Le linguiste était presque parfait

(Double Negative)

  1. Crime, humour et linguistique

    Un soir, le linguiste Jeremy Cook (spécialiste du babillage) reste de manière inhabituelle au bureau, son chef lui ayant demandé de lui préparer un dossier pour le lendemain. Entendant un fort crissement de pneus, il sort voir de quoi il s'agit. Il ne voit rien d'anormal mais ne peut plus rentrer, ses clés étant restées à l'intérieur. Il s'en va et son bureau est donc resté ouvert. Le lendemain, alors qu'il arrive en retard, on lui annonce qu'on a retrouvé Stiph, un de ses collègues, mort dans son propre fauteuil, vraisemblablement assassiné. Le cadavre ayant été découvert dans son bureau, difficile pour l'inspecteur Leaf de ne pas faire de Cook le suspect idéal.

    On s'attache rapidement à Cook, sympathique loser à qui il arrive tout de sorte de tuiles et qui a l'impression que personne ne l'aime. Il a des vues sur une nouvelle auxiliaire de puériculture (le centre étudie l'acquisition du langage chez les enfants et dispose d'une crèche expérimentale), la belle Paula. Problème, il ne sait pas trop comment l'aborder et en la suivant, il l'entend prononcer : « Cook, il foire tout, c'est un parfait trou du cul. » Pas facile...
    Un peu par désœuvrement, et parce qu'il est concerné au plus haut point, Cook décide décide de mener lui aussi son enquête, ou plutôt une double enquête. Après avoir compris que l'assassin ne pouvait être qu'un de ses collègues, il va essayer de déterminer lequel. Il va aussi tenter de trouver qui a pu colporter des rumeurs derrière son dos, lui compliquant l'approche de ses charmantes nouvelles collègues. La tension devient palpable au centre, chacun suspectant le collègue qu'il n'aime pas d'être l'instigateur du crime de Stiph.
    Aux ingrédients habituels du whodunit classique (meurtre, indices, suspects, rebondissements, révélation finale inattendue), David Carkeet ajoute une sympathique touche d'humour et fait évoluer ses personnages dans le cadre intéressant de la linguistique. D'ailleurs, Cook se convainc que le coupable finira bien par se dévoiler tout seul, sans faire exprès, en laissant échapper quelque chose qu'il n'arrivera plus à taire. Le final est à la hauteur de nos espérances.

    Publié il y a plus de trente ans aux États-Unis, il aura fallu attendre cette initiative des éditions Monsieur Toussaint Louverture pour faire découvrir aux francophones ce roman original de David Carkeet, qui se lit encore comme aux premiers jours, et avec un plaisir certain. Si vous pensez aimer le whodunit un peu décalé, ce polar est fait pour vous.

    /5