, autant d'autres pépites.

    11/07/2015 à 14:32 4

  • De mort lente

    Michaël Mention

    10/10 Nouveau roman et hop, nouvel univers.
    La part d’exotisme est assurée en visitant la « commission européenne » à Bruxelles. Un monde éloigné de notre quotidien dont il a pourtant pour mission de se préoccuper, une toute autre dimension que celles de la vie de Marie, Nabil et de leur fils Léo.
    Surprise ? Vous avez dit surprise ? C’est peu de le dire !
    Au cours de la lecture de ce roman de Michaël Mention, les personnages s’installent doucement, ils sont nos potes, nos voisins, nos collègues et nous adhérons progressivement à leurs quêtes, avec leurs idéaux et leurs angoisses. Un récit chronologique qui se déroule sur une dizaine d’années (2010-2020), riche en événements politiques, qui a vu Daech et ses attentats, la guerre en Libye, trois Présidents de la République en France et tant d’autres choses que nous évoque l’auteur au cours de ces 415 pages.
    Nous adhérons bien sûr à la cause de Marie et Nabil, à l’angoisse révélée par le scandale sanitaire des agents chimiques qui envahissent de façon intrusive nos quotidiens. Le couple trouvera un allié avec Franck, journaliste au Monde ce qui procure à l’auteur l’occasion de montrer comment l’argent de la publicité influe sur la ligne éditoriale de la presse car même la plus vertueuse à l’origine, peut cacher la finance.

    Oui Michaël Mention est un formidable lanceur d’alerte, puisque nous sommes tous concernés par ce sujet. Comment les entreprises prennent-elles le pas sur la santé, comment la finance dirige-t-elle le monde, comment l’empoisonnement de l’humanité peut-il se faire en toute impunité ?
    C’est la lutte du pot de terre contre le pot de fer mais même les élites sont le pot de terre de quelqu’un !
    En cocoonant dans notre confort quotidien, on peut se croire très loin des enjeux financiers de cette société de consommation alors qu’en fait on y est immergés (nos meubles, notre nourriture, nos vêtements, …)
    Le talent de Michaël Mention fait que le doute s’immisce dans notre esprit, tant nous sommes étrangers à cette planète des « experts » (quoique l’actualité récente les ait mis avec outrance, en lumière). Que dire de la lutte entre l’intérêt public confronté à l’intérêt privé ? Que dire quand l’intégrité des justes et de leur famille est menacée … jusqu’où serions-nous prêts à aller pour défendre nos idéaux au risque de mettre en péril nos proches ? Et cependant, la parano ambiante milite aujourd’hui pour alimenter la théorie du complot …

    J’arrête ici la liste de mes questionnements, je suis totalement sous le choc de ce bouquin qui confirme si toutes fois il en était besoin, la capacité de son auteur à traiter des grands problèmes de notre société en « se cachant » derrière une intrigue bien menée. Vous l’avez compris, De mort lente est un incontournable de ce début 2020 même si hélas, vu sa date de naissance, il n’a pu bénéficier de la promotion qu’il méritait …

    Au fait les auteurs, on adore quand vous vous faites des clins d’œil dans vos livres …Grossir le ciel est un très bon bouquin aussi et que dire du policier hybride Yvan Smadja !

    05/06/2020 à 21:16 9

  • Derrière la haine

    Barbara Abel

    10/10 J'ai lu ce livre de Barbara Abel après "bonheur sur ordonnance" pour "vérifier" qu'elle écrivait bien des thrillers, comme suggéré par son appartenance à "la ligue de l'imaginaire". Alors, là pas de déception !
    L'analyse d'un crime parfait, fruit d'un délire de souffrance rarement atteint.
    Vous ne regarderez plus vos voisins de la même façon !
    Le style est agréable, les personnages très attachants et leurs réactions très proches de celles que nous pourrions avoir dans les mêmes circonstances.
    Nous le savons, nous sommes tous des paranos en puissance

    01/07/2015 à 16:58 1

  • Dompteur d'anges

    Claire Favan

    10/10 Que ceux qui étaient restés sans voix à la fin de « serre-moi fort » se rassurent, le nouveau roman de Claire Favan va encore plus loin …
    Max, victime d’une erreur judiciaire va mettre tout son diabolisme au service de sa vengeance par anges interposés. Il est impossible d’en dire d’avantage tant le roman est riche en rebondissements et ses personnages totalement atypiques, attachants de tant de martyrs subis !
    L’écriture est d’une précision rare et l’intrigue crédible pour notre plus grand malheur … Encore un coup de cœur à l’actif de cette auteure au sourire angélique !

