L'Aiglon ne manque pas d'aire

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  • 7/10 Valdémar Aigle, antiquaire dans le quartier du Marais, s’occupe de la liquidation de l’héritage de Lucien Michepape. Parmi ses effets, il découvre des documents signés de Napoléon II. Ce dernier, abandonné par sa mère et livré à l’oubli suite au décès de son père, s’était retrouvé dans l’ennui et la certitude de mourir dans l’anonymat des grandes cours européennes. Cependant, il semblait avoir lentement repris goût à la vie grâce à un stratagème qui lui aurait permis de revenir sur le devant de la scène diplomatique mondiale…

    Voilà un roman à suspense très original. Là où d’autres, avatars plus ou moins heureux de Dan Brown ou de Raymond Khoury, se seraient lancés dans un énième livre mettant en scène un complot lié à l’Histoire, Patrick Weber signe un ouvrage délicieux, à la langue colorée, empli d’humour et de second degré. La cabale existe, certes, mais elle est souvent reléguée au second plan d’un scénario qui met en lumière des personnages atypiques, résolument détonants. L’ironie et l’absurde se côtoient dans ce récit qui mêle descriptions du Marais et de sa faune, interventions de protagonistes presque théâtraux dans leurs actes et attitudes, et narration de la vie de Valdémar. À rythme cadencé, l’histoire s’entrecoupe de lettres laissées par Napoléon II, qui mettent lentement en lumière le plan du fils de Napoléon Ier pour échapper à l’amnésie des dirigeants de son époque.
    L’intrigue est bien imaginée, ménageant quelques rebondissements bienvenus et un final émaillé d’une symbolique pertinente. Le roman est assez court, se lit vite, et offre un contrepoint intéressant aux ouvrages du même genre, qui se montrent parfois trop ambitieux, au risque de perdre en crédibilité. Finalement, le seul reproche que pourront faire certains lecteurs à Patrick Weber tient justement à cette approche mineure de sa propre intrigue : à force de chercher l’humour et la distanciation avec ses condisciples, l’auteur risque de se priver d’un lectorat qui aurait peut-être désiré plus de nervosité ou de sérieux dans la résolution de l’histoire.

    Patrick Weber fait donc la part belle à la décontraction et l’amusement, et évite ainsi les poncifs d’un ixième thriller conjuguant quête historique et cabale ésotérique. Le ton est assumé, avec entrain et efficacité, et brille dans le paysage littéraire comme une bien agréable facétie.

    27/07/2012 à 19:04 El Marco (3229 votes, 7.2/10 de moyenne)