Les vacances de Maigret

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  • 8/10 Les moules ? Non. Elles les ont rendus malades, Maigret et sa femme, mais ce qui a conduit cette dernière à l’hôpital, c’est une crise d’appendicite. Sur place, notre commissaire a pris ses habitudes au cours de ces vacances, rendant visite chaque jour à son épouse. Il se retrouve un jour avec un message manuscrit dans sa poche : « Par pitié, demandez à voir la malade du 15 ». Une jeune femme, tombée par accident d’un véhicule en mouvement, la belle-sœur du médecin Philippe Bellamy. Sauf que cette Hélène Godreau finit par décéder. Maigret va alors se mettre, lentement, à enquêter, sans savoir que deux autres décès, cette fois-ci des assassinats, vont avoir lieu.
    Je retrouve avec un double plaisir la plume de Georges Simenon et ce très cher commissaire Jules Maigret. On l’y voit d’abord un peu dolent, se faisant à ces vacances qui se prolongent aux Sables-d’Olonne, observant le paysage humain sans pour autant totalement s’y fondre. Il y lève sacrément le coude avant de se mettre en chasse, mettant à nu une histoire d’amours dévoyées, éconduites et exclusives. Un style toujours aussi brillant, sec et profond (exquis paradoxe), avec quelques passages absolument remarquables d’humanité, de la lettre laissée par Emile Duffieux, parti à la capitale, à sa mère, ou encore les rapports entre Maigret et le médecin, de cordiales à tendues. D’ailleurs, ce médecin est en soi un véritable régal psychologique : irréprochable physiquement, un peu froid, faisant partie du tissu local, admiré, il va révéler des abysses de monstruosité, de sang-froid comme de furies retenues. Alors, certes, l’épilogue ne provoque pas de véritable surprise quant à l’identité du criminel, mais les ressorts mis en œuvre et soulignés à la maestria de l’auteur belge pallient sans le moindre mal ce léger déficit. Dans le même temps, Maigret s’y révèle parfois accort, parfois bougon et grossier, parfois également « en transe » lorsqu’il est en pleine réflexion, ainsi que très énergique, à la limite de la crise cardiaque lorsqu’il se rend chez le tueur en espérant que ce dernier ne va pas commettre un autre forfait. On sent parfois que Georges Simenon a écrit ce roman à toute vitesse (on y retrouve deux fois la phrase « C’est à peine si, maintenant, ses lèvres frémissaient, mais le commissaire ne s’y trompait pas » à quelques pages d’écart) sans pour autant que nous ressentions de la précipitation ou un sentiment de va-vite. Bref, un autre très bon ouvrage, dense et profond, qui régale d’un bout à l’autre.

    30/10/2021 à 08:24 El Marco (3232 votes, 7.2/10 de moyenne) 1

  • 8/10 Investigations empreintes de légèreté. Maigret est en vacances sur la côte Atlantique, aux sables-d'Olonne. Malheureusement, dès son arrivée, sa femme contracte une appendicite, et reste alitée un long moment après une opération, à la clinique locale tenue par des religieuses.
    L'occasion pour notre commissaire de découvrir la ville autrement, ses couleurs, ses riverains et vacanciers, les habitudes de tout ce petit monde, au travers de promenades l'amenant de places en café. Avec aménagement de ses flâneries bien régulier, visite à Mme Maigret dans l'après-midi, suivi des parties de belote des notables de la ville en fin de journée, à la brasserie du Remblai. Paisible quoi.
    Jusqu'à ce qu'une des sœurs du couvent glisse un billet dans sa poche : "par pitié, demandez à voir la malade de 15". Un mot qui va passer inaperçu le reste de la journée. Mais une demoiselle va décéder dans la nuit...
    On est envoûtés pas cette atmosphère reposante et pas ces descriptions. Il faudra attendre la moitié du récit, lorsque le commissaire s'active afin d'éviter tout meurtre supplémentaire, pour découvrir une ambiance plus oppressante. Très plaisant, parfait comme lecture si l'été approche, mais quel dommage que le dénouement, bien que correct, ne soit pas à la hauteur de l'intrigue nous ayant bercé tout au long de ce roman… Cela aurait été royal.

    17/06/2020 à 07:09 Lucas 2.0 (456 votes, 7.7/10 de moyenne) 5

  • 9/10 Un homme « normal » en vacances, ça se repose, Maigret, non. Jamais en vacances, celui-là ! Il suffit qu’il visite son épouse alitée dans une clinique pour qu’il sente l’anormal, pour qu’il piste, pour qu’il cherche, pour qu’il découvre une vérité cachée.

    Sa confrontation avec un tueur psychopathe est bien dans la veine de Simenon : Maigret interroge, l’air de rien, patelin. Son adversaire feint d’être sûr de lui, se dérobe, joue les notables, plaide la maladie, la folie d’une autre. Serré de près, il tuera encore, pour se protéger, au grand dam du commissaire qui n’a pas vu venir le coup et laissera une enfant se faire tordre le coup. Une enfant de pauvre, une qui n’avait rien demandé mais qui a eu la malchance de voir. Le notable se décomposera en finale, nouveau jouet malade entre les mains d’un Maigret même pas haineux. Très belle scène entre un juge d’instruction ami du psychopathe, une amitié de classe, un juge qui défend son camarade d’extraction bourgeoise, et un Maigret compréhensif mais impitoyable.

    La version télé, starring Jean Richard, a été tournée à Saint-Martin de Ré. Une toute petite ville dans laquelle j’ai traîné longtemps mes guêtres, prenant un café à l’hôtel des Colonnes comme lui, me demandant qui possédait cette belle demeure bourgeoise flanquée de canons à son huis, sise sur le port. La demeure du monstre.

    25/11/2011 à 16:22 NoirPolars (18 votes, 7.7/10 de moyenne)