    16/02/2017 à 10:45 4

  • Enfermé.e

    Jacques Saussey

    10/10 On sait quand on suit Jacques Saussey, qu’il n’est jamais aussi déroutant que dans ses one-shots … Après Le loup peint et le pied de nez à notre conscience écologique, c’est notre plus profonde intimité qu’il ébranle avec Enfermé(e).
    Deux temporalités se mettent au service de la démonstration. La première au passé nous fait revivre l’histoire de Virginie, prisonnière d’un corps qui ne convient pas à ses émotions, son parcours et son coming out….. la seconde au présent se consacre à l’intrigue de nos jours …
    Mais ça ne s’arrête pas là … trop simple pour Jacques Saussey. C’est plus généralement de la domination des faibles par les pervers, les toxiques, ceux qui ne peuvent accepter la différence mais aussi de la fin de vie et du traitement réservé à ceux qui ont eu un passé et qui sont en train de perdre leur identité « au bénéfice » de l’âge qu’il parle ici. Mais ne sommes-nous pas tous complices de détourner le regard de ce que nous ne voulons pas voir …
    On a déjà beaucoup écrit sur ce thriller et c’est tout à fait légitime pour ce roman noir bien foncé, ces 373 pages d’une densité rare et hyper documentées. C’est pour moi un véritable coup de cœur 2018 !
    Des « artifices » de rédaction rendent ce récit encore plus dérangeant : pas de noms propres pour ceux qui sont en perte d’humanité, seuls les personnages ayant abouti dans leur parcours trouvent un nom.
    Plus déglinguant que Meurtre pour rédemption de Karine Giébel auquel on pense immanquablement lors de la description du parcours carcéral, c’est une vision optimiste néanmoins pour ceux et celles qui viennent à bout de tous les obstacles posés par notre société bien (trop) pensante.

    26/10/2018 à 10:14 9

  • Et le mal viendra

    Jérôme Camut, Nathalie Hug

    10/10 «… est-il légitime de recourir à la violence pour que cesse la violence ?
    Ou plutôt, n’est-il pas de notre devoir de le faire ? »

    Un thriller à large spectre … tout autant philosophique que sociétal, à la fois tome 2 et préquel, saga familiale et road movie et qui pose LA question : peut-on/doit-on avoir recours à la violence, même extrême, en cas d’urgence absolue, pour provoquer la prise de conscience et l’action ?
    Deux hommes se sont « affrontés » à la sortie du Bataclan en novembre 2015 et leurs destins ont basculé. Morgan a ensuite croisé le regard d’un gorille dominant et il est lui-même devenu Silverback, le défenseur des opprimés, entraînant à sa suite ses enfants. Quant à Julian, c’est la voie de la légalité qui l’a guidé dans la traque de Morgan et de son armée.
    Que vous ayez lu ou non Isla Nova, vous serez emporté par l’intrigue qui mêle notre quotidien et celui des pays du sud, à la fiction … d’ailleurs, est-ce bien la fiction ou une simple anticipation de ce qui nous guette à très brève échéance ?
    Eminemment actuel, le sujet de l’avenir de l’humanité nous prend aux tripes et de façon bien efficace. Nous avons en plus du désastre écologique, des terribles conflits de l’eau (passés, présents ou à venir) à confronter notre vie actuelle à la très prochaine existence sous contrôle intégral de l’IA, l’intelligence artificielle.
    Notons à ce sujet, la parution simultanée du thriller de Bernard Minier qui nous alerte lui aussi avec M, le bord de l’abîme, sur les dangers d’un détournement de ces « petites boîtes magiques » qui nous accompagnent de plus en plus, sur le « tout connecté ». Le danger est bien présent !
    Secouée je suis après ce thriller capable de réveiller bien des consciences, qui fait écho à mes convictions écologiques quand la réalité donne malheureusement raison à la fiction, tant la vraisemblance et la précision interpellent le lecteur.
    La construction atypique de l’intrigue, si elle déroute dans ses premiers chapitres, devient peu à peu une évidence, pour ce thriller complémentaire d’Islanova paru en 2017 (à lire avant ou après, mais à lire de toute façon). Trois périodes (2015-2016, 2025 et 2028), indissociables et éclairantes. LA question reste entière mais au moins est-elle posée dans une actualité où la jeunesse en perte d’espoir s’oppose aux générations qui n’ont rien fait par avidité, en lui demandant d’agir utilement …enfin !

