Texas, vers la fin de la décennie 1860. La famille d’Henry Edwards vient d’être massacrée dans sa ferme par des Comanches, et seules les filles Lucy et Debbie ont échappé au carnage, enlevées par les Indiens. Amos, le frère d’Henry, et son neveu Martin – un jeune homme en réalité adopté – ainsi que quelques autres cowboys partent à leur recherche. Cette traque, qui durera de longues années, les éprouveront plus qu’il n’est possible de le dire.
L’adaptation en film de 1956 est un bijou du septième art, et c’est avec entrain que l’on entame la lecture de ce roman publié deux ans plus tôt. On se délecte rapidement de la plume et du style d’Alan Le May, à la fois racée, profonde et dense. L’auteur refuse les poncifs du genre, brouille les codes, se joue d’eux avant de les brutaliser au gré de ce récit héroïque. Il n’y a guère de bons ou de méchants, même si les premiers chapitres ne laissent aucun doute quant à la sauvagerie des monstres qui s’en sont pris aux Edwards : les victimes ont été assassinées à coups de couteau, et Martha, la mère de famille, a même eu le bras tranché puisque certains Amérindiens pensaient que les personnes amputées ne pouvaient pas rejoindre l’au-delà. Dans le même temps, les Blancs ne sont pas exemplaires non plus, seulement de braves gens médusés par l’horreur de l’événement, contraints de déployer des trésors de résilience et de courage pour aller, des années durant, pister ces Comanches en espérant ramener Debbie à la maison. A cet égard, Amos compose un personnage édifiant : solide mais taiseux, tassé sur son cheval « comme un sac de grains », il va lentement être pris par une rage destructrice au point que Martin, son acolyte, va même craindre qu’il ne veuille achever la malheureuse Debbie une fois qu’ils l’auront secourue parce qu’elle aura été « souillée » par ses kidnappeurs. Dès lors, s’amorce une chasse à l’homme – ou plutôt à la fillette – qui va permettre au lecteur d’en apprendre davantage sur le territoire texan, les us et coutumes de l’époque, les mœurs amérindiennes, etc. On se régale de cette battue, dans l’aridité des déserts comme dans le froid des glaces, où chaque information ressuscite la frêle espérance de remettre la main sur la gamine. Le film de John Ford a fidèlement repris la trame de cet ouvrage ainsi que des passages marquants – les circonstances de la découverte de Lucy, le piège ourdi par Futterman, la rencontre avec le chef Scar. C’est aussi tout le talent d’Alan Le May qui éclate sous nos yeux près de sept décennies après la parution de ce western à la fois désenchanté et gorgé d’espoir. Le final, différent de celui du film et encore plus poignant, vient clore avec maestria ce livre d’une rare puissance narrative.
Un roman remarquable d’humanité comme de brutalité, au scénario inoubliable, et qui rend dans le même temps un hommage appuyé aux femmes et hommes qui ont participé à la conquête de l’Ouest. Une évocation d’autant plus vibrante qu’elle est directement inspirée du drame vécu par Cynthia Ann Parker et qui démontre, s’il en était encore besoin, que ce processus de colonisation fut autant un récital de chants de sirènes que la promesse de sombres tragédies.
Texas, vers la fin de la décennie 1860. La famille d’Henry Edwards vient d’être massacrée dans sa ferme par des Comanches, et seules les filles Lucy et Debbie ont échappé au carnage, enlevées par les Indiens. Amos, le frère d’Henry, et son neveu Martin – un jeune homme en réalité adopté – ainsi que quelques autres cowboys partent à leur recherche. Cette traque, qui durera de longues années, les éprouveront plus qu’il n’est possible de le dire.
L’adaptation en film de 1956 est un bijou du septième art, et c’est avec entrain que l’on entame la lecture de ce roman publié deux ans plus tôt. On se délecte rapidement de la plume et du style d’Alan Le May, à la fois racée, profonde et dense. L’auteur refuse les poncifs du genre, brouille les codes, se joue d’eux avant de les brutaliser au gré de ce récit héroïque. Il n’y a guère de bons ou de méchants, même si les premiers chapitres ne laissent aucun doute quant à la sauvagerie des monstres qui s’en sont pris aux Edwards : les victimes ont été assassinées à coups de couteau, et Martha, la mère de famille, a même eu le bras tranché puisque certains Amérindiens pensaient que les personnes amputées ne pouvaient pas rejoindre l’au-delà. Dans le même temps, les Blancs ne sont pas exemplaires non plus, seulement de braves gens médusés par l’horreur de l’événement, contraints de déployer des trésors de résilience et de courage pour aller, des années durant, pister ces Comanches en espérant ramener Debbie à la maison. A cet égard, Amos compose un personnage édifiant : solide mais taiseux, tassé sur son cheval « comme un sac de grains », il va lentement être pris par une rage destructrice au point que Martin, son acolyte, va même craindre qu’il ne veuille achever la malheureuse Debbie une fois qu’ils l’auront secourue parce qu’elle aura été « souillée » par ses kidnappeurs. Dès lors, s’amorce une chasse à l’homme – ou plutôt à la fillette – qui va permettre au lecteur d’en apprendre davantage sur le territoire texan, les us et coutumes de l’époque, les mœurs amérindiennes, etc. On se régale de cette battue, dans l’aridité des déserts comme dans le froid des glaces, où chaque information ressuscite la frêle espérance de remettre la main sur la gamine. Le film de John Ford a fidèlement repris la trame de cet ouvrage ainsi que des passages marquants – les circonstances de la découverte de Lucy, le piège ourdi par Futterman, la rencontre avec le chef Scar. C’est aussi tout le talent d’Alan Le May qui éclate sous nos yeux près de sept décennies après la parution de ce western à la fois désenchanté et gorgé d’espoir. Le final, différent de celui du film et encore plus poignant, vient clore avec maestria ce livre d’une rare puissance narrative.
Un roman remarquable d’humanité comme de brutalité, au scénario inoubliable, et qui rend dans le même temps un hommage appuyé aux femmes et hommes qui ont participé à la conquête de l’Ouest. Une évocation d’autant plus vibrante qu’elle est directement inspirée du drame vécu par Cynthia Ann Parker et qui démontre, s’il en était encore besoin, que ce processus de colonisation fut autant un récital de chants de sirènes que la promesse de sombres tragédies.