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5/10 Vincent Albonezi, appelé souvent « Albo » tout simplement, a terminé une carrière très lucrative dans le domaine de la décoration de luxe, avant d'aller s'installer dans une maison dont il a hérité, à Tarbes. Désabusé de la vie, il traîne ses journées dans le whisky ou autres boissons alcoolisées, le plus souvent en compagnie de 4 compagnons aussi imbibés que lui. Il tente de garder un semblant de santé en faisant un jogging de temps en temps au jardin Massey. C'est ainsi qu'il devient le découvreur du corps sans vie d'une femme flottant sur le lac de ce jardin, peut-être noyée par accident, ou peut-être assassinée. Il est entendu comme témoin, tandis que cette histoire réveille en lui des souvenirs enfouis depuis plus de 15 ans…
L'histoire posée ainsi semble simple et même attrayante pour qui aime le genre policier. Et en effet, l'enquête (pour autant qu'il y en ait une) avance au fil des pages, un peu du côté des policiers dont 3 personnages nous sont présentés de façon récurrente et très typée ; un peu du côté d'un pseudo-journaliste auto-proclamé, actif sur les réseaux sociaux, et dont le personnage pose indirectement la question de la fiabilité d'une certaine presse actuelle ; et beaucoup dans les pensées et le quotidien glauque de Vincent « Albo », sans qu'il ait jamais l'air de vraiment mener une enquête pourtant, tout au plus il pose des questions ici et là, bien davantage tourmenté par ses souvenirs que par la nouvelle noyée…
Le tout est présenté dans un style qui me laisse très perplexe. On a pour une grande partie ce que j'appellerais des « descriptions-promenades », où l'on suit Albo à travers les rues de Tarbes ou parfois ailleurs… et c'est si descriptif, si bien écrit dirais-je même, qu'on a envie d'accompagner la lecture d'une promenade sur Google Maps, à défaut de connaître la ville – que je n'ai visitée qu'une seule fois ! A vrai dire : ce sont les Pyrénées qui m'intéressaient, j'avais trouvé ce livre en tapant « roman Pyrénées » sur Google, mais finalement elles sont assez peu présentes, même si elles apparaissent épisodiquement dans toute leur majesté… Mais à côté de ces nombreux passages, on a l'enquête même, trop souvent dans un style pédant, avec des effets de style improbables. A noter parmi ceux-ci : le flash-back sur une histoire à Barcelone, où l'on n'a pas d'italique ou de guillemets ou tout autre effet graphique habituel, mais… c'est un passage à la 2e personne du singulier ! Certes, c'est intéressant, mais je ne vois pas trop l'intérêt d'une telle figure de style dans ce contexte. On notera aussi les nombreux dialogues, qui sont sans doute les éléments qui font le plus avancer l'histoire, mais très souvent ils commencent comme surgis du néant, et se terminent de façon abrupte – autrement dit : ils sont intéressants et bien écrits, mais ils n'ont rien de « naturel », jamais personne ne parlerait ainsi dans la vraie vie ! à moins que tous soient des érudits, quelle que soit leur niveau d'études et leur degré d'alcoolémie…
Ajoutons à ça que les personnages, aussi typés et bien amenés qu'ils soient, ne sont à aucun moment attachants ou même simplement touchants. Ou bien c'est moi qui ne peux m'identifier à ces personnages soit alcoolisés, soit paumés, soit les deux à la fois ? Toujours est-il qu'on ne ressent aucune sympathie pour eux, et à la longue c'est lassant…
Mais alors, ce qui m'horripile particulièrement dans ce livre, ce sont certaines incohérences autour de … Bruxelles, ma ville ! En effet, outre le bref passage à Barcelone, la plupart des retours en arrière se passent à Bruxelles, et c'est là que le bât blesse. L'auteur est-il seulement conscient que Bruxelles est une ville majoritairement francophone, et pour le moins bilingue ? Ainsi, quand on écrit un livre en français, la moindre des choses serait de respecter cette francophonie. Mais non… le lecteur découvre au fil des pages des noms de lieux en flamand, alors que leur équivalent en français existe bel et bien ! Deux exemples qui m'ont frappée : « Dudenpark » au lieu de « parc Duden », j'habite juste à côté… seuls les Flamands utiliseraient la première version, dès lors c'est en langue étrangère, il aurait fallu le mettre en italique ! ou, plus loin, « gare de Brussel-Zuid » (sic), pourtant je passe tous les jours par la « gare de Bruxelles-Midi » (et les deux versions sont bien notés sur les panneaux de la gare) ! Et puis quelques lignes plus loin ô miracle, on est revenus au français quand même, alors que, tant qu'à faire, l'équivalent flamand existe aussi : il est question de « l'avenue Louise »… pour rester dans son trip snobinard, l'auteur aurait été presque plus avisé de choisir plutôt « Louizalaan » ! mais non... Bref, tout cela n'a aucun sens et prouve, au mieux, une méconnaissance totale de la capitale belge, ce qui est bien dommage vu qu'une grande partie de l'histoire (passée) s'y déroule ! En revanche, si l'effet est voulu, comme je le soupçonne, c'est de la pure et inutile pédanterie, tout simplement agaçante.
Au final, je reste mitigée sur ma conclusion. L'enquête (non) policière se déroule lentement, les choses se mettent peu à peu en place, et si j'avais accroché un peu plus, j'aurais peut-être tenté de deviner le fin mot de l'histoire, qui surprend bien un peu, mais on fait aussitôt le lien avec les éléments qui ont été semés tout au long du livre. En outre, en dépit de toutes les faiblesses citées plus haut, il y a quand même un certain intérêt dans tout ça, et ici ou là une réflexion, un passage particulièrement réussi (je pense notamment à la découverte, tout à la fin, de qui est vraiment ce lieutenant de police, le seul personnage, soit dit en passant, pour qui j'avais un brin de sympathie), au point que je les note dans ma Kindle ! Il n'en reste pas moins que l'ennui a été présent bien plus souvent que le plaisir de la lecture ; j'ai réussi à terminer ce livre… mais difficilement, poussée par le fait que je n'aime pas l'idée d'abandonner un livre, et parce qu'il est heureusement assez court !16/11/2021 à 15:12 domi_troizarsouilles (67 votes, 8/10 de moyenne) 1