    09/12/2020 à 09:50 3

  • Glaise

    Franck Bouysse

    10/10 Presque une chronique villageoise sauf que ça n’est pas si simple … L’action se passe au début de la première guerre mondiale, Joseph un jeune garçon de seize ans va devoir endosser le rôle de chef de clan et qu’il va révéler sa formidable énergie à l’épreuve des faits.
    Dans un village du Cantal, les jeunes hommes sont au front et il ne reste que les femmes, les enfants, les handicapés et les vieillards. Les anciennes rancœurs refont surface avec ce qu’elles amènent de cupidité, de malveillance et de manipulations. Pas vraiment une balade de santé dans ces paysages à couper le souffle, décrits par un auteur conteur et poète, au mieux de sa forme.
    Après « Nous rêvions juste de liberté » de Henri Loevenbruck en 2015, « le garçon » de Marcus Malte en 2016, assurément mon coup de cœur 2017, ce roman noir est tout simplement inclassable !

    03/12/2017 à 17:38 11

  • Heimaey

    Ian Manook

    10/10 Soulniz est en froid avec sa fille fugueuse depuis 3 ans. Il décide de lui offrir LE voyage de réconciliation, en retrouvant ses pas d’il y a quarante ans en Islande. Rebecca sous ses allures de rebelle a publié les détails de leur trip sur le net et … toute l’e-planète est au courant de leur itinéraire. De fait cela va faciliter la traque de ces Français depuis l’aéroport … jusqu’où ira la malveillance à leur encontre ? S’agit-il vraiment de malveillance ? Pourquoi avoir décidé ce voyage au bout du monde ? Pour le grand tour des spots de géothermie ? Pour plonger dans les racines de la culture islandaise ?
    Tout ça ne serait (presque) rien si deux kilos de drogue n’avaient pas été subtilisés à un gang lituanien dont le chef parle de façon décalée, par citations littéraires …
    Pour le paysage, c’est beau et contemplatif comme du Franck Bouysse qui aurait délaissé sa campagne corrézienne pour le contraste chaud-froid du grand nord. On connaissait le talent de Ian Manook pour emmener ses lecteurs au fin fond de la Mongolie et de la philosophie des moines Shaolin, il confirme ici sa grande connaissance des cultures et sa maîtrise des ambiances de l’extrême le tout avec un humanisme rare.
    Attention ce thriller palpitant est le premier d’une série dite Kornelius Jacobson du nom du flic improbable de cette aventure, le tome 2, Askja, étant annoncé pour le 02/10/2019 …

    12/09/2019 à 09:30 3

  • Il était deux fois

    Franck Thilliez

    10/10 « Je te retrouverai, Julie. Je te jure que je te retrouverai. » Telle est la promesse que Gabriel a faite à sa fille disparue. C’est a priori sans compte sur cet accident de mémoire qui va le priver de douze années de souvenirs d’enquête et de traque. Il va devoir tout recommencer ce père qui a quitté les Alpes pour Lille … pourquoi ? Sa mère le sait peut-être, mais lui a vraiment oublié. Il va refaire connaissance avec ses anciens collègues, son ancien coéquipier qu’il a agressé, son ex-épouse.
    Franck Thilliez fidèle à ses thèmes de prédilection nous entraîne dans une histoire complexe, qui pourrait voir sa conclusion lors de la découverte du « corbeau » qui harcèle notamment la mère de Julie et qui détient des collections bizarres. En fait on ne sait pas à ce moment de l’histoire que le roman n’est pas un one-shot mais … la suite du Manuscrit inachevé ! Oui lecteurs, ressortez votre exemplaire de votre bibliothèque, sinon commandez-le de suite pour enchainer la lecture après les 548 pages que vous tenez entre vos mains. Rassurez-vous néanmoins, les rappels sont suffisamment explicites pour ne pas vous perdre.
    Des personnages hors du commun, meurtris pour certains, qui n’ont pas mené leurs deuils à terme et surtout une bande de pervers qui s’affichent « artistes » pour mieux couvrir leurs trafics. Ajoutez des paysages grandioses ou des friches sordides et une curiosité saisonnière et migratoire avec ces chutes d’étourneaux qui évoquent Hitchcock.
    On sait aussi que l’auteur est joueur, il aime défier ses lecteurs et la fin ce cru 2020 vous réservera encore des surprises avec pas moins de 15 pages manuscrites qui devraient vous révéler les secrets du manuscrit enfin achevé … là on voit vraiment que c’est du Thilliez, du Thilliez comme on aime !

    Une construction complexe liée au sujet et au personnage de Gabriel qui « n’a pas toute sa tête », du moins tous ses souvenirs et se démène à réapprendre notamment les technologies nouvelles, qui rencontre plutôt la bienveillance de la part des victimes collatérales dans le Nord et en Belgique. Une approche de l’art ultime dont l’objet est bien contestable mais néanmoins le fruit l’un snobisme latent. Pas de Sharko ni Henebelle cette année, vous l’aurez compris mais un certain Bernard Minier en guest-star, pour une brève apparition !
    Enfin, si vous voulez parfaire votre pratique de la science de DK, vous lirez avec plaisir le roman de la série l’embaumeur, trop vite disparu des rayons pour cause de faillite de son éditeur, La piste aux étoiles de Nicolas Lebel.
    Du plaisir de lecteur à l’état pur !

    12/06/2020 à 10:02 9

  • Impact

    Olivier Norek

    10/10 L’évidence est niée, dissimulée par la trop puissante finance et le pouvoir.
    Le cru 2020 de notre Olivier Norek est grand, documenté (les notes en fin d’ouvrage apportent les précisions et les crédits nécessaires) et humaniste. Encore un peu optimiste … ou pas, au lecteur de faire son opinion.
    La sixième extinction est en cours, pour preuve pour ponctuer le récit, les calamités qui s’abattent sur les plus pauvres, présentées comme pourraient l’être des faits divers sur nos chaînes d’informations en continu. Quand bien même le désastre touche des millions d’humains, leur vole des millions d’années de vie, il disparaitra face à l’enlèvement d’un PDG qui de fait quitte l’anonymat pour la mise en lumière face aux voyeurs de toutes tendances.
    La fille de Virgil a été victime de la pollution aux les particules fines, alors pour dépasser le deuil impossible, il décide que tous les moyens sont légitimes pour alerter. La demande de rançon dont il est l’auteur est doublement originale sur le fond et sur la forme, plutôt un suicide qu’un acte de terrorisme semble-t-il !
    Virgil n’est pas survivaliste comme le héros de Survivre de Vincent Hauuy, mais plutôt lanceur d’alerte pour fédérer l’opinion mondiale contre la catastrophe annoncée, tout autant que le duo Camhug avec Et le mal viendra, sa production 2019.
    Que fait la police ? elle constitue un duo de négociateurs pour l’occasion, les meilleurs semble-t-il, mais pour quels résultats ?
    Et que fait la justice ?
    Un roman sociétal, un réquisitoire « au sens propre » contre nos institutions complices car on ne peut écouter le plaidoyer de Fabien Attal, l’avocat de Virgil, sans adhérer à sa thèse. Une justice aux règles opposables à tous et c’est heureux, au demeurant rendue par des juges qui n’en sont pas moins hommes et là aussi c’est heureux d’échapper à un algorithme qui s’y substituerait. Va-t-elle considérer Virgil comme un terroriste car il a tué, car « est considéré comme terroriste tout acte se rattachant à une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur. » ?
    Un roman contemporain qui utilise les réseaux sociaux.
    En fin de roman une touche d’espoir … mais à supposer que l’on ait fait collectivement le nécessaire aujourd’hui pour préserver ceux qui seront là en 2040. Pas sûre et ma conscience écolo souffre tous les jours à l’unisson de celle de l’auteur. Oui j’ai vibré tout à long de ces 350 pages. Trop court ce roman ? Certes on aime lire le Norek de l’année mais la démonstration est à ce point brillante que les chemins de notre réflexion sont pour le moins ouverts, au mieux confortés par l’absolue nécessité de « faire » chacun à son niveau, mais aussi globalement les gestes, non pas de survie car ils ne suffiraient pas mais bien prendre les décisions d’un vrai changement de mode de vie.
    Ecolo, visionnaire ou juste réaliste s’il en est encore temps ! J’ai adoré et je flippe encore plus en fermant ce thriller dont la conclusion n’est pas écrite.
    Un roman qui restera un coup de cœur 2020 même si sa lecture tardive a empêché qu’il figure dans ma sélection Top 10 de l’année. Espérons qu’il ne soit pas victime de sa date de publication et de la Covid réunies.

    08/12/2020 à 10:43 4

  • Inestimable

    Zygmunt Miloszewski

    10/10 Zofia, nous l’avons rencontrée dans le précédent roman de Zygmunt Miloszewski Inavouable. En difficulté professionnelle, cette experte de l’art doit trouver les ressources financières pour soigner son mari atteint de pertes de mémoires. Pour ce faire, elle accepte d’aider un scientifique en l’accompagnant sur l’île de Sakhaline et en tenter de dérober un artéfact shamanique susceptible de soigner la maladie d’Alzheimer.
    Fin du premier épisode … ensuite ça se complique !
    Pourra-t-elle atteindre son objectif, sauver son couple, sa famille de l’effacement des bons souvenirs qu’elle y partage ? A quel prix ?
    Au-delà de ce roman d’aventure, haletant et scénarisé comme un « Indiana Jones », l’auteur, tout en bousculant les clichés, nous pose des questions existentielles, au-delà d’une réflexion sur les religions …
    Que faire pour résister aux changements climatiques ? Changer nos habitudes de consommation ou réduire la population mondiale ? Les deux ?
    Que faire pour vieillir en toute conscience, en toute autonomie ?
    Deux factions vont s’affronter autour de Zofia qui prendra cher dans ce conflit ! Deux factions dont il est difficile de dire si les uns sont plus vertueux que les autres, confrontés que nous sommes à nos valeurs : humanité contre humanisme ? L’auteur élève le débat depuis son dernier roman, il secoue les consciences. Il provoque l’empathie douloureuse. Ces personnages sont d’un réalisme tragique et les situations souvent cocasses.
    Pour tout vous dire lecteurs, j’ai beaucoup aimé ce livre car il m’a touchée au plus près de mes phobies. Oui, car à titre personnel je crains par-dessus tout la perte de la mémoire, de la pleine conscience, mais aussi moins égoïstement, je redoute l’incapacité de notre humanité à réagir au désastre climatique qui n’est plus une vision futuriste mais bien une actualité.
    Roman noir, sociétal, thriller, tout à la fois, ce dernier opus est en outre remarquablement traduit. La complicité entre l’auteur et son traducteur est une valeur inestimable aussi !
    Clin d’œil de l’auteur à Olivier Norek himself, au chapitre 11 … il a lu Impact, assurément.

    03/11/2021 à 08:45 1

  • J'irai tuer pour vous

    Henri Loevenbruck

    10/10 Après Nous rêvions juste de liberté, les lecteurs attendaient le nouveau Loevenbruck. Certes, il a fallu patienter trois ans et demi, mais il est excusé car quand on voit la masse de travail de documentation qu’a dû demander ce thriller, on comprend que la gestation a été longue et semée d’embuches. La relation des sentiments et doutes de Marc, le personnage central inspiré d’un homme que l’auteur a côtoyé pour faire de sa vie un roman, est en soi un pari réussi. Il n’est sans doute pas aisé d’approcher les secrets d’Etat, mes méandres du renseignement et d’être fidèle à l’histoire, la petite et la grande. Nous en découvrons des choses qu’il est parfois plus confortable d’ignorer. Tout ça n’en rend que plus précieux le résultat par ces 640 pages.
    Soit un triangle, une pyramide si vous voulez, … au somment les politiques, cyniques, qui ne pensent qu’à leur élection présidentielle, voire leur réélection, ils vont mener le jeu, la diplomatie qu’ils disent … Une sphère publique, dont on connaît les noms, soucieuse de l’image et de son avenir, dépendante de la haute finance qui tire les ficelles de la vente d’armes à l’international…
    Entre le sommet et la base, les services secrets qui ont pour objectifs de démanteler les réseaux et commanditaires des attentats et des prises d’otages, parce que c’est leur job. Ils observent, analysent, préparent, choisissent les cibles, déploient la logistique nécessaire mais pas toujours suffisante…
    Et enfin la base, niveau de l’exécution, qui ne doit pas se poser de questions sur le bien fondé des commandes à honorer, sans état d’âme ou presque.
    La base, c’est bien le centre de ce thriller, l’auteur nous fait approcher le cheminement d’un obscur, la construction de sa personnalité, par son carnet qui ponctue le récit actuel. Les lecteurs comprennent alors pourquoi un petit aventurier devient barbouze sans scrupule, capable de mener de front ses deux identités.
    L’action principale se situe au milieu des années 80, pendant une période d’attentats perpétrés à Paris, que les moins de 40 ans ne peuvent pas connaître … : les événements ont cependant une résonance particulière au vu de notre actualité récente. Nous allons assister au recrutement, à l’entrainement et aux actions de ce héros de l’ombre, attachant par ses questionnements et sa quête de bonheur. Au-delà des aventures qui, si elles n’étaient pas adaptées du réel, pourraient sembler improbables, la vie de Marc est donc tumultueuse et clandestine …
    Il est peu aisé d’en dire d’avantage si ce n’est qu’il faut lire absolument ce dernier Loevenbruck, bien loin de l’ésotérisme et la fantasy auxquels il nous avait habitués dans ses premiers romans, plus proche de Nous rêvions juste de liberté par sa sensibilité et ses questionnements.

    Rythmé et réaliste, précis et haletant, un style efficace, ce « témoignage » sera sans conteste un coup de cœur 2019 …

    16/02/2019 à 15:34 14

  • Le Jour des fourmis

    Bernard Werber

    10/10 En ces temps d'actualité permanente et anxiogène, il me fallait une lecture optimiste et dépaysante. J'ai donc opté pour le deuxième volume du cycle des fourmis (qui en comporte trois). Il s'agit bien d'une « vraie » suite à lire après le premier opus.
    La civilisation des fourmis nous interpelle sur nos outrances, notre capacité à la tolérance et la sous-jacente quête du pouvoir, par la domination bien évidemment, car les fourmis ont une approche particulière de la démocratie. A la fois conte et métaphore, ce roman ne laisse pas indifférent et il n'est pas aisé de résumer. L'humanité n'y est pas particulièrement glorifiée. Les confrontations entre les deux mondes sont particulièrement jubilatoires même si en fin de compte on n'aura pas de révélation sur la façon de guérir du cancer …
    Très bon moment de lecture pour surtout si le lecteur décide de prendre son temps … à lire bien sûr

    22/11/2015 à 16:07 3

  • Le Loup des Cordeliers

    Henri Loevenbruck

    10/10 Pour les chroniqueurs, Henri Loevenbruck est le remède absolu contre l’angoisse de la page blanche …
    Lorsque le lecteur ferme ce roman, immanquablement il se demande ce qui est le plus important dans ses 560 pages. L’histoire captivante de la chute de l’ancien régime, même si l’on connaît la fin, la prise de conscience du pouvoir du peuple sur les nantis, la devise républicaine qui découle de ces deux événements et les parallèles incontournables que nous faisons avec notre actualité qui la rendent bien fragile cette devise ou encore et surtout le tableau de la société de l’époque révolutionnaire. Nous connaissions la rigueur de l’auteur quand il écrit l’Histoire (cf la bibliographie en fin d’ouvrage), ici ce « travers » que l’on ne peut que louer est poussé à son paroxysme, le souci du détail devient un art. Il nous invite à la promenade dans le cloître des Cordeliers avec Danton, Desmoulins, personnages à part entière de l’intrigue … on a envie de s’immerger aux côtés de Gabriel, qui comme le personnage de Balzac Lucien de Rubempré, monte à la capitale pour vivre de son art et de la gloire qu’il pourrait en tirer. Nous faisons notre « initiation maçonnique » et nous chassons les méchants. Qui sont-ils ces méchants ? Des justiciers ou des voyous ? Méchants pour qui ? Jusqu’où doit aller la justice et qui peut la rendre ? Quelle légitimité à la violence ?
    Qu’a donc écrit Henri Loevenbruck ? Une fiction historique, une enquête sur un meurtrier en série, une chronique historique sur cet été 1789 et la vie parisienne de cette époque, une romance ? Ce roman est tout à la fois, rompant brutalement avec ses dernières productions, outre cette intrigue complexe et ambigüe, il restera le vocabulaire de l’époque, ces dialogues et ces descriptions d’un autre temps et cependant remarquablement maîtrisés.
    Il est bien attachant ce jeune Gabriel, le personnage central de ce roman, aspirant journaliste arrivant à Paris juste au moment de la convocation des Etats Généraux. Et surtout, il est bourré de talent, d’un talent brut et sans concession comme les grands héros romantiques. Son personnage, véritable fil rouge inspiré, a cependant de la chance dans son approche des milieux révolutionnaires, car il rencontre les bonnes personnes au bon moment, notre panthéon révolutionnaire, pour notre plus grand plaisir.
    C’est donc avec beaucoup de plaisir que j’ai accompagné Gabriel dans sa chasse au loup des Cordeliers, que j’ai fait la connaissance de Théroigne de Méricourt, admiratrice d’Olympe de Gouges, véritable amazone féministe, ne manquant pas de « googliser » pour l’iconographie disponible qui oui, confirme les descriptions de l’auteur. Un roman qui restera parmi mes coups de cœur de cette année.

    08/10/2020 à 10:44 17

  • Meurtres pour rédemption

    Karine Giebel

    10/10 On m’avait dit que c’était son meilleur roman … je n’ai pas été déçue. C’est au-delà de la violence rencontrée dans « le purgatoire des innocents » qui n’était pas non plus un roman de fillettes …
    Plusieurs volets dans ce récit :
    L’univers carcéral et ses « contrats », les affaires cachées de la République, ça c’est pour les faits. La vengeance, l’amour, la haine, la cruauté gratuite et la rédemption, ça c’est pour les sentiments.
    Un style efficace au service de l’atmosphère pesante et angoissante de l’intrigue dont on découvre les clés en toute fin du roman après s’être fait balader à merveille … tout comme j’aime. Beaucoup de sang, de coups tordus, de psychopathes et on ne sait plus qui sont les bons et qui sont les méchants (sauf Justine) car ils sont tous aussi pervers et fêlés les un(e)s que les autres. Mais qu’aurait-on fait à leur place ?
    Je vois bien ce roman adapté au cinéma … Vite … au prochain !

    01/07/2015 à 16:57 6

  • Né d'aucune femme

    Franck Bouysse

    10/10 Comme à son habitude, l’auteur ancre son action dans la ruralité. Pour autant les horreurs qu’il nous décrit ne sont pas l’apanage de la campagne. En effet le thème principal est proche de celui qu’évoque Karine Giébel dans Toutes blessent, la dernière tue à une époque et dans un lieu différents. La nature humaine est capable des plus grandes perversités et la domination en est une des armes les plus efficaces.
    Rose est vendue par son père et devient l’esclave d’un maître de forges affublé d’une épouse malade et d’une mère intransigeante. Le lecteur vit l’effondrement moral de cette jeune fille de quatorze ans, partage ses quelques moments de répit avec une jument et sa relation salutaire avec Edmond. Tout s’emballe quand elle cherche à connaître LA vérité, elle va se confronter aux secrets de famille les plus obscurs.
    L’auteur nous avait déjà convié à une quête des origines dans Grossir le ciel, une quête du père et ici il s’agit d’une quête de la mère. Il entretient la confusion sur ses personnages au point où la fin de l’intrigue, le dénouement du suspense peut paraître improbable … quoique …
    Enfin on a connu l’auteur plus descriptif de la nature, plus bucolique, plus contemplatif. Ici le ton est différent puisqu’il y a avant tout, « enfermement » des êtres et des esprits, domination, asservissement, bassesse et lâcheté. Le style est tout aussi efficace qu’en pleine nature, la noirceur peut inviter à la rêverie, au cauchemar.
    Si la ruralité s’avère un environnement propice à ce type d’intrigue, parce que tout le monde y connait tout le monde, on peut cependant valablement redire que ça aurait pu se passer en ville, de nos jours et pourquoi pas à côté de chez nous ? La lâcheté est une « valeur » partagée par les témoins passifs de tous temps et en tous lieux !

    19/01/2020 à 11:01 7

  • Nous rêvions juste de liberté

    Henri Loevenbruck

    10/10 Quelle claque … même si le doute nous étreint tout au long de ce roman sur son dénouement probable, tout de même LA surprise finale m’a laissée sans voix … Que dire de plus que les autres critiques au sujet de la road-movie initiatique ? Lisez-le vite. Un ton juste pour le passage à l’âge adulte de cette bande d’apprentis motards qui même si vous n’avez jamais enfourché de bécane vous rappellera les conneries que vous n’avez pas manqué de faire à l’adolescence. Allez-y c’est simplement magistral !

    15/11/2015 à 14:32 5

  • Nymphéas noirs

    Michel Bussi

    10/10 J'ai lu ce livre après "un avion sans elle". Le traitement du suspens est original et dans des décors mythiques que j'aime, ce qui ne gâche rien. En plus ça m'a donné envie de retourner à Giverny pour voir le moulin et le lavoir. Une bonne énigme qu'on comprend juste à la fin. Tout compte fait j'aime bien cette écriture et je poursuis par des ouvrages plus anciens.

    01/07/2015 à 17:15 3

  • Pandemia

    Franck Thilliez

    10/10 La parution du Thilliez de l'année est toujours un événement pour ses lecteurs assidus. En 2015 on en a pour son argent et ses 644 pages ne dérogent pas au rituel. Au moment de fermer cet opus il m’apparaît clairement qu'une étape s'achève avec ce qu'on pourrait qualifier de troisième épisode d'un triptyque qui a commencé avec Atomka. Il me semble donc bon de conseiller aux lecteurs de passer par les deux épisodes précédents pour pleinement profiter du troisième, même s'il peut se lire isolément mais … c'est dommage.
    Oui Lucie et Sharko y soufrent encore, mais moins que d'habitude et surtout moins que d'autres personnages ! On retrouve avec plaisir Nicolas et Camille …
    L'auteur nous entraîne dans le milieu de la recherche et de la lutte contre le bioterrorisme. Tom Clancy avait en 1996 répandu Ebola sur la terre à partir d'un congrès international aux Etats-Unis et cette année Thilliez nous fait frémir avec la « grippe des oiseaux » mais attention, tout à côté de chez nous, et … une épidémie peut en cacher une autre … bien plus terrible ! Et comme les premières cibles sont policières, au lieu cette fois d'assister à la guerre des polices et bien on voit au contraire la solidarité des différents corps pour le plus grand bénéfice des civils.
    Outre le suspens qui ne nous lâche pas, on apprend plein de choses sur les mesures de précaution et procédures de décontamination qu'on est bien loin d'imaginer. Quelques réflexions plus philosophiques également, sur l'avenir de l'humanité comme dans les romans de Bernard Werber.
    Ce thriller haletant est un très bon cru et un très bon Thilliez où l'auteur fidèle à son souci de précision, confirme son travail d'horloger qui a présidé à l'élaboration de ce roman. Il y confirme aussi sa place de grand-maître du polar français qui ne prend pas son lecteur pour une buse !
    Difficile d'en dire plus sans nuire à la découverte de cette intrigue … ô lecteur, sus aux frissons et aux angoisses et plonge toi dans ce nouveau Thilliez !

    29/06/2015 à 18:38 7

  • Power

    Michaël Mention

    10/10 Comment fait donc cet auteur pour changer de style et d’univers à chacun de ses romans ?
    L’action se déroule de 1965 à nos jours dans une Amérique raciste, les descendants d’esclaves décident de s’organiser pour sécuriser et pacifier les quartiers ghettoïsés. Au début, démarche expérimentale, la réaction pacifiste aux extrémismes doit s’organiser quand le phénomène s’amplifie et devient un fait de société.
    Le contexte historique est illustré au travers des assassinats qui ont marqué cette période à commencer par Malcolm X, puis les frères Kennedy, le pasteur King et tous les autres ainsi que les événements de cette deuxième moitié du XXème siècle. Grâce à cette fresque si bien dépeinte, tout s’éclaire et notamment les origines du Black Panther Party, la lutte pour l’égalité des droits et contre les violences faites aux femmes, au travers de personnages follement attachants ou franchement antipathiques, tous désespérés. Un regard incisif, un récit hyper documenté, une immersion au cœur de la contestation de cette société qui aurait pu réaliser le rêve de fraternité mais qui a mené notre humanité mesquine à ce qu’elle est malheureusement encore aujourd’hui.
    Après l’écologie (bienvenue à Cottons Warwick), la grande criminalité (la voix secrète), les journalistes véreux(le carnaval des hyènes), ce dernier roman choral étonne et captive avec une grande maîtrise du sujet … Où donc va-t-il nous emmener la prochaine fois ?
    Power … mon coup de cœur 2018 !

    04/07/2018 à 11:12